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sur 1546 notes

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Lu deux fois, bouleversant !
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La vieille tante Rosamond vient de mourir à 74 ans. Elle était malade du coeur. Elle a émis le souhait que sa nièce Gill retrouve Imogen qui est la petite-fille de Beatrix, cousine de Rosamond. Il s'agit de lui transmettre un lot de quatre cassettes audio sur lesquelles Rosamond a enregistré le récit de sa vie. Ce récit s'appuie sur 20 photos souvenir que Rosamond décrit mais cette description est aussi un prétexte à se remémorer les événements dans lesquels sont intervenus les gens et les lieux photographiés.

L'histoire commence pendant la seconde guerre mondiale quand les enfants sont évacués des villes britanniques pour les protéger des bombardements allemands et placés dans des familles à la campagne. Rosamond âgée de huit ans est envoyée chez ses oncle et tante. Elle y fait la connaissance de sa cousine Beatrix dont elle va devenir très proche. Cette relation, jamais facile, marquera le reste de sa vie.

Tout le récit est empreint de nostalgie. Nostalgie douce quand il s'agit des souvenirs d'enfance puis de plus en plus poignante à mesure qu'on avance et qui m'a fait venir des larmes aux yeux sur la fin. C'est un livre émouvant que j'ai lu d'une traite et que j'ai trouvé très bien écrit.

Il est question de relations familiales difficiles qui se transmettent, de filles mal-aimées par leurs mères sur trois générations. Il est question de la perte d'un amour dont on ne se remet jamais vraiment. Il est question d'un lac en Auvergne qui serait comme un avant-goût du paradis.

"Tu comprends, ça n'existe pas, la pluie, avant qu'elle tombe. Il faut qu'elle tombe, sinon ça n'est pas de la pluie." C'était un peu ridicule de vouloir expliquer ça à une enfant, et je regrettais de m'être lancée là-dedans. Mais Thea ne semblait avoir aucun mal à saisir ce concept -bien au contraire : au bout de quelques instants, elle m'a regardée avec pitié en secouant la tête, comme si c'était éprouvant pour elle de discuter de ces matières avec quelqu'un d'aussi obtus. "Bien sûr que ça n'existe pas, elle a dit. C'est bien pour ça que c'est ma préférée. Une chose n'a pas besoin d'exister pour rendre les gens heureux, pas vrai?"
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Dans ce livre, nous retrouvons donc bien ; le court, la langue belle qui glisse toute seule, hypnotique, mais pas le léger.
Nous voilà dans une lande anglaise franchement lugubre, avec des personnages fantomatiques. Mais qui ont la présence des spectres. En effet, ces spectres sont très présents, palpables et chaque souvenir qu'ils appellent semble si réel qu'ils paraissent encore vivant aux personnages du roman. L'ambiance est bien dérangeante en somme. Je n'avais jamais lu cet auteur connu qui manie avec brillo la langue. Passant d'un point de vue à un autre sans user de mascarade ni d'artifice avec une facilité déconcertante grâce à une narration omnisciente. Vous l'aurez compris, ce qui séduit, c'est l'écriture.
Ensuite, l'atmosphère hypnotise, autant séduisante que macabre. Moi qui adore les romans histoires de famille, de vie, j'étais rudement bien tombée !

Il y a également le récit central : celui, réellement, qui révèle la fameuse histoire de famille. Une vieille femme qui vient de décéder (un spectre, comme on disait) laisse un témoignage audio, celui là même que nous lisons. Elle parcours ainsi sa vie et celles de ceux qui l'ont croisé, dès la Seconde Guerre Mondiale alors qu'elle était enfant. Cela a quelque chose de touchant, pour moi, car ma grand-mère doit avoir son âge et la campagne sordide me rappelle celle où elle habite.
Ce qui est particulièrement fascinant dans ce témoignage oral, au-delà de la maîtrise stylistique entre oralité, souvenirs flous et pourtant d'une linguistique parfaite, c'est que ce témoignage est fondé sur des photos. La vieille dame raconte ses souvenirs au travers de vingt photos sélectionnées, entre description et souvenirs. Et je trouve l'idée superbement bien menée, avec quelque chose de très poétique. D'autant plus que cette idée de description audio de photographies qui ravivent de souvenir à une symbolique folle dans ce texte (pour des raisons que je laisse le plaisir de découvrir, mais qui sont très parlantes.) Enfin, il y a une belle réflexion sur ces raviveurs de mémoires qui, si on parle beaucoup de supports visuels, sont détrônés par le son et l'odeur. En filigranes, d'ailleurs, cette réflexions est saupoudrée par divers personnages secondaires. Comme si de rien. C'est encore plus agréable et poétique car non frontal.
Comme si de rien, et c'est là où est la force de ce texte : des comme si de rien prodigieusement impactant.

