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Critiques de Roberto Saviano (312)
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Piranhas

Roberto Saviano, pour avoir écrit Gomorra et Extra Pure, reportage sur la Camorra napolitaine, vit sous protection policière depuis plusieurs années. Ses livres et les adaptations en film ou télévisées sont régulièrement attaquées. De la non-fiction narrative, Saviano est passé à l'écriture d'un roman de fiction très alimentée par la réalité. 



Dès que j'ai ouvert le livre, j'ai failli le refermer. Le premier chapitre Mange-merde m'a paru difficilement soutenable. Humiliation d'un petit et humiliation diffusée sur les Réseaux Sociaux.



  Dois-je vraiment lire cela?



La limite entre la complaisance, le plaisir de lire des horreurs et la curiosité est vraiment floue. 



Surtout que cela empire par la suite. Dès que ces adolescents, encore des enfants pour certains, se procurent des armes, ils passent très vite au meurtre. Meurtres gratuits tout d'abord, pour s'entraîner pour vérifier  les tutoriels sur lesquels ils apprennent le maniement des armes. Chevauchées infernales sur leurs motos, terreur des passants. On se croirait au cinéma, ou dans un jeu vidéo. Et puis conquête d'un pouvoir, d'un territoire. Luttes avec d'autres bandes. Luttes à mort. 



Aucune perspective si ce n'est la consommation immédiate de biens dérisoires. Une entrée dans une boîte clinquante au Posilippo, du champagne, de la coke...et toujours des armes, des actions d'éclat au goût du sang. 



Suis-je forcée de lire cela?



Et bien, je me suis laissée embarquer jusqu'au final, au meurtre d'un enfant.  Logique, inévitable. Tragédie totale qui mettra peut être le point final à la lecture mais pas à l'engrenage dans lequel les pirhanas sont entraînés. C'est bien écrit! Cela se lit bien. Mais cela me met mal à l'aise. Loin de moi le reproche qu'on a fait à l'auteur de pousser les adolescents à la violence, lire Saviano ne me fera commettre aucun délit mafieux! 



Doit-on censurer ces images insoutenables comme celles de Daech? Faire des procès à ceux qui les regardent? Lien entre  terrorisme et violence des gangs mafieux. Ce n'est pas moi qui le fais, c'est Saviano lui-même. Ces enfants écrivent les louanges des islamistes sur leur mur Facebook, même s'ils sont de bons catholiques qui vont brûler des cierges à la Madone. 





Saviano dédicace ses livres et je fais la queue avec mon exemplaire!

C'est en écoutant Saviano (La Grande Librairie), en lisant ses interviews du Monde, etc... que j'ai compris. Pirhanas est le développement romanesque de faits divers "une histoire incroyable"ayant vraiment eu lieu. Une bande d'enfants d'adolescents de 14 à 19 ans a vraiment pris le pouvoir sur Naples à une époque où les parrains se sont retrouvés en prison et où le territoire était à prendre. Le jeune  chef de bande n'est pas une fiction, même si le personnage est inventé. Pour écrire les dialogues, l'auteur s'est basé sur des écoutes téléphoniques authentiques. 



J'ai eu le privilège d'avoir une invitation dans les salons de Gallimard et d'écouter Saviano. D'après lui, ces enfants sont des "génies criminels" des "enfants prodiges" qui ont su exploiter un vide de pouvoir pour développer le commerce de la drogue. Ce ne sont pas des enfants poussés par la misère, ce sont les enfants d'une petite bourgeoisie dont le pouvoir économique s'effondre. Logique capitaliste ou logique mafieuse? Ils ont compris qu'avec un investissement de 5000€, l'économie de la drogue pouvait les rendre multimillionnaires. Et pour la mise de départ, il faut des armes, des extorsions, des braquages. Mais pour garder le pouvoir, le territoire, il faut maintenir la terreur et la mort.  



La différence entre les enfants-pirhanas et les parrains traditionnels adultes, c'est que les enfants vivent dans l'instant immédiat, No- future. Ils veulent tout et tout de suite. La mort est la suite logique, ils n'en ont pas peur. Comme les terroristes, ils vivent un désir de mort. Ce désir est selon Saviano, le point de contact avec le djihadisme. Le langage de la banlieue selon lui est violent et universel, comme le Rap. 



Encore plus effrayant que je ne le croyais en lisant! 



merci à Babélio et à Gallimard pour le livre et l'invitation!




Lien : http://miriampanigel.blog.le..
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Gomorra : Dans l'empire de la Camorra

Paru en 2006

Ce livre révèle le pouvoir de la Camorra, sa main-mise économique et financière, sa puissance militaire, ses transformations en comités d'affaires.

Saviano a recueilli des témoignages et nous fait entrer dans le monde incroyable,et bouleversant, affairiste et criminel de la Camorra qui, aujourd'hui se nomme le "Système".

Il retrace le cycle de vie des marchandises. Les "fraîches" arrivent au port de Naples dans de gigantesques containers et remplissent les immeubles voisins volontairement gardés vides.

Les autres, les "mortes", arrivent de toute l'Italie et de la moitié de l'Europe sous formes de scories chimiques, de résidus huileux toxiques, de boues qui sont abusivement déversés dans les campagnes où elles empoisonnent tout.



Dans ce livre captivant et scrupuleusement documenté Roberto Saviano a retracé, soit la téméraire logique économico-financière et expansionniste des clans, soit l'imagination débordante qui, aux logiques d'entrepreneurs conjuguent le fatalisme mortuaire des anciens samouraïs japonais.

Au final, un livre hors-norme et puissant, passionné et brutal, à la fois objectif et visionaire, tenant du reportage et de la littérature, plein d'horreurs inquiétantes.

"Ce sont des pages qui prennent le lecteur à la gorge et le traînent dans un abîme où , vraiment, aucune imagination n'est capable d'arriver."

Ce témoignage fait preuve d'un grand courage civil. Qui d'ailleurs l'a contraint à vivre caché et sous protection continue.

C'est un document palpitant de dénonciation et de rage.

Rage qui ne me quitte pas .
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Crie-le ! 30 portraits pour un monde engagé

"Le cri. Il est à l’origine de la vie de l’homme sur Terre.

