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Critiques de Marcel Proust (1050)
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A la recherche du temps perdu, tome 2 : A l..

UN ETE AVEC MARCEL #2



Ahhh le temps perdu. Ces élégantes dames, les bains de mer l'été, les salons mondains. Le temps perdu de Marcel (enfin du narrateur, soyons correcte !)



Dans ce second opus, notre narrateur est adolescent... et comme tout adolescent, il sent en lui monter l'attirance amoureuse vers le sexe opposé.

D'abord Gilberte Swann (qui n'en a rien à kicker). Et cet amour occupera toute la première partie des Jeunes filles en fleurs. On y retrouvera Odette et Swann qui sont mariés maintenant. la seconde partie sera consacrée aux vacances au grand hôtel de Balbec en Normandie (ne cherchez pas, Balbec est une ville fictive), en compagnie de sa grand-mère. Elégantes, bains de mers, hypocrisie en tout genre, bonne société. Marcel nous replonge dans l'ambiance d'époque à un tel point que l'on s'y croirait. Et c'est là qu'apparait Albertine, magnifique Albertine, peu commune, dévergondée,.. ou pas.



Au cas où, je viens de résumer 800 pages en 10 lignes. Niveau intrigue, vous comprendrez par là qu'il ne se passe pas grand chose dans ce roman.

Par contre nous sommes dans un magnifique tableau dont les parties s'éclairent au fil des pages. Description des lieux, des goûts, des caractères tout fait en sorte de vous plonger dans l'histoire non à la place du narrateur mais en spectateur de la fresque qui se joue. Fresque qui nous conte les interactions de vies futiles.

Marcel ne dépeint pas le 19ème siècle, il dépeint son univers à lui, dans sa caste. Les pauvres, ça n'existe pas enfin, non, on ne les voit pas , et les liftier feraient mieux de retourner à la domesticité.

Marcel c'est aussi une langue de peste avec ses collègues écrivains ( et voilà Victor Hugo et Chateaubriand rhabillés pour l'hiver ) mais aussi dans la description des caractères où la fourberie de son monde est détaillée.



Marcel c'est surtout un style inégalé où la beauté des mots subjugue et pallie à l'intérêt limité de l'histoire.



Bien vite, je reprendrai ma madeleine de pélerine pour aller faire un tour à Guermantes admirer le nouveau tableau de Marcel.





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Contre Sainte-Beuve

Ouvrage particulièrement étrange alliant une ébauche de certains passages de la Recherche avec une critique de Sainte-Beuve, de sa méthode consistant à mettre en parallèle la vie de l'auteur et son œuvre, c'est souvent un prétexte pour Proust de donner son opinion sur certains de nos plus grands auteurs. Certains des chapitres sont rédigés à la deuxième personne, comme s'ils étaient des lettres adressées à des tiers ; j'ai trouvé cela agréable car ça m'a donné l'impression que Proust s'adressait directement à moi. Certaines de ses analyses sont d'une acuité stupéfiante, notamment celle de Nerval ou de Baudelaire. Pour Nerval, j'ai l'impression d'avoir enfin saisi certains éléments de Sylvie qui m'avaient échappé jusqu'alors. La critique de Balzac est, par moments à mourir de rire, par les singularités du caractère de l'auteur de la Comédie humaine. Le fil directeur est parfois difficile à saisir, mais on comprend entre les lignes que lorsqu'il analyse les auteurs, Proust essaie de montrer en quoi leur vie domestique est sans intérêt pour connaître de leur œuvre. Les passages préparatoires de la Recherche n'ont pas eu grand intérêt pour moi, excepté celui sur l'homosexualité, qui va bien plus loin que Sodome et Gomorrhe.
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A la recherche du temps perdu, tome 2 : A l..

Il y a 104 ans, le 10 décembre 1919, le prix Goncourt couronnait Marcel Proust pour son roman « À l'ombre des jeunes filles en fleurs. L'auteur n'en était pas à sa première tentative pour obtenir le précieux prix et les critiques étaient déjà nombreuses à l’époque pour dénoncer la difficulté de son œuvre…



Cet Everest du monde littéraire, je l’ai gravi en cordée avec des amis babelionautes et sur une durée d’un mois. Je n’étais pas le premier mais pas non plus le dernier. Je me suis accroché pour ne pas m’effondrer dans les premières pages. De plus, s’attaquer directement au tome 2 de la recherche du temps perdu pouvait paraître risquer pour le commun des lecteurs… l’auteur des 856 mots dans une seule phrase ne me faisait pas peur et je pouvais compter sur l’esprit d’équipe pour arriver à mes fins.



Le style et la personnalité de marcel Proust ne se limitent pas à la longueur de ses phrases bien que celles-ci restent sa marque de fabrique. Si elles sont interminables pour le quidam, ses phrases demeurent pourtant fluides et dynamiques à la manière d’un véritable tsunami littéraire. Si l’on peut se perdre les premières heures dans le style proustien, les idées qu’il énonce sont claires et bien ordonnées. Avec le temps - et dieu sait qu’il est important chez l’écrivain - on commence rapidement à accepter sa prose et voir même à l’apprécier. La monotonie du départ laisse vite la place à la curiosité pour ce foisonnement de sentiments et d’émotions naissantes. On finit par accepter sa marque de fabrique.



Mais on ne peut pas s’intéresser à Proust sans parler de ses personnages. Le trait fondamental du personnage proustien réside dans sa description complexe mais aussi précise. Dans la recherche du temps perdu, il y a plus de 200 personnages. L’écrivain sait les faire évoluer sans les figer dans leurs traits de caractère. Comme dans la vraie vie, leurs attitudes évoluent au grès du temps ou de l’instant présent. Chez notre ami Marcel, l’individu change suivant qu’il est seul ou en compagnie. Le lecteur peut se perdre dans cette multitude de « faux semblant » et de « paraître-être ». S’ils sont à la fois sincères et sympathiques, ils peuvent aussi devenir snobs voire cruels. On peut les croire artificiels mais ils sont souvent comme on les imagine être du moins comme on voudrait les voir, la question étant de savoir s’ils sont faits pour être aimés ou admirés.



Enfin on se doit aussi de parler de l’amour proustien et des filles qui émoustillent tant le jeune Proust dans ce roman. De la jeune paysanne portant une jarre de lait qu’il voudrait ne plus quitter à la belle Albertine au polo noir qu’il veut épouser, en passant par l’espiègle Gisèle ou la mature Andrée, son cœur (d’artichaut) ne sait ou ne peut choisir. L’impossibilité de les différencier va rendre la décision de l’auteur très compliquée. Pourtant, le désir chez Proust semble trouver son paroxysme dans le manque ou l’inachevé plutôt que dans l’atteinte ou la réalisation de ses amours. «J'aime ce que je n'ai pas et je n'aime plus ce que j'ai ». Gilberte qui vit à Paris en compagnie de ses parents les Swann, en fera également les frais dans la première partie du roman.



Avec Proust, nous restons dépaysés tout au long de notre lecture. Le narrateur, héros principal, nous entraîne et nous bouscule dans une succession de souvenirs sans chronologie et sans fil conducteur au grès de ses pensées. La mémoire du temps passé et présent se mélange pour nous donner la représentation réelle du monde qui nous entoure ou plutôt du monde que nous percevons plus par l’esprit que par les yeux. Avec cet écrivain, nous rentrons pleinement dans la pensée du narrateur et nous ne faisons plus qu’un avec lui. Le « je » de l’auteur devient notre propre « je ». C’est cette fusion d’esprit qui nous permet d’être transporter au sein même du récit en nous permettant de partager en parfaire osmose, tous les sentiments du héros.



C’est cette expérience incroyable et unique que je vous invite à expérimenter seul ou en groupe. Elle vous permettra d’assister à la représentation de la pièce de théâtre Phèdre jouée par Sarah Bernard (La Brema) ou de dîner dans le restaurant du Grand Hôtel de Cabourg (Balbec) comme visiter l’atelier du peintre Whistler (Elstir) ou de fréquenter la bourgeoisie parisienne durant l’affaire Dreyfus. Vous pourrez vous promenez sur le Champ de Mars avec Odette Swann et sa fille Gilberte ou vous baladez sur la côte normande avec Robert, marquis de Saint Loup. C’est tout ça aussi l’ombre des jeunes filles en fleur…



Je tiens encore une fois à remercier mes amis 4bis, AnnaCan, Berni_29, Cathe, Djdri25, gromit33, H-mb, HundredDreams, Isacom, MisssLaure, mylena, Nicolak pour leurs échanges constructifs et soutiens tout au long de notre ascension littéraire.



