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André Berne-Joffroy (Éditeur scientifique)
EAN : 9782070377695
379 pages
Gallimard (22/10/1986)
4.11/5   59 notes
Résumé :
C'est pour obéir aux ordres du directeur de ma vie que j'ai écrit l'histoire de l'abbé de Rancé. Mon premier ouvrage a été fait à Londres en 1797, mon dernier à Paris en 1844. Entre ces deux dates, il n'y a pas moins de quarante-sept ans, trois fois l'espace que Tacite appelle une longue partie de la vie humaine. Le temps s'est écoulé, j'ai vu mourir Louis XVI et Bonaparte ; c'est une dérision que de vivre après cela. Que fais-je dans le monde ? Autrefois je barboui... >Voir plus
Que lire après Vie de RancéVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (7) Voir plus Ajouter une critique
Le dernier livre De Chateaubriand. Pourquoi son confesseur l'a-t-il incité à écrire sur Rancé ? Pour le distraire de sa mélancolique vieillesse ou de son dépit ? Lui donner à réfléchir sur un modèle de retraite exemplaire ? C'est drôle comme certains mots changent de sens au fil du temps. A l'époque De Chateaubriand - et encore plus celle de Rancé - le mot de « retraite » évoquait bien moins le repos que l'effort. La retraite était un acte en soi, une activité, se retirer du monde et se tourner vers Dieu. Peut-être par nature, Chateaubriand a davantage tendance à se retourner sur sa vie.
Au début surtout, il fait beaucoup d'aller-retours entre le XVIIe siècle et sa propre vie : la révolution française, la mort du roi, ses souvenirs d'Henri V. Il compare George Sand aux romancières du XVIIe, règle inopportunément des comptes avec Paul-Louis Courier, se lamente sur sa triste époque... comme si son sujet ne l'intéressait pas. Mais à sa décharge, il semble n'avoir pas eu accès à beaucoup de documents sur la première partie de la vie de Rancé, celle où il était un religieux mondain. Il fait aussi des digressions sur les moeurs, l'art, la politique, ce qui permet de rendre magnifiquement la société de ce temps. Par exemple l'hôtel de Rambouillet, le creuset de la politesse et de l'élégance française, vite altérées en préciosité. le lieu où Rancé fréquenta Mme de Montbazon et dont la mort sera à l'origine de sa conversion. Puis les premières difficultés pour réformer La Trappe, les adversités, sa relation privilégiée avec Bossuet, son mépris de la vie, sa santé défectueuse.
Deux choses parmi d'autres ont retenu mon attention. Ce grand mémorialiste en évoque deux autres, les plus célèbres du siècle de Louis XIV : le duc de Saint-Simon et le cardinal de Retz qui ont personnellement connu Rancé. En fait, il ne consacre vraiment qu'une demi-page à Saint-Simon, pour lister quelques-unes de ses particularités qui peuvent passer pour des défauts. Il le fait avec justesse d'ailleurs. Outre les divergences de point de vue, il existait une trop forte opposition de style entre les deux ; l'effervescence et la spontanéité de Saint-Simon ne pouvait que plaire modérément à la correction, pour ne pas dire la sévérité, De Chateaubriand, à son emphase et son esprit chagrin. Il est plus prolixe sur le cardinal de Retz dont il retrace toute la carrière, mais pas plus indulgent.
D'autre part, la comparaison de la Trappe et de Port-Royal parait inévitable. La préférence De Chateaubriand va évidemment à la première abbaye, trouvant que Port-Royal et les Jansénistes, malgré toute leur austérité, étaient encore trop impliqués dans le monde. Il retrace les relations de Rancé et des Jansénistes. Il reproduit une longue lettre de 1676 adressée à M. de Brancas, dans laquelle l'abbé avoue les avoir combattus dans sa jeunesse et s'en être repenti par la suite. Mais Chateaubriand précise que son avis évolua encore : « influencé par Bossuet, [il] changea d'opinion ; il cessa de tolérer ce qu'il avait respecté. »
