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Citations de Jean-Michel Maulpoix (402)


Je voudrais reprendre ma place dans le temps, aidé par le déclin du jour qui fait la vie plus lente, une odeur de lavande, de glycines ou de roses le long des murs, les voix qui s'attardent et bavardent, et les silhouettes qui circulent derrière la vitre de ce café où mon encre a trouvé refuge pour quelques heures. Je voudrais pouvoir dire, à l'heure de mourir - et si possible d'une voix bien audible - que j'ai passionnément aimé ce monde, cette vie et mes semblables et que je ne regrette pas de n'avoir pu emprunter d'autres chemins ! N'est-ce pas ce que pourrait faire de mieux le poème : affirmer l'unité et la beauté de notre vie terrestre, plutôt que remâcher dans l'encre un goût de cendre ?

p. 76
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La modernité, c'est le sujet pris dans l'histoire.
L'homme qui naît, qui souffre et qui meurt. Avec ses affections, ses vices, tribut payé au temps et à autrui. Les avatars singuliers d'une disparition, rien de plus. A chacun, comme le souhaitait Henri Michaux, de s'en tenir à son "transitoire". Sur la terre, l'homme est en transit. Aussi lui appartient-il d'assurer quantité de transitions, d'être un lieu de passage autant qu'un passager, et parfois de se consoler un peu de sa finitude en permettant au fini de transiter sur le papier vers une apparence d'infini.
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Que fera de sa vie celui à qui nul n'a appris à demeurer seul avec soi ? Quelle sorte de son rendra-t-elle, si la musique n'éveille en lui qu'un vague tresaillement ? Quelle intellIgence, si nulle question ne lui est plus posée? Quel signe saura-t-il tracer, s'il n'aime ni la langue ni la terre ? Quelle parole s'il ne connaît rien du silence ? Quelle clef s'il n'a aucune porte à ouvrir ?
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La vie humaine est-elle une ligne, un point, ou « une espèce d’œuf d’où jaillissent des étincelles » ? Quel astre, quel oiseau, quelle sorte de fleur sommes-nous ? Et quel sourire d’enfant qui joue avec le feu pour tenter d’attraper ses gerbes d’étoiles ? Et combien d’hirondelles sont-elles mortes dans notre hiver, de n’avoir pu ou voulu partir, fidèles à la boue séchée de leur nid de brindilles, collé aux solives de quelque grange ? Cela reste un mystère…

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Toi, mais comment te dire ?
Je te remets debout comme je peux dans la lumière.
Il y a longtemps que tu n'existe pas. Longtemps que je te cherche. Pourtant si souvent approchée. Croisée partout, à l'improviste, porteuse de je ne sais quelle chemise et chapeau de clarté. De quels cheveux en quel désordre ?
Quel regard de sorcière m'as-tu jeté ? Depuis quelle fenêtre, quel portique de balançoire ancienne où bien sûr ta jupe blanche se gonflait en corolle ? Que puis-je décider contre toi ? Mes deux yeux n'y résistent pas. Immobile ou passante, tu as toujours raison. Je te poursuis sans te parler. Je demeure privé de ta voix. Je ne connais pas le chemin qui mène à ta peau nue.
Je te rature et te déchire. Ta vie sans nous deux que vaut-elle ? Guère plus que la mienne, sans doute. De quelles joies nous sommes-nous privés ? Pour quels autres amours, devoirs, obstinations ? En m'adressant ainsi à toi, je m'administre encore une fois la preuve que notre vie ne nous appartient pas. Nous sommes un rendez-vous manqué.
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EN ÉTÉ LE SOIR

Les soieries d'été sont douces au toucher
C'est un crépuscule de corsages entrouverts sur la promenade
Et de baisers volés le long des bassins du jardin public
Où se mirent longuement les filles et les étoiles

Sous la laine noire des arbres des voix tricotent
Peaux brunes la promenade est encore belle.
Poudre à vos yeux bleu de vos cernes
La lune en son halo de juillet.

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La nuit fait dans l'encre d'infinis détours. Nous avons tant de manières de nous perdre et de croire, nous disposons d'un si grand nombre de mots pour nous divertir de l'inexprimable. Ainsi va cette vie que tout y chemine vers la mort, mais s'égare. Nous ne vivons jamais que de nous perdre en route. Nous ne savons rien dire que de travers.
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Nous rêvons d’une terre bleue, d’une terre de couleur ronde, neuve comme au premier jour, et courbe ainsi qu’un corps de femme.

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Quiconque marche à la nuit tombante sur un chemin de campagne entre de grands arbres noirs et nus poudrés de neige sait ce qu'il reste de croyance possible au coeur de l'humain. Il n'a besoin ni de prêtre ni de chapelle ; il marche, et chacun de ses pas répète qu'il n'y a rien à ajouter.
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L'un d'entre nous parfois se tient debout près de la mer.