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Du côté de chez Swann - Combray : Premières épreuves

Du côté de chez Swann

Marcel Proust (1871-1922)

« Longtemps, je me suis couché de bonne heure. » Ainsi commence la première partie du long fleuve littéraire que constitue « À la recherche du temps perdu » qui comporte sept volumes. Je dois à la vérité de dire que pour aborder la littérature de Marcel Proust, il faut être préparé, puis prendre son temps et savoir qu’une grande concentration est requise quand on découvre la longueur des phrases. Il m’a bien fallu arriver au terme du chapitre I soit la page 47 (édition Folio) pour commencer à me sentir mieux dans ce monde à part qui est celui de cet immense écrivain. Alors, pour en revenir à la première phrase, très brève certes, celle-ci résume en fait un peu tout le premier chapitre qui nous montre l’attachement de l’enfant qu’était alors Proust le narrateur pour sa mère qui parfois le privait d’une affection dont le garçon était avide. Il n’est que de lire le magnifique passage de la page 23 pour tout comprendre : « Le seul d’entre nous pour qui la venue de Swann devint l’objet d’une préoccupation douloureuse, ce fut moi. C’est que les soirs où des étrangers, ou seulement M. Swann, étaient là, maman ne montait pas dans ma chambre. Je dînais avant tout le monde et je venais ensuite m’asseoir à table, jusqu’à huit heures où il était convenu que je devais monter ; ce baiser précieux et fragile que maman me confiait d’habitude dans mon lit au moment de m’endormir il me fallait le transporter de la salle à manger dans ma chambre et le garder pendant tout le temps que je me déshabillais, sans que se brisât sa douceur, sans que se répandît et s’évaporât sa vertu volatile et, justement ces soirs là où j’aurais eu besoin de le recevoir avec plus de précaution, il fallait que je le prisse, que je le dérobasse brusquement, publiquement, sans même avoir le temps et la liberté d’esprit nécessaires pour porter à ce que je faisais cette attention des maniaques qui s’efforcent de ne pas penser à autre chose pendant qu’ils ferment une porte, pour pouvoir, quand l’incertitude maladive leur revient, lui opposer victorieusement le souvenir du moment où ils l’ont fermée. »

Il faut avoir présent à l’esprit que La Recherche du temps perdu est l’histoire d’une vie, de l’enfance à l’âge adulte racontée à la première personne par un narrateur sans nom, mais dont on devine vite l’identité. Comment le narrateur va devenir écrivain constitue le fil conducteur de ce roman très philosophique où la recherche de la vérité accompagne celle du temps perdu. C’est aussi la vie d’un idéaliste esthète grand amateur d’art en une époque qui n’est plus la nôtre.

Au fil des pages on note des remarques qui retiennent l’attention comme la tyrannie de la rime qui torture les poètes ou bien l’inanité des journaux qui tous les jours attirent notre attention sur des choses insignifiantes tandis que nous lisons trois ou quatre fois dans notre vie les livres où se trouvent les choses essentielles. L’humour n’est pas absent et le bourg de Combray, village d’enfance du narrateur, est le lieu de situations cocasses : « On connaissait tellement bien tout le monde, à Combray, bêtes et gens, que si ma tante avait vu par hasard passer un chien « qu’elle ne connaissait point », elle ne cessait d’y penser et de consacrer à ce fait incompréhensible ses talents d’induction et ses heures de liberté. »

Et le style somptueux et d’une foisonnante richesse de Proust s’attache à nous décrire parfaitement l’ambiance paisible et surannée de Combray, le village où il passait aussi ses vacances d’enfant : « Beaux après-midi du dimanche sous le marronnier du jardin de Combray, soigneusement vidés par moi des incidents médiocres de mon existence personnelle que j’y avais remplacés par une vie d’aventures et d’aspirations étranges au sein d’un pays arrosé d’eaux vives, vous m’évoquez encore cette vie quand je pense à vous et vous la contenez en effet pour l’avoir peu à peu contournée et enclose – tandis que je progressais dans ma lecture et que tombait la chaleur du jour – dans le cristal successif, lentement changeant et traversée de feuillages, de vos heures silencieuses, sonores, odorantes et limpides. » Sublime !

Et Proust sait aussi avec style nous mettre l’eau à la bouche : « Françoise (la cuisinière et servante) tournait à la broche un de ces poulets, comme elle seule savait en rôtir, qui avaient porté loin dans Combray l’odeur de ses mérites, et qui, pendant qu’elle nous servait à table, faisaient prédominer la douceur dans ma conception spéciale de son caractère, l’arôme de cette chair qu’elle savait rendre si onctueuse et si tendre n’étant pour moi que le propre parfum de ses vertus. » Plus loin il décrit la vision du poulet dans le plat apporté à table avec « sa peau brodée d’or comme une chasuble et son jus précieux égoutté d’un ciboire… »

Et il nous faire apprécier la nature du cadre de Combray : « C’est ainsi qu’au pied de l’allée qui dominait l’étang artificiel, s’était composées sur deux rangs, tressés de fleurs de myosotis et de pervenches, la couronne naturelle, délicate et bleue qui ceint le front clair-obscur des eaux, et que le glaïeul, laissant fléchir ses glaives avec un abandon royal, étendait sur l’eupatoire et la grenouillette au pied mouillé, les fleurs de lis en lambeaux, violettes et jaunes, de son sceptre lacustre. »

Toute cette première partie se déroule en une seule nuit alors que le narrateur se couche et se remémore le passé, avec les visites de M.Swann, les soirées chez Mlle de Vinteuil et la duchesse de Guermantes.

La seconde partie est en fait un roman dans le roman : c’est un retour en arrière dans la vie de Charles Swann et comme les faits se déroulent avant la naissance du narrateur, il use de la troisième personne pour narrer cet amour de Swann.

Swann, intellectuel séducteur, érudit et esthète, mondain et cultivé, a rencontré Odette de Crécy, une jeune femme un peu farouche et vulgaire, au passé déjà lourd, qui l’introduit chez des bourgeois très riches qui se sont constitués un salon qu’ils veulent brillant et intime, la famille Verdurin. Devenu amoureux d’Odette qu’il juge toutefois assez imparfaite, Swann reconnaît avoir la faiblesse de lui rendre visite dans son appartement et il justifie cette passion par des mobiles d’ordre esthétique. Peu à peu la passion faiblit mais la sonate de Vinteuil, l’air national de leur amour, la revivifie par le message qu’elle leur envoie. Odette de son côté trouve Swann intellectuellement inférieur à ce qu’elle aurait cru et regrette qu’il conserve toujours son sang-froid ce qui l’empêche de le définir. Elle s’émerveille davantage de son indifférence à l’argent, de sa gentillesse pour chacun et de sa délicatesse. Peu à peu Swann devient misanthrope car dans tout homme il voit un amant possible pour Odette.

Tout au long des conversations sont faites références à des œuvres d’art en particulier à la peinture, Proust ayant été un très grand amateur d’art. Il ne pouvait en être autrement pour Swann qui se consacre à une étude exhaustive de l’art de Ver Meer. La musique occupe aussi une grande place dans la vie de Swann et sa passion pour Chopin se répète tout au long de cette partie du roman : « …les phrases au long col sinueux et démesuré de Chopin, si libres, si flexibles, si tactiles, qui commencent par chercher et essayer leur place en dehors et bien loin de la direction de leur départ, bien loin du point où on avait pu espérer qu’atteindrait leur attouchement, et qui ne se jouent dans cet écart de fantaisie que pour revenir plus délibérément – d’un retour plus prémédité, avec plus de précision, comme sur un cristal qui résonnerait jusqu’à faire crier – vous frapper au cœur… Swann tenait les motifs musicaux pour de véritables idées, d’un autre monde, d’un autre ordre, idées voilées de ténèbres, inconnues, impénétrables à l’intelligence, mais qui n’en sont pas moins parfaitement distinctes les unes des autres, inégales entre elles de valeur et de signification. »

Vient un jour où une lettre anonyme sème le doute dans l’esprit de Swann quant à la moralité d’Odette qui serait entre les mains d’entremetteuses pour se livrer à des ébats étrangers d’une part et à des amours saphiques d’autre part. Sur cette dénonciation qui lui paraît invraisemblable, Swann l’interroge et le peu qu’elle lui avoue révèle bien plus que ce qu’il eût pu soupçonner ! Faible, Swann lui sourit avec la lâcheté de l’être sans force qu’ont fait de lui ces paroles accablantes. Ainsi il découvre que même dans les mois où il avait été le plus heureux avec elle, ces mois où elle l’avait aimé, elle lui mentait déjà. « Mais la présence d’Odette continuait d’ensemencer le cœur de Swann de tendresses et de soupçons alternés. »

La troisième partie se passe à Paris et évoque les rêveries du narrateur et le temps où Charles Swann est marié à Odette de Crécy : ils ont une très jeune fille, Gilberte dont le narrateur encore adolescent est follement amoureux. On est alors dans la continuité de la première partie.