Il ne me reste plus qu'à lire ses Mémoires d'Outre-Tombe, pour voir comment ce farouche royaliste et fervent chrétien a vécu la Révolution. Mal a priori, comme un bain de sang.
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Ce n'est pas la lecture la plus facile d'accès et la plus agréable à lire pour moi selon mes préférences : la biographie d'un homme d'église vivant hors du monde, avec des réflexions sur sa spiritualité est assez éloignée de mes lectures habituelles. J'ai beaucoup oublié de ce que je savais sur Port-Royal et le jansénisme, sur le quiétisme... Si je m'intéresse beaucoup au Grand Siècle, ce n'est pas les querelles théologiques que je maîtrise le mieux.
Néanmoins, c'est une oeuvre De Chateaubriand, ce qui signifie un style d'écriture élevé. Et, surtout, ce n'est pas qu'une biographie de Rancé, mais il y a quasiment quatre biographies en une...
J'ai d'abord été intéressée par la vie du jeune Rancé, abbé car possédant par privilège familial une abbaye et non pas parce qu'il est prêtre, car j'y retrouvais le XVII ème siècle qui m'est familier, celui des duels, des écrivains de Louis XIII, du début de la Fronde ; celui des Mousquetaires en un mot - du moins, ce début du XVII ème siècle qui n'est pas encore le Grand Siècle car le soleil ne s'est pas encore levé, que je connais assez intimement grâce à Dumas. Rancé est donc un lettré reconnu, un docteur, mais c'est surtout un abbé mondain. Il court les ruelles des précieuses - qui ne sont pas ridicules, avec une grande passion au coeur. Un abbé, bretteur, séducteur, au XVII ème siècle... Cette première vie de Rancé résonne en moi en évoquant Aramis de Dumas - qui connaissait bien les mémoires du temps. Rancé n'est pas le seul abbé mondain, n'ayant de rapport à la religion que les bénéfices. Cette première partie m'a donc plus séduite que le reste.
La deuxième partie de a vie de Rancé, après sa conversion et sa retraite à la Trappe, se passe pendant le véritable Grand Siècle, c'est-à-dire sous Louis XIV. Et cela permet à Chateaubriand de nous donner son deuxième portrait de façon plus souterraine, celui de Louis XIV. Mais c'est un portrait du roi dans son siècle, appelé depuis Voltaire "Siècle de Louis XIV". Car Louis XIV est inséparable de ceux qui ont fait sa gloire, les militaires en tant que roi de guerre, les peintres, artistes, poètes et dramaturges, qui le font briller en tant que roi Soleil.
D'où le troisième portrait, à un troisième niveau d'écriture, celui du grand homme du XIX ème siècle, Napoléon. Chateaubriand le monarchiste le met toujours en face de Louis XIV, il le compare ; certes, pour lui, c'est le roi qui est supérieur, mais on sent justement à quel point Chateaubriand admire l'Empereur, puisqu'il ne peut s'empêcher de le citer tout le temps, qu'il parle de guerre, d'art, de spiritualité... Pour reprendre Victor Hugo, "toujours dans nos tableaux, tu jettes ta grande ombre", Napoléon domine le siècle et donc la littérature, même celle de ses opposants.
Et c'est là le 4ème portrait, de façon encore plus implicite, celui De Chateaubriand lui-même. En parlant de Rancé, il parle de lui. Et que cet autoportrait en creux est sombre et noir ! Chateaubriand se sent lui aussi à l'automne de sa vie, il regrette sa jeunesse, les jours qui ne sont plus. Il pense à la postérité, ou plutôt à l'absence de postérité, comparant son oeuvre, celle qu'il est en train d'écrire, aux runes scandinaves que plus personne ne sait lire, ou à la poussière qui s'efface au vent.
Plus que le portrait des tourmentes spirituelles de Rancé, ce sont les autres biographies qui m'ont intéressée, ainsi que le portrait d'une époque.
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Je ne vais pas écrire sur Chateaubriand, ni sur Rancé, je vais divaguer...
C'est-à-dire ne pas occulter ce qu'il y a eu de "non-lecture" au cours de cette lecture.
Comment ce livre a-t-il été écrit ? (ou non-écrit)

