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« L'étranger » de Camus … Voilà bien un vieux livre ! Je l'avais lu, scolairement, il y a quelques 45 ans… Je viens de le relire. Édifiant ! L'écriture de Camus a traversé le temps, son histoire tient toujours : un être peut être jugé sans être compris !
Et ce n'est pas à l'heure des « ébats sociaux sur Facebook, twitter ou autres réseaux que l'on oserait contredire la fragilité des jugements péremptoires dont s'empare, souvent sans discernement, la vindicte publique. Car, -et ce n'était pas, dans mon chef, une faute de frappe si je viens de parler « d'ébats sociaux »- pour bon nombre, il s'agit bien plus de s'ébattre, d'éclabousser, « d'éclats-bouser » (si ce néologisme m'est permis) plutôt que de chercher à comprendre, à écouter, à démonter les mécanismes qui se sont mis en place pour donner aux faits, aux gestes, aux propos leurs vraies valeurs !
Camus touchait déjà cette cible quand il dénonçait les travers d'une justice qui condamne un étranger … simplement parce qu'il est étrange à nos yeux, non conforme aux attitudes et déclarations politiquement correctes dans une société qui n'admet pas, ou si peu, la différence !
Sans m'attarder ici sur le style de Camus (on a déjà tant écrit à ce propos!), je veux simplement souligner que bien des auteurs actuels suivent cette écriture qui paraît simple, dénuée de toutes fioritures mais qui, en fait est dense et riche en résonance lorsqu'on veut se laisser prendre par "un essentiel qui, en peu de mots, dit tout".

Camus, avec son roman « L'étranger » paru en 1942, est d'une actualité fascinante. À lire, relire et méditer !
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C'est le tout premier roman de Camus paru en 1942 durant la seconde guerre mondiale.

C'est l'éloge de l'absurde, cela commence fort avec cette phrase célèbre : "Aujourd'hui maman est morte. Ou peut-être hier, je ne sais pas".

Meursault apprend le décès de sa mère, elle était à l'hospice depuis trois ans. Nous sommes en Algérie, il prend le bus pour Marengo à 80 kms d'Alger. Il semble distant, sans émotion.

Après l'enterrement, il rentre à Alger, rencontre Marie avec qui il va voir un film drôle au cinéma. La vie reprend ses droits. Marie devient sa compagne, elle lui propose de l'épouser. Pourquoi pas ? Il accepte.

Son voisin de palier Raymond l'invitera avec Marie à la mer. Suite à une affaire sentimentale , des arabes en veulent à Raymond. Ils le poursuivent, il sera blessé au visage. Raymond sur ses gardes confiera son arme à Meursault qui l'utilisera un peu plus tard en croisant l'agresseur sur la plage. Ébloui, étourdi par la chaleur il tire. Légitime défense ? Un simple fait divers ? Oui mais Meursault a tiré trois balles de plus sur le corps inerte. Pourquoi ?

Son procès aura lieu mais peut-on parler de procès, il est d'avance jugé par son attitude , son comportement avant la rixe. Meursault ne réagit pas comme les autres, il semble sans réaction, flotte et observe son existence. Il ne manifeste aucun sentiment, ne pleure pas sa mère, s'amuse. Il sort du rang et des conventions et la société n'aime pas cela, cela dérange.

Il y aurait encore beaucoup de choses à dire sur ce récit intemporel de la littérature française. de courtes phrases. Simples d'apparence. C'est visuel, on ressent la chaleur étouffante, la lumière du soleil, les couleurs et la notion du temps qui passe.

Un classique 5 étoiles , à lire ou à relire.