Le titre général appelle un commentaire en soi, à savoir que le temps perdu, c’est le souvenir et tout le livre est construit sur des souvenirs à retrouver, perdus qu’ils sont dans le passé. Et les madeleines dans tout cela ? C’est leur goût retrouvé qui permet au narrateur d’entamer cette plongée dans les réminiscences.

Mon aventure proustienne est commencée et comme bon nombre de lecteurs de Proust, j’ai connu tour à tour des moments d’émerveillement de par le style et la poésie dans le récit de la vie à Combray et des moments où il faut accepter les détails extrêmes de la psychologie de l’amour de Swann au sein d’une prose assez complexe mais brillante.

Proust rappelons-le, est au panthéon de la littérature française selon tous les experts. Courage, vous pouvez le lire à condition de prendre votre temps, de perdre un peu de temps pour vous y retrouver.

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A la recherche du temps perdu, tome 2 : A l..

Au début du tome, le narrateur et Gilberte sont amis et Marcel (appelons-le ainsi) passe la plupart de son temps chez les Swann. Malheureusement, cette amitié (pour lui de l'amour) ne dure pas car Gilberte n'a pas les mêmes sentiments. Marcel, personnage alors torturé décide de la fuir pour guérir son chagrin. C'est ainsi qu'il part en vacances à Balbec (Cabourg, dans la vraie vie) pour plusieurs mois. Cette destination lui est d'ailleurs recommandée par son médecin car le petit Marcel a la santé fragile... Il part avec sa grand-mère adorée et là le livre subi un petit passage à vide puis l'action revient grâce à la personne du Marquis de Saint-Loup. Marcel découvre la "haute" et fait connaissance avec Monsieur de Charlus, alors identifié comme un tombeur (pourtant il découvrira que Charlus est homosexuel). Bref, la lecture est agréable, encore plus lorsqu'on rencontre le peintre Elstir et le livre connait son apogée avec l'arrivée d'ELLES: les jeunes filles en fleurs...



Elles sont au nombre de cinq ou six, nous n'en connaissons que quatre : Albertine, Andrée, Gisèle et Rosemonde. Elles sont belles, elles sont jeunes, elles sont mystérieuses. En fait, elles sont cool.

Je trouve que c'est vraiment la partie la plus intéressante du livre. La fin est très belle, il y a beaucoup de belles phrases.
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A la recherche du temps perdu, tome 1 : Du ..

"Un amour de Swann" (2e partie du roman "Du côté de chez Swann," lui-même 1er tome d’"À la recherche du temps perdu" de Marcel Proust) a pour personnage principal Charles Swann. En 1950, le roman est inclus dans la liste du Grand prix des Meilleurs romans du demi-siècle.

N.B."À la recherche du temps perdu", couramment évoqué sous le titre "La Recherche", est un roman de Marcel Proust, écrit de 1906 à 1922 et publié de 1913 à 1927 en sept tomes, dont les trois derniers sont parus à titre posthume.

Mais revenons à nos moutons, c'est-à-dire à "Un amour de Swann". [/L'intrigue se déroule entre Paris et la région du narrateur (qui n'est pas né au moment de cette histoire) : la Normandie, ou plutôt, Combray.

C'est donc l'histoire de Charles Swann (dont on parle également dans Combray comme d'un ami de la famille), un mondain aux goûts littéraires et artistiques très sûrs. Il est présenté un soir à Odette de Crécy, une cocotte demi-mondaine, qui l’introduit bientôt dans le salon des Verdurin. En dépit de la mesquinerie de ce salon bourgeois où Mme Verdurin règne en tyran, Swann se montre fort agréable, et apprécie avec un air amusé les plaisanteries calamiteuses du doc­teur Cottard, la vantardise des maîtres de maison et l'admiration ridicule presque narcissique du peintre Biche ; c’est là que, pour la première fois, il entend jouer la sonate de Vinteuil, et plus particulièrement la petite phrase qui le plonge dans une sorte d’extase.

Cependant, il préfère encore une jeune ouvrière à Odette, dont il remarque néanmoins la ressemblance avec la Zéphora de Botticelli. Cette analogie flatteuse allume son désir qui s’exaspère un soir où, arrivé en retard chez les Verdurin, il n’y retrouve pas Odette ; l’ayant cherchée dans plusieurs restaurants, il la ren­contre enfin et passe la nuit chez elle. À partir de ce moment, Swann se rend tous les soirs chez sa maîtresse et éprouve pour elle une passion soutenue par la phrase de Vinteuil, se pliant à ses caprices et laissant même son jugement de côté pour se conformer à ses goûts vulgaires.

Mais, depuis qu’elle a introduit le commun marquis de Forcheville chez les Verdurin, Swann est peu à peu tombé en dis­grâce, supportant de moins en moins l'ambiance de la maisonnée. D'autant qu'il est peut-être un tantinet jaloux. Prisonnier de sa passion (tel Emma Bovary ou les femmes sous l'emprise de Bel Ami), il entretient sa maîtresse et cède à tous ses désirs, se tenant à l’écart sous prétexte qu’Odette ne tient pas à ce qu’ils soient vus ensemble. Livré à lui-même, il cherche alors à connaître son emploi du temps et encourage pour ce faire son ami le baron de Charlus à sortir avec elle. Lors d’une soirée chez Mme de Saint-Euverte, il entend une nouvelle fois la sonate de Vinteuil qui le replonge dans le souvenir cruel des tendres débuts de sa liaison.

C’est alors qu’il reçoit une lettre anonyme qui lui expose la vie dissolue de sa maîtresse, qu’elle finit elle-même par lui avouer sous le feu de ses questions ; il découvre alors progressivement son vrai visage qui détruit rétrospectivement son amour initial. Odette étant partie en voyage avec les Verdurin, Swann retrouve le repos et se rend à Combray dans le but d’y retrouver Mme de Cambremer, aperçue lors de la soirée de Mme de Saint-Euverte, et revoit alors Odette comme au début, en rêve.]

Proust évoque, dans ce roman, je pense, l'amour-passion, qui, emporté dans son élan, peut ravager un cœur. La mélancolie, l'art et l'homosexualité sont des thèmes également abordés dans l’œuvre.

L'écriture de Proust est, pour ainsi dire, à rallonge. Il peut d'ailleurs rédiger parfois des phrases de 15 km et je n'exagère pas, je crois ! Je n'aimerais pas me plonger dans ses cahiers de brouillon ! Enfin... ma note de 2.5/5 est peut-être injustifiée puisque je suis jeune et n'ai peut-être pas encore saisi tout le message de l'auteur. Qui sait? En prépa, aurais-je plus de chance ?

Il faut toutefois admettre que les mots sont compréhensibles et que la réflexion de Proust est juste et profonde si l'on prête un tant soit peu attention à ce qu'il raconte :)

Ce roman va être abordé sous la forme littéraire du récit : j'espère le comprendre mieux alors !

Bonne soirée cher lectorat babelionesque et à bientôt pour d'autres critiques de classiques en classe préparatoire B/L....
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A la recherche du temps perdu, tome 2 : A l..

Autant j’avais apprécié le premier tome, autant avec celui-ci mon ressenti est bien plus complexe : par moment j’ai retrouvé ce qui faisait le charme de cette lecture, mais plusieurs fois ma lecture est devenue laborieuse, voire ennuyeuse et longue.

La longueur des phrases n’en est pas vraiment la cause car elles n’étaient pas plus courtes dans les passages qui m’ont plu. Mais quand il faut revenir en arrière pour trouver à quoi peut bien se rapporter un pronom ce n’est pas bien agréable ! Et il faut bien dire que cela arrive plus souvent dans les moments où le narrateur se penche sur ses sentiments, ses émotions. Peut-être que c’est une question aussi d’état d’esprit et de contexte au moment de la lecture... Quel dommage : au fil des pages les analyses introspectives minutieuses, les oscillations incessantes entre anticipation et souvenir, me rebutaient de plus en plus, au contraire des descriptions et des portraits de personnages. Là le talent de Proust s’épanouit, chaque description de lieu est inoubliable ( l’église de Balbec, les chemins normands, l’atelier d’Elstir, le Grand Hôtel, …) et les peintures de personnages sont d’autant plus savoureuses qu’ils sont issus d’un autre temps et que Proust souligne tous les travers de chacun, travers d’autant plus frappants que les préoccupations de tous ces personnages, quel que soit leur milieu, semblent bien futiles. En tant que tranche de vie d’une époque révolue (les Champs Elysées comme terrain de jeu, le Grand Hôtel de Balbec, …) c’est une totale réussite. D’autant qu’autant que la nostalgie, on sent bien tout le poids, très lourd, des conventions sociales. Et j’adore la façon dont tout ce monde est dépeint, avec humour et quelques coups de griffes ironiques.

