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4.02/5 (sur 28 notes)

Nationalité : France
Né(e) à : Mulhouse , le 10/07/1960
Biographie :

Michèle Finck est née le 10 juillet 1960. Elle est la fille d’Adrien Finck, universitaire, mélomane et poète. Elle se forme à la littérature et à la musique, en France et en Allemagne. Elle entre à l’École normale supérieure en 1981 et continue à travailler la musique à Cologne. Elle consacre sa maîtrise puis sa thèse à Yves Bonnefoy. Elle fonde en 1988, avec Laury Granier, l’association culturelle Udnie qui réunit des poètes et des artistes de toutes disciplines. Depuis 1987, elle enseigne à l’Université de Strasbourg.
Son domaine de recherche privilégiée est le dialogue entre la poésie contemporaine (française, allemande, italienne, espagnole, russe) et les arts (musique, danse, cinéma, peinture)
Elle publie des livres de poésie mais aussi des traductions (Trakl) et des essais consacrés aux rapports de la poésie et des arts.

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Source : poezibao.typepad.com
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Avec Arthur H, Rim Battal, Seyhmus Dagtekin, Maud Joiret, Sophie Loizeau, Guillaume Marie, Emmanuel Moses, Anne Mulpas, Suzanne Rault-Balet, Milène Tournier, Pierre Vinclair & les musiciens Mathias Bourre (piano) et Gaël Ascal (contrebasse) Soirée présentée par Jean-Yves Reuzeau & Alexandre Bord Cette anthologie reflète la vitalité impressionnante de la poésie francophone contemporaine. Quatre générations partagent des textes pour la plupart inédits. La plus jeune a 17 ans, les plus âgés sont nonagénaires. Ils sont ainsi 94 à croiser leurs poèmes sur la thématique du désir, un mot aussi simple que subversif. ADONIS – ARTHURH – Olivier Barbarant – Linda MARIA BAROS Joël BASTARD – Rim BATTALClaude BEAUSOLEILTahar BEN JELLOUN – Zoé BESMOND DESENNEVILLE – Zéno BIANUCarole BIJOUAlexandre BONNET-TERRILE – Alain BORER – Katia BOUCHOUEVAJulien BOUTREUXNicole BROSSARDTom BURONTristan Cabral – CALI – Rémi ChecchettoWilliam CLIFFFrançois de CORNIÈRECécile COULONCharlélie COUTURELaetitia CUVELIERSeyhmus DAGTEKINJacques DARRASMichel DEGUY – Chloé DELAUME – René Depestre – Thomas DESLOGIS – Ariane DREYFUSRenaud EGOMichèle FINCKBrigitte FONTAINEAlbane GELLÉGuy GOFFETTECécile GUIVARCHCécile A. HOLDBANPhilippe JAFFEUXMaud JOIRETCharles JULIETVénus KHOURY-GHATAAnise KOLTZPetr KrÁLAbdellatif LAÂBIHélène LANSCOTTE – Jean LEBOËL – Yvon LE MEN – Perrine LEQUERREC – Jérôme LEROY – Hervé LETELLIER – Sophie LOIZEAULisette LOMBé – Mathias MALZIEU – Guillaume MARIESophie MARTINJean-Yves MASSON – Edouard J.MAUNICK –

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Citations et extraits (85) Voir plus Ajouter une citation
Le pressentir depuis l'enfance : chaque être est là sur cette terre pour accomplir à tâtons main nues quelque chose comme une ébauche obstinée. Marelle mentale. Mais que faut-il ébaucher ?
Pourquoi ? Comment ? Personne ne le sait.
L'écriture : une façon parmi d'autres de risquer balbutiants la buée des mots espérée...
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qui n’a pas de larmes a-t-il encore visage ?
     
.
Voix de contralto vacille à la recherche
De l’origine des larmes.
     