Gros coup de ♥

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C'est un des livres que vous devrez absolument lire avant de mourir.
Un incontournable: touchant, profond, mélancolique, subtil ...
La lecture de ce roman est une expérience à part, qui marque à tout jamais.
Dès les premières lignes: " Aujourd'hui maman est morte. Ou peut-être hier, je ne sais pas. ", on est plongé dans l'esprit de cet homme, Meursault, qui " passe son existence " comme s'il était un passager dans son proppre corps.
Toute sa vie, ou bien la vie que les autres lui font vivre, sera mise dans les mains de quelqu'un d'autre.
Est-il vraiment le maître de sa vie? Seulement quand il sera condamné en verra-t-il la valeur.
Il entrevoit la responsabilité de ses actions... ... et il voit l'absurdité de Sisyphe.
N'est-ce pas cela l'une des choses de la vie que de ne s'apercevoir de la valeur d'une chose qu'au moment où on risque de la perdre?
Emmerdant! oui, c'est pour ça qu'il est génial!!
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Comme tout le monde, j'ai découvert ce livre il y a des années (des décennies même!) au lycée et je le relis périodiquement. Je l'ai toujours aimé, même si ça manque d'originalité, vu qu'on le considère comme un monument de la littérature mondiale. Ces deux dernières années, j'aurai relu les trois grands romans de Camus et mes deux préférés sont toujours L'étranger et surtout La chute, dont j'aime le style plus dépouillé. La peste est plus philosophique et les réflexions du Dr Rieux sont parfois bien pesantes. Comme je viens de découvrir Aux abois, de Tristan Bernard, qui aurait inspiré le chef d'oeuvre de Camus, l'occasion était trop belle de le relire.

Comme il y a déjà des milliers, voire des dizaines de milliers d'avis sur ce livre, je me contenterai de partager quelques réflexions non essentielles. D'abord je suis frappée de constater à quel point on a la mémoire sélective, même quand on croit connaître un livre, j'avais oublié une grande partie des détails de l'histoire, même si elle est simple. Il me semble qu'à chaque nouvelle lecture (environ tous les cinq ans), je découvre une nouvelle facette de ce texte, ce qui est le propre des grands livres.

J'avais l'impression d'une grande parenté entre le texte de Tristan Bernard et celui de Camus, mais en fait le rapprochement est assez superficiel. On nous parle bien d'un meurtre gratuit qui débouche sur une condamnation à mort dans les deux romans, mais les héros sont bien différents. Les deux livres sont des plaidoyers contre la peine de mort, ce qui n'est pas si fréquent dans les années 1930/40. le système judiciaire est injuste, mais la population « le peuple français ou allemand ou chinois » en est complice, tous sont coupables et l'innocence est au placard comme dira le héros de la chute un peu plus tard. Si la justice est inhumaine, ses fonctionnaires ne font qu'obéir à un système voulu par la société dans son ensemble et c'est la société elle-même qui broie les individus, en encore plus ceux qui ne se plient pas à ses normes.

Meursault est plus coupable de n'avoir pas tenu compte des convenances lors de l'enterrement de sa mère et du début de sa liaison avec Marie que d'avoir tué l'Arabe. D'ailleurs il a agi en légitime défense puisqu'on le menaçait d'un couteau, même s'il aggrave son cas en tirant sur le cadavre à quatre reprises (un détail que j'avais complètement oublié). Dans la réalité, on aurait certainement pas condamné à mort un colon qui aurait tué un Arabe brandissant un couteau et ayant déjà blessé un autre Français, même si Raymond est loin d'être innocent non plus. Donc on est dans un roman symbolique et pas une intrigue réaliste. La problématique n'est pas le racisme systémique dont devaient certainement souffrir la population indigène face aux colons.

Ce qui frappe le plus chez Meursault, c'est évidemment son indifférence à tout et sa passivité totale, en toutes choses il laisse les autres décider pour lui. Il est une sorte de mort vivant, qui ne peut qu'être rejeté par la société qui refuse une personne aussi différente. On peut voir en lui une sorte d'autiste et heureusement la médecine a fait des progrès depuis cette époque, tout comme la place donnée aux personnes handicapées. J'aime voir dans ce roman un appel à traiter de façon humaine les personnes différentes et le refus du jugement qui ne peut qu'amener la mort, réelle ou symbolique. Dans notre société où vivent de nombreux exclus, car ils ne rentrent pas dans la norme économique ou autre, nous avons plus que jamais besoin d'entendre ce message de tolérance.