Le cri du chasseur et celui du guerrier, le cri d’amour et ceux de terreur,

de joie, de douleur, de mort. Les animaux aussi crient

et, pour l’homme primitif, le vent et la terre crient,

le nuage et la mer, l’arbre, la pierre et le fleuve."

Voilà ce qu'écrit Emanuele Severino, le philosophe italien dans son ouvrage - non traduit en français - "Il parricidio mancato"



Cri qui devient le fil conducteur de ce nouveau livre de Roberto Saviano, et quel livre !!!

Un gros coup de cœur en même temps qu'un grosse claque. Vous me direz rien d'étonnant avec cet auteur....



Tout commence avec une carte toute symbolique, en effet au passage il est dommage que dans la version française le choix éditorial ne se soit pas porté sur la représentation physique d'une carte sur laquelle figurent, comme c'est le cas dans la version italienne, chacune des questions comme épinglées sur une planisphère ou les pays ont disparus. Ici les questions sont juste listées, comme une litanie des questions.

Fort heureusement les illustrations, signées Alessandro Baronciani, des personnages qui seront abordées dans cet ouvrage ont été conservées

Des questions sur une carte muette, comme une abolition des frontières, une abolitions des dates, comme une abolition des barrières...



Et c'est bien ce dont va s'affranchir Roberto Saviano au travers de ces questions :

- Et si c'était toi celui qui n'arrive plus à respirer ?

- Toi aussi tu es horrifié de choisir entre le mal et "un moindre mal" ?

- Sais-tu repérer les pièges fait de mots ?

- Sais-tu reconnaître le moment où le poison du mensonge commence à faire effet ?

- Sais-tu que plus on a de mots à sa disposition, plus on est libre ?



Ce ne sont là que quelques-unes des questions que Saviano pose à Roberto, un étudiant de Diaz : chacune d'elles laisse une marque dans l'esprit du lecteur car après tout se Roberto n'est ce pas NOUS ?

Car cet homme qui s'arrête devant l'école qu'il a fréquentée à seize ans et voit sortir le garçon qu'il était, celui qui a encore un avenir à imaginer. L'homme sait que ce garçon est seul et que son chemin ne sera pas facile. Il aimerait pouvoir l'aider, mais il ne peut pas. Cependant, il peut réunir autour de lui des compagnons de voyage pour le guider, pour qu'il se sente moins seul, car nos destins individuels constituent ensemble la seule grande aventure de l'histoire humaine.

Tout ceci plonge au plus profond de l'âme, car on se surprend pendant la lecture, à devenir nous-mêmes, lecteurs, les destinataire de ces question profondes, existentielles, et indubitablement on est poussé à apporter une réponse, à la chercher dans l'histoire du monde et dans notre propre histoire.



Les compagnons de voyage viennent du passé, de l'histoire contemporaine et du présent : elles nous parlent d'Hypatie, de Carl Schmitt, d'Anna Politkovskaja, de Jamal Khashoggi, d'Edward Snowden, de Giordano Bruno, de Robert Capa, d'Anna Achmatova, d'Emile Zola, des Frères Grimm, George Soros, Martin Luther King, Daphne Caruana Galizia, Venus Callipigia, Terry Bollea alias Hulk Hogan, Karina Bolaños, Jean Seberg, Pier Paolo Pasolini, Joseph Goebbels, Kantano Habimana, Settimia Spizzichino, Xu Lizhi, Francesca Saverio Cabrini, Gloria Trevisan et Marco Gottardi, garçons et filles syriens, George Floyd.



Chaque histoire nous fait découvrir des facettes du personnage d'une manière nouvelle, sous une autre approche, sous une forme différente, à travers des détails méconnus de beaucoup, avec une lumière toute à la fois en claire-obscure, si vous me permettez ce néologisme, qui éclaire des messages d'espoir et de force mais aussi un avertissement de ne pas répéter des attitudes, des actions, des paroles qui peuvent tuer, qui peuvent "polluer" l'humanité.



Des réminiscences de son histoire refont surface, quand il évoque sous forme de rêve éveillé :

"Rome, 28 mai 2018. Aujourd’hui, je me suis réveillé à l’aube comme chaque matin. Comme chaque matin, j’ai eu la tentation de sortir et de marcher dans les rues désertes de Rome.

Si je sors à cette heure-ci, me dis-je, personne ne me remarquera. Je peux essayer de respirer librement l’air du matin, le parfum des tilleuls qui commencent tout juste à fleurir. Si je marche d’un bon pas, avant que la lumière du jour ne m’éclaire tout à fait, je peux même espérer atteindre le Campo de’ Fiori avant que mon escorte ne me rattrape. Je veux poser une main sur la statue en bronze de Giordano Bruno, pour de nouveau entendre le crépitement des fagots qui brûlé."



Il est bien vite rattrapé par la réalité de sa protection policière....

Où alors quand il parle de ces listes sur lesquelles il figure avec des références aux juges anti-mafia



" Dans le cas de Carlo Alberto Dalla Chiesa, de Giovanni Falcone et de Paolo Borsellino, c’est ce même fonctionnement qui a prévalu. L’État s’est effacé, silencieusement mais clairement ; ceux qui voulaient leur mort savaient qu’ils pouvaient les viser. Le but des listes est d’isoler le proscrit, de sorte que n’importe qui puisse l’abattre en toute impunité.

Cicéron affirmait qu’être un proscrit était pire qu’être un cadavre. Pour un cadavre, le pire est passé, l’heure a déjà sonné ; mais pour ceux qui figurent sur une liste, l’agonie ne fait que commencer. Et le temps d’attente peut être long. On n’est plus d’un côté mais pas encore de l’autre. Tu n’es pas encore un cadavre, mais tu n’es plus tout à fait vivant non plus ; tu ne peux plus rien faire de ce que font les vivants : tu ne peux pas marcher, tu ne peux pas aller au bord de la mer, tu ne peux pas faire de projets, tu ne peux pas nouer de relations ni espérer te soustraire à la peine. Tu ne peux qu’attendre et jouer aux échecs avec la mort, l’imaginer, la soupeser, la prévoir, sans savoir où et quand elle te tombera dessus. À partir du moment où ton nom apparaît sur une liste, nulle cave, nul couloir, nul porche, nulle crevasse, nulle crypte, nulle forêt, nul tronc creux ne pourra te servir d’abri. Personne ne te donnera asile, personne ne pourra te cacher ni t’offrir une nuit de repos, car même ta mère paierait de sa vie un tel élan."



