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Maurane Mazars (Autre)
EAN : 9782368465844
120 pages
Steinkis Editions (16/02/2023)
3.4/5   24 notes
Résumé :
Paris, 1937. Jean Cocteau, artiste génial, connu et reconnu, fait la rencontre d’un jeune aspirant comédien, Jean Marais. Souvent réduite, avec un brin de condescendance, à une relation de pygmalion et de muse, la relation des deux hommes s’avère bien plus profonde. Face à la guerre qui menace puis éclate, Cocteau refuse « de se laisser distraire à aucun prix des choses sérieuses par la frivolité dramatique de la guerre ». Ce n’est alors pas l’intellectuel privilégi... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (7) Voir plus Ajouter une critique
Lutter, c'est vivre ; risquer, c'est vivre. Écarter d'avance le moindre obstacle, c'est la mort.
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Ce tome contient une histoire complète, une forme de biographie consacrée au couple formé par Jean Cocteau (1889-1963) & Jean Marais (1913-1998). Sa première édition date de 2023. le scénario a été écrit par Isabelle Bauthian, les dessins et les couleurs par Maurane Mazars. Il comporte cent-dix-neuf pages de bande dessinée. Il se termine avec un trombinoscope de trois pages présentant trente-quatre personnages apparaissant dans l'ouvrage, avec une petite vignette dessinée en gros plan, le nom de la personne, ses dates de naissance et de mort, et une brève présentation en une ou deux phrases. Après une page de remerciements des autrices, vient une liste des principales oeuvres de Jean Cocteau.

Eugénie Cocteau, la mère de Jean, s'interroge. Elle ne sait pas comment elle a fait pour mettre au monde un poète. C'est très, très difficile. Il a toujours été sensible, cruel, parfois avec elle. Si, si, se souvient-il de ce gros mensonge, dans le train, qui manqué de la faire arrêter ? Avec ses amis, par contre… Ah, ils ne l'ont pas toujours remercié de sa générosité. Elle espère qu'il ne revoit plus cet odieux Maurice Sachs. Bien. En tout cas, elle est contente qu'il prenne enfin soin de sa santé. Et qu'en est-il de son mariage avec mademoiselle Chanel ? Mais pourquoi ne pas lui avouer ? Puisque c'est dans les journaux ! Paris en 1937, les journaux évoquent le fait que par crainte des milliers de tracts distribués par le Front populaire allemand, on ne fait plus l'obscurité dans les rues de Berlin. Jean Cocteau écrit un article sur le génie du boxeur Panama al Brown. Dans le journal Action française, un article tourne en dérision le soutien de Cocteau à Brown. Un soir, Jean Marais reçoit un appel téléphonique de Jean Cocteau qui lui demande de venir immédiatement.

Jean Marais se rend en courant à l'hôtel Castille et va frapper à la porte de la chambre de Jean Cocteau. Celui-ci lui indique d'entrer, et il déclare au jeune acteur que c'est une catastrophe, il est amoureux de lui. D'abord pris de court, Marais se ressaisit et répond rapidement que c'est réciproque. le lendemain, l'acteur dîne avec une actrice de la troupe de théâtre et elle le met en garde : s'il devient le nouvel enfant de Cocteau, les gens ne le verront plus jamais autrement. Quelques jours plus tard, le poète le présente à ses amis et ses amants : Christian Bérard, Boris Kochno, Marcel Khill, puis Marie-Laure de Noailles, Panama al Brown, etc. L'actrice continue : tout le monde saura que Jean Marais n'est que le dernier en date de ces médiocres qu'il a parés de tous les talents, tellement il voulait le retrouver en eux. Marais ne comprend pas à quoi renvoie ce Le. Elle explicite le terme : Raymond Radiguet, le plus grand poète de leur génération, l'enfant auprès de qui Cocteau a créé ses plus grandes oeuvres. Cocteau n'est plus que l'ombre de lui-même depuis sa mort. Suicidaire terrorisé par la mort, opiomane, médiocre. C'est à cette période qu'il crée sa pièce : les chevaliers de la table ronde.