On pourrait dire évidemment des milliers de choses sur ce monument de la littérature, mais c'est ce que je retiens pour cette lecture, je sais déjà qu'il y en aura d'autres, car La chute et L'étranger sont comme des bancs sur mon chemin, j'aime m'y arrêter de temps à autre.

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"Aujourd'hui, maman est morte. Ou peut-être hier, je ne sais pas. J'ai reçu un télégramme de l'asile : “ Mère décédée. Enterrement demain. Sentiments distingués.” Cela ne veut rien dire. C'était peut-être hier."

Cet incipit, l'un des plus connus de la littérature française, nous plonge d'emblée dans l'oeuvre phare d'Albert Camus. L'Étranger. Une oeuvre connue mondialement, traduite dans plus de soixante-huit langues et qui est, ni plus ni moins, le troisième roman francophone le plus lu dans le monde. Telle une photographie instantanée, les premiers mots de ce livre figent un point de départ précis. Celui d'un homme singulier — Meursault — confronté à la mort.

Dès cette introduction, nous pouvons déjà distinguer une écriture qui contribuera à la renommée de l'Étranger. Les phrases sont neutres, descriptives, dépouillées d'un style particulier. Ce degré zéro de l'écriture (comme l'écrivit Roland Barthes) colle parfaitement à la psychologie de Meursault, le personnage principal. En effet, rien ne l'atteint et c'est spécifiquement sur ce trait de caractère que la société le jugera tout au long du roman. L'écriture d'Albert Camus, qui peut paraître simpliste au premier abord est, en fait, une mise en abyme parfaite pour faire ressentir au lecteur la problématique de l'insensibilité de Meursault.

A ce titre, le titre du livre est on ne peut plus clair quand on sait à quel point l'indifférence est prégnante chez le personnage principal. Il est étranger à lui-même, aux autres ainsi qu'à la société en général. Je ne m'épancherai pas sur le sujet, tant de choses ayant déjà été dites quant à la signification du titre. Je conseille malgré tout l'excellent article de Christophe Junqua Regard sur l'Étranger de Camus qui synthétise avec brio le cas Meursault.

En revanche, Il me semble important de relever quelques détails ou interprétations du roman qui me semblent peu répandus et qui pourront donner un nouvel éclairage sur ce classique de la littérature:

- Plusieurs éléments laissent à penser que le roman Crime et Châtiment de Dostoïevski a laissé de profondes traces dans l'intrigue de l'Étranger. On retrouve dans les deux romans, une personne qui commet un meurtre pour des raisons singulières. L'une pour tester la moralité (sic) et l'autre par pur concours de circonstances. Dostoïevski et Camus partagent aussi le fait de se mettre totalement dans la peau de Raskolnikov et de Meursault. Enfin, la place prise par l'après-meurtre dans l'Étranger n'est pas sans rappeler celle de Crime et Châtiment où une partie conséquente du roman fait la part belle aux questionnements intérieurs du meurtrier. Comme si Meursault était l'antithèse de Raskolnikov.

- Les éléments du soleil et de la mer sont omniprésents dans le roman d'Albert Camus. Il n'y a pas un chapitre sans que Meursault ne fasse référence à la sensation que lui procure un rayon de soleil sur sa peau ou une une baignade en mer avec Marie. Ce n'est d'ailleurs certainement pas un hasard si le nom du personnage principal est la contraction de deux mots Mer-Soleil. Il n'y a qu'à travers ces deux éléments naturels que Meursault fera preuve de sensibilité. Est-ce une coïncidence?

