"My African Journey" (Mon voyage en Afrique) a été écrit en 1907 par
Winston Churchill, futur prix Nobel 1953. A l'époque, le jeune
Winston Churchill est sous-secrétaire d'état pour les Colonies et son poste l'amène à séjourner en Afrique, plus précisément en Ouganda qui est alors un protectorat de l'empire britannique.
Le livre date, c'est sûr ! Et dans sa façon de parler des "populations indigènes" comme de grands enfants à éduquer vers le "progrès", et dans son éloge de la chasse sans aucune retenue.
Winston Churchill écrit avec beaucoup de talent. Son écriture est vivante, le rythme soutenu, on ne s'ennuie pas. Il sait aussi bien raconter une bonne chasse au lion (!) que nous partager ses réflexions sur l'avenir géopolitique de cette Afrique coloniale en construction. Il faut lire sa réponse à ceux qui pensent que l'Afrique deviendra "blanche" !
Il montre déjà une certaine intelligence du terrain, puisqu'il reconnaît aux Indiens la prédominance dans la "middle-class" existante en Afrique de l'Est. Comme le bas de l'échelle est occupé à l'époque par les Noirs qui sont recrutés pour toutes les basses besognes, il ne reste aux Blancs, conclut-il, que la place de "capitalistes" en Afrique…
Bien que racontés avec talent et un grand sens du suspens, les exploits de chasse font mal au coeur. Les animaux de toutes sortes sont traqués, acculés, blessés, tués. On est loin des safaris photographiques… D'ailleurs même
Churchill, le fusil pointé sur son gibier, va se poser la question de savoir si finalement cet animal n'a pas autant le droit de vivre que lui !...
Vu l'époque et le contexte, l'auteur soutient bien sûr l'apport positif des européens, en particulier dans le protectorat en Ouganda : la sécurité face aux territoires voisins, la justice, les hôpitaux, l'éducation, la religion monothéiste. L'auteur nous rappelle les ravages causés en Afrique par la mouche tsetse et la maladie du sommeil au début du siècle. Il nous décrit en détails comment les scientifiques occidentaux ont découvert la provenance de la maladie et comment ils envisagent alors d'enrayer sa propagation.
Churchill arrive à Kampala, il est même reçu par le jeune roi ougandais, alors âgé d'une dizaine d'année (et bénéficiant d'un précepteur anglais). Il nous fait visiter la ville en détails, photos à l'appui. Malheureusement, et c'est ma grande frustration, ma version Kindle ne contient pas les nombreuses photos, ni les plans contenus dans l'édition livre.
Il remonte ensuite le Nil jusqu'à sa source, et de là, part en "Safari" (mot swahili signifiant « long voyage », issu de l'arabe, nous apprend
Churchill). Il décrit rigoureusement comment s'équiper pour un safari, le nombre de porteurs qu'il vous faut, la vitesse de marche à atteindre, et surtout comment se protéger des moustiques qui sont une vraie menace. La caravane se met en route, le chef des porteurs frappant ceux qui traînent et l'ensemble chantant une mélodie de marche (Cette description m'a en tout points rappelé le voyage décrit dans le roman "Paradise" de Gurnah !). Arrivés à Hippo camp, ils chassent le gros gibier, hippo et éléphants.
La fin du livre se concentre sur la descente du Nil jusque Karthoum et un épilogue dans lequel
Churchill présente son point de vue : encourager le protectorat en Ouganda, construire des lignes de chemin de fer, avec chiffres et détails à l'appui.
Je referme ce livre avec une grande admiration pour ce jeune
Churchill, intelligent, dynamique, courageux et très bon écrivain. Ce livre, qui n'a plus rien d'actuel, est pourtant un livre de voyage bien mieux écrit que certains livres récents dans lesquels les auteurs se mettent tellement en avant qu'ils en oublient de vous décrire les lieux visités…