C'était le sujet d'un cours d'Antoine Compagnon, c'était la "fin de la littérature"..
Les histoires de reclus volontaires m'ont toujours passionné, l'ermitage plus ou moins complet, la mortification au coeur de la religion
J'ai eu des moments d'absence
J'ai beaucoup pleuré...
J'ai eu un fol espoir

Je n'ai pas tout lu, pas tout compris, il y avait trop de vie autour des lignes pour tout saisir
Trop d'éclat !
Le désespoir repose et enivre en même temps
L'auteur ne fait plus semblant d'être un auteur, il le devient, renonçant...

Qu'y a-t-il dans le monde ?
Une grande inexactitude et l'absence de réponse
La furie...
La foi me console comme l'existence d'une terre étrangère que je ne pourrais jamais atteindre, je m'en raconte les histoires, en imagine les personnages, je m'arrête
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Livre foutraque écrit par un vieillard sur la vie d'un religieux top beau pour être vrai.
Digressions extraordinaires, sublimes cheveux sur la soupe d'un récit qui part dans tous les sens (ah la petite fleur de l'Himalaya!).
Ce ne pourrait n'être que ridicule: c'est aussi carrément génial
Livre ovni d'un insurpassable génie
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C'est pour obéir aux ordres du directeur de ma vie que j'ai écrit l'histoire de l'abbé de Rancé. Mon premier ouvrage a été fait à Londres en 1797, mon dernier à Paris en 1844. Entre ces deux dates, il n'y a pas moins de quarante-sept ans, trois fois l'espace que Tacite appelle une longue partie de la vie humaine. le temps s'est écoulé, j'ai vu mourir Louis XVI et Bonaparte ; c'est une dérision que de vivre après cela. Que fais-je dans le monde ? Autrefois je barbouillai du papier avec mes filles, Atala, Blanca, Cymodocée, chimères qui ont été chercher ailleurs la jeunesse. On remarque des traits indécis dans le tableau du Déluge, dernier travail du Poussin : ces défauts du temps embellissent le chef d'oeuvre du grand peintre ; mais on ne m'excusera pas, je ne suis pas Poussin, je n'habite point au bord du Tibre, et j'ai un mauvais soleil.

(Abbé de la Trappe, Orne - 1664-1700)

Ce peu de temps qui fuit d'un cours imperceptible,
Et qui ne m'est donné qu'afin de me sauver.
Tôt ou tard par la mort doit enfin s'achever ;
Et de mes jours comptés le terme est infaillible.

D'être surpris coupable en ce moment terrible,
Et de laisser à Dieu de quoi me réprouver,
Dans quel affreux malheur ce serait me trouver !
Et toutefois, hélas ! ce malheur est possible.

Ce malheur est possible ! et je chante et je ris !
Et des objets mortels mon coeur se sent épris !
Dans quel sommeil mon âme est-elle ensevelie ?

Que fais-je ? Qu'ai-je fait du temps que j'ai passé ?
Ah ! mon amusement me convainc de folie,
Vivre sans vivre en saint, c'est vivre en insensé.

