AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
Citations de Jean Genet (415)


Ce chapitre de mon livre ne sera qu’un champ de désespoir, et je crains que ce dernier mot ne revienne souvent sous ma plume.
Commenter  J’apprécie          40
En prison à ces instants où le soleil qui pénétrait par la fenêtre dispersait la cellule, chacun de nous devenait de plus en plus,  vivait de sa propre vie, et la vivait d’une façon si aiguë que nous en avions mal, étant isolés, et conscients de notre emprisonnement par les éclats de cette fête qui éblouissait le reste du monde, mais les jours de pluie, au contraire, la cellule n’était plus qu’une masse informe d’avant la naissance, avec une âme unique où la conscience universelle se perdait.
Commenter  J’apprécie          40
Je suis né à Paris le 19 décembre 1910. Pupille de l’Assistance Publique, il me fut impossible de connaître autre chose de mon état civil. Quand j’eus vingt et un ans, j’obtins un acte de naissance. Ma mère s’appelait Gabrielle Genet. Mon père reste inconnu. J’étais venu au monde au 22 de la rue d’Assas. - Je saurai donc quelques renseignements sur mon origine, me dis-je, et je me rendis rue d’Assas. Le 22 était occupé par la Maternité. On refusa de me renseigner. Je fus élevé dans le Morvan par les paysans. Quand je rencontre dans la lande, et singulièrement au crépuscule, au retour de ma visite des ruines de Tiffauges où vécut Gilles de Rais, des fleurs de genêt, j’éprouve à leur égard une sympathie profonde. Je les considère gravement, avec tendresse. Mon trouble semble commandé par toute la nature. Je suis seul au monde, et je ne suis pas sûr de n’être pas le roi, peut-être la fée de ces fleurs. Elles me rendent au passage un hommage, s’inclinent sans s’incliner, mais me reconnaissent. Elles savent que je suis leur représentant vivant, mobile, agile, vainqueur du vent. Elles sont mon emblème naturel, mais j’ai des racines, par elles, dans ce sol de France nourri des os en poudre des enfants, des adolescents enfilés, massacrés, brûlés par Gilles de Rais. Par cette plante épineuse des Cévennes, c’est aux aventures criminelles de Vacher que je participe. Enfin par elles dont je porte le nom le monde végétal m’est familier. Je peux sans pitié considérer toutes les fleurs, elles sont de ma famille. Si par elles je rejoins aux domaines inférieurs — mais c’est aux fougères arborescentes et à leurs marécages, aux algues, que je voudrais descendre — je m’éloigne encore des hommes. De la planète Uranus, paraît-il, l’atmosphère serait si lourde que les fougères sont rampantes ; les bêtes se traînent écrasées par le poids des gaz. À ces humiliés toujours sur le ventre, je me veux mêlé. Si la métempsycose m’accorde une nouvelle demeure, je choisis cette planète maudite, je l’habite avec les bagnards de ma race. Parmi d’effroyables reptiles, je poursuis une mort éternelle, misérable, dans les ténèbres où les feuilles seront noires, l’eau des marécages épaisse et froide. Le sommeil me sera refusé. Au contraire, toujours plus lucide, je reconnais l’immonde fraternité des alligators souriants.
Commenter  J’apprécie          40
Je veux couvrir le monde de sa progéniture abominable.
Commenter  J’apprécie          40
On comprenait ceci : "qu'est-ce qu'un malfaiteur ? Une cravate qui danse au clair de lune, un tapis épileptique, un escalier qui monte à plat ventre, un poignard en marche depuis le commencement du monde, une fiole de poison affolée, des mains gantées dans la nuit, le col bleu d'un matelot, une succession ouverte, une suite de gestes simples et bénins, une espagnolette silencieuse."
Commenter  J’apprécie          41
Le seul moyen d'éviter l'horreur de l'horreur est de s'abandonner à elle.
Commenter  J’apprécie          40
L'habitude abandonnée de mon enfance abandonnée me reprit tout le reste de la journée et toute la nuit, je bâtis une vie imaginaire.
Commenter  J’apprécie          40
Jean Genet
Un homme au lieu de subir, revendique ce qui lui est donné.
Commenter  J’apprécie          40
Connaissez-vous quelque poison-poème qui ferait éclater ma prison en une gerbe de myosotis ? Une arme qui tuerait le jeune homme parfait qui m’habite et m’oblige à donner asile à tout un peuple animal ?
Commenter  J’apprécie          40
J’aimerais jouer à inventer les manières qu’a l’amour de surprendre les gens.
Commenter  J’apprécie          40
Pendant quelques heures il (le policier Mario) devait être celui qui doit découvrir la faille des hommes, leur péché, la légère indication pouvant, le plus sûrement possible, conduire l'homme le plus insoupçonnable, au châtiment le plus terrible. Métier sublime qu'il serait fou de rabaisser à la pratique d'écouter aux portes, ou regarder par le trou des serrures. Mario n'éprouvait aucune curiosité à l'égard des gens, ni ne désirait commettre d'indiscrétion, mais ayant enfin décelé ce léger indice du mal, il devait procéder un peu comme l'enfant avec la mousse de savon : de l'extrémité d'une paille choisir le fragile élément capable d'être travaillé jusqu'à devenir une bulle irisée. Mario connaissait alors un sentiment d'exquise allégresse quand il allait de découverte en découverte, quand il sentait, comme de son propre souffle, le crime se gonfler, se gonfler encore,, enfin se détacher de lui et monter seul dans le ciel.