Le bilan est cependant positif, quoique je ne sois pas sûre de continuer la lecture des tomes suivants, d’autant que je pressens que c’est une lecture qui appelle presque inéluctablement la relecture, mais ... sait-on jamais ?
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A la recherche du temps perdu, tome 2 : A l..

Pendant ma dernière année au lycée, sur un an ou presque, j'ai lu toute La Recherche de Proust. Je serais bien en peine d'envisager la même chose aujourd'hui si j'en crois ma lecture de A l'ombre des jeunes filles en fleurs. Un tome me suffira pour longtemps. Je n'ai pas la patience et l'accueil bienveillant nécessaire pour me lancer dans un si long parcours. Un certain nombre de points m'exaspèrent quelque peu d'ailleurs.



Une vague impression de schizophrénie : le plaisir de me couler dans la phrase de Proust et ses méandres, avec des évocations, exquises parfois, de la mer, de la campagne, de la mémoire. En même temps, la vacuité sur laquelle ces évocations sont bâties, les contrefaçons de la vie mondaine, les micro-incidents sur lesquels il se base pour dévider le fil de sa pensée. J'ai l'impression que tout le texte peut s'effondrer complètement à tous moments et puis je m'y noie volontiers un instant après.



Je note aussi qu'il écrit ça en pleine guerre mondiale ! J'en suis choquée. Il parle à plusieurs moments de l'égocentrisme extrême et nécessaire de l'artiste mais c'est aller vraiment loin. Ailleurs, il présentera l'amitié comme une gêne pour les artistes qui "ont aussi le devoir de vivre pour eux-mêmes ; or l'amitié leur est une dispense de ce devoir, une abdication de soi". Une chose est sûre, je n'aimerais pas rencontrer le narrateur IRL !

Puis je continue à lire et la séduction des phrases refait son effet…



C'est une étrange façon de vivre, dans l'anticipation ou dans le souvenir mais pas dans le moment présent qui est toujours décevant. C'est épuisant de suivre les aller-retour du narrateur !

"Il en est des plaisirs comme des photographies. Ce qu'on prend en présence de l'être aimé n'est qu'un cliché négatif, on le développe plus tard, une fois chez soi…"

En revanche, l'art le ramène à l'ici et maintenant : cf. le passage à l'atelier d'Elstir où les tableaux font leur effet dans l'immédiat, sans stratégie à bâtir ni souvenir à reconstruire. "…quand je fus dans l'atelier ; je me sentis parfaitement heureux, car par toutes les études qui étaient autour de moi, je sentais la possibilité de m'élever à une connaissance poétique".



Enfin il faut dire la formidable puissance d'évocation de Proust : Odette Swann de sortie entourée de sa "cour", les chemins de Normandie, l'atelier d'Elstir. Ah! L'atelier d'Elstir : un moment de pur bonheur. Il faudrait citer des pages entières tellement c'est beau.
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A la recherche du temps perdu, tome 2 : A l..

J’ai lu les deux premiers tomes de "À la recherche du temps perdu" un été, alors que j’étais lycéenne. J’étais fière de lire Proust, ça me paraissait une sorte de rite de passage à l’âge adulte. Du premier tome j’avais gardé le souvenir, certes pas d’un suspense haletant, mais plutôt d’une lecture qui prend son temps - parfaite pour l’été dans un transat à l’ombre.

Le deuxième tome j’avoue l’avoir lu en diagonale, c’était un peu trop pour moi à l’époque.

La lecture commune proposée par 4bis me paraissait donc une excellente occasion d’y revenir ; voire de poursuivre avec les tomes suivants ?

Bah non, tiens, finalement.

Alors d’emblée, j’aime beaucoup mieux quand Proust parle des choses que des gens : la description de l’église de Balbec couverte de lierre, la réminiscence évoquée par un bouquet d’arbres au cours d’une promenade, c’est magistral. Dans l’ascenseur en fin de journée, "à chaque étage une lueur d’or reflétée sur le tapis annonçait le coucher du soleil et la fenêtre des cabinets." Splendide, non ?

Mais quand il parle des gens…

Tout ce qui suit n’est que mon ressenti d’humble lectrice de 2023, je le précise à l’avance pour ne pas être enquiquinée par les vrais amateurs de littérature pour lesquels "faut replacer dans le contexte."

Quand il parle de lui, d’abord : c’est quoi ce type qui va au bordel et picole tant que tant, mais exprime les sentiments d’un enfant (il s’endort "dans les larmes" si Grand-Mère n’est pas venue lui faire son bisou du soir), voire d’un pré-ado de 12 ans quand il joue d’une fille contre une autre ?

Pourtant il écrit drôlement bien, Marcel ; aucun frotteur du métro, sûrement, ne s’exprime aussi joliment : "Je tâchais de l’attirer, elle résistait (…) je la tenais serrée entre mes jambes comme un arbuste après lequel j’aurais voulu grimper (…) et, au milieu de la gymnastique que je faisais (…) je répandis, comme quelques gouttes de sueur arrachées par l’effort, mon plaisir auquel je ne pus pas même m’attarder le temps d’en connaître le goût."

Aucun ministre de l’Intérieur ne saurait décrire aussi finement les femmes : "Même dans le bas peuple (…) la femme, plus sensible, plus fine, plus oisive, a la curiosité de certaines délicatesses."

Aucun Bernard Arnault ou autre ultrariche, sûrement, ne dépeint aussi élégamment sa domesticité : "le regard intelligent et bon d’un chien à qui on sait pourtant que sont étrangères toutes les conceptions des hommes".

(Bon, probablement aussi qu’aucun fêtard s’envolant pour Dubaï n’a un médecin qui lui aurait "conseillé de prendre au moment du départ un peu trop de bière ou de cognac, afin d’être dans cet état qu’il appelait "euphorie", où le système nerveux est momentanément moins vulnérable".)

Concluons : à mes yeux c’est plutôt un long essai sur la perception et la mémoire, destiné à des pairs érudits, mais mis en forme de roman - sinon personne ne l’aurait lu ?

Et puis surtout, la haute société qu’il décrit ne me donne qu’une envie : défiler le poing levé en brandissant un drapeau rouge. (Ce livre pourrait être un magnifique outil de la révolution prolétarienne, voyez Lady L. de Romain Gary.) Écrivant à la même époque, John Galsworthy ou Thomas Mann étaient autrement plus critiques, plus percutants, et avec plus de finesse à mon goût.

Une dernière citation ? Un éclair de lucidité : "Une grande question sociale, de savoir si la paroi de verre [de la salle à manger de l’hôtel] protégera toujours le festin des bêtes merveilleuses et si les gens obscurs qui regardent avidement dans la nuit ne viendront pas les cueillir dans leur aquarium et les manger." (Pour les personnes qui aiment bien replacer dans le contexte, "Mangeons les riches" date du 18ème et c’est de Jean-Jacques Rousseau.)

Merci aux collègues de la lecture commune, 4bis, AnnaCan, Berni_29, Cathe, Djdri25, gromit33, H-mb, HundredDreams, MisssLaure, mylena et Patlancien (ainsi qu’à NicolaK pour les biscuits… !)
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A la recherche du temps perdu, tome 2 : A l..

Longtemps je me suis fait une montagne de Proust. Pas une montagne magique, non… Un chemin laborieux peuplé d'aubépines aux branches piquantes et acérées.

Longtemps les amateurs et amoureux de Proust m'ont également fait tout autant peur. Mais lorsque j'en ai rencontré quelques-uns, - quelques-unes devrais-je préciser, j'ai pu me rendre compte qu'ils étaient comme moi faits de chair et d'os, surtout de chair, et non pas quelques rombières évanescentes trempant des madeleines rances dans des tasses de thé à la verveine.

Longtemps j 'ai considéré que je n'étais pas prédisposé à lire et aimer Proust. Je portais un regard façonné de représentations toutes les unes plus fausses que les autres : une oeuvre écrite par un mondain pour des mondains, un monde peuplé de snobs et de dandies qui n'avaient rien d'intéressant à me dire, une écriture datée et hermétique.

« Je tournai le dos comme un baigneur qui va recevoir la lame. »

On dit qu'À l'ombre des jeunes filles en fleurs serait la suite logique et chronologique du premier volume d'À la recherche du temps perdu, du côté de chez Swann.