Roberto Saviano excelle dans ses romans, mais sa plume incisive, tranchante, vive et fait des merveilles dans cet exercice où on ne l'attend pas forcément.

Ce livre est un questionnement permanent, c'est percutant :

" Avant, il arrivait que quelqu’un se demande : comment rendre l’homme heureux ? Aujourd’hui, on ne se pose qu’une seule et même question : comment l’adapter à la productivité du marché mondial ? Puisque nous sommes devenus nous aussi des produits à vendre, que chacun est l’acheteur du temps et des droits d’autrui, nous obéissons tous à ce mécanisme infernal : enfants, jeunes, personnes âgées, pauvres, riches, hommes, femmes, malades ou bien portants, du Nord ou du Sud. Produire, attraper, courir, consommer et détruire. C’est le fouet qui nous frappe tous indistinctement, et on n’a pas le temps de comprendre où la machine se grippe, où notre geste prive de place celui de l’autre et dans quel coin reculé de la planète on joue avec notre vie. Nous avançons les yeux bandés vers un abîme profond, sans jamais voir où notre monde se crée."



C'est un livre à lire et à relire histoire par histoire, chapitre par chapitre, avec attention car la parole et le savoir sont les seules armes qui nous restent.



En parlant de livres on ne peut s'empêcher de penser aux siens quand il écrit :

" Puis, tu comprends que le pouvoir se méfie de ceux qui écrivent, car au fond il se méfie de ceux qui lisent. En eux-mêmes, ceux qui écrivent ne sont pas dangereux, car si personne ne les lit ils ont simplement perdu leur temps. Le problème, ce sont les lecteurs. Ceux qui ont du mal à lire se contentent de slogans, de phrases toutes faites, d’icônes et de symboles. Le lecteur est un chercheur solitaire, mais celui qui cherche creuse et, à force de creuser, tôt ou tard il trouve.

Ce n’est pas le livre qui manipule le lecteur, souviens-t’en, c’est le lecteur qui manipule le livre. Le livre est un instrument que le lecteur utilise pour s’exprimer, sortir du rang, penser et exister. Bien sûr, j’ai écrit ces pages, mais elles n’ont de substance que si elles vont chercher ce qui était tout au fond, ce que tu gardes en toi et qu’ensemble nous sommes en train de faire sortir. D’une certaine manière, je suis celui qui écrit tes mots. Ça ne vaut pas pour tous les lecteurs ni bien sûr pour tous les écrivains. Certes, il y a l’écriture de divertissement, celle qui t’entraîne dans une sorte de fête. Est-elle moins importante ? Absolument pas. Mais elle est beaucoup moins risquée. Elle est acceptée sous toutes les latitudes et à toutes les époques. Amuse ! Récite des poèmes inoffensifs !"



Le final est un "poème compilation", qui rassemble toutes les raisons de crier, une série de commandements profanes, générés à la fin de chaque histoire. Chacun de ces cris étant un leg que Roberto, devenu un homme adulte, laisse à Roberto garçon, lycéen, pour qu'il ne succombe pas au sentiment de vide qu'il ressentira inévitablement face à la laideur, l'injustice, l'indifférence , la violence, mais qu'il peut combler de savoir et par le savoir.



"Écoute-moi : le vide que tu sens en toi, remplis-le de savoir. Car le savoir fournit toujours un chemin préférable à celui que la colère creuse dans ton ventre : un gouffre qui, tôt ou tard, t’avale, après t’avoir mastiqué.

« À beaucoup de savoir, beaucoup de douleur », affirme l’Ecclésiaste. Moi, je te dis ceci : plus on a de connaissances, plus on a d’outils pour comprendre la douleur. C’est à cela que servent les histoires que je t’ai racontées : à augmenter tes dioptries afin que tu comprennes mieux la douleur et que tu ne restes pas immobile. Je sais que l’effet immédiat d’une telle lecture est difficile. On se pose des questions. Quel intérêt y a-t-il à se battre dans un monde aussi tordu ?

Mais, tu vois, savoir d’où vient l’injustice nous aide à comprendre. Et la compréhension augmente la résistance de nos boucliers, elle augmente notre masse musculaire, elle nous donne une autre trempe, ajoute du mortier dans les failles de notre mur protecteur ; elle nous indique la direction, nous rend plus rusés, nous fait deviner le danger, le piège : voir l’injustice stimule notre capacité de survie."





Un livre coup de poing ;

Un livre dur mais nécessaire ;

Un livre comme un acte de courage, de défense, d'attention ;

Un livre comme un acte de rébellion contre une époque qui veut tout faire pour nous habituer à la pensée unique ;

Un livre qui entre en résonance avec l'Histoire actuelle, qu'elle soit italienne ou mondiale ;

Bref un livre de Saviano



Et comme une réponse à l'auteur MERCI, de nous avoir donné ce livre, de nous avoir donné ces mots. Vos mots.

Les mots de quelqu’un qui a compris que le bonheur est collectif ou n’est pas, que le bien-être est collectif ou n’est pas, que la liberté appartient à tout le monde ou à personne



En guise de conclusion, comme une voix sortie de l'Histoire, comme une voix issue de l'Italie, comme une voix de retour du Moyen-Âge, comme une voix à méditer :



Hélas ! ne gardez plus le silence, et criez comme si vous aviez mille voix.

C’est le silence qui perd le monde

(Sainte Catherine de Sienne - Lettre LXXXIV (38). — À UN GRAND PRÉLAT- Œuvres complètes - les Belles Lettres)
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Baiser féroce

Roberto Saviano nous livre la suite de Piranhas, son 1er roman. Nous continuons à suivre Nicolas et sa bande, sa paranza pour la conquête du trône de Forcella, quartier du centre de Naples.



Nicolas et sa paranza ont pris du galon depuis leurs débuts, ils ont fait du chemin, ont acquis une certaine notoriété à Forcella et au-delà. Mais aussi et avant tout du respect. Mais pas suffisamment. Ce sont des meurts-de-faim, des crèves-la-dalle ils en veulent plus, toujours plus, beaucoup plus.