Les éditions Steinkis ont débuté une collection appelé Dryade en 2022, avec [[ASIN:2368464336 Derrière le rideau - Simone Signoret et Yves Montand]] de Xavier Bétaucourt et Aleksi Cavaillez. La quatrième de couverture rappelle la définition de Dryade : réunion de deux principes qui se complètent réciproquement. Cette collection est consacrée aux couples qui ont marqué les esprits par leur engagement politique, leur créativité, leurs succès et leurs échecs, leurs forces et leurs faiblesses. le présent ouvrage est donc consacré à l'idylle entre l'acteur et le dramaturge qui a duré de 1937 à 1948. Il s'arrête un peu avant. D'un côté, un poète, peintre, dessinateur, dramaturge et cinéaste français, âgé de quarante-huit ans en 1937, de l'autre un jeune acteur qui deviendra également metteur en scène, écrivain, peintre, sculpteur et potier, âgé de vingt-quatre ans. Cette idylle nait alors que le gouvernement d'Adolf Hitler a déjà viré au totalitarisme et que la seconde guerre mondiale approche, avec l'invasion et l'occupation d'une partie de la France. L'histoire personnelle de ces deux créateurs et de leur couple est indissolublement liée à celle de la France. Les autrices ont fait des choix structurels et esthétiques marqués pour rendre compte de cette réalité.

S'il commence par feuilleter l'ouvrage pour s'en faire une idée, le lecteur remarque qu'une partie significative de la narration repose sur des dialogues entre les personnages, souvent en plan poitrine ou plus rapproché, parfois en plan taille, avec un décor qui peut être minimaliste ou inexistant en fond de case, une mise en couleurs à base de camaïeu, à l'aquarelle, avec souvent une teinte prédominante pour une scène, du vert ou du rouge, un peu délavés. Il relève également une grande variété de lieux, et une discrète influence manga de type shojo dans certaines expressions de visage mais sans systématisme, souvent pour une émotion particulière plus appuyée. Dans les caractéristiques graphiques, il remarque également l'intégration de brèves coupures de presse qui semblent être des copies conformes d'articles de l'époque avec une reprographie reprenant l'épaississement des caractères et les imperfections d'imprimerie. Majoritairement l'artiste a recours à des traits de contour pour chaque forme, chaque personnage, parfois interrompus le temps d'une courbe ou d'un segment droit, et quelques cases sont réalisées en couleur directe, une certaine liberté d'exécution en phase avec la liberté d'écriture et de création de Cocteau.

Dans un premier temps, le lecteur ne sait pas trop comment s'adapter au mode narratif. Les deux pages d'introduction avec la mère de Jean Cocteau atteste de cette liberté visuelle : un dessin en pleine page, faisant penser à collage de différents éléments : la mère représentée en pied à la croisée de ce qui semble être deux faisceaux lumineux, l'un rouge, l'autre bleu, des bombes à ses pieds, une sorte de manteau ou de robe à motifs géométriques sur un mannequin à droite et un acteur ou deux déguisés en âne à gauche, la tête de son fils étant surimposée en lignes blanches. Dans la page suivante, elle est représentée en plan poitrine, jeune dans la première case, puis âgée dans la deuxième, puis en trait de contour délié de profil, puis sous forme d'une poupée gonflable avec un gros plan sur la tête, puis à nouveau comme dans la première page avec un perroquet sur l'épaule en plus. le lecteur ne sait trop quoi en penser.

La page suivante comprend trois coupures de presse, un individu sur échelle en train de réaliser une fresque murale, et enfin deux cases, un téléphone qui sonne, un homme en très gros plan sur sa bouche qui répond. Les sept pages suivantes prennent une forme de bande dessinée classique, avec des cases alignées en bande, et ces camaïeux à l'aquarelle qui apportent de la substance, sans pour autant être figuratifs ou représentatifs de la couleur de chaque élément. En page treize, le lecteur découvre trois autres coupures de presse intégrées chacune à la place d'une case dans une bande. Puis en page seize, un autre article et cette fois-ci en surimpression de la case où les deux Jean regardent une danseuse sur scène. Les pages dix-huit et dix-neuf sont construites sur la base de juxtaposition d'images, sans bordure de case, avec un texte qui courent librement. En page trente-neuf, c'est une illustration en pleine page dépourvue de tout mot. En page quarante-quatre, trois bandes de deux cases, sans aucun mot. En page quatre-vingt-cinq, Jean Marais passe à tabac un critique insultant, et le rouge prend la place du noir pour les traits de contour et les aplats. La page quatre-vingt-treize contient uniquement le texte écrit par Jean Cocteau comme salut à Arno Breker, à l'occasion d'une exposition.