Il demeure là longtemps, fixant le bleu, immobile et raide comme dans une église, ne sachant rien de ce qui pèse sur ses épaules et le retient, si frêle, médusé par le large. Il se souvient peut-être de ce qui n'a jamais eu lieu. Il traverse à la nage sa propre vie. Il palpe ses contours. Il explore ses lointains. Il laisse en lui se déplier la mer : elle croît à la mesure de son désir, elle s'enivre de son chagrin, cogne comme un bâton d'aveugle, et le conduit sans hâte là où le ciel a seul le dernier mot, où personne ne peut plus rien dire, où nulle touffe d'herbe, nulle idée ne pousse, où le tête rend un son creux après avoir craché son âme.
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La mort est fragile comme l'amour. La mort est en nous l'idée la plus belle, l'idée mère, l'idée douce et sans bornes, la seule idée point trop folle pour laquelle on puisse encore avoir le goût de vivre.
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Le train de nuit traverse des bourgs à l’agonie derrière leur double rangée de lampadaires. Des lumières bleues tremblent aux fenêtres des immeubles et des pavillons. De petites vies calées dans le béton clignotent en attendant de mourir. Avec leurs couvertures de laine, leurs bas nylon leurs chemises de nuit, leurs pyjamas rayés et leurs draps brodés à la machine, elles font mine de ne pas croire que l’heure sonnera tantôt au clocher de l’église. Il soulève le couvercle de ces logis funèbres quand le train s’arrête en gare de Vitré, à hauteur du deuxième étage des immeubles les plus proches. Le père, la mère et les trois enfants regardent la télévision. C’est l’heure du « communiqué », de la guerre du Liban, du Boeing fracassé sur une autoroute et du Paris-Dakar… Traversant le carreau bleu, il vient s’asseoir à leur coté, sans déranger personne, sans même qu’on le remarque. Il trempe un instant son pain dans leur soupe, puis il prend congé. Le voyage se poursuit, vers une nuit plus profonde et plus inhabitée. Il abandonne ainsi derrière soi les choses du monde auxquelles il aurait aimé croire et les créatures anonymes dont le poursuit partout la tristesse impénétrable.
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A l'aube, en été, la ville ressemble à la mer. Peu de voitures et de passants. Juste ce qu'il faut de livreurs et d'employés municipaux pour que l'obscurité se dissipe. Le boulevard prépare son appareillage. Déjà quelques rideaux métalliques se lèvent avec fracas au dessous des façades ensommeillées. Des employés lessivent le carrelage des cafés. Les balayeurs ont ouvert en grand les bouches d'incendie: les caniveaux dégoulinent de fraîcheur. L'air cru du matin claque aux carrefours comme un jeu de voiles neuves. Les autobus esseulés chaloupent; tout à l'heure ils disparaitront dans le flux des automobiles...

Il aime entre toutes cette heure approximative où le temps sort avec précaution des choses, où la vie est encore imprégnée de rêve, et où il semble que le jour neuf permettra d'accomplir des tâches considérables.
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Pizza grignotée au soleil sur une terrasse. Sur chaque table, un téléphone est posé à côté de l'assiette. Les individus se déplacent avec leur monde, moins que jamais curieux et disponibles, ligotés par d'invisibles fils à leur ordinaire, monades ou molécules enfermées dans leur microscopique histoire.
A présent recouverte d'une toile électronique, la Terre dont on dit qu'elle fut ronde est redevenue plate.
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J'ai rêvé d'une maison verte. D'une maison qui verdit comme un arbre au printemps et qui perd ses feuilles en automne. Sa façade est couverte de vigne vierge, mélangée de rosiers et de glycine. Elle abrite deux cœurs rouges, mes travaux d'encre noire et mes pensées de neige.
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De bien des manières, je me suis émancipé de mon enfance. Me voici devenu comme la plupart citoyen de l'aléatoire, détaché de tous lieux, incertain de l'avenir et n'éprouvant plus que dans l'encre des émotions comparables à celles dont ma mémoire a embelli le souvenir.Encore ces émois se font-ils désormais plus rares; et le geste d'écrire, qui me fut à ses débuts un enchantement, ne me réserve que de parcimonieuses surprises. J'en règle les cérémonies avec application. Les mots sont des drapeaux en berne. Je me perds; l'encre a dépensé naïvement quantité d'images sans prendre la peine d'en suivre le fil: elles m'ont écarté de moi-même qui les ai laissées s'effacer.
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Je vous le demande : lorsqu’elle s’est échappée du corps, où l’âme est-elle allée se loger ? Dans quel trou de souris ? Derrière l’armoire, dans le piano, sous le tapis ? À quatre pattes, je la cherche, comme une bête qui croirait encore à sa proie. Et je renifle jusque dans ma bouche, ce souffle dont je ne sais plus s’il est de vie ou de vent.

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Les morts ont le cœur gros de chrysanthèmes. Il leur vient, sous la pierre, des désirs en retard et d’insidieuses tristesses, à cause de ce parfum douceâtre mélangé de voix chères. Des larmes encore voudraient couler de leurs paupières, des paroles filtrer de leurs lèvres, mais seul le gravier crisse et l’ombre se rendort.

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MÉMOIRE



à Benoît

Les morts en gare de Montbard
Sous leur lit fleuri de pierre neuve
Les dents serrés les yeux fermés
Cherchent-ils à comprendre

Les souvenirs sont faits
De petits riens qui durent
De petits riens très durs
En travers de la gorge

Le ciel bleu chaque soir
Ranime un peu de braise
Puis le vent retombe

Les toits de tuiles ont des lueurs
Plus grises et la douleur
S’assourdit un peu

En ce début de mars
Les arbres sont encore mauves
Et noirs avec des façons désolées
D’attendre le printemps et de ne pas y croire.
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UN POÈTE AU JARDIN



extrait 5

    J’aime lire auprès de l’herbe, avec le vent et le commentaire indiscret des oiseaux. Et j’aime que les mots se disposent en massifs ou en bouquets dans un poème. Rapprocher poésie et jardin est une idée simple, assez belle, et dont la justesse n’a pas échappé aux poètes…
[…]
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