p. 247
Commenter  J’apprécie          40
Éclipser est un mot riche. Outre le soleil, plus visible si la lune l’éclipse, tout événement, homme, figure, éclipsés par d’autres ou d’autres choses reviennent régénérés, la disparition fût-elle brève a fait son œuvre de nettoyage, de polissage.
Commenter  J’apprécie          40
Le chien en bronze de Giacometti est admirable. Il était encore plus beau quand son étrange matière : plâtre, ficelles ou étoupes mêlées, s'effilochait. La courbe, sans articulation marquée et pourtant sensible, de sa patte avant est si belle qu'elle décide à elle seule de la démarche en souplesse du chien. Car il flâne, en flairant, son museau allongé au ras du sol. Il est maigre.
Commenter  J’apprécie          40
Il est bien que les hommes s'éloignent d'une œuvre profonde si elle est le cri d'un homme enlisé monstrueusement en soi-même.
Commenter  J’apprécie          40
Son silence même ajoutait à l'exception de son cas, le déshumanisait.
Commenter  J’apprécie          40
La trahison, le vol et l'homosexualité sont les sujets essentiels de ce livre. Un Rapport existe entre eux, sinon apparent toujours, du moins me semblerait-il reconnaître une sorte d'échange vasculaire entre mon goût pour la trahison, le vol et mes amours.
Commenter  J’apprécie          40
A vous écouter, il n'y aurait pas de crime puisque pas de cadavre, et pas de coupable puisque pas de crime. Mais qu'on ne s'y trompe pas : un mort, deux morts, un bataillon, une levée en masse de morts on s'en remettra, s'il faut ça pour nous venger ; mais pas de mort du tout, cela pourrait nous tuer.
Commenter  J’apprécie          40
L’assassinat n’est pas le moyen le plus efficace de rejoindre le monde souterrain de l’abjection. Au contraire, le sang versé, le danger constant où sera son corps qu’un peut un jour ou l’autre décapiter (le meurtrier recule mais son recul est ascendant) et l’attrait qu’il exerce car on lui suppose, pour si bien s’opposer aux lois de la vie, les attributs les plus facilement imaginés de la force la plus grande, empêchent qu’on méprise ce criminel. D’autres crimes sont plus avilissants : le vol, la mendicité, la trahison, l’abus de confiance, etc, c’est ceux-là que j’ai choisis de commettre, cependant que toujours je demeurais hanté par l’idée d’un meurtre qui, irrémédiablement, me retrancherait de votre monde.
Commenter  J’apprécie          40
« Mes livres seront-ils jamais autre chose qu’un prétexte à montrer un soldat vêtu d’azur, un ange et un nègre fraternels jouant aux dés ou aux osselets dans une prison sombre ou claire ? » (p. 24)
Commenter  J’apprécie          40
Mon esprit continue de produire de belles chimères, mais aujourd'hui aucune d'elle n'a pris corps. Jamais. Pas une fois. Maintenant, il suffit que j'entreprenne une rêverie, ma gorge sèche, le désespoir brûle mes yeux, la honte me fait baisser la tête, ma rêverie se casse net. Je sais qu'un possible bonheur m'échappe encore et m'échappe parce que j'ai rêvé.
L'accablement qui suit me fait semblable au naufragé qui, à la vue d'une voile, se croit sauvé quand, tout à coup, il se souvient que le verre de sa lunette porte un défaut, une buée : cette voile qu'il apercevait.
Mais alors ce que je n'ai rêvé demeure accessible, et comme je n'ai jamais rêvé de malheurs, ce ne sont guère que des malheurs qu'il me reste à vivre. Et des malheurs à mourir, car je me suis rêvé des morts splendides à la guerre, en héros, ailleurs couvert d'honneurs, jamais par l'échafaud. Il me reste donc.
Commenter  J’apprécie          40



Acheter les livres de cet auteur sur
Fnac
Amazon
Decitre
Cultura
Rakuten

Lecteurs de Jean Genet Voir plus

Quiz Voir plus

Poésie et chanson

Léo Ferré a chanté "L’affiche rouge". Qui a écrit les paroles ?

L. Aragon
V. Hugo
P. Eluard
P. Verlaine

10 questions
17 lecteurs ont répondu
Créer un quiz sur cet auteur

{* *}