Comme je l'ai dit, le texte est raconté par une personne âgée, mourante au moment de sa diction, et on retrouve des réflexions sur les souvenirs, les digressions, les fascinations morbides typiques d'un certain moment de la vie.
Dans ces souvenirs soi-disant audio, bien que nous, lecteurs, lisions, n'avons aucun mal à nous mettre à la place des personnages qui écoutent les bandes de cassette. En effet, nous non plus, nous n'avons pas accès aux images décrites, il faut se les figurer. Tout comme les écouteurs, aveugles.
Je trouve édifiant la manière dont le texte est traité, notamment car il parle de la condition des femmes à ces époques qui nous paraissent lointaines.
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Les photos, ça s'écoute (aussi, et surtout!)

Factuellement, il n'est pas nécessaire, ni souhaitable, de rajouter quoi que ce soit à la présentation de l'éditeur. Elle est amplement suffisante.
Il me reste donc à livrer des éléments de cette expérience de lecture.

Il ne m'a pas fallu plus de 7 pages pour entrer dans l'histoire : dans ce laps de temps, la tante Rosamond est déjà morte et enterrée. On a aussi déjà fait la connaissance d'une douzaine de personnages (Rosamond, Gill, Stephen, Thomas, David, Sylvia, révérend Tawn, Elizabeth, Dr May, Ruth, Catharine, Imogen...). Leurs portraits physiques sont déjà esquissés, leurs profils psychologiques aussi, ainsi que les types de connexions interpersonnelles qu'ils entretiennent entre eux. Des tensions sont déjà palpables, des réminiscences d'événements passés affleurent. Pour couronner le tout, la mort de Rosamond semble receler une part de mystère, de même que son testament, dont la divulgation commence déjà. Bref, ça part bien.
Le poisson que je suis, a mordu à l'hameçon. Jonathan Coe ne m'a relâché que 2 longues soirées plus tard, vivant et satisfait, au terme de 250 pages d'immersion.

Pour parler davantage de ce livre sans trop en révéler, je vais utiliser des sentiers détournés :
1) Dès la première occurrence du prénom "Rosamond" (le personnage principal) dans le roman, j'ai malgré moi fait le rapprochement phonétique avec le mot "Rosebud". Je dois dire que la voix d'Orson Welles (en V.O) prononçant ce mot dans le film Citizen Kane, avec un gros plan sur sa bouche, est imprimée dans ma mémoire de façon indélébile et prégnante. Dans ce film, le richissime Charles Foster Kane (interprété par O.Welles) laisse échapper cet ultime mot en mourant. Un journaliste va s'efforcer d'en trouver la signification, dont on pressent l'importance. "Rosebud" renvoie effectivement à un évènement ancien, traumatisant et essentiel. Mais faute de témoignages, le mystère risque de se refermer définitivement et le sens de ce souvenir structurant pour Kane pourrait disparaître avec lui.

2) J'ai chez moi une reproduction d'une photo de foule prise sur la plage de Coney Island en 1929. Toutes ces personnes (des centaines) fixent l'objectif (et donc moi !). Leurs traits et leurs regards sont d'une grande netteté. A travers les 80 années qui nous séparent, il semble que nous nous fixons, que nous établissons les prémices d'un contact.
Cette photo est fascinante mais elle provoque un certain désarroi. Toutes ces personnes (probablement mortes maintenant) sont autant de vies et d'histoires, mais tout ce que je peux en tirer s'arrête à cette surface insondable. À elle seule, cette image reste désespérément muette et sujette à toute interprétation fantaisiste. de plus les apparences sont trompeuses. On "prend la pose" le temps d'un cliché, l'affectation surgit pour masquer la "vérité" de l'instant qu'on essayait justement de saisir.

Dans cette histoire, Rosamond digresse, s'éloigne des descriptions formelles, révèle les couches profondes d'une vingtaine de photos.
Dois-je le préciser? J'ai beaucoup aimé.
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Voilà un roman comme je les aime, simple et émouvant. Il m'a beaucoup fait pensé à "L'étrange disparition d'Esmée Lennox" de Maggie O'Farrell. J'aime ces histoires de femmes, de volonté, de destin.

Il s'agit là du premier livre de Jonathan Coe que je lis, et j'ai apprécié son écriture, sa capacité à faire vivre Rosamond. le lecteur traverse la vie de Rosamond au travers de la description de vingt photos. Et ces photos, on les voit ! Elles sont parfaitement décrites. C'est une approche originale qui rend ce roman si particulier. Ce livre pourrait faire l'objet d'une belle adaptation cinématographique. Tout à la fin, certains éléments se recoupent, ferment la boucle.