Dans Baiser féroce, on comprend et on s'imprègne encore plus de cette mentalité d'un jeune leader napolitain prêt à tout pour atteindre le sommet. Les rouages d'une société qui ne croit plus en son gouvernement, se sentant abandonné des politiques et où seul le crime paie. L'omerta toujours, mais aussi l'approbation familiale dans certains cas, jusqu'à pénétrer des milieux légaux comme la banque et même approcher le clergé, l'argent est le nerf de la guerre et régit la vie quotidienne ! Mais n'oublions pas que certains subissent, que seul leur instinct de survie leur dicte cette conduite dont ils ne sont pas toujours fiers, la peur à cet effet. Et les politiques encore une fois ne comprennent ou ne veulent pas comprendre ce qu'il se passe réellement dans cette ville, qui devient de plus en plus touristique grâce aux vols low-cost. La violence va monter crescendo jusqu'à atteindre un point de non-retour.
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Je suis toujours vivant

Je suis toujours vivant, c’est l’histoire de la vie au quotidien de Roberto Saviano, l’auteur de Gomorra.

Je ne connaissais pas ce livre, cette enquête menée sur la mafia napolitaine et paru en 2006. Pourtant, ce fut un grand succès de librairie à sa sortie, mais, au-delà de la qualité de ce travail, il faut savoir qu’il a condamné son auteur. Plus exactement, ce livre l’amena à être « condamné à mort » par la Camorra et le conduisit à être placé sous protection policière.



Avec son dessin haut en couleurs et percutant, Asaf Hanuka met en images quinze années de la vie de cet homme coupé du monde, de la vie ; en danger constant parce qu’il a osé mettre par écrit ce qu’il ne fallait pas écrire.

Oui, Roberto Saviano est toujours vivant mais à quel prix ! Plus de vie privée, plus de lieu de vie...une longue errance organisée afin de le protéger. Et il lui faut de plus une sacrée carapace pour ne pas être atteint psychologiquement par les insultes, les menaces ; pour ne pas sombrer dans la dépression, la paranoïa, la folie.



Il y a là le récit d’un dilemme insoluble : Roberto ne veut pas qu’on l’oublie, que ses mots soient perdus, et pourtant c’est là se condamner à cette non-vie. Faut-il se soumettre pour regagner un peu de liberté ou conserver son esprit d’indépendance et de révolte quitte à perdre tout le reste ?

La question reste posée.
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Piranhas

J'ai une pal gigantesque... Toutefois, j'aime me laisser tenter par des livres qui ne passent pas par la case pal et que je lis directement. Je les appelle mes livres "coupe file". Celui-ci est l'un d'eux. Je l'ai attrapé sur la table de ma biblio et lu directement sans pourtant en avoir entendu parler. Pourquoi ce coup de foudre ?

Parce que je ne connais rien à la littérature italienne contemporaine et que cela fait un moment que je veux combler cette lacune. Et pourquoi pas commencer avec un auteur dont j'ai entendu parler à travers la série Gomorra (toujours pas vue d'ailleurs) et dont je sais qu'il vit sous protection pour avoir dénoncé les agissements de la mafia.

Parce que la collection Du monde entier de Gallimard est superbe et qu'elle me fait très souvent craquer

Parce que le pitch lu en quatrième de couv, évoquant ce baby gang m'a attrapée de suite.



Et le coup de foudre a été tellement au rendez-vous que je vais lire très vite la suite Baiser féroce.



Piranhas est un roman saisissant porté par un souffle dévastateur et un rythme trépidant. Nicolas Fiorillo, 16 ans, aime se faire appeler Maharaja (surnom inspiré du club huppé où il rêve d'avoir SA table). Depuis le quartier de Forcella, il sillonne Naples sur son scooter entouré de sa bande, sa paranza, composée de petits piranhas à son image, dont le plus petit a 10 ans (!!!). Il n'a peur de rien si ce n'est de vivre la petite existence étriquée de ses parents, professeur de sport et blanchisseuse. Il n'a ni scrupules ni sensibilité. Ce qu'il veut c'est vivre grand pied, vite et à n'importe quel prix. C'est le respect aussi, à commencer par celui de ses amis. Et les parrains étant pour beaucoup en prison, il y a une place à prendre et un territoire à conquérir. Pour cela, peu importe les moyens et il est prêt à tout, même à se frotter aux criminels endurcis de la Comorra, même à tuer (avec une immense facilité), même à faire du mal à ses amis. Nicolas est machiavélique (son prénom est tout sauf un hasard) et il a un aplomb monstrueux !



La grande réussite de ce livre est de réussir un portrait aussi saisissant qu'effrayant de Nicolas, chef incontesté et incontestable de sa paranza. C'est un ado comme les autres par bien des côtés : il est jaloux, se dispute et se réconcilie avec sa petite amie, joue de longues heures aux jeux vidéo, traîne avec ses potes, va au lycée, vit chez ses parents, poste des photos sur les réseaux sociaux et adore faire la fête. Et en même temps, il est prêt à tout - au sens propre - et commence à tuer avec une immense facilité, avec un total détachement, sans aucune rupture entre ses deux vies - la scène où avec sa bande il apprend à tirer grâce à un tuto sur Youtube est hallucinante. Il continue à faire des sms à sa petite amie, à blaguer avec ses potes. Son absence complète d'humanité force le respect de sa paranza.



Piranhas m'a captivée et terrifiée à la fois... il est formidablement juste et crédible. Et l'écriture est aussi enfiévrée que les héros (bravo au traducteur Vincent Raynaud pour avoir traduit cette fièvre et cette fureur en français). Des mots qui claquent, une virtuosité et une intensité constantes. Bref une lecture explosive coup de coeur et coup de poing comme je les aime.

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Piranhas

C'est une bande d'ados, ils n'ont pas plus de 16 ans … avec une famille avec des pères et des mères qui travaillent. Ils sont napolitains et biberonnés aux jeux vidéo et à leurs consoles : Assassins'Creed, Call of Duty, Breaking Bad, et vont – occasionnellement – au lycée.



Parmi eux, un ange blond : Nicolas, dit Maharadja. Car tous arborent un surnom … qui leur restera toute leur vie. Sauf que ces jeunes vivent dans un chaudron où la violence camorriste quotidienne fait partie du décor, de la tradition, suinte des murs. A deux sur leurs deux-roues pourraves, ils enfilent les ruelles en sens interdit, fondent sur les places de deal, rêvent d'égaler leurs aînés dont la plupart sont bouclés dans les prisons alentour comme à Poggioreale, l'enfer sur terre.