.
Les
Larmes
Non
Pleurées
Sont
Celles
Qui
Font
Écrire
     
     
Poésie :
Traire les ténèbres ?
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 ÊTRE VIVANT
  
  
  
  
Pour écrire   un poème
il faut être vivant
de tous ses   vocables
infinitésimaux
et pour être   vivant
avoir  regardé longuement  la mer
jusqu’à ce que les yeux  soient couleur mer
avec des oiseaux de mer    peints sur le ciel de l’iris
avoir respiré   le ressac  par bouffées
jusqu’à ce que  les parfums de mer
migrent  au profond des pores
avoir écouté  toute une vie  la scansion de la mer
pouls  cosmique  de l’univers
pour écrire  un poème
il faut  renaître  sans cesse
enfanter en soi  les morts
bercer les noyés   devenus varech
écouter la mer  chuinter
un mot toujours le même difficile
à déchiffrer             quelque chose comme :
é-bau-che  é-bau-che  é-bauche
et pour cette  é-bau-che  commencer non par les mots
mais par le rythme  et regarder
les dessins de l’écume  sur le sable
nager  en avant  et à rebours
de siècles  en siècles
jusqu’à  retrouver en soi
le oui  central
rayonnant  et dansant
sur la chair  du monde
passé  présent

                          et futur
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VAGUE
  
  
  
  
Garder
Toujours
Un
Peu
De
Mer
Au
Creux
De
La
Main :
Il
Nous
Relie
À
La

Résonance
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Michèle Finck
L’adoration des images



Extrait 2

Ce soir    angoisse
Que    Dieu
(S’il    existe ?)
Ne    soit
Handicapé
Sans    bras
(Perdus    à Buchenwald)
Sans    jambes
(Perdues    à Auschwitz)
Juste    une tête immense
Presque    décapitée
Et un tronc    mutilé
Le voici    d’ailleurs
Que se penche    douloureusement
Au-dessus    de sa création
Sa chimère
(Nous tous)

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Celle qui neige
ou l’alchimiste des larmes


Quand j’étais enfant, on me demandait ce que je voulais
 faire plus tard.
Je répondais : NEIGER.
On ne me comprenait pas.

Maintenant : je neige, j’écris.
Par alchimie des larmes.

Ma neige de mots est blanche à force d’être noire.
Ma neige de mots est éternelle à fore d’être éphémère.
Ma neige de mots est universelle à force d’être anonyme.
On ne me comprend pas.

Mais aujourd'hui un enfant, qui est passé à côté de moi,
 a dit à sa mère :
« Regarde cette femme elle neige.

– Pourquoi ? A demandé la mère.
– Pour moi pour toi pour nous tous.
Pour que tu neiges à ton tour.
Essayez vous aussi. »

Êtrécrire, neiger.
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LE DIT DE LA CATHÉDRALE DE STRASBOURG

Quatrième vitrail
Labyrinthe

Qui n’a pas regardé
L’autre pleurer
Ne le connaît pas.

Aimer un être
Pour la façon
Unique
Qu’il a de pleurer.

Le reconnaître
À l’odeur
De ses larmes

Toucher les traces
Que tes larmes laissent
Sur mon visage.
Cartographie étrange
Dont nul n’a la clé.

Dans le labyrinthe
De tes larmes
Avancer
À tâtons :
Éblouie.

Tes larmes
Nous élèvent
Au-dessus
De la poussière.

Tu pleures je ferme les yeux
Pour t’écouter pleurer
À nos pieds la cathédrale
De grès rose
Lentement tournoie.

L’essentiel est invisible
Aux sans-larmes.

Visage contre visage
Savons-nous encore
Qui de nous deux pleure ?
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Michèle Finck
9
Cette métaphore végétale, centrale dans l’imaginaire de la poète, entre en profonde correspondance avec un art poétique qui identifie poésie et jardinage. La métaphore la plus juste du travail de l’écriture est en effet, pour Vénus Khoury-Ghata, celle du jardinage. Mais ce n’est pas seulement une métaphore, car la poète passe sans cesse de l’une à l’autre et l’écriture s’enrichit de ce constant passage, qui souligne encore la sensorialité extrême de l’écriture. Texte ou jardin, Vénus Khoury-Ghata les travaille avec la même acuité visuelle, auditive, mais aussi, pour ainsi dire, olfactive et tactile. Les pages dans lesquelles poésie et jardinage échangent, sous le signe d’un plein épanouissement des cinq sens, une réciprocité de preuves sont nombreuses en prose et en vers. La prose de La Maison aux orties y revient plusieurs fois : « La plume dans une main, une cuillère dans l’autre, je touille un potage et corrige un texte en même temps, désherbe une plate-bande tout en cherchant la chute d’un poème » (MO, 28). Tout est fait dans l’univers poétique de Vénus Khoury-Ghata pour que la « table de travail » entre en résonance avec le « jardin », sous le signe d’une poésie aux inflexions baroques, qui peut trouver son équivalent végétal le plus juste dans le « volubilis » : « Ma table de travail face à mon jardin […]. Chèvrefeuille et volubilis s’entortillent sur mon mur, jusqu’à ne plus savoir où commence le poème, où s’arrête le jardin » (MO, 28). Vénus Khoury-Ghata aime travailler par variations (autre signe d’une langue profondément musicienne) autour de cette osmose entre la poésie et le jardinage. Ainsi par exemple certains passages de la prose (« Armée d’un râteau ou d’un crayon je fais la guerre aux adjectifs adipeux, élague une page, arrache des orties » MO, 28) se retrouvent, avec des variations subtiles, dans la poésie :