Deux ans se sont passés depuis la fin d'Un amour de Swann, élément central du tome précédent. Y étaient décrites les turbulences de la liaison entre Swann et Odette de Crécy. On les retrouve mariés, au début de ce tome II, sans que rien n'ait été dit sur la façon dont ce mariage a été amené et sur la manière dont la cérémonie s'est déroulée. Cette union conduit Swann a descendre d'un cran dans le niveau de ses relations sociales.

Dans mon voyage qui m'amène à revenir vers Proust, deux mois se sont écoulés. Cette attente a été faite d'impatience et de peur.

C'est sans doute le ton d'une confidence qui m'a convié à ce nouveau rendez-vous avec Proust.

Alors j'ai pris mon temps pour lire ce second opus. D'ailleurs, existe-t-il une autre manière de lire Proust que de prendre son temps ?

Me croirez-vous si je vous avoue que ces pages sont emplies de sortilèges ?

Je pourrais vous parler de quelques personnages de ce roman, mais pour ceux qui n'ont jamais lu Proust, ce serait comme vous parler de mes amis ou de la fête des voisins… Si je vous évoque les Verdurin, Swann et Odette de Crécy, Elstir, la Berma, Bergotte, Françoise, Andrée, Gilberte, la grand'mère, Albertine… cela ne vous parlera sans doute guère et vous aurez raison car ce n'est pas ce qu'il y a de plus important dans ce texte. de même que les lieux évoqués dans ce roman sont évocateurs, le salon des Verdurin, le Grand Hôtel de Balbec, l'atelier d'Elstir, l'hôtel des Guermantes…

Il y a bien sûr un arc narratif qui sous-tend le texte, qui convoque des personnages, des lieux, une histoire…

Mais le personnage principal de ce roman est bien pour moi son écriture et ce qui compte aussi c'est la façon de convoquer par le cheminement de cette écriture intelligente, nuancée et parfois ironique il faut bien l'avouer, des émotions, des sensations, l'éveil des sens, le désir, des rebuffades, des regrets, une manière de dire la douleur du chagrin avec sensibilité et élégance.

C'est une écriture emplie d'enchantement par sa finesse et sa subtilité, une écriture qui ouvre des possibles.

Il ne se passe rien ici, la seule aventure c'est l'écriture. Proust remplace ici l'imagination par la sensibilité des ressentis. C'est la réalité qui se prend pour un rêve éveillé, dans l'immobilité des choses.

L'écriture de Proust m'a fait entendre une voix, un vertige, mes propres émotions de lecteur, peut-être d'homme tout simplement. Elle est pour moi un chemin inouï pour entrer dans ce rapport intime au monde, pour le visiter, en éprouver non pas une certaine vision, mais plutôt les sensations.

À l'ombre des jeunes filles en fleurs, il y a un mot qui m'a tout de suite interpelé dans ce titre. Non, non, vous ne m'entraînerez pas sur ce chemin espiègle et polisson… Quoique j'y reviendrai plus tard… Je voulais seulement parler ici de l'ombre citée dans le titre qui sous-entend qu'à un autre endroit existe une lumière vive, arrogante presque, celle peut-être d'un soleil qui écraserait le paysage et parmi lequel la vue soudaine de quelques jeunes filles sur une plage offrirait la protection d'une ombrelle ou d'un parasol. J'y ai vu la sensibilité douloureuse d'un homme, disons le Narrateur, une sensibilité à fleur de peau justement, fuyant la brutalité du monde et découvrant la possibilité d'y trouver une connivence intime à sa musique intérieure. Plus tard, c'est peut-être cette lumière qu'Elstir répand dans ses tableaux qui exalte justement les ombres, ces ombres sous lesquelles le Narrateur cherche à abriter les bruits de son âme.

Le Narrateur n'est pas Proust et Proust n'est pas le Narrateur. Je me souviens de m'être fait cette réflexion à plusieurs reprises durant ma lecture et pourtant le Narrateur lui ressemble tout en étant son contraire. Nous voilà bien avancé !

J'ai aimé suivre l'errance de ce Narrateur dans le clair-obscur de cette écriture, entrer dans la lumière d'un tableau figurant un soleil couchant, épier les jeunes filles en fleurs au détour d'une dune, les observer comme lui, y voir des constellations.

Proust m'a rendu le monde à son ingénuité, comme si j'en avais furieusement besoin dans ce temps qui passe parfois trop vite.

C'est sans doute dans cette image à la fois cocasse et touchante que j'ai deviné la dimension sociale de ce récit, le Narrateur éprouve un désir effréné à entrer dans le groupe composé de ces jeunes filles en fleurs "étourdies, coquettes et

pieuses", partager leur vie, peut-être qui sait, devenir l'une d'elle enfin. J'ai eu l'impression soudaine d'être le Narrateur à mon tour et d'avoir déjà vécu cet instant fragile et fugace…

J'avais l'impression de me transformer au fur et à mesure que je pénétrais les volutes du texte. L'oeuvre était là, immuable, ne m'avait pas attendu pour saisir d'autres lecteurs dans sa nasse ou les repousser à jamais vers d'autres rivages moins opaques et je ne l'avais pas attendu non plus pour exister à ma manière.

Je me suis pourtant rappelé combien la littérature peut nous façonner par d'insoupçonnés et imperceptibles mouvements, par des chemins inattendus qui innervent ce que nous sommes et ce que nous pouvons devenir.

L'écriture de Proust m'a apporté ici sa légèreté et l'envie vorace de ne plus être ankylosé par des livres qui ne me parleront jamais.

Les livres qui ne m'intimident pas ne m'intéressent plus. Enfin, à quelques exceptions près, bien sûr...

Je continuerai de craindre l'écriture de Proust, mais maintenant je sais un peu mieux l'apprivoiser…



« Car Lesbos entre tous m'a choisi sur la terre

Pour chanter le secret de ses vierges en fleurs ».

Les Fleurs du mal – Charles Baudelaire



Cette lecture commune avec quelques amis fut un délicieux moment très inspirant. Merci à eux pour les échanges si riches durant cette aventure proustienne insolite.

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À la recherche du temps perdu - Intégrale

Que dire sur Proust qui n'aurait pas déjà été dit ?

Cette oeuvre est l'essence même de ce pourquoi on écrit et on lit des livres.

Si vous êtes l'une de ces âmes nées nostalgiques, et qui sait être émue par une atmosphère, un souvenir, un éclat de lumière, alors cette oeuvre monde est faite pour vous.

À mon sens, elle explore principalement ce qui tient lieu d'éternité en-dehors du spectre religieux. Le célébrissime épisode de la madeleine en est l'un des exemples : où survivent ces souvenirs qu'un rien imprévisible peut ramener à la mémoire ?

Ce sont ces instants que le narrateur personnage (puisqu'il ne s'agit pas d'une réelle autobiographie, bien que Proust l'oublie parfois en cours de route) va essayer de chercher pendant plusieurs milliers de pages, pour composer une oeuvre à venir que l'on ne lira jamais, affrontant la question douloureuse du temps qui passe, de ce qui reste, de ce qui change, de l'amour, de la noblesse, de la matière et de la mémoire pour reprendre Bergson...

C'est l'une de ces lectures amicales, à la manière de Montaigne, qui parasite notre vision du monde au point de la voir ensuite partout.

Je m'étais lancé dans sa lecture il y a 10 ans, pendant 8 mois, sans lire autre chose, et elle fait désormais partie intégrante de ma vie intime.

C'est une lecture difficile, parfois pénible, mais qui touche à plusieurs moments, sans prévenir, au sublime, à ces instants de lecture où tout ce que l'on est s'exclame : "il est donc possible de dire cela avec des mots !"
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A la recherche du temps perdu, tome 2 : A l..

Il y a des rendez-vous qu'il faut avouer manqués. Non que cela tienne particulièrement à l'un ou l'autre des parties, mais plutôt que les potentialités que chacun avait à apporter à cette rencontre n'ont pas trouvé assez d'échos en l'autre. A l'ombre des jeunes filles en fleur est de ces étonnantes déceptions.



Remarquez qu'en cela, mon désappointement est tout à fait à fait emblématique du rapport du narrateur aux oeuvres ou artistes qu'il s'apprête à aduler et qu'il se trouve, dès lors qu'il a la possibilité d'y être réellement confronté, obligé de reconnaitre en deçà des attentes qu'il formulait pour eux. J'aurais adoré glorifier A l'ombre des jeunes filles en fleur ! Mais voilà, comme au narrateur, alors qu'il en attend des merveilles avant de les avoir rencontrés, la Berma, Bergotte, Elstir auront commencé par paraître complètement étrangers à la gloire dont il aurait voulu les auréoler, A l'ombre des jeunes filles en fleur m'a lourdement désappointée quand j'espérais y boire le filtre d'un puissant enchantement. J'y ai en revanche retrempé mon penchant aux phrases interminables, vous l'aurez noté.