Depuis qu'il a dénoncé dans « Gomorra » les crimes de la Mafia, Roberto Saviano vit sous protection policière mais continue à décrire ce monde cruel, où l'on commence à entrer dès la sortie de l'enfance et parfois même avant.



La trajectoire de Nicolas, c'est la chronique d'une résistible ascension dans le cursus honorum du crime. Sous la fallacieuse tradition de la fraternité et de l'appartenance, de la soumission et de l'humiliation, de la punition et de la trahison, de la vengeance. Cet engrenage fatal va le conduire, parce qu'il est dans doute plus intelligent que ses copains et qu'il dégage un évidence charisme, à créer son gang personnel, sa paranza, la paranza des gamins, et à tailler des croupières aux caïds vieillissants de la drogue. Car personne ne se méfie de gamins, tout juste bons à s'entraîner à tirer dans les paraboles au-dessus des toits … dans un premier temps.



Comme son jeune héros, Roberto Saviano « est doué ». Il a « une façon bien à lui de voir les choses et de les exprimer, il sait capter les bruits du monde et trouver une langue pour les raconter », comme le dit le professeur de Nicolas. Les paroles peuvent tuer, comme les textos ou les photos sur les portables et aussi les regards : soit vides pires que l'insulte et la rébellion, soit le regard comme un territoire : regarder quelqu'un, c'est comme entrer lui par effraction, l'envahir … Il n'en faut pas plus pour déclencher la pire des humiliation pour le vengeur, voire le meurtre. Une sorte d'obligation si l'on veut rester crédible, s'imposer comme chef …



A Naples, on ne grandit pas, on naît dans la réalité et on la découvre peu à peu. Et, comme dans la série télévisée qui ne manquera pas d'être tournée d'après ce récit initiatique, après les épreuves et les rites de passage, avec en filigrane la transformation progressive de la personnalité du héros, sa découverte de son nouveau pouvoir et de nouveaux plaisirs, ainsi que ses pires souffrances. Terrifiant.
Lien : http://www.bigmammy.fr/archi..
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Extra pure

Un livre très ardu à livre. Pour ma part une deuxième lecture s'imposera car je n'ai retenu que les grandes lignes tant les détails sont pointus. Le titre du livre donne le ton, il n'y a pas de surprise en cours de lecture. D'ailleurs, comme le titre, tous les mots sont choisis pour être le plus exact et retranscrire cette enquête de titan.



Les personnages sont si nombreux qu'ils est impossible de retenir tous leurs noms et leur "profession". Aux patronymes sont ajoutés leurs surnoms ce qui demande un effort de concentration très élevé. A ces noms, il faut ajouter les noms des cartels et des pays correspondants ou des sections des polices et de leur pays d'origine. Une bonne mémoire s'impose.



Le mécanisme du blanchiment demande aussi de la concentration car de nombreuses banques sont cités. Toutefois, je trouve qu'il manque un peu de précision quant au processus lui-même. Je ne comprends pas pour l'auteur ne lui a pas réservé un peu plus d'approfondissement.



Les différents trajets de transit de la cocaïne sont également nombreux et il n'est pas évident de se rappeler quel moyen de transport et quel parcours privilégient les différents cartels.



Une enquête (ou quête) sur des années pour éclairer et sensibiliser la population mondiale au fléau de la cocaïne, drogue "à la mode" qui amène effectivement le lecteur à voir certaines choses différemment à propos de l'instabilité financière que nous subissons. Un travail colossal mené par Roverto Saviano qui aboutit sur un livre accessible à tous. La tournure des phrases et la complexité des noms appellent une attention de la part du lecteur qui le fait adhérer à la démarche de l'auteur. Ceci est réussite littéraire au-delà du travail d'investigation effectué.









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Je suis toujours vivant

Une très belle bande dessinée qui raconte la vie, ou plutôt la survie de Roberto Saviano enfermé malgré lui dans une protection policière, caché et éloigné de ses proches pour échapper aux mafieux de Naples qui l'ont condamné à mort depuis 15ans. Relire Gomorra, jamais dépassé!

C'est un cri de révolte, un pied de nez pour les commanditaires des tueurs, de s'affirmer toujours vivant avec une plume qui ne se taira pas.

Le dessinateur a su choisir les détails de sa vie avec le souci de faire connaître la solitude de l'auteur, ses frustrations et souffrances qui

l'éloignent de tous. Il a payé très cher sa liberté de dénoncer le crime organisé.

Un beau dessin épuré et des couleurs vives qui émergent avec force rendent l'oeuvre très éclatante et donne envie de voir d'autres ouvrages de Asaf Hanuka. Un album utile pour garder les yeux ouverts.

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Je suis toujours vivant

-Vous avez lu Gomorra, ou pas. Vous avez entendu parler de la camorra, ou pas. Cette bande dessinée, autobiographie de Roberto Saviano met en images simples, épurées, les éléments essentiels de la vie de celui qui a parlé dans un roman au retentissement planétaire du système mafieux dont il était témoin depuis l'âge de 12 ans. Il raconte la protection rapprochée dont il est l'objet, la solitude et l'envie de retrouver la naïveté et le plaisir d'une partie de Subbutteo avec son frère.
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Extra pure

Je ne sais pas pourquoi j'ai sélectionné ce livre dans le cadre d'une masse critique. Dans tous les cas, merci aux organisateurs et à Babelio. Mais j'ai trouvé cette lecture indigeste, fastidieuse, d'autant plus que le livre de poche fait 530 pages. Autant dire que, sans mauvais jeu de mots, j'ai frôlé l'overdose. Et comme on a un temps imparti pour en faire la critique, je l'ai lu en continu. Or, je pense que c'est un livre qui mérite une lecture fractionnée.