- Enfin, la qualité du roman tient aussi par son effet miroir. Il est composé de deux parties qui n'ont de cesse de se renvoyer la balle à coup de parallélismes et d'oppositions. Cette scission du roman entre l'avant-meurtre et l'après-meurtre en fait presque deux histoires distinctes qui se nourrissent subtilement. le roman aurait pu voir ces deux parties inversées que cela n'aurait en rien changé la lisibilité de l'intrigue.

En guise de conclusion, ce roman est un de ceux qui, j'en suis convaincu, continuent à se bonifier avec le temps. Derrière le cas d'un meurtrier singulier, Albert Camus pose la délicate question de l'individualité dans une vie en société.

A relire.
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Etranger à lui-même, étranger au monde...La philosophie de l'Absurde, que Camus développera dans d'autres livres plus largement, est déjà présente, à travers ce personnage de Meursault, qui ne mourra pas sot, justement, car il comprendra, après sa colère contre l'aumonier venu le voir en prison, que son indifférence au monde est aussi celle, en retour, du monde envers lui." Comme si cette grande colère m'avait purgé du mal, vidé d'espoir, devant cette nuit chargée de signes et d'étoiles, je m'ouvrais pour la première fois à la tendre indifférence du monde."

" Aujourd'hui, maman est morte." Une phrase neutre, sans affect, qui, à elle seule, résume l'histoire sans histoires de Meursault, que les circonstances rendront pourtant meurtrier.Il invoquera le soleil, ce dur soleil de la plage, à Alger, pour expliquer son geste fou et mécanique à la fois." Et c'était comme quatre coups brefs que je frappais sur la porte du malheur."

J'ai aimé l'aspect original, dérangeant de ce livre mais la neutralité , la presque inhumanité de Meursault finit par exaspérer. Son détachement fait froid dans le dos.Et le livre sonne trop comme une illustration sèche d'une théorie contestable.

Face à lui, la justice représente les êtres humains qui tentent de donner une rationalité à un univers lui-même irrationnel...Effrayantes pensées...
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Aujourd'hui, j'ai lu l'Etranger. Ou peut-être hier, je ne sais plus. Je vous fais un petit topo des faits et du style afin de vous expliquer mon point de vue.


L'Etranger, c'est Meursault. Aujourd'hui, sa mère est morte. Ou peut-être hier, il ne sais pas. Il l'a placée en maison car il n'avait personne pour la garder lorsqu'il était au travail. Et aussi parce qu'ils n'avaient plus rien à se dire. A l'enterrement, les nouveaux amis de feu sa vieille mère pleurent plus que lui. Que voulez-vous, les parents partent avant nous, c'est la vie. Et « ils n'avaient plus rien à se dire », avec sa mère.
Tout de suite après, il rencontre une ancienne collègue. Son deuil tout neuf ne l'empêche pas de passer du bon temps avec elle, elle tombe amoureuse et lui demande s'il voudrait se marier avec elle. Si tu veux, lui répond-il. Mais tu m'aimes ? s'enquiert-elle. Non, lui est-il répondu (je sais, ça fait plaisir).
Quand il retourne au travail, son patron lui propose un super poste à Paris ; n'est-il pas super content de ce nouveau départ ? Il ne sait pas. Non, pas spécialement, mais « ça n'a pas d'importance », il veut bien y aller si on l'y envoie.


Et puis dans son immeuble, un voisin se lie d'amitié avec lui, lui demande un service, qu'il lui rend puisqu'il n'y avait pas de raison de ne pas lui rendre. Alors on est copain ? Si tu veux. (Non, ne demandez pas s'il en a envie lui-même, on va pas s'en sortir).
Sur une plage, l'ennemi de son nouvel ami, les menace, armé d'un couteau. Deux contre deux. Son nouvel ami lui prête une arme. La première anicroche tourne en agression avortée ; tout le monde s'égaye et vaque, la journée continue. Mais au détour d'une balade en solitaire, Meursault retombe sur l'ennemi, seul avec son couteau. La chaleur, l'adrénaline, un mouvement de l'autre, le stress des derniers jours, un moment de panique ? de rage - ou qu'en sais-je : Meursault tire. Puis tire encore. Quatre fois de plus.


