Ecriture "à effets" de qui le sait. de qui ne s'abaisserait pas, pourtant, à la vaine notoriété littéraire d'une certaine Françoise S., dont l'auteure reprend ici certaines recettes éprouvées, quelques années après le triomphe d'un certain Bonjour t..
Etude de moeurs d'une jeunesse bohême ++, d'un petit cercle de privilégiés de l'esprit évoluant à la marge, de façon oisive, hautaine et fière, se prélassant dans une belle fatigue de vivre traversée d'aérations alcoolisées, où les couples se font pour se défaire, en une hasardeuse litanie de l'amour — amour pressé, libre, offert... disponible certes, mais toujours au risque de la péremption. On reconnaîtra dans le "Gilles" du récit un portrait en creux d'un certain Guy D., tandis que la narratrice "Geneviève" semble beaucoup ressembler à son auteure Michèle B., effectivement compagne à la ville et compagnonne de route de ce Guy.
Parodie larvée, transparente — tellement que ç'en est insensible —, jamais le ton de
Sagan (voilà, le nom est lâché) n'est grossièrement caricaturé, on se contente de faire, calmement, plus fin, plus spirituel, dans un trait brossé "à la manière de", histoire de se donner une contenance, un peu, et de se construire une plume dont la chair soit parlante, pour soi, pour le public, pour construire un livre à la fin et faire oeuvre de "romancier".
"Je me réveille plus tôt dans un lit dont je n'ai pas l'habitude."
En creux se lit une vague conscience de la vacuité de la formule (...et alors, what's the point de se réveiller plus tôt?), se surajoutant au clin d'oeil, racoleur et facile, au fait que "souvent elle ne se réveille pas dans son lit".
À la formule "à la
Sagan", l'auteure ajoute une forme d'ironie souterraine, invisible, telle le
Pierre Ménard de
Borgès réécrivant à l'identique un Quichotte avec des niveaux de lecture additionnés, en l'occurence, des strates de conscience autoréflexive qui font de chaque ligne une double voix, la voix de la personne qui parle — la narratrice saganienne — et celle qui se regarde ainsi parler — l'auteure, subtilement lucide de ses effets. Mais sans trop de complaisance non plus. Après tout, ce n'est pas si mal,
Sagan... La preuve en est que, dans un style
Sagan, ce livre fait un excellent roman.