Extra pure, pas besoin d'être un génie pour savoir que l'on va parler de drogue, plus particulièrement de cocaïne. L'auteur a enquêté sur ce trafic, de sa fabrication jusqu'à sa livraison. C'est vraiment complet, exhaustif. Il nous amène au Mexique, au Guatemala, en Colombie, en Europe, en Afrique, à la rencontre des cartels, celui de Sinaloa, de Juarez, du Golfe, de Medellin, de Cali pour n'en citer que quelques-uns, puis des personnages peu recommandables comme El Chapo, Osiel, El Lazca et tant d'autres, tous plus manipulateurs, violents, cruels, abjects les uns que les autres. Il y a une surenchère constante dans l'atrocité, une cruauté sans limite, une imagination sans fin dans les tortures infligées avant de donner la mort. Il aborde également l'impact économique de ce trafic qui est considérable, le fonctionnement des organisations mafieuses et ses ramifications dans le monde judiciaire, politique, militaire. C'est une gigantesque pieuvre.



Ce livre est intéressant, mais j'ai été noyée par trop d'informations, trop de noms, trop de chiffres. On a l'impression d'une énumération de faits, de personnages, de cartels, sans fin et ça a fini par me fatiguer. A mon avis, c'est un livre qu'il faut lire par doses homéopathiques, le poser et le reprendre quelques jours plus tard, le temps de digérer les événements que l'auteur porte à notre connaissance et également toute cette violence dont il nous fait part, omniprésente dans ce monde impitoyable des narcotrafiquants. Bravo à Roberto Saviano, son travail d'enquête, de recherche, de documentation, de compilation est impeccable. Il ne manque pas de courage. Maintenant, on a tout de même l'impression d'avoir affaire à une guerre sans fin, une lutte éternelle.



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Gomorra : Dans l'empire de la Camorra

A lire pour savoir tout ce qui se cache derrière la belle façade de notre modernité et du "Système" qui produit le profit pour ceux qui ne reculent devant rien pour obtenir l'argent et le pouvoir. Je pensais que la mafia s'occupait de la drogue surtout , mais ce sont des pans entiers de l'économie qui lui appartiennent et pas qu'en Italie. Le respect de la vie humaine n'est pas une valeur si partagée que cela et le crime est un moyen de parvenir au but.

Avoir tout et tout de suite est la philosophie du mafieux , cela explique aussi notre difficulté à comprendre et éduquer notre jeunesse perdue.

J'admire le courage exceptionnel de l'auteur qui a su enquêter pour nous offrir au prix de sa vie même puisqu'il est sous le coup d'une menace de mort un dossier complet des méfaits de la camorra.

Venu à Nancy récemment pour présenter son nouveau livre Piranha que je lirai plus tard , le temps de me remettre.

Lecture éprouvante, essentielle pour garder nos yeux ouverts.
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Extra pure

Roberto Saviano, l'auteur de Gomorra, vit sous protection policière depuis plus de huit ans. À la fin d' Extra pure, il note : « Merci à Salman Rushdie qui m'a appris à être libre même entouré de sept hommes armés. » Enfin, ces pages très émouvantes de remerciements se terminent ainsi : « Merci à ma famille qui paie par ma faute un prix exorbitant. Malgré tous les remerciements du monde, je ne pourrai jamais me faire pardonner et je le sais. »

Ces remerciements de l'auteur sont le reflet des risques pris et des souffrances endurées : « J'ai observé l'abîme et je suis devenu un monstre… Fouiller. Déchirer. S'enfoncer… Les parrains, les massacres, les procès. Les tueries, les tortures, les cartels. Les dividendes, les actions, les banques. Les trahisons, les soupçons, les délations. La cocaïne… La vie qui m'est échue est une vie de fuyard, de coureur d'histoires, de multiplicateur de récits. Une vie sous protection, une existence de saint et d'hérétique… »

Fruit d'un énorme travail de recherche et d'enquête très poussées, "Extra pure" commence par un constat d'une lucidité effroyable : « La coke, quelqu'un autour de toi en prend… » Suit une énumération qui n'oublie personne et balaie toutes les professions, jusqu'aux plus prestigieuses.

Après, il faut suivre l'auteur dans ses recherches, ses récits foisonnant de noms, de lieux, d'histoires terribles, sanglantes où un seul dieu règne en maître : l'argent. Il n'élude aucune responsabilité comme celle des USA ordonnant aux gomeros, paysans d'Amérique centrale, de cultiver à nouveau le pavot parce que ce pays avait besoin de morphine pour la guerre. le Mexique a dû fournir plus d'opium et, peu à peu, se sont mis en place les cartels, groupes gérant la production de cocaïne, encaissant les profits, contrôlant prix et distribution. Les saisies policières donnent une idée bien faible par rapport à la réalité. le Mexique est à l'origine de tout mais, comme une gangrène, la coke a contaminé le monde entier et Roberto Saviano en décortique les filières, « cette folie meurtrière sans limites vers laquelle le trafic de drogue a poussé le Mexique aujourd'hui. »

La cocaïne rapporte cent fois plus que les meilleures actions en bourse avec « un océan d'esclaves interchangeables qui perpétuent un système d'exploitation dont seuls quelques-uns profitent… L'économie de la coke croît sans limites et se glisse partout. » L'auteur n'oublie pas le blanchiment de l'argent : « Aujourd'hui, New York (Wall street) et Londres (la City) sont les deux plus grandes blanchisseries d'argent du monde. »

Enfin, il y a le continent africain : « L'Afrique est au Mexique ce qu'un hypermarché est à un grossiste de denrées alimentaires. La cocaïne est comme l'une des épidémies qui se sont répandues sur tout le continent africain à une vitesse effrayante. »

Roberto Saviano rappelle le souvenir de Christian Poveda, abattu par les maras, gangs de rue les plus dangereux du monde, après avoir tourné son fameux documentaire La vida loca. « Raconter, c'est mourir » mais devant l'ampleur du désastre, il débat du problème de la légalisation et se dit favorable à cela afin de casser la spéculation, la loi de l'offre et de la demande.

"Extra pure" est une livre dont on ne sort pas indemne mais Roberto Saviano note : « du respect pour ceux qui lisent… Connaître, c'est commencer à changer. »
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Gomorra : Dans l'empire de la Camorra

L'un des livres essentiels qu'il faut avoir lu . Pourquoi ? En premier lieu parcequ'il est écrit par un homme qui n'a pas hésité à mettre sa vie en péril pour faire obstacle à la mafia. Saviano n' a plus de vie depuis la publication de ce livre qui s'advére le plus terrifiant réquisitoire , pamphlet contre la mafia. Quand l'on sait que ce livre est tiré d'éléments réels , on ne peut qu'avoir peur . Tout ceux qui glorifient la mafia devraient lire ces pages terrifiantes qui sont le reflet d'une réalité abominable . Oui cet ouvrage est capital pour mieux comprendre une partie des problémes de la socièté . Inestimable .
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Le contraire de la mort

Roberto Saviano revient après le phénoménal succès de "Gomorra" (à quel prix !) avec ce livre de deux nouvelles qui se déroule à Naples et ses environs.