Pourquoi ? Il ne sait pas. Une réponse qui aura du mal à satisfaire la justice.


*****

Bon. J'ai un peu de mal avec ce livre, même si je comprends l'idée.


Premièrement, le style : du fait, rien que du fait. Et une suite de faits, d'actes du quotidien mis bout à bout, c'est très froid. On ne s'embarrasse pas de sentiments ni de pensées à démêler. C’est même tellement poussé à l’extrême que ça en paraît parfois artificiel.


J'ai lu avec intérêt les explications de l'auteur sur ce qu'il voulait faire ressortir de son roman. Il aurait voulu faire de Meursault une sorte d'emblème de la vérité, qui dit ce qu’il pense sans se soucier du qu’en dira-t-on : s'il pense non, il dit non ; s'il ne sait pas, il ne cherche pas à inventer une réponse qui ferait plaisir. Il est un homme à qui on aurait enlevé le verni de la politesse, de la bienséance et du politiquement correct - tout ce qui fait que vivre ensemble est agréable, mais parfois un peu faux et hypocrite. En quelque sorte, le style était le personnage : pas moche mais brut de décoffrage et sans artifice.


Alors quand la justice lui posera des questions, il n’embellira pas la vérité pour se faire acquitter : Quand on lui demande pourquoi il a tiré cinq fois sur un homme déjà à terre, il répond qu’il ne sait pas.
Selon Albert Camus, c'est « l'histoire d'un homme qui, sans aucune attitude héroïque, accepte de mourir pour la vérité ».
Risquer de se faire condamner pour ne pas trahir ses idéaux, ça peut paraître à la fois stupide dans ce contexte et beau dans un autre contexte (pour un enjeu national, par exemple).
On peut admirer la quête d’absolu de l’auteur et de son personnage : Meursault disait la vérité à tout va lorsque ça l’arrangeait, et il ne change pas d’attitude même lorsque sa mort est en jeu.
A vrai dire, le miroir est même intéressant entre les habituelles excuses arrangées des accusés qui en font des tonnes pour se disculper, et Meursault qui semble demeurer fidèle à ses principes face à la menace de la peine de mort. Ca ferait presque du bien de ne pas entendre de mensonges. Presque. Parce que je ne suis pas sûre que Meursault n’arrange pas la vérité quand il dit ne pas savoir. N’est-ce pas un peu facile pour un puriste qui recherche la vérité ?


Il semble tellement à nu, sans mensonge apparent, que certains lecteurs ont pu y voir une sorte d’acharnement de la justice (et par extension de la société) à vouloir condamner Meursault uniquement parce qu’il est différent et que ça dérange : il ne pleure pas sa mère comme tout le monde parce qu’il a digéré sa mort, il ne cherche pas à se justifier de son crime, etc…
Chacun trouvera probablement sa « vérité » dans ce livre, c’est sûrement le but. Mais pour moi la « vérité » est toute autre (d’ailleurs tout au long du roman la société l’accueille plutôt bien je trouve, pour voir la personnalité !).
La société ne condamne pas Meursault pour sa différence, mais parce qu’il n’est pas capable d’expliquer pourquoi il s’est acharné sur un être humain. : Il est jugé pour son crime, à la lumière de sa personnalité. On cherche à savoir par exemple si c’est le stress des jours passés qui aurait pu causer sa réaction, s’il s’en fout vraiment (il déclare qu’il ne regrette pas mais est simplement « ennuyé »), en gros s’il a des circonstances atténuantes ou si c’est vrai psychopathe (je schématise comme l’auteur).