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critiques presse (1)
Actualitte
03 mai 2017
C’est une méditation sur le sens de l’existence. L’idéal chrétien a quelque chose de grandiose et il place les croyants devant leur propre faiblesse.
Lire la critique sur le site : Actualitte
Citations et extraits (64) Voir plus Ajouter une citation
Voici qu'un matin quelque chose de presque insensible se glisse sur la beauté de cette passion, comme une première ride sur le front d'une femme adorée. Le souffle et le parfum de l'amour expirent dans ces pages de la jeunesse, comme une brise le soir s'alanguit sur des fleurs: on s'en aperçoit, et l'on ne veut pas se l'avouer. Les lettres s'abrègent, diminuent en nombre, se remplissent de nouvelles, de descriptions, de choses étrangères; quelques-unes ont retardé, mais on est moins inquiet; sûr d'aimer et d'être aimé, on est devenu raisonnable; on ne gronde plus, on se soumet à l'absence. Les serments vont toujours leur train; ce sont toujours les mêmes mots, mais ils sont morts; l'âme y manque: " je vous aime" n'est plus là qu'une expression d'habitude, un protocole obligé, le "j'ai l'honneur d'être" de toute lettre d'amour. Peu à peu le style se glace, ou s'irrite; le jour de poste n'est plus impatiemment attendu; il est redouté; écrire devient une fatigue. On rougit en pensée des folies que l'on a confiées au papier; on voudrait pouvoir retirer ses lettres et les jeter au feu. Qu'est-il survenu? Est-ce un nouvel attachement qui commence ou un vieil attachement qui finit? n'importe: c'est l'amour qui meurt avant l'objet aimé. On est obligé de reconnaître que les sentiments de l'homme sont exposés à l'effet d'un travail caché; fièvre du temps qui produit la lassitude, dissipe l'illusion, mine nos passions, fane nos amours et change nos cœurs, comme elle change nos cheveux et nos années. Cependant il est une exception à cette infirmité des choses humaines; il arrive quelquefois que dans une âme forte un amour dure assez pour se transformer en amitié passionnée, pour devenir un devoir, pour prendre des qualités de la vertu; alors il perd sa défaillance de nature, et vit de ses principes immortels.


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Don Pierre Le Nain, religieux et prieur de l'abbaye de La Trappe, frère du grand Tillemont et presque aussi savant que lui, est reconnu comme le plus complet historien de Rancé. Il commence ainsi la vie de l'abbé réformateur.

" L'illustre et pieux abbé du monastère de Notre-Dame de La Trappe, l'un des plus beaux monuments de l'ordre de Cîteaux, le parfait miroir de la pénitence, le modèle accompli de toutes les vertus chrétiennes et religieuses, le digne fils et le fidèle imitateur du grand saint Bernard, le révérend père dom Armand-Jean Le Bouthillier de Rancé , de qui, avec le secours du ciel, nous entreprenons d'écrire l'histoire, naquit à Paris, le 9 janvier 1626, d'une des plus anciennes et illustres familles du royaume. Il n'y a personne qui ne sache qu'elle a donné à l'Eglise monseigneur Victor Le Bouthillier, évêque de Boulogne, depuis archevêque de Tours, premier aumônier de M. le duc d'Orléans ; monseigneur Sébastien Le Bouthillier, évêque d'Aire, prélat d'une piété singulière ; et à l'Etat Claude Le Bouthillier, sieur de Pons et de Foligny, qui fut d'abord conseiller au parlement de Paris, ensuite secrétaire d'Etat, et quelques années après surintendant des finances et grand-trésorier des ordres du roi. Cette famille, qui tirait son origine de Bretagne et touchait de parenté aux ducs de cette province, a été encore plus ennoblie par la sainteté de celui dont nous écrivons la vie.

" Son père se nommait Denis Le Bouthillier, seigneur de Rancé, maître des requêtes, président en la chambre des comptes et secrétaire de la reine Marie de Médicis. Il épousa Charlotte Joly, de laquelle il eut huit enfants : cinq filles, qui se firent religieuses presque toutes, et trois garçons. Le premier, Denis-François Le Bouthillier, fut chanoine de Notre-Dame de Paris ; le second fut notre digne abbé, le troisième est le chevalier de Rancé, qui servit Sa Majesté en qualité de capitaine du port du Marseille et de chef d'escadre.