«Le Contraire de la mort», raconte l'amour de Maria pour son fiancé Gaetano mort en Afghanistan. «La Bague», nous dresse le portrait de Giuseppe et Vincenzo, assassinés sauvagement pour avoir refusé de travailler pour la Gomorra. Un homme va se révéler incapable de raconter ce drame à une femme venue enquêter. Saviano nous parle d' amour, de mort, de violence, de mémoire. Il le fait de façon très réaliste, la peur est là présente dans chacun des protagonistes, comme si le mal triomphe toujours du bien, comme si la mafia est une fatalité. Menacé de mort par la Gomorra , on ne peut que saluer ce courage d'écrire sur un sujet aussi sensible en Italie. Cela m'a donné envie de

lire Gomorra.

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Gomorra : Dans l'empire de la Camorra

C'est Pierre Desproges qui disait :

Il y a deux sortes d'Italiens : les Italiens du nord qui vivent au nord et les Italiens du sud qui meurent au sud.



Gomorra, c'est l'anti-Sopranos, le contrepied du Parrain, de Scarface et des Affranchis. Il n'y a ni honneur ni morale dans cette mafia. C'est au contraire la guerre perpétuelle entre des arrivistes qui se sautent à la gorge au moindre signe de faiblesse. Des gens que la misère pousse à bout, y compris à nier la valeur d'une vie humaine. Des petits caïds qui rêvent de tutoyer des mannequins, des adolescents avec pour seul horizon la came, le braquage et la prison. Pas d'échappatoire, ou si peu.



Roberto Saviano décrit un système poussé dans ses derniers retranchements. La camorra, c'est la libre entreprise extrême, le libéralisme le plus sauvage qui soit. Les fusions/acquisitions se font à coup d'AK47 dans les rues de Naples. Les parrains ne sont ni plus ni moins que des entrepreneurs qui délocalisent en Chine et appliquent toutes la logique néolibérale pour rogner sur les frais et augmenter les bénéfices. Les petits soldats sont payés à coup de lance-pierre, transportant des montagnes de dope pour des salaires de misère, quand ils sont payés. Et pour conquérir de nouveaux marchés, il faut les arracher aux mains des concurrents qui lorgnent depuis toujours sur le voisin dans l'espoir de voir une ouverture dans la défense adverse.



Cette Naples là, c'est le tiers-monde au cœur de l'Europe, une vaste machine à broyer les enfants pour en faire des hommes qui accepteront tous les sacrifices pour rêver de quelques miettes de pouvoir. Ce sont aussi des jeunes filles condamnées à épouser des mafieux pour ne pas à avoir à travailler au noir dans des usines sordides, en s'usant les mains sur des machines à coudre qui tissent la soi-disante mode italienne à grande rafale de misère. Tout passe par Naples, le port des trafics : drogue, tissus, contrefaçons, technologies, armement, main d'oeuvre... C'est le point névralgique de l'économie européenne, celle dont on nie l'existence quand on parle de CAC40 et de croissance.



C'est vrai que c'est loin, Naples. C'est presque une autre planète. Mais les intérêts de la camorra s'éparpillent de partout dans le monde. En bon investisseurs, plus fortiches que des gestionnaires de fonds de pension, les camorristes mondialisent comme des bêtes. Ils étaient déjà là quand l'URSS s'est effondré pour se tailler la part du lion dans l'arsenal militaire qui se bradait. Ils sont présents en Chine. Les grandes villes du monde ont des magasins chics qui vendent du luxe pour une poignée de parrains qui vendent de l'image de marque fabriquée par des sans-papiers. Un atavisme étrange qui poursuit les italiens même à l'étranger : la petite Italie de Montréal n'échappe pas à sa tradition, avec son clan sicilien, ses neufs cafés incendiés en un mois, le financement occulte des parties politiques par des entreprises de construction...



Dans une Italie berlusconienne, dénoncer la mafia semble aussi utile que de pisser dans un violon. Et pourtant, Roberto Saviano monte au barricade en racontant la camorra qui pollue son coin de pays. Avec le fantôme du juge Falcone en arrière-plan, on sait que ça risque de mal se terminer pour ce journaliste qui dissèque cette gangrène. Il doit se cacher, composer avec des gardes du corps, comme s'il vivait dans la Russie de Poutine. Des compatriotes comme Umberto Eco ont beau le soutenir, c'est le pot de fer contre le pot de terre. Parce que c'est enraciné dans les mentalités, c'est devenu un état de fait qu'on tolère d'autant plus facilement que l'on est pas éclaboussé par cette merde.



Elle est insupportable, cette indifférence morne face au meurtre. Pour une fois, c'est pas la faute aux jeux vidéos, ni celle du black metal. Non, c'est une nation qui a baissé les bras, de guerre lasse. Le monstre a gagné.



En plus du livre, Gomorra c'est également un film qui fait penser à la misère de La Cité de Dieu, la samba et Everybody was kung-fu fighting en moins. L'accent change, le bidon-ville est remplacé par du béton pourri, mais derrière ça c'est la même jeunesse qui se fourvoie dans le crime et la violence et qui bazarde son avenir, faute de mieux. Et comble de l'ironie, certains acteurs du film ont été arrêtés parce qu'ils étaient membres de la camorra. C'est comme si James Gandolfini travaillait réellement pour la mafia du New Jersey.



Si je fais des grandes phrases et que je semble découvrir tout à coup la dureté de la vie, c'est qu'une partie de mon patrimoine génétique vient de ce pays. Pas de Naples, non, plutôt du nord. Des bribes de souvenirs familiales, je crois me souvenir que la famille possède une usine de parpaings. Ouais, ça tutoie le monde de Gomorra, quelque part. En lisant le livre de Roberto Saviano, je me dis que si la Mama n'avait pas traversé les Alpes quand Benito faisait des siennes, qui sait quelle vie m'aurait tendu les bras...
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Je suis toujours vivant

Saviano raconte dans son autobiographie, comment sa vie a changé depuis la publication de son best-seller, Gomorra, et met en lumière toutes les critiques et tous les dangers auxquels il a été confronté au fil des ans, des commentaires menaçants en ligne aux menaces de mort constantes, des relations endommagées avec ses amis et sa famille à une "alerte à la bombe" lors d'une séance de dédicaces. Depuis 2006, l'auteur, est contraint à un quotidien blindé, sans pouvoir se séparer d'une escorte permanente d'hommes armés, au risque de se faire tuer.

