La forme de l'eau, premier roman d'
Andrea Camilleri mettant en scène le Commissaire Salvo Montalbano a été publié en Italie en 1994.
L'action se déroule à Vigàtà, dans les années 1990. Vigata, ville imaginaire de Sicile, est en fait Porto Empedocle, ville natale de Camilleri.
Sans emploi, deux jeunes géomètres au chômage, Pino Catalano et Saro Montaperto exercent le métier de « ramasse-poubelles » à Vigatà. En nettoyant le Bercail, terrain vague malfamé, qui sert de lieu de rencontres aux traffics en tous genres de Vigatà, Saro découvre un collier d'une grande valeur. Son fils est malade, et il ne peut faire face aux soins médicaux, il ne dit rien et empoche le collier. Quelques mètres plus loin, Pino et Saro découvrent à l'intérieur d'une automobile de luxe le cadavre de l'Ingénieur Luparello, personnalité politique en vue de la ville ; ils préviennent Maître Rizzo, avocat de renom, ami de Luparello qui ne paraît pas étonné, et leur demande de faire leur devoir – ce qui, pour eux, signifie contacter le Commissaire Montalbano.
Appelé sur les lieux,le Docteur Pasquano, médecin légiste est formel, il s'agit d'une mort naturelle, une crise cardiaque a emporté l'Ingénieur Luparello, alors qu'il se trouvait, en galante compagnie, dans le terrain vague… Montalbano a besoin d'informations plus précises…. Et l'informateur en question n'est autre que son ami d'enfance, Gegè, qui exerce entre autres activités celle de souteneur au Bercail. Gegè rapporte le témoignage de deux de ses protégées, qui ont vu la voiture de l'Ingénieur Luparello arriver, se garer, et en sortir une jeune femme qui s'est rapidement éloignée … il explique également à Montalbano qu'un collier d'une grande valeur semble avoir été perdu au Bercail… les prêteurs sur gages sont en alerte….
Montalbano rencontre la Signora Luparello, qui pense que son mari a été attiré dans un guet-apens et qu'il est mort d'une crise cardiaque. Elle est persuadée que tout n'est qu'une mise en scène réalisée par les ennemis politiques de son mari, destinée à le discréditer. Il ne faut pas s'arrêter à la forme qu'ils ont fait prendre à l'eau », ajoute-t-elle, expliquant à Montalbano que l'eau, par définition, n'a pas de forme …. L'Ingénieur Luparello disposait d'une maison discrète pour ses rendez-vous, pourquoi se serait-il rendu au Bercail, au risque de se faire reconnaître ?
Et l'enquête progresse, on apprend que le collier est celui d' Ingrid Sjostrom, belle-fille du Docteur Angelo Cardamone, opposant politique à l'ingenieur Luparello… tout désigne la jeune suédoise comme la coupable idéale… mais pourquoi ? là encore, Montalbano se méfie de
la forme de l'eau….
L'enquête s'accélère…. Et trouve son dénouement tragique, alors que Montalbano est parti à Gênes retrouver Livia sa fiancée.
Mais Montalbano a toujours été à la manoeuvre, jouant, comme le dit Livia sa fiancée, "le rôle d'un dieu de quatrième ordre, mais d'un dieu qui tombe juste" plaçant l'arme du crime au bon endroit, cachant les preuves voulant incriminer Ingrid, permettant au géomètre de faire soigner son fils en négociant avec le propriétaire du collier....
La forme de l'eau… premier roman dans lequel nous faisons connaissance avec le Commissaire Montalbano. Comme le dit Pino "le commissaire, au contraire, était de Catagne, il s'appelait Salvo Montalbano, et quand il voulait comprendre quelque chose, il comprenait".
Ce roman peut paraître un peu déroutant au premier abord ; les personnages, le langage, tout semble peut être un peu trop "exotique", et à la fois trop simple, un roman policier comme les autres, sans grande épaisseur ?
Ce serait, selon moi, mal connaître Camilleri… dans
La forme de l'eau, on trouve déjà, ébauchés, des aspects chers à l'auteur qui vont prendre tout leur sens au fur et à mesure de la parution des autres romans.
Le personnage de Montalbano est esquissé, mais on ressent déjà son humour, son sens de la dérision, son humanité, son aspect proprement "sicilien". Les personnages féminins, Livia et Ingrid sont déjà présents. du commissariat, on rencontre Mimi et Fazio, bien campés dans leur rôle.
Vigàta, ou Porto Empedocle, la Sicile, la sècheresse de ses paysages, sa beauté, ses paradoxes, ses magouilles politiques, constitue tout un ensemble mis en valeur par le langage propre à Camilleri ; toutes les nuances sont respectées grâce à la traduction de
Serge Quadruppani.
Il s'agit d'une toute première plongée dans l'univers de Camilleri.... une rencontre avec un Commissaire hors du commun, incarné à l'écran par l'acteur Luca Zingaretti…