Dans La Recherche, une rédemption existe pourtant : il s'agit de créditer ces grandes oeuvres ou illustres artistes de ce que les autres leur auront trouvé. Ainsi, parée de l'éloge que lui fait Norpois, la Berma devient admirable au narrateur tout comme la petite phrase, qui avait paru presque commune à Swann lorsqu'il l'avait entendue la première fois se voit conférer des mérites supplémentaires par l'environnement et les sentiments qui auront été ensuite associés à son écoute. Il faut donc que la sensation soit médiatisée par une caution culturelle honorable, une émotion, un souvenir pour qu'elle devienne sublime.



Les amis, vous avez du boulot car je compte sur vous pour hisser cette lecture au pinacle de mes admirations grâce à ce que vous m'en direz qu'il faut que j'en pense. Et vu le pensum que ça a été d'en venir à bout – et mon esprit critique toujours affuté, reconnaissons-le -, il va falloir que vous mouilliez la chemise pour que nous y parvenions ! Anna, bien sûr, ma foi dans tes talents de persuasion est sans limite !



Il y a eu pourtant des moments de plaisirs à ma lecture, heureusement. J'ai ri avec délice des tournures de Françoise et de certaines affections ridicules que montrent Odette, Norpois ou Bloch ensuite. Je me suis trouvé bien des points communs avec le narrateur lorsqu'il peut passer une nuit entière à regarder une branche de pommier en fleur, attribuant au marchand à qui il l'a achetée la générosité, le « goût inventif aussi et contraste ingénieux » d'avoir ajouté « un seyant bouton rose » aux blanches corolles et bourgeons de feuilles. J'ai aimé aussi la synesthésie qui fait prendre la terre pour la mer et l'inverse dans les toiles d'Elstir, les jeunes filles en bande pour des mouettes, la manière dont la lumière du soir change un lieu et en fait une toile. Pour connaître un peu La Recherche dans son ambition globale d'avoir lu des essais sur elle, j'ai admiré la manière dont le narrateur semait le trouble sur l'identité sexuelle de tel ou tel personnages, dont les thèmes du travestissement, de l'incertain commençaient à prendre leur place dans l'oeuvre.



Mais quelle interminable litanie ! C'est fait exprès, je le conçois bien. Il faut que le lecteur se perde dans ce flux de conscience qui mâche et remâche les événements, les passe au crible de ses comparaisons intérieures, leur trouve des correspondances et des interprétations grâce à une digestion sempiternellement répétée. Si la vache a sept estomacs, la tête du narrateur a au moins autant de cerveaux ! Heureusement pour notre rencontre, qui dans le cas contraire aurait été absolument ratée, ce narrateur pose sur lui-même un regard lucide. Il parle à son sujet de sa « faiblesse », de « [s]on excès de sensibilité douloureuse et d'intellectualité ». Oui, on le dirait à moins !



Et si, n'évoluant pas en littérature dans les eaux morales du délit et du jugement, on ne peut dire que faute avouée est à moitié pardonnée, cette lucidité aura au moins un temps apaisé l'agacement que je sentais monter à mesure que je lisais les circonvolutions infinies que provoquait le moindre événement, que dis-je, l'absence même d'événement, comme lorsqu'on prend des pages à évoquer ces jeunes filles qui ne passent pas sur la digue. Qu'on attend et qui ne viennent pas. (J'en vois sourire certaines, Beckett est bien plus lapidaire pour faire advenir ce qui n'existe que parce que ce que l'on attend ne vient pas).



Ainsi, toute la finesse d'une analyse intelligente et sensible, toute observation subtile d'un paysage que je chéris aussi ne suffiront pas à me lier à ce narrateur avec lequel je pensais avoir pourtant tant de points communs.

Prenez par exemple les aubépines. Ce sont celles de Combray qu'il retrouve à Balbec, celles des chemins creux, que je connais de mon côté aussi et que, sans les avoir croisées depuis longtemps, j'aime infiniment, plus encore depuis que mon sentiment à leur endroit a été augmenté par la connivence que cela me donnait, croyais-je dans un élan de snobisme littéraire que je confesse bien volontiers, avec Proust. Ces buissons piquants dont les tendres fleurs disent le mois de mai dans le bourdonnement des abeilles, le noir crocheteux des branches le dénuement d'un hiver après que les oiseaux auront achevé le festin de baies écarlates qu'elles auront offert à l'automne triomphant. Ces aubépines-là. Eh bien le narrateur, au détour d'une promenade charmante avec Andrée, va reconnaître leurs « feuilles découpées et brillantes qui s'avançaient sur le seuil » et « touché au coeur par un doux souvenir d'enfance » (on ne se refait pas), il va leur faire la conversation et s'enquérir des fleurs qu'il ne voit pas. Scène champêtre à la naïveté charmante. « Ces demoiselles sont parties depuis déjà longtemps. » lui répond l'arbuste. Et boum la perte ! Déjà ! Encore ! Au plus fort de sa jeunesse, alors qu'il batifole avec une charmante jeune fille dans les chemins creux, il aurait tout de même mieux à faire que de porter le deuil de fleurs passées ! Mais non, il déplore. Et pour se consoler, ne lui reste que la perspective de revenir l'an prochain, d'inscrire la répétition de l'habitude pour contrarier celle d'un temps enfui.

Et le devenir de la fleur, le fruit qui porte la graine, cette vitalité toute ramassée qui, à la faveur d'un lit obscur et humide donnera peut-être l'an prochain une nouvelle pousse ? C'est la déchéance, la flétrissure et la mort. Avec, compensation sublimatrice et véritable jouissance, le plaisir de lui adresser un tombeau littéraire. Un monde me sépare de cette manière d'envisager la vie ! Alors dites-moi, je vous prie, le moyen de s'entendre avec pareil animal ?



Et puis, à force d'y réfléchir, je ne crois pas que le processus de réminiscence corresponde à ma manière de concevoir l'identité ou même le réel. Qu'il faille trouver des redites signifiantes ou tisser la toile d'une interprétation qui contienne le monde aurait pu me plaire il y a quelques années encore. Lorsque je ne savais pas que ce ne serait pas ainsi que je regarderais mon passé. Lorsque j'ignorais encore qu'il était possible de faire autrement et que j'aurais alors admiré l'ampleur de la tâche en pensant qu'elle mimait, en une réalisation magnifiée par le talent d'écriture, celle de n'importe quel esprit un peu réflexif. Mais je ne crois plus aujourd'hui dans cette raison surplombante qui assigne un sens à tel ou tel signe qu'elle isole. Dans cet immense effort pour rester maître des correspondances et penser qu'elles sont autre chose que la simple émanation d'un esprit qui veut trouver une continuité, une trajectoire, à la succession décousue et hasardeuse des éléments qui font son existence.



Enfin, et c'est peut-être le plus rédhibitoire pour moi, quel sérieux dans la démarche de Proust ! Vous me direz, elle aura occupé sa vie, encore heureux qu'il lui accorde du prix. Oui. Mais il n'y a aucune autodérision, aucune place pour le rire incrédule, la gratuité d'un moment qui échappe malicieusement au sens qu'on veut lui donner. C'est l'esprit d'un temps, je veux bien l'admettre. On est dans le hiératique, Villiers de l'Isle Adam, Hérédia, Vigny. Dans l'icône et l'emblème. du lourd, du compassé, du sacre de l'artificiel. On est entre gens qui se savent sérieux, importants, et dont, indéniablement, je ne suis pas.

Mais pour finir sur une note un peu plus positive et les remercier de leur présence, j'ajouterai aux qualités de ce livre le prétexte qu'il a constitué pour rencontrer de nouveaux lecteurs sur Babelio et discuter plaisamment avec toute la fine équipe que nous avons constituée autour de cette lecture commune. Sans vous les copains, j'aurais lâché l'affaire, c'est sûr !

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A la recherche du temps perdu, tome 5 : La ..

Cinquième étape du « Proust Tour ». La relecture de ce volume m’a confirmé dans un certain malaise éprouvé dans les approches passées . La situation décrite ,d’une jeune femme cloîtrée (en grande partie) et soumise à une surveillance constante et qui l’accepte est assez troublante. La jalousie déclinée sous toutes ses formes jusqu’aux plus paranoïaques , les interrogatoires rappelant ceux de l’Inquisition (la torture en moins tout de même) crée chez le lecteur (moi en l’occurrence) une forme d’angoisse que n’effacent ni la subtilité de l’analyse ,ni la beauté de l’expression. En thèmes d’arrière-plan subsistent l’homosexualité (autour de Charlus et des amantes supposées d’Albertine) , la vie des salons (autour des Verdurin)et la réflexion sur l’art (la musique de Vinteuil ,la peinture d’Elstir) . Ve tome contient ce qui est à mon avis l’un des plus beau passages de l’œuvre : le récit de la mort de Bergotte..
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A la recherche du temps perdu, tome 1 : Du ..