Le râteau dans une main le crayon dans l’autre je dessine un parterre écris une fleur à un pétale
désherbe un poème écrit entre veille et sommeil
je fais la guerre aux limages et aux adjectifs adipeux
[…]
je sarcle arrache
replante dans mes rêves. (M, 51)

30La variation est ici surtout rythmique, soulignant une fois encore l’indissociable lien entre le travail de l’image et du rythme, clé de voûte de cette poésie. Mais la métaphore végétale ne doit pas donner une vision trop clarifiante de l’œuvre, comme le suggère une nouvelle variation sur le même thème, qui met encore plus en relief le « combat » et la « lutte » indissociables ici de cette poésie définie comme un art du jardin :

Toute une vie de lutte pour apprendre à jardiner, à cuisiner, à écrire une langue qui n’est pas la mienne. Combat quotidien contre les limaces dévoreuses de plantes aromatiques, contre la poussière qui dévore les meubles, contre les adjectifs gras et les métaphores, appréciés dans ma langue maternelle mais rejetés par le français qui se rétrécit, maigrit à vue d’œil. Exit les images et l’excès de sentiment. (MO, 78)

31Dans cette perspective de la primauté de l’imaginaire végétal et des liens entre poésie et jardinage chez Vénus Khoury-Ghata, j’aimerais pour finir ouvrir une brève réflexion autour de l’image matricielle qu’est dans cette œuvre l’ortie. Si l’herbier poétique de Vénus Khoury-Ghata est tendu entre le volubilis et l’ortie, c’est cette dernière qui a l’ascendant dans l’univers imaginaire et en révèle le tréfonds ténébreux. Le « mot de passe » de l’œuvre, Vénus Khoury-Ghata le suggère elle-même, c’est le mot « ortie » : « le mot de passe “ORTIE” » (M, 34), peut-on lire au début du livre majeur éponyme. Entrer dans l’œuvre par la porte de l’ortie, c’est entrer par là où écrire est indissociable d’une nécessité vitale, d’une condition de vie. L’ortie est le blason de la force de nécessité qui fait de l’œuvre de Vénus Khoury-Ghata une grande œuvre. L’ortie est l’emblème par excellence de la dette de cette poésie aux ténèbres et aux enfers : « L’enfer décrit par le catéchisme, c’était chez nous, entre nos murs cernés d’orties » (MBL, 76). L’ortie est ici l’humus même de l’enfance (La Maison aux orties) et de la poésie. Elle est indissociable de la figure initiatique de la mère :

Une vieille femme pliée jusqu’au sol arrache à mains nues l’ortie qui a poussé sur la page pour la lancer dans la marge elle s’arrête pour me crier qu’elle est ma mère je suis forcée de la croire à cause de l’ortie. (M, 34)

32La mère qui a passé sa vie à remettre « toujours au lendemain ce travail » d’arrachage de l’ortie « qu’elle disait au-dessus de ses forces » (M, 35), passe sa mort à s’affronter à l’ortie : « C’est une fois morte qu’elle retrousse ses manches pour leur faire un sort » (M, 35). La superbe ouverture, lyrique et épique, funèbre et baptismale, d’Orties est à la fois un poème autoréférentiel (où Vénus Khoury-Ghata interroge la genèse de la poésie) et une forme neuve de nekuia (le rituel qui a pour but d’invoquer les morts, comme dans le Chant XI de L’Odyssée où Ulysse parvient à parler avec sa mère morte). Inséparable de la figure de la mère, l’ortie l’est aussi de celle du père et du frère, sous le signe de la « part maudite » qu’est la poésie dans la pensée paternelle : « quand le père décidait d’enterrer le fils et ses poèmes sous les orties » (M, 38).