Les autrices montrent ainsi la relation qui unit les deux créateurs, la manière dont ils se soutiennent, dont Cocteau apprend à Marais à se cultiver, comment ce dernier réconforte le premier pendant les périodes de doute ou de manque. Les coupures de presse apportent un contexte partiel de la montée du nazisme, du déroulement de la guerre, des repères ponctuels et très épars, et aussi des informations sur les représentations, les parutions des oeuvres de l'un, les rôles de l'autre. Il semble que l'ouvrage s'adresse d'abord à un lecteur ayant une idée préalable de la carrière de l'un et l'autre de ces deux créateurs, car la narration ne revêt pas une nature pédagogique ou vulgarisatrice. Par exemple, il vaut mieux pouvoir identifier les titres des pièces de théâtre, des films pour avoir l'assurance de ne pas les rater dans une page ou une autre. Sous cette réserve, ou après avoir lu une fiche encyclopédique sur la vie de l'un et l'autre à cette période, le lecteur ressent alors ce qui se joue pour les deux Jean, sur le plan de la création, sur le plan émotionnel, ainsi que l'intrication avec leur relation de couple. Il comprend la difficulté pour l'un comme pour l'autre de choisir s'il doit s'engager contre l'envahisseur et ses idées et comment, sur le dilemme cornélien d'accomplir leur métier de créateur dans une période d'incertitude totale sur la possibilité de faire jouer une pièce, de réaliser un film, de subir la censure, d'aider des amis ou d'autres créateurs qui portent l'étoile jaune. Ces questionnements et les décisions afférentes apparaissent sans manichéisme ni leçon de morale, découlant de la personnalité et l'histoire de l'un et de l'autre.

Une collection ambitieuse avec pour objectif de donner à voir l'engagement d'un couple dans son époque. Cette bande dessinée peut sembler un peu difficile d'accès pour un lecteur totalement ignorant de la vie des deux Jean, ce à quoi la simple lecture d'une fiche encyclopédique peut rapidement remédier. Il plonge alors dans une narration visuelle très personnelle, adaptée à la diversité des formes de création de ces deux auteurs. Il ressent la pression de l'Histoire, les événements arbitraires qui influent sur leur vie, en même temps qu'il côtoie deux êtres à la personnalité et à l'histoire différente, et qu'il devient le témoin privilégié de leur relation amoureuse et de la manière dont elle les enrichit l'un l'autre.
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Cette collection "Dyade" (réunion de deux principes qui se complètent mutuellement), m'a conquise pour la deuxième fois.

Dessins clairs rappelant ceux de Cocteau, j'ai particulièrement apprécié la couleur et les traits des visages

Malgré certains éléments assez confus (liés aux multiples intervenants de la BD et aux encarts parfois peu lisibles), j'ai apprécié cette relation particulière entre les amants. Elle est explicitée et c'est une approche intéressante pour connaître davantage ces deux Jean. On comprend d'ailleurs très vite que le talent de l'un ne va pas sans l'autre !
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« Venez tout de suite. C'est une catastrophe. Je suis amoureux de vous ». Paris, 1937. Jean Cocteau, écrivain, dramaturge, poète de renom, déclare sa flamme à un tout jeune comédien ambitieux et doté d'un physique exceptionnel : Jean Marais. À travers cette liaison des corps et de l'esprit, l'un et l'autre vont se soutenir mutuellement : Cocteau encourage sa muse Marais en proie aux doutes tandis que Marais essaie de tirer Cocteau de sa neurasthénie et de son addiction à l'opium. Quand la Seconde Guerre mondiale éclate, Marais part à la guerre. Les pièces de Cocteau sont, quant à elles, passées au vitriol par certains critiques nationalistes, antisémites et homophobes.

Cet album nous fait entrer dans l'intimité de deux grands artistes aux multiples facettes pendant l'Occupation : on y découvre leur caractère, leur fascination mutuelle, leur amour des mots, leurs liens avec d'autres artistes. La scénariste Isabelle Bauthian glisse certaines anecdotes et informations sur la vie de Colette, Jean Genet, al Brown, Jean Desbordes, Sacha Guitry, Max Jacob, Serge Reggiani… L'aspect décousu du scénario montre comment l'Histoire entre dans l'histoire des deux amants. Il permet aussi d'insérer des réflexions pertinentes sur le théâtre, la condition d'artiste pendant l'Occupation avec un Jean Marais engagé et un Jean Cocteau plus ambigu. Immense coup de coeur pour le graphisme, très documenté avec l'insertion de coupures de journaux d'époque, dans le dessin lumineux et vivant de Maurane Mazars. À la fin de ce nouvel opus de la collection Dyade des éditions Steinkis, on a un récapitulatif des personnages croisés dans le livre, un petit plus vraiment très appréciable.