Le récit est accompagné de diverses interviews que Saviano a données au fil des ans, un procédé littéraire par lequel il raconte les cauchemars qui l'ont assailli, mais aussi le sentiment de liberté qu'il a éprouvé à New York, lorsqu'il a enfin pu se déplacer librement.  Il y a aussi l'emprisonnement réel qu'il doit subir et les fakes news qui annoncent sa mort, sans négliger la controverse politique de ces dernières années, lorsqu'un ministre italien a tenté de l'intimider en menaçant de lui retirer sa protection s'il continuait à mettre en lumière les erreurs et les horreurs de son mandat. 

Côté graphique, je découvre un style élégant et précis qui accompagne les angoisses du récit de Saviano, je remarque surtout l'utilisation créative de la couleur, avec un choix chromatique différent pour chaque chapitre, pour souligner les états d'âme vécus par le protagoniste.

Une histoire en bande dessinée que j'ai appréciée , même si je n'ai pas accroché tout à fait au personnage de Roberto qui reste assez froid et qu'il me manquait certains éléments pour comprendre toute l'histoire. Le plus important, reste le cri de liberté qu'il souhaite faire pousser à travers son récit! 
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Piranhas

« Piranhas », fiction se passant à Naples, est le premier tome d’un diptyque. Fictif, vous avez dit ? Pas si sûr que cela. Car même s’il est précisé au début de la lecture que c’est de la fiction, on a vraiment l’impression de lire une étude de terrain.



Nous faisons la connaissance de Nicolas, 14 ans, qui va devenir le leader d’un baby gang, ces gangs mafieux d’adolescents avides de pouvoir et d’argent. Nicolas souhaite régner sur Naples et il va tout faire pour y arriver. Nous suivons son ascension, son « apprentissage ».



Les « parrains » de la mafia tels que nous les connaissons sont en passe de devenir has been, car cette nouvelle génération est bien plus efficace, elle veut tout, tout de suite. Ils vivent à 200 à l’heure et n’ont pas peur de mourir jeunes, bien au contraire ! Et ils utilisent les réseaux et internet, comme tous les ados. Sauf qu’ils regardent youtube pour apprendre à se servir d’armes à feu, non pas pour regarder la vidéo de leur star préférée. C’est glaçant !



Le pire dans tout ça, c’est que je me suis attachée à ces gamins. Ils ont choisis la mauvaise route, ont fait les mauvais choix. Mais ils restent des enfants. Sans avenir. Ils se détruisent petit à petit, ruinent leurs parents également. Ils sont tellement insouciants dans le fond, ils ont leurs propres valeurs et y croient dur comme fer.



L’écriture est d’une redoutable efficacité, sans aucun filtre, soucieuse de nous relater l’impensable. Je me suis prise à imaginer mes enfants dans ce milieu, avec un fusil dans les mains, à vendre de la drogue et à se jouer de la vie. Et j’ai imaginé Nicolas et ses copains vivant normalement, jouant au foot après l’école et postant des photos de leurs vacances sur facebook. La limite est ténue. La qualité du terreau sur lequel pousse nos enfants est primordial. Car cela peut déraper très très vite…



Ce livre m’a bouleversée. Il met le lecteur face à cette réalité de la vie que nous ignorions jusqu’alors. Je vais me laisser le temps de digérer tout cela avant de lire la suite. C’est impératif. Parce que c’est trop fort.
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Piranhas

Nicolas est un bel adolescent, il grandit dans une cité napolitaine avec son petit frère et ses parents. Il a une petite amie et des copains. Cela ne lui suffit pas. Il aime la violence, observer son effet sur les autres, commander et gagner de l'argent pour être puissant. Il apprend en assistant aux procès des mafieux locaux et en visionnant en boucle des films sur la mafia.

Cette petite frappe est sans limites, jouant sans cesse avec sa vie et celle de ses associés mais la rage de gagner lui apporte l'énergie nécessaire pour accepter sa peur et progresser dans cette société parallèle. Il est pressé de réussir, son immense détermination écrase toute velleité de discussion.

Ce roman glaçant peut se révéler dur à lire car les dialogues sont parfois étranges. Des stratégies tordues sont mises en œuvre pour réitérer des allégeances. Ce monde obscur est mis en lumière par Saviano avec beaucoup d'efficacité. Et pourtant, je n'ai pas eu de plaisir à lire ce roman, sachant qu'un article à ce sujet m'aurait amplement suffit, car la violence est dure à lire, surtout quand elle est perpétrée par des enfants sans histoire.
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Piranhas

Nicolas et sa bande, sa paranza, sont une bande de gamins de 10 à 18 ans qui n’aspirent qu’à une chose : être les rois de Forcella, quartier napolitain, leur quartier. Mais aussi les boss de Naples. L’ambition ne manque pas surtout pour Nicolas qui s’est autoproclamé chef de la bande. Pour atteindre son objectif la paranza doit se former et exister aux yeux de tous par tous les moyens nécessaires et être reconnue comme telle.



Pour son 1er roman Roberto Saviano nous raconte, mais toujours inspiré d’une réalité, comment une bande de gamins qui pour la plupart ne sont pas issus de clans camorristes veulent prendre le pouvoir des nombreuses ruelles de cette ville bouillonnante du pied du Vésuve. Leurs maîtres sont Youtube, PornHub ou GTA, leurs idoles sont les acteurs des films de mafia ou des membres de la Camorra.



Avec Piranhas, dans un style direct et incisif, Roberto Saviano nous embarque dans une mer déchainée : elle est verte d’espoir et de colère, rouge de sang, bleu de pouvoir et noire de deuils.



La fin est un peu directe et brutale mais au fond représente très bien le roman et une partie minoritaire mais réelle de cette jeunesse napolitaine en quête de pouvoir et d’argent, quel qu’en soit le prix à payer.
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