" Comme notre abbé avait été baptisé en la maison de son père sans les cérémonies ordinaires de l'Eglise, elles furent suppléées le 30 mai 1627 en la paroisse de Saint-Côme-et-Saint-Damien. L'éminentissime cardinal de Richelieu fut son parrain, et lui donna le nom d'Armand-Jean ; il eut pour marraine Marie de Fourcy, femme du marquis d'Effiat, surintendant des finances. "

Tel est le début du Père Le Nain. Le désert se réjouit, le réformateur de La Trappe se montre au monde entre Richelieu, son protecteur et Bossuet, son ami. Il fallait que le prêtre fût grand pour ne pas disparaître entre ses acolytes.

Le frère aîné de Rancé, Denis-François, le chanoine de Notre-Dame était dès le berceau abbé commendataire de La Trappe ; la mort de Denis rendit Armand le chef de sa famille : il hérita de l'abbaye de son frère par cet abus des bénéfices convertis en espèce de biens patrimoniaux. Admis dans l'ordre de Malte, quoiqu'il fût devenu l'aîné, ses parents le laissèrent dans la carrière de l'Eglise.
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Sociétés depuis longtemps évanouies, combien d’autres vous ont succédé ! les danses s’établissent sur la poussière des morts, et les tombeaux poussent sous les pas de la joie. Nous rions et nous chantons sur les lieux arrosés du sang de nos amis. Où sont aujourd’hui les maux d’hier ? Où seront demain les félicités d’aujourd’hui ? Quelle importance pourrions-nous attacher aux choses de ce monde ? L’amitié ? Elle disparaît quand celui qui est aimé tombe dans le malheur, ou quand celui qui aime devient puissant. L’amour ? Il est trompé, fugitif ou coupable. La renommée ? Vous la partagez avec la médiocrité ou le crime. La fortune ? Pourrait-on compter comme un bien cette frivolité ? Restent ces jours, dits heureux, qui coulent ignorés dans l’obscurité des soins domestiques, et qui ne laissent à l’homme ni l’envie de perdre ni de recommencer la vie.
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Les hommes qui ont vieilli dans le désordre pensent que quand l’heure sera venue ils pourront facilement renvoyer de jeunes grâces à leur destinée, comme on renvoie des esclaves. C’est une erreur. On ne se dégage pas à volonté des songes ; on se débat douloureusement contre un chaos où le ciel et l’enfer, la haine et l’amour se mêlent dans une confusion effroyable. Vieux voyageur alors, assis sur la borne du chemin, Rancé eût compté les étoiles en ne se fiant à aucune, attendant l’aurore, qui ne lui eut apporté que l’ennui du cœur et la difformité des jours. Aujourd’hui il n’y a plus rien de possible, car les chimères d’une existence active sont aussi démontrées que les chimères d’une existence désoccupée. Si le ciel eût mis au bras de Rancé les fantômes de sa jeunesse, il se fût tôt fatigué de marcher avec des Larves. Pour un homme comme lui il n’y avait que le froc ; le froc reçoit les confidences et les garde ; l’orgueil des années défend ensuite de trahir le secret, et la tombe le continue. Pour peu qu’on ait vécu, on a vu passer bien des morts emportant leurs illusions. Heureux celui dont la vie est tombée en fleurs ! élégances de l’expression d’un poète qui est femme.
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Rancé, c'est aussi lancer à la face du siècle réputé incroyant un idéal d'ascétisme qui donne au catholicisme le prestige de l'incorruptibilité, de la pureté, d'une forme de sublime provocateur. Il y a de cette attitude dans le texte de Chateaubriand, qui relève, tels les gueux de la révolte, le flambeau d'une pratique chrétienne traditionnelle que les temps faisaient volontiers passer pour ridicule : désinvolture superbe à montrer très simplement que l'on va se confesser très régulièrement, à affirmer qu'il y a de la grandeur à réciter son chapelet, comme le prince de Lampedusa, comme si vous et moi ne faisions pas autre chose.

