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Jean-Michel Kalmbach (Traducteur)François Fejtö (Traducteur)
EAN : 9782221093849
144 pages
Robert Laffont (01/06/2001)
3.19/5   8 notes
Résumé :

Gabriel Ventuza arrive à Bogdanski Dolina avec pour mission de racheter aux fossoyeurs la dépouille mortelle de son père, Victor, passeur qui fut assassiné plusieurs années auparavant et qu’on dit avoir été enterré au cimetière arménien. Bogdanski Dolina est un bourg des montagnes ukrainiennes qui n’offre d’autres curiosités que la tombe du Voyageur inconnu, la monumentale décharge... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
« La Visite de l'Archevèque » (15, Cambourakis, 128 p.), c'est un peu le Godot Roumain. La scène se passe à Bogdanskyi Dolina, village reculé, près d'une décharge nauséabonde. Toujours près de ce point triple entre l'Ukraine, la Roumanie et la Hongrie.
Donc, dans ce village, le matin on avait capturé les soeurs Schenkowitz, deux vieilles filles évadées du quartier d'isolement des pulmonaires, délicieusement appelé Isolda. Et dire qu'on attendait l'archevèque Zilava dans ce village (pour la Saint Médard en plus). Que dire de la ville, avec sa décharge, son impasse Sans-Nom qui mène au séminaire, sa rue des Saints-Académiciens, son église Sainte Zénobie, l'avenue du 22-février, le débit de vins du père Punga, l'auberge de Hariton Manoukian, et cerise sur le gâteau la tombe du Voyageur inconnu. Tout cela sous une autorité de fer et deux archimandrites Kostine et Tizmane. A la fin du roman, on va aboutir à la lapidation des deux soeurs, et à l'explosion de l'archevêque Boutine en mille morceaux.
« À Bogdanski Dolina, le crépuscule dure des heures. ». « Les ordures dégagent de la lumière; ici, il ne fait pas complètement noir la nuit. Bien après que le soleil a sombré derrière la forêt de Pop Sabin, la vapeur gélatineuse couvrant les montagnes d'immondices continue d'éclairer, comme si des vers luisants brillaient à l'intérieur; elle est illuminée d'une incandescence magnétique, on dirait la lueur d'une bénédiction rayonnant confusément au-dessus de la ville, alors qu'à l'entour les prés de Bogdanski sont plongés depuis longtemps dans un noir d'encre. »
Donc, le seul repère que l'on ait reste la Saint Médard (en principe le 8 juin), qui est jour férié à Bogdanski Dolina. Cette ville ( ??) est proche de Ivano Frankovsk, en Ukraine (en fait Ivano Frankivsk qui a eu pour nom, au gré des changements de frontières : Stanisławów (en polonais), Stanislau (en allemand) et Stanyslaviv ou Stanislav (en ukrainien). Mais elle est tout de même à 300 kilomètres de la frontière. Mais c'est le lot habituel de ces villes qui ont changé plusieurs fois de nationalité. « le débarcadère grouillait continuellement de Hongrois, de Juifs, de Saxons et de Polonais. »).
Donc, « les fugitives avaient été ramenées dans le camp par Gabriel Ventuza, l'aumônier, au bout d'une laisse de cuir ». « Pourtant, le temps pour [eux] d'arriver, il n'y avait plus rien à voir pas plus de cage à poules que de soeurs Schenkowitz ». Voilà une histoire qui commence par une cruelle déception. Heureusement, il suffit de tourner la page. « Explication : les deux fugitives avaient été lapidées par les autres malades ». Comme quoi, un bon auteur trouve toujours une fin quasi heureuse à une belle histoire (et puis il y a encore une bonne centaine des pages à tenir le lecteur en haleine – à défaut d'une laisse de cuir). Et surtout, il y a dans le ré Mida, cette terrible décharge avec ses terribles mouettes (on les entend à des kilomètres). Décharge qui peut même détourner les orages mais que les mouettes pratiquent, quoiqu'elles évitent de survoler le quartier d'isolement.
Ce qui n'empêchera tout de même pas le vicaire Periprava de mourir assassiné avec un pic à glace. Comme quoi la religiosité a ses limites. Gabriel Ventuza, « venu il y a quelques années récupérer la dépouille mortelle de son père » s'était trouvé un emploi d'aumônier du camp. « Mais cela faisait cinq jours que Gabriel Ventuza dormait ». À son réveil, nu et dévalisé, il est contraint de rester au village. Long cauchemar éveillé, avec des lynx et des licornes, le tout au milieu d'ermites témoins de Jéhovah.
Heureusement, il y a les alentours. « Les fins de semaine, quand il n'y avait pas de confessions, je traversais parfois les cols des Carpates pour aller retrouver mes anciennes amours. » et ce « dans la cabine du serre-freins d'un wagon ». Et pendant ce temps « les séminaristes, qui même en dormant, des oreillers noués sous les pieds, traçaient imperturbablement leurs cercles ».

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Le premier paragraphe pose un certain nombre d'éléments essentiels du roman, situé quelque part dans une petite ville des Carpates, à une époque indéterminée. Une petite ville dans laquelle un clergé non clairement identifié règne sur la population. Une partie est parquée dans le camp des pulmonaires, n'importe qui peut du jour au lendemain être considéré comme malade, après un semblant de diagnostic effectué par le vétérinaire. Mais les gens continuent, comme si de rien n'était, de vivre, de tenter de faire des projets, de gagner de l'argent. Aussi absurde et imprévisible soit le monde dans lequel ils vivent.
C'est terrible si on y réfléchit, mais en même temps la plume de l'auteur est légère, narquoise, n'insiste pas sur les aspects noirs, mais plutôt sur l'ironie sous-jacente à ce monde. Une sorte de parodie plus qu'une dystopie sombre. Ce qui fait sans doute l'originalité de ce texte, dont la lecture provoque par moments le sourire, tout en faisant aussi parfois froid dans le dos. C'est incontestablement fort et dense, même si la fin ne tient pas toutes les promesses du début.
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De Bodor, j'avais lu La Vallée de la Sinistra. Avec La Visite de l'archevêque, on retrouve ce ton si particulier, entre humour noir et légèreté, ce décalage entre la situation décrite et la façon dont elle est décrite. On retrouve également des personnages hauts en couleur, marqués chacun par de curieuses idiosyncrasies et un individualisme certain. du romantisme, n'en cherchez pas : même l'amour a une saveur terre à terre et aigre chez Bodor. Mais si le rêve et les idéaux semblent en exil, le merveilleux, lui, ne l'est pas...
Petit roman mais sommet de l'absurde, ce livre dénonce une société soumise au carcan du totalitarisme. Dans le cadre assez sordide d'une ville dominée par une décharge nauséabonde - image du monde peint par Bodor, en écho à sa propre expérience ? - se déroulent et s'enchaînent les péripéties narrées selon un plan complexe et un jeu de miroirs permanents. Sous le vernis de simplicité, c'est ainsi un objet littéraire et philosophique remarquable qui est offert au lecteur.
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Citations et extraits (1) Ajouter une citation

Une semaine avant la Saint Médard, les premiers clients du salon de coiffure annoncèrent que, tôt le matin, on avait capturé les sœurs Schenkowitz. Les deux vieilles filles s’étaient évadées, des mois de cela, de l’Isolda, le quartier d’isolement des pulmonaires. Les fugitives auraient été ramenées dans le camp par Gabriel Ventuza, l’aumônier, au bout d’une laisse de cuir, et aussitôt exposées à la curiosité publique dans une cage à poules.
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