28 Vénus Khoury-Ghata, Les Derniers Jours de Mandelstam, Paris, Mercure de France, 2016.
29 Jean-Louis Backès, Préface à Anna Akhmatova, Requiem, Poème sans héros et autres poèmes, Paris, Poé (...)
30 Yves Bonnefoy, L’Arrière-Pays, Paris, Skira, 1992, p. 106.
31 Claude Vigée, Les Orties noires, Strasbourg, Oberlin, 1984.
33Il est intéressant de proposer, en guise d’ouverture, une brève poétique comparée de l’ortie dans la poésie moderne et de suggérer à quel point l’œuvre de Vénus Khoury-Ghata se hausse au tout premier plan. Pour faire bref, ne citons ici que trois poètes majeurs qui travaillent en profondeur autour de l’ortie : Anna Akhmatova, Yves Bonnefoy et Claude Vigée. La convocation d’Anna Akhmatova (qui s’impose d’autant plus que Vénus Khoury-Ghata a consacré un livre à la figure de Mandelstam28 et s’est ouverte à la poésie russe) peut être éclairée par les mots de Jean-Louis Backès dans sa préface à cette œuvre : il y a partout « des herbes folles, de l’ortie […]. Le monde existe, feuille à feuille29 ». Pour Yves Bonnefoy, l’ortie, parce qu’elle est laide et mal aimée et qu’elle peut être l’emblème de sa poétique de la pauvreté essentielle, est primordiale : tant dans L’Arrière-Pays (où elle hante l’évocation de l’enterrement des grands-parents, de la fin de l’enfance, sous le signe de la finitude30) que dans Hier régnant désert (où elle est la servante de Veneranda). Pour Claude Vigée, l’auteur du livre de poèmes Les Orties noires31 surgi d’abord en alsacien et traduit ensuite en français, l’ortie est, comme chez Vénus Khoury-Ghata, Akhmatova, et Bonnefoy, liée fondamentalement à l’enfance. À l’instar de l’œuvre de Vénus Khoury-Ghata et à la différence des deux autres, l’œuvre de Claude Vigée fait de l’ortie la plante indissociable de la face ténébreuse, voire infernale, de l’enfance. Si les trois poètes ont tous créé une poétique originale et forte de l’ortie, Vénus Khoury-Ghata, dont l’œuvre est véritablement blasonnée par l’ortie, a su hausser l’ortie au tout premier plan de l’imaginaire. Elle est la seule à avoir fait de l’ortie le terreau même de la vocation poétique.

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NOTES
1 Vénus Khoury-Gatha, Une maison au bord des larmes, Paris, Balland, 1998 ; repris aux éditions Actes Sud, « Babel », 2005 (édition retenue dans cette étude). Le titre de ce livre sera abrégé ici : MBL. La citation se trouve p. 57.

2 Id., La Maison aux orties, Paris, Actes Sud, 2006 ; repris dans la collection « Babel », 2008 (édition retenue dans cette étude). Le titre de ce livre sera abrégé ici : MO.

3 Id., Les mots étaient des loups, Paris, Poésie/Gallimard, 2016. Le titre de ce livre sera abrégé ici : M.

4 Id., Au sud du silence, Paris, Saint-Germain-des-Prés, 1975.

5 Id., Les Ombres et leurs cris, Paris, Belfond, 1979 (Prix Apollinaire).

6 Louis Aragon, Le Mentir-vrai, Paris, Gallimard, 1980.

7 Pierre Brunel, « La traversée des “âmes en souffrance” », préface de Les mots étaient des loups, op. cit., p. 21.

8 Arthur Rimbaud, « Une saison en enfer », Poésies – Une saison en enfer – Illuminations, Paris, Poésie/Gallimard, 1999, p. 186.

9 Jacqueline de Romilly, La Tragédie grecque, Paris, PUF, 1970.

10 Je souligne.

11 Je souligne.

12 Georges Bataille, La Part maudite, Paris, Minuit, 1949.

13 Marcel Mauss, Essai sur le don [1925], Paris, PUF, 2007.

14 Yves Bonnefoy, La Vérité de parole, Paris, Mercure de France, « Essais », 1988.

15 Arthur Rimbaud, « Honte », op. cit., p. 164-165.

16 Martine Broda, L’Amour du nom. Essai sur la lyrique amoureuse, Paris, José Corti, 1997, p. 31.

17 Ossip Mandelstam, De la poésie, trad. Mayelasveta, Paris, Poésie/Gallimard, 1990, p. 58-68.

18 Dominique Moncond’huy (dir.), Le Tombeau poétique en France, Rennes, La Licorne/ Presses Universitaires de Rennes, 1994.