(…)

C'est avec Couperin qu'il faut marier la Vie de Rancé. Cette "grande aphonie", qui atténue l'écho de la tourbillonnante fronde en Barricades mystérieuses, est tout à fait analogue à la délicatesse de toucher qu'exige Couperin, même dans l'énergie la plus mâle, même dans la fantaisie la plus débridée, miracle d'équilibre qui n'est réservé qu'aux très grands. Au plan très clair de la Vie de Rancé, on pourrait distribuer des titres puisés dans les Pièces de clavecin. À la généalogie de Rancé et à son enfance Les Fastes de la grande et ancienne ménestrandise. Au tableau trépidant du XVIIº siècle Les Tricoteuses, avec sa section "mailles lâchées", quand Chateaubriand déraille. Le Drôle de corps à la duchesse de Montbazon, Les Regrets au travail de discernement qui suit la conversion et au voyage à Rome. À la réforme de la Trappe Les Vieux Seigneurs, Sarabande grave et à la mort Le Point du jour. il y a chez Couperin le même mélange de fantaisie, de mélancolie et de grandeur que dans cette Vie de Rancé où tout semble baisser d'un ton, même l'humour noir, où tout paysage s'estompe dans l'invasion des nuages, avant la tombée de la nuit qui empêchera désormais de les voir.

(Introduction de Nicolas Perot)
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Vidéo de François-René de Chateaubriand
INTRODUCTION : « Il est assez probable que les pages intitulées Pensées, Réflexions et Maximes seront une révélation pour bien des gens, — même pour ceux qui connaissent très suffisamment leur Chateaubriand [1768-1848]. de cela il y a de fort bonnes raisons. Ces pages sont assez courtes ; elles n'ont jamais été publiées, que je sache, séparément ; elles ont paru, pour la première fois, très tardivement, entre 1826 et 1831, quand l'auteur donna chez le libraire Ladvocat, la première édition de ses Oeuvres complètes. […] Et cependant, ces Pensées, — dont l'origine exacte nous échappe, — sont pour la plupart fort remarquables ; et il est évident, pour qui sait lire, qu'il n'eût tenu qu'à Chateaubriand d'en grossir considérablement le nombre, et de se faire une juste place, à côté, et probablement au-dessus de son ami Joubert [1754-1824], parmi les Moralistes français. […] » (Victor Giraud.)
« Le chant naturel de l'homme est triste, lors même qu'il exprime le bonheur. Notre coeur est un instrument incomplet, une lyre où il manque des cordes, et où nous sommes forcés de rendre les accents de la joie sur le ton consacré aux soupirs. » (Oeuvres complètes de M. le Vicomte de Chateaubriand, tome XVIII, Paris, Pourrat frères, 1836, p. 119.)
CHAPITRES : 0:00 — 1. ; 0:45 — Introduction ; 1:09 — 7. ; 2:11 — 18. ; 2:46 — 20. ; 3:10 — 27. ; 3:23 — 30. ; 3:38 — 31. ; 3:51 — 36. ; 4:06 — 38. ; 4:25 — 49. ; 5:09 — 62. ; 5:40 — 64. ; 5:55 — 68. ; 6:48 — 69. ; 7:05 — Générique.
RÉFÉRENCE BIBLIOGRAPHIQUE : Chateaubriand, Pensées, réflexions et maximes, suivies du Livre XVI des Martyrs, édition nouvelle par Victor Giraud, Paris, Bloud & Cie, 1908, 68 p.
IMAGE D'ILLUSTRATION : https://ia800109.us.archive.org/23/items/EST95RES_P8B/BSG_EST95RES_P8B.jpg
BANDE SONORE ORIGINALE : Carlos Viola — Immortal Beloved Immortal Beloved by Carlos Viola is licensed under an Attribution-NonCommercial 3.0 Unported (CC BY-NC 3.0) license. https://thegamekitchen.bandcamp.com/track/immortal-beloved
LIVRES DU VEILLEUR DES LIVRES :
CE MONDE SIMIEN : https://youtu.be/REZ802zpqow
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#Chateaubriand #Pensées #LittératureFrançaise
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