Dans ce premier tome d' “A la recherche du temps perdu”, Marcel Proust évoque, en trois parties distinctes, le souvenir d'une enfance entre Paris et Combray, lieu de vacances en famille. Rencontres, dîners, voisinage, calme, air frais, plaisir de lecture, sont tous ces moments que l'auteur se remémore avec douceur et mélancolie dans un texte riche sur le temps qui passe.



Je remercie les éditions du Livre de poche pour l'envoi de cette édition dans sa nouvelle traduction de Matthieu Vernet avec laquelle je découvre enfin l'oeuvre de Proust.



“Du côté de chez Swann” est le premier des sept tomes constituant l'oeuvre principale de l'auteur écrite entre 1906 et 1922. Il est paru pour la première fois en 1913 aux éditions Grasset puis aux éditions Gallimard à partir de 1919. La préface indique que le texte de 2022 se rapproche au plus juste de l'original.



Marcel Proust retrace les souvenirs d'une jeunesse, les liens avec sa mère, sa santé fragile, les instants paisibles et simples, d'une simple lecture matinale sous un marronnier à une promenade en bord de mer, au goût du thé et à la dégustation de petites douceurs. L'auteur présente les personnages et décrit les lieux que l'on retrouvera plus tard.



Dans “Combray”, la première partie du livre, ces sont les souvenirs des vacances en Normandie chez tante Léonie. Il est fait référence à la famille et aux liens qui se créent avec un certain Charles Swann.



“Un amour de Swann”, la deuxième partie, est concentrée essentiellement sur cet homme très apprécié et bien entouré, ainsi que sur sa future femme, Odette.



Dans “Le nom”, troisième et dernière partie, l'auteur met l'accent sur le ressenti et les émotions que lui procurent certains lieux de vie et de vacances.



Le texte est très imagé. On visualise et on contemple toutes les scènes. Je n'ai pas trouvé la lecture difficile, mais elle demande du temps. Les phrases sont longues, il y a peu de ponctuations. C'est une lecture qui se savoure chaque jour.



"Du côté de chez Swann" est un roman autobiographique dans laquelle Marcel Proust aborde les thèmes de la famille, de la jeunesse, du souvenir et de l'amour. C'est aussi l'histoire d'une époque, d'une société bourgeoise du XXème siècle en France. C'est un premier tome condensé, volumineux, précis mais c'est aussi une immersion totale. Une fois que l'on entre dans la vie de ces personnages, on y reste pendant quelque temps en buvant un thé et en s'installant un petit cocon tout en détente.
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A la recherche du temps perdu, tome 2 : A l..

Encore une fois, Proust ne déçoit pas. Que dire sur cet ouvrage qui a déjà été critiqué et analysé des centaines de fois si ce n'est qu'il faut le lire et surtout oublié cette réputation trompeuse comme quoi Proust serait difficile à lire et pompeux.

Dans ce deuxième tome de la recherche, il est vrai que l'on peut trouver quelques longueurs, mais qui sont alternées par des passages absolument fascinant autant dans l'histoire que dans l'écriture, mais aussi, et surtout selon moi, dans la pensée.



Il est possible de lire cet ouvrage comme un roman, comme un poème en prose mais aussi comme un essai. En effet tous les grands enjeux de la philosophie sont questionné. Avec une prédilection pour le sensible et sa place dans la construction du (des) mondes.
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A la recherche du temps perdu, tome 7 : Le ..

Passionnant, émouvant, remuant, marrant, amusant, élégant, édifiant, jamais barbant, toujours prenant, enthousiasmant, choquant de temps en temps, enivrant, en un mot : géant !! Je conseille vivement la lecture de La Recherche du Temps (pas) perdu, histoire de voir la vie autrement, comme un enfant qui porterait toujours en lui le souvenir ineffaçable des baisers de sa mère et qui, ayant grandi doucement, s'aperçoit un jour, alors qu'il attend patiemment dans une bibliothèque, celle d'un prince par exemple, alors presque mourant, qu'il est devenu un artiste !
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A la recherche du temps perdu, tome 1 : Du ..

Retour de (re)lecture sur "Du côté de chez Swann" écrit par Marcel Proust et publié en 1913. Une deuxième tentative de lecture, cette fois aboutie, après un premier abandon il y a 25 ans. Ce livre est le premier tome du roman "A la recherche du temps perdu" qui en comporte sept, mais peut se lire seul. Ce roman, qui est une introspection ultra détaillée, est une pièce majeure de la littérature française et parfois considéré comme le meilleur roman de tous les temps. Il contient l'épisode de la fameuse madeleine de Proust qui est maintenant devenue une expression courante. Ce roman est un travail littéraire impressionnant dans sa manière de décrire avec énormément de détails les sentiments, de mettre des mots sur les pensées les plus furtives, sur l'indicible. On n'est pas dans un roman classique mais plutôt dans une expérimentation littéraire, d'une complexité et d'une richesse incroyable. C'est tout le fonctionnement d'un esprit humain qui est décortiqué. Proust nous expose ainsi sa très grande sensibilité, il nous parle de ses peurs, de ses ressentiments et émerveillements, il nous partage la vie de ses personnages en nous épargnant aucun détail sur leurs sentiments, sur l'amour, la crainte, la jalousie, leurs peurs d'enfant ou d'adulte, les déceptions ou la trahison. Tout est exprimé par des mots avec énormément de grâce, de précision et de justesse, c'est là tout le talent et la spécificité de Proust. Par contre cela a un prix, et la lecture de ce livre est tout sauf facile. Il faut avoir énormément de persévérance, car le plaisir n'est pas toujours là. Le vocabulaire utilisé par Proust est particulièrement riche mais la pagination est très dense, il y a peu de dialogues, les phrases sont souvent d'une longueur incroyable, il ne se passe pas grand chose, la ponctuation est très déstabilisante. Tout cela demande beaucoup de concentration et entraîne un rythme de lecture particulièrement lent. Le livre est divisé en trois parties inégales. Dans la première partie "Combray" le narrateur nous raconte sur près de deux cent pages ses souvenirs d'enfant, dans la maison familiale de sa tante dans le Calvados. Cette partie est hallucinante. Proust pousse à l'extrême l'introspection, la description de ses sentiments, la lenteur des scènes et l'inaction. Il faut être particulièrement persévérant pour en venir à bout, on dirait presque qu'elle a pour unique but de faire une sélection et d'éliminer les lecteurs trop impatients pour s'adapter à cette mécanique littéraire proustienne. La deuxième partie "Un amour de Swann" est beaucoup plus facile et abordable puisqu'il y parle du sentiment amoureux et de ses différents états à travers ses personnages M.Swann et Odette de Crecy. Il y a également dans cette partie une description assez intéressante de cette classe sociale frivole des gens du monde au début du vingtième siècle, à travers leurs réunions mondaines. Une classe sociale qui semble ne jamais rien faire de constructif et évoluer dans une vacuité totale. La troisième partie "Un nom" est elle plus anecdotique étant beaucoup plus courte. Elle est néanmoins superbe, et donne du sens et de la cohérence à tout ce premier tome. Au final, c'est un livre pour lequel j'ai surtout retenu la performance littéraire, avant le plaisir qui était beaucoup trop intermittent. Le plus grand plaisir étant finalement d'arriver au bout de cette lecture, qui est une épreuve, un périple littéraire, mais qui est passionnante et particulièrement intéressante, avec de très grands moments de jubilation sur certains passages. En tout cas, je signe sans hésiter pour le deuxième tome, "À l'ombre des jeunes filles".

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Vacances de Pâques et autres chroniques

Parmi ces six textes, les souvenirs de vacances de Marcel Proust : les aubépines du jardin, l’église du village pour Pâques, les jeux sur les Champs-Élysées, Florence où il n’est pas allé parce qu’il était malade…



Les souvenirs sont empreints de douceur et de nostalgie, c’est agréable à lire mais les phrases, trop longues, font perdre le fil de la narration.

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A la recherche du temps perdu, tome 1 : Du ..

(Swann partie 2, donc pris en "cours de route")

Une écriture éblouissante au service d'une démonstration d'un abîme narcissique.

Peut-on aimer Proust sans être snob ?

Et que dire de Proust qui n'ait déjà été dit ?