19 Pierre Michon, Rimbaud le fils, Paris, Gallimard, 1991, p. 30-31.

20 Sigmund Freud, « L’Humour », in L’Inquiétante Étrangeté et autres essais, Paris, Gallimard, « Folio », 1998, p. 322-324.

21 Ibid., p. 328 : « Par l’humour, le surmoi aspire à consoler le moi. »

22 Entretien avec Bernard Mazo, Autre Sud, n° 19, décembre 2002, p. 27.

23 Ibid.

24 Sur la notion de plurilinguisme, je renvoie aux nombreux travaux d’Alfons Knauth, par exemple le collectif dirigé par Alfons Knauth et Ping-hui Liao, Migrancy and Multilingualism in World Literature, Berlin - London, LiT Verlag, 2016, et l’ensemble de la collection « poethik polyglott » dirigée par Britta Benert, Rainer Grutman et Alfons Knauth chez LiT Verlag.

25 Salah Stétié, Ur en poésie, Bruxelles, Talus d’approche, 1995, p. 113.

26 Voir Michèle Finck, « Salah Stétié ou l’invention d’un phrasé », numéro spécial « Salah
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3.


Sentir que la mer, son appel lancinant, est le seul vrai terreau mélodique et rythmique.

Aimer que, chaque fois, elle nous ramène, soudain plus vivants, à l'origine des sons et des larmes.

Prendre le pouls de la mer, c'est prendre le pouls du cosmos et peut-être de la musique des sphères. Faire un retour au plus intense réservoir de sons sacrés du monde.

On le pressent le jour, quand le soleil fait la roue du paon sur la plage, parmi le marmonnement des vagues, et que l'archet des hauts mâts fait vibrer la ligne mate de l'horizon.

Mais on le sent encore plus à la tombée du soir, quand on est au bord de l'eau et des ténèbres de l'être, presque dans le noir, et que l'âme saute à cloche-pied dans le blanc de l'écume pour s'y laver. Alors on entend la sonorité de la mer en son tréfonds.

La mer est l'utopie de toute musique, de toute poésie. Même au sommet extatique d'elles-mêmes, elles n'atteignent jamais, quoi ? — Son flux et son reflux. Sa psalmodie. Sa scansion. Son silence qui tremble entre deux arpèges sourds de l’écume.

La mer pour extrême onction.

Seule la leçon de musique de la mer fait monter les larmes aux yeux des mots.
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Michèle Finck
               Dobre



Extrait 2

Mais soudain    (d’où venu sur cette plage
Isolée ?)    un enfant tout petit
Encore à quatre pattes    s’approche de moi.
Avoir failli    ne pas le voir    à cause de la pile
De mes feuillets    qui jonchent le sable mouillé.
M’apporterait-il quelque chose    dans sa main
Fermée ?    Un caillou ?    Un coquillage ?
Me regarde en silence    et dans un soubresaut soupire
Avec un bruit de mer très doux    dans la gorge.
Tout à coup ouvre    sa minuscule main.    Elle est
Vide.    Mais déjà vient plus près de moi.
Me regarde    et murmure :     « Dobre »     « Dobre ».
Le regarder.    Perplexe.    Murmure encore
Accentuant la première syllabe    comme une note
Tenue :     « Dobre »     « Dobre »,    Brusquement
Larmes    me montent aux yeux.    Serait-ce là le mot
Tant cherché ?    Donné par un petit enfant
Russe    sur cette plage corse sauvage    où il n’y a
Jamais personne.    Peut-être est-ce la seule
Formule ?    Que Dieu existe ou n’existe
Pas    articuler :     « Dobre »     « Dobre » ?    Dire
« Bon »     « Bon »    ne serait pas    le mot
Juste. « Dobre » « Dobre »,    Oui    le mot
Juste     est toujours donné    par l’autre
Dans une autre langue.    Dieu    que tu existes
Ou non :     « Dobre »     « Dobre » ?
Arrive en courant    casque de vélo ou de moto
À la main   écouteurs aux oreilles    une jeune fille
Venue d’ailleurs.    Légère.    Elle tend les mains  
Vers l’enfant    en fredonnant :     « Dobre » « Dobre »
Puis leur duo ailé    s’égrène au large :
« Dobre » « Dobre »     « Dobre ».
Et moi jazzant la vie comme ils me l’apprennent
Syncopant à leur manière    les syllabes rythmées :
« Dobre »           « Dobre »   « Dobre ».
                                    « Dobre »
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