Mais surtout, cette histoire sonne faux pour moi : Je peux comprendre que pour décrire un genre de puriste qui ne ment pas, l’auteur ne le fasse pas se confondre en excuses bidons. Ce que je ne comprends pas en revanche, c’est pourquoi Meursault s’obstine à répondre qu’il ne sait pas pourquoi il a tiré ces cinq balles sur la victime. Admettons que sur le moment il n’ait pas eu le temps de se poser la question en ces termes et d’y répondre ; admettons que la première fois qu’on lui a demandé, il ait été surpris. Mais au bout d’un moment, « ne pas mentir » ne signifie pas « s’abstenir de réfléchir à toutes les questions que tout le monde nous pose dans la vie ».
Pour moi, Meursault aurait forcément pu donner les raisons de son acte, qu’il exprime d’ailleurs en partie en lui-même dans la scène du passage à l’acte. Ce qu’il dit à ce moment-là pourrait peut-être nous rapprocher de la vérité.


Mais éluder la réponse à chaque fois, c’est mentir ; et comme on veut nous faire croire que ce n'est pas de manière volontaire, on va dire que c'est par flemme. Alors, la vérité serait que Meursault meurt non pas pour avoir dit la vérité ("je ne sais pas") mais par paresse intellectuelle, bref, qu’il meurt de sa propre indifférence envers lui-même, la vie, et les gens qui l’entourent.
Et ça colle assez bien aussi avec le personnage qu’on nous inflige depuis le début : un Meursault qui se laisser porter par la vie, sans chercher à réfléchir à ce qu’il veut vraiment, au sens de ce qu’il fait. Ce qui en ferait plutôt une morale sur le fait de prendre sa vie en main.


Quoi qu'il en soit, ça n'enlève pas le côté artificiel que l'on doit subir pour parvenir au côté absurde voulu probablement par l'auteur. Comme si le l'auteur le retenait de nous dire toute sa vérité. Or, cette sensation à mes yeux décrédibilise Meursault et donc l'histoire entière, qui repose intégralement sur lui. Car empêcher artificiellement le personnage de répondre à la question, en l'empêchant d'y réfléchir, n'est-ce pas se mettre dans le rôle de l'avocat qui fait taire son client face aux questions compromettantes ? Et donc au final, cela ne fait-il pas de Meursaut un personnage très banal qui se ment à lui même et/ou aux autres, comme cela peut arriver à tout le monde, accusés compris ?


En tout état de cause, c’est vrai, Meursault a l'air presque étranger à lui-même (il ne semble pas si bien se connaître lui-même en ne cherchant jamais d’explication sur rien) et semble traverser sa propre vie en étranger au lieu de chercher à se l’approprier, comme s’il ne voulait pas à la contrôler, comme si ce qui lui arrivait ne le concernait pas vraiment.
En refermant ce livre, il demeure du même coup un étranger pour nous - ce qui nous met un peu dans la position des jurés, qui ne peuvent jamais connaître les véritables pensées et sentiments des êtres qu'ils jugent, mais n'en perçoivent que la surface qu'on veut bien leur montrer.