Que dire de nouveau sur ces phrases qui ne sont, quand on vient de quitter des ouvrages instantanément accessibles, pas prêtent à se laisser apprivoiser sans un minimum de concentration, d'effort, d'immersion, qui n'admettent pas qu'on ne leur soit pas totalement dédiées, si jalouses et excessives, comme seules savent l'être les adolescentes, qu'on se doive d'être entièrement à elles, ces phrases langoureuses, qui parfois minaudent, font semblant de se refuser, reviennent vers vous, certaines tellement farouches qu'il faut les relire pour pouvoir les tenir pleinement dans les bras, ces longues phrases qui parfois vous laissent à bout de souffle mais jamais rassasié, qu'il me soit difficilement envisageable de lire avec des gens autour, d'ombres qui se déplacent, osent parler, vivre ?

Elles me sont d'autant plus attendues ces phrases qui surgissent ça et là dans le roman, ces longues phrases qui n'en finissent pas, traversées de voies parallèles multiples, parfois inattendues désorientant le lecteur qui s'abandonne alors plus à leur musicalité qu'à leur sens, avant d'aboutir au point final et de retomber avec l'auteur "sur ses pattes", que je reviens en arrière pour refaire une deuxième fois le parcours de ces chemins en fait si parfaitement cartographiés.

Parfois, ce sont des paragraphes entiers qui tiennent du grandiose, comme quand Proust décrit une galerie de grands valets de pieds. "L'un d'eux (...)" jusqu'à "les premières heures de sa domesticité." Sublime passage, se suffisant à lui-même, comme une courte nouvelle.

Très certainement que cela a déjà été maintes fois remarqué : quand l'auteur parle des phrases de Chopin ("Elle avait appris de sa jeunesse...") on croirait que tout en parlant de phrases musicales Proust explique justement la construction particulière de ses phrases à lui, avec toutes ces vagues "parallèles" dont parfois on n'aperçoit pas tout de suite le lien, mais qui au final nous amène toujours logiquement au bout du chemin.

Mais...

Ces phrases ont sur moi un effet surprenant : elles se suffisent à elles-mêmes. En dehors de ce goût pour les mots de Proust ,les personnages n'indiffèrent pleinement. Quand l'auteur nous présente le docteur Cottard, je lis la virtuosité, mais je me contrefous du portraituré. Ce qui peut bien lui arriver. Je me contrefous des amours ridicules de Swann (déjà je me fous de pratiquement de toutes histoires d'amour en littérature, en fiction, car non universelles, ne concernent que des êtres qui me sont étrangers) de ses jalousies médiocres chez cet être insignifiant, ces mésaventures sans intérêt d'une tête à claque. Quand l'histoire entière pourrait se résumer en une phrase : "Mais qu'est-ce qu'on peut être con quand on est amoureux."

Un Swann, que Proust "ne gâte pas", avec son longue tête un peu chauve, une tête de cocu, que l'on trouve ridicule, qui "avait l'esprit paresseux et manquait d'invention", immensément dédaigneux, qui ressent de l'abjection pour les gens modestes (ceux vivants dans des quartiers presque populaires par exemple, mais en fait tout ce qui n'est pas lui)

C'est quelqu'un qui se contente d'observer (Swann-le narrateur-Proust), avec snobisme (ce même snobisme d'ailleurs que l'on retrouve chez ses aficionados, ceux qui disent adorer Proust, mais pour expliquer cet amour, sont obligés d'aller piocher chez les autres lecteurs ce qu'ils ont vénéré)

Je me contrefous de cette si ennuyeuse deuxième partie, où tout tourne autour de l'amour blessé de ce Swann… Quel ennui que cette façon d'être au monde... Chez chacun de ces personnages détestables, tous plus petits les uns que les autres, qui n'ont d'intérêt pour l'autre que si il peut être utile d'une façon ou d'une autre à leur égo, par exemple en servant leurs sarcasmes, et bien sûr tous entièrement dépourvus de second degré s'agissant de leur petite personne.

Car Proust est un écrivain, pas un conteur. S'il avait été peindre, il n'aurait réalisé que des natures mortes. Sans feu ni passion.

Odette est une nature morte : alors que le livre ne parle pratiquement que d'elle, elle semble absente. Swann nous dit ce que sans doute elle pense, ce que sans doute elle fait, ce que sans doute elle ressent (ou plutôt le narrateur nous dit ce que Swann sans doute pense) Sans doute Odette fait-elle ceci à tel endroit, sans doute dit-elle cela à telle personne ; mais finalement elle n'est jamais réellement là : ce n'est qu'un fantôme dans la tête de Swann.

Et je me fous de cette époque pourrie d'un paradigme obscène : "ou supérieurs ou inférieurs", un Paris de totale pourriture, suintant de vanité, de dédain et de faux semblants, où tous s'estiment "gens d'esprit", de la frivolité de ces courses d'une soirée à l'autre où le but est juste d'être vu, un monde de futilité, d'ennui, un monde factice.

Et puis... et puis j'ai commencé à regarder ce personnage de Swann. Comprendre pourquoi il m'est si exaspérant, comprendre qu'en fait Swann est une femme, plus précisément une adolescente. Et que toute cette description d'un amour transis est celle d'une ado (forcément énervante) ; quand elle entre dans une pièce, elle n'a pas encore ouvert la bouche qu'elle vous horripile déjà, cette tête à claque maniérée. Avec son côté totalement exagéré, outrancier, sans recul aucun, façon fan dérangé qui dormirait sur le palier de son idole ou entrerait chez elle pour y voler un objet.

D'où ce que ces femmes aiment chez Swann : sa façon d'aimer comme une femme.



Jusqu'à … jusqu'à cette cassure inattendue dans ce monde sclérosé , cette dernière partie du roman où le narrateur reprend la main. Dans un premier temps, je constate avec dépits que Proust a donné au narrateur la même façon de penser que Swann, que Gilberte, elle, n'est qu'une resucée d'Odette ! me mettant à deux doigts de faire le procès en fainéantise du grand écrivain...

Et puis, on a l'impression que, dans notre dos, quelqu'un vient d'ouvrir une fenêtre et que l'odeur de renfermé peu à peu se dissipe, que l'espace se déplie enfin ; on se rend compte que ce narrateur a une vie aussi (bon, tout ça provient certainement du fait que j'entre dans la série des romans "en marche") ce narrateur a donc une vie lui aussi, où lui aussi est amoureux, et où cette amoureuse n'est autre que... la fille de Swann ! Mais alors ? On change d'époque ? Swann est donc marié ? Avec... avec Odette ! Comment est-ce possible ?

Ce monde commence à prendre corps, les longues descriptions de paysages deviennent les décors où enfin les personnages commencent à se mouvoir, à vivre, à jouer... Et voilà même brusquement que le narrateur devient vieillard, en peine avec son époque incomprise (soit encore un saut dans le temps ! )

Ne voilà t-il pas que, pourtant bien décidé à ne pas aimer Proust, je commence à me demander ce qu'il pourrait survenir, à envisager la suite, les romans précédents...

Je commence à doucement entrer (enfin !) dans l'histoire, à me prêter au jeu : de par cette entrée timide dans le monde de l'enfance, d'un récit qui devient plus coloré il me semble, Je me surprend même à sourire quand Gilberte appelle le narrateur "Bel Ami". (N'exagérons rien quand même : le narrateur, torturé lui aussi ,se retrouve dans les mêmes tourments amoureux que celui qu'il admire)

Et au final, je me dis qu'on pardonne tout l'homme qui écrit :

"Peut-être est-ce le néant qui est le vrai et tout notre rêve est-il inexistant, mais alors nous sentons qu'il faudra que ces phrases musicales, ces notions qui existent par rapport à lui, ne soient rien non plus. Nous périrons, mais nous avons pour otages ces captives divines qui suivront notre chance. Et la mort avec elles à quelque chose de moins amer, de moins inglorieux, peut être de moins probable."

et je me dis que je vais les retrouver un jour ces phrases musicales...







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A la recherche du temps perdu, tome 4 : Sod..

Quatrième étape de ma relecture de « La Recherche du temps perdu » Le titre d’origine biblique souligne l’importance qu’assume l’homosexualité comme thème dans ce volume , principalement à propos du baron de Charlus et d’Albertine. Monte aussi en puissance le thème de la jalousie déjà abordé dans l’histoire de Swann. Le roman se déroule à Paris puis à Balbec pour un deuxième séjour où le statut du narrateur a radicalement changé. Deux passages m’ont encore marqué (comme lors des précédentes lectures) : la description pleine d’humour du début qui pose un parallèle entre la danse de séduction du bourdon et de l’orchidée et celle de Jupien et du baron de Charlus. Et , pour sa charge émotionnelle , le passage intitulé « les intermittences du cœur » qui voit le narrateur prendre pleine conscience de la disparition de sa grand-mère .
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