Les Choses sérieuses est un album passionnant et instructif pour faire plus ample connaissance avec ce couple mythique !
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Vous ne voulez rien apprendre sur Cocteau et Jean Marais ? Cette BD est faite pour vous ! Je ne connais pas du tout les deux hommes (enfin, le strict minimum) et je n'ai absolument rien appris de nouveau à la lecture de cette BD.
Point central: on ne sait pas pourquoi ils s'aiment. On sait ce qu'ils s'apportent matériellement l'un à l'autre, mais si vous vouliez comprendre leur relation, passez votre chemin.
L'autrice survole leurs oeuvres, vous n'apprendrez rien non plus là-dessus. Au moins, ça m'a donné envie de lire "Les parents terribles", c'est déjà ça.
La vie pendant l'Occupation ? Pareil. Traité avec désinvolture par Cocteau qui refuse "de se laisser distraire des choses sérieuses par la frivolité dramatique de la guerre", ils n'en sont guère affectés donc le sujet est absent tout en étant présent par le dessin.
A part les critiques de théâtre et de ciné, rien n'a l'air de toucher les protagonistes et autant dire que c'est très peu passionnant.
Ca jacte énormément, c'est entrecoupé d'articles de presse de l'époque et le dessin se contente d'être illustratif.
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Il est rare que cela m'arrive mais je n'ai pas réussi à terminer la lecture de ce roman graphique. Il est pourtant intéressant mais pas mal de choses dérangent ma lecture. A commencer par tous ces articles de presses, certes ils apportent de l'authenticité au récit et beaucoup d'originalité mais… Au début, je les lisais systématiquement mais ils me faisaient perdre le fil de ma lecture principale, je les ais donc mis de côté. Autre chose, les personnages rencontrés sont presque tous célèbres mais si, comme moi, on connait mal les artistes et célébrités de l'époque, les reconnaître est assez difficile. le résultat est que ça m'a embrouillée encore plus.

J'ai aussi un peu du mal avec le personnage de Cocteau, je sais qu'il est opiomane, cela se ressent dans ses comportements, façons de bouger, parler, réagir. Et justement, le suivre et le comprendre dans ses folies amoureuses, créatives est très difficile. Ce n'est pas un mauvais album en soit, l'illustratrice ayant reçu un prix en 2021 pour une autre de ses oeuvres. Cela dit, je n'accroche pas au style graphique mais je ne peux le qualifier de mauvais, j'ai d'ailleurs beaucoup apprécié la couverture. Je trouve que le dessin colle plutôt bien à l'ambiance générale de l'histoire.