Alors, comment jugerez-vous Meursault, comment jugerez-vous ce roman? « Je ne sais pas » !
En ce qui me concerne, une lecture très artificielle dans laquelle je n'ai pas trouvé de grand plaisir immédiat sur la forme et, au surplus, une démonstration qui ne m'a pas réellement convaincue sur le fond. C'est une expérience de lecture pas inintéressante, mais un peu ratée en ce qui me concerne car elle fraude l’absurde, un concept que j’ai visiblement du mal à apprécier. Peut-être plus tard ? Cela dit, j'ai aimé Les Justes, et j’ai encore La Chute et La Peste à découvrir… To be continued !
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Livre qui questionne les relations humaines, livre qui interroge la place de l'humain avec les humains, livre qui fait réfléchir sur l'humanité.
Je pense que si je le lisais à nouveau, je découvrirais d'autres éléments dans l'histoire, autour des personnages, des descriptions.
Recommander et à recommander sans hésitation !
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L'étranger est un livre particulier, au style narratif volontairement haché, au personnage principal énigmatique, mais avec des réflexions plus que pertinentes, et je comprends qu'il soit devenu un classique de la littérature française.
Meursault, personnage sans véritable ambition ni charisme, étranger à la vie, à sa propre vie, à lui-même peut-être, interroge par ses actes sur le sens de la vie et celui qu'on veut bien lui donner.
C'est un récit au style très brut, haché, qui surprend de prime abord, mais qui finalement sied parfaitement à l'histoire et au propos.
La destinée de Meursault évoque quant à elle la destinée de l'humanité toute entière.
C'est un texte intelligent, pessimiste mais absolument pas pathétique.
La lecture en est très rapide, quelques petites heures suffisent.
Un classique qui le mérite...
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Justice est rendue. On n'abat pas un arabe de cinq coups de feu en invoquant la légitime défense, encore moins un coup de soleil, sans en outre en exprimer le moindre remord. Même au temps de l'Algérie française.

Meursault, narrateur-acteur de ce récit nous relate la tranche de sa vie, de sa fin de vie, qui l'a conduit au pied de celle que l'homme rejoint "comme on marche à la rencontre d'une personne" : la guillotine. Quand a contrario la personne qui réside en tout être humain le laisse de marbre.

Les juges ont estimé que la froideur de son tempérament était propice à la préméditation du crime qu'il a commis. Meursault fait preuve de la même insensibilité à l'énoncé du verdict qui le condamne que celle qui l'a engourdi dans ses relations avec son entourage, les femmes de sa vie en particulier : sa mère, qu'il a placée à l'asile puis enterrée sans verser la moindre larme, la douce Marie qui s'est éprise de lui et ne deviendra son épouse que si elle insiste. Côté sentiment, c'est un peu chiche.

Point de révolte chez ce "coeur aveugle". Il ne remet pas en cause la justice des hommes. Il ne peut toutefois se résoudre à la "certitude Insolente" d'une fin décidée. Il s'interroge sur l'utilité d'abréger une vie qui, de toute façon, est promise à s'éteindre d'elle-même. Pourquoi interférer dans le cours des choses ?

Raisonner en pareille circonstance est encore faire preuve de distance avec le cours des choses. C'est être étranger à soi-même. Etranger au monde, étranger à la vie.
Voilà un ouvrage dans lequel le verbe est dépouillé, comme le décor dans lequel se noue le drame, comme la palette sentimentale de ce héros qui n'inspire pas l'empathie. Les phrases sont courtes et sèches. Il en est ainsi de tout le roman. le style est direct et froid comme l'austère mécanique qui enchaîne les événements de la vie. Comme la justice qui condamne.

Meursault n'aura pas su se réchauffer au coeur des hommes, il n'attend rien non plus du secours de l'ambassadeur d'un dieu qu'il ne veut pas connaître. Plus que le drame qui se déroule sous les yeux du lecteur, c'est la part d'inhumain qui habite tout homme, lorsqu'elle le domine, qui surprend. Certains l'évacuent dans la sauvagerie, lui, c'est dans l'indifférence.

Encore Meursault se dit-il à lui-même, puisque personne ne recueille ses confidences, que l'essentiel est de donner une chance au condamné. C'est le peu que l'on percevra de son ressenti. Encore répond-t'il plus à une logique qu'à un trait d'humanité. Aussi, plus qu'un ultime sursaut d'intérêt pour la vie, ne s'agit-il pas de la crainte de l'inconnu ? Au-delà de l'oeuvre du couperet.

Albert Camus lui en a t'il donné une de chance pour qu'il nous relate son histoire, ou le fait-il intervenir d'outre-tombe, pour nous parler de la vie ?
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