Mais c'est trop flou, trop chargé, trop compliqué à suivre et à comprendre. Je n'ai vraiment pas accroché du tout, je pense néanmoins qu'il pourrait plaire à beaucoup de monde ne fut-ce que parce qu'il parle de Cocteau et Marais. A vous de voir si vous avez envie de tenter cette lecture.
Lien : https://sambabd.net/2023/03/..
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critiques presse (7)
9emeArt
13 juin 2023
Intrigant et atypique, cet album renouvelle la proposition biographique et offre un point de vue réussi sur ces personnalités tout en cherchant à questionner la pratique ou la réception artistique.
Lire la critique sur le site : 9emeArt
Bedeo
24 avril 2023
Récit d’une liaison entre deux artistes pris dans la tourmente de la marche à la guerre et des années noires.
Lire la critique sur le site : Bedeo
Sceneario
17 avril 2023
Autant histoire d’un couple à la vie tumultueuse et brillante, qu’étude sur le monde intellectuel sous l’occupation allemande, Les choses sérieuses est passionnant et offre un regard captivant sur ce microcosme intellectuel et artistique durant la deuxième guerre mondiale !
Lire la critique sur le site : Sceneario
LaTribuneDeGeneve
14 avril 2023
Établie à Genève, Maurane Mazars met en images le destin croisé du célèbre écrivain-cinéaste et du comédien, avant et pendant la Deuxième Guerre mondiale.
Lire la critique sur le site : LaTribuneDeGeneve
BDGest
11 avril 2023
La rencontre entre Jean Cocteau et Jean Marais tient du coup de foudre. Le dramaturge, ancienne coqueluche de Paris, est devenu la cible d'attaques virulentes des milieux conservateurs qui voient en lui le symbole d'une certaine décadence.
Lire la critique sur le site : BDGest
LigneClaire
07 mars 2023
Un acteur et un poète, un retour sur une époque, des noms qui ressurgissent, Les Choses Sérieuses ne sont pas une double biographie mais un focus sur la guerre à l’ombre de la Tour Eiffel, là où justement il va falloir prendre conscience d’une réalité qui n’est pas des plus drôles. Comment l’un et l’autre vont-ils réagir, se comporter ?
Lire la critique sur le site : LigneClaire
LeFigaro
02 mars 2023
Les deux auteurs restituent avec brio cette romance artistique.
Lire la critique sur le site : LeFigaro
Citations et extraits (19) Voir plus Ajouter une citation
Maintenant, Maman habite avec moi. J’ai longtemps habité avec elle. C’est l’intervalle qui me gêne. Ar chance, elle n’est pas morte rue d’Anjou. Il aurait fallu revivre dans cet appartement, retrouver les ruines sous la poussière, ranger, dispenser, vendre. Elle est morte sans se rendre compte, faute d’huile, dans une chambre rue de l’Assomption où quelques meubles lui semblaient être tous ses souvenirs. C’est le passage d’un état à l’autre qui rend les morts insupportables. Les larmes jaillissent de cette rupture d’équilibre, comme le rire dont parle Bergson. Maman a changé de forme, s’est échevelée, évaporée avant de disparaître dans un ciel calme. Je suis libre de revoir à mon aise toutes les formes qu’a pris ce nuage avant de se dissoudre. C’est pourquoi je me couche vite ce soir.
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Salut à Breker, par Jean Cocteau. Je vous salue Breker, Je vous salue de la haute patrie des poètes, patrie où les patries n’existent pas, sauf dans la mesure où chacun y apporte le trésor du travail national. Je vous salue. Parce que vous réhabilitez les mille reliefs dont un arbre compose sa grandeur. Parce que vous regardez vos modèles comme des arbres et que, loin de sacrifier aux volumes, vous dotez vos bronzes et vos plâtres d’une sève délicate qui tourmente le bouclier d’Achille de leurs genoux, qui fait battre le système fluvial de leurs veines, qui frise le chèvrefeuille de leurs cheveux. Parce que vous inventez un nouveau piège où se prendra l’esthétisme de nos jardins publics. Parce que sous le clair de Lune, véritable soleil des statues, j’imagine vos personnages arrivant une nuit de printemps, place de la Concorde. Avec le pas terrible de la Vénus d’Isle. Parce que la grande main du David de Michel-Ange vous a montré votre route. Parce que, dans la haute patrie où nous somme compatriotes, vous me parlez de la France.
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Je déteste le scandale. On m’en invente sans cesse, et ensuite on m’accuse de les avoir instigués. Malheur à moi si je suis nuance, disait Nietzsche. Vous préférez Stendhal ? Si je ne suis pas mouton, je ne suis rien. Le poète est un homme libre, voilà une notion qui devrait vous parler. J’ai toujours pu compter sur l’amitié d’Arno. Il a été, je vous le rappelle, l’une des rares personnes à me soutenir quand la presse collaborationniste me conspuait. Mais peu importe : je me suis fait à l’idée d’être incompréhensible. Au moins, après ce salut, mes détracteurs ne pourront plus m’accuser de saper la morale de bons français.
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Je marche à l’idéal avec des mains ouvertes, et les yeux levés sur un point qu’on ne voit pas. Je vais avec l’espoir au cœur, et, sous mes pas, je foule des pavés gris ou des plantes vertes. Mon chemin est semé de pierre. Mon chemin de rêveur – ma très droite et très exacte route – et ces pierres sont la laideur et le doute. Et j’y butte des pieds tout en tendant la main. Évidemment, je suis vil et bas comme un autre ; le fumier traîne avec une odeur de pourri, plein de peuple qui beugle et de mon monde qui rit ! Mais mon esprit est loin, lorsque mon corps s’y vautre. – Jean Cocteau
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Et j’ai vu de beaux et braves jeunes gens sacrifiés aux ordres absurdes de ceux qui restaient sourds à nos demandes lorsque nous les alertions du sort des blessés. Et je me suis vu : tu sais pourquoi, j’ai finalement quitté le front ? La guerre m’amusait. Seule la curiosité m’attachait encore à ce drame futile et je m’en dégoûtais.
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