Alors, la vie est-elle seulement une succession de hasards, ou bien y a-t-il un destin tout tracé pour chacun d'entre nous ?...
Lien : http://caromleslivres.canalb..
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Poignant voyage dans le passé dans différents lieux clefs, à travers le récit d'une vieille tante avant sa mort, à partir de 20 photos qu'elle a entrepris de décrire à une jeune femme aveugle.
Retrace trois générations de filles mal aimées de leurs mères, un ton mélancolique sur fond de campagne anglaise brumeuse et de musique lyrique (Chants d'Auvergne, de Canteloube, belle découverte pour moi) dans une magnifique écriture fluide et poétique.
Réflexions sur le sens de la vie, qui nous échappe malgré les coïncidences et occasions manquées. M'a fait penser à Mrs Dolloway : les actions défilent mais la pensée s'est arrêtée dans un ailleurs ou le questionnement règne (roman essentiellement féminin! Exercice réussi pour un auteur masculin), incapacité à tout saisir dans le tourbillon de la vie
Réflexions intéressantes sur les photos de famille, témoins souvent trompeurs (une image peut dire tout et son contraire), mais précieux support pour se raconter soi et se définir par rapport à son histoire familiale
J'ai note aussi la difficulté très actuelle que rencontre la narratrice principale, de ne pouvoir adopter l'enfant en partie en raison de son orientation homosexuelle, alors qu'on ressent toute la légitimité de sa demande.
Pour résumer, un roman touchant, beau, intime, féminin, que je conseille vivement !
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Voilà un magnifique roman, envoûtant. Et vous pouvez sortir les mouchoirs. Pourtant, ce n'est jamais mièvre et tout est dans la nuance. Les pages qui donnent l'explication du titre du roman sont absolument splendides.
On y croise plusieurs personnages féminins, plusieurs destins. Les hommes n'ont pas ici le beau rôle, sans qu'il n'y ait toutefois de revendications particulières. Ici, ce qui se joue ce sont le destins de ces différentes femmes, la manière de vivre leur féminité à différentes époques. le procédé narratif utilisé est très original. Raconter une vie à travers un album photo, expliquer qui se trouve sur chaque cliché, quand a été prise la photo... à une jeune aveugle.
Vraiment un très beau roman.
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A travers une série de photos destinées à une jeune aveugle, donc accompagnées de cassettes audio explicatives, Rosamond se fait la narratrice d'une saga familiale. Rosamond vient juste de mourir et sa nièce, Gill et les filles de celle-ci écoutent religieusement les cassettes en regardant les photos, car la jeune aveugle, Imogen a disparu de la circulation proche de la narratrice.
Chaque photographie est en fait une histoire dans l'histoire, une amitié, des serments, de grandes occasions, l'amour d'une vie, des enfants, des vacances, des réunions familiales, des Noëls etc. Les personnages vont et viennent au fil du temps où tout se défait et se refait autrement, où les moments de bonheur intense précèdent les tragédies, les mots et les disputes irréparables qui déterminent tout le reste d'une existence.
« Rien n'est laissé au hasard , après tout» (Nothing was random after all.) pense Gill à la fin du livre. En effet, l'auteur nous plonge et nous entraîne dans cette famille , dans l'histoire de Rosamond depuis la seconde guerre mondiale jusqu'à nos jours. Il y met tellement de choses sur la fidélité, la confiance, la foi en l'autre , l'amour de deux femmes entre elles (Rosamond préfère les femmes, ce qui ne va pas toujours sans quelque problème dans sa vie en général) et surtout l'attachement aux enfants, mais pas n'importe lesquels, ceux que le destin a choisis, et même si pour certains de leurs parents « ils ne fallait pas qu'il naissent… », c'est pour d'autres une révélation :

“I have only ever enjoyed the company of exceptional children. I am not talking about IQs or early signs of musical genius. I'm talking about the way they look, the way they talk, their sense of humour, their sense of fun, a certain quality of animation and vitality which you find in some children and which makes you glad to be around them.”
(Je n'ai toujours apprécié que la compagnie d'enfants exceptionnels. Je ne parle pas de QI ou des prémisses du génie musical. Je parle de la façon d'être, de parler, de leur sens de l'humour, de l'amusement, une certaine qualité d'animation et de vitalité qu'on trouve chez les enfants et qui font qu'on est heureux d'être avec eux.)

On pourrait trouver lassant cette voix d'outre-tombe de Rosamond qui décrit chaque photo par le menu, en partant bien du premier plan, ressuscitant le souvenir pour Imogen,qui n'est pas aveugle de naissance mais par un de ces accidents de la vie qui jalonnent le roman – et hélas, les vies aussi – mais rien n'y fait, on creuse l'abîme avec elle, car nous avons la même position de l'aveugle puisqu'aucune de ces photos n'apparaît sous nos yeux de lecteur mais sont « révélées » avec tellement plus de profondeur par la narratrice qu'elles semblent un peu nous appartenir. le talent exceptionnel de Coe – comme tout grand écrivain- est de rendre universel ce qui ne pourrait être que privé : une fugue entre cousines, un Noël dans un jardin enneigé, une femme et une petite fille à la baignade en vacances, toutes ces photos sont autant de tableaux universels.
Tous les personnages sont en demi-teinte, rien de manichéen dans le portrait qu'en fait la narratrice à la fin de sa vie, quand bien même on pourrait se prendre à les rejeter. C'est impossible, la justification de leurs actions est là, imperceptible.
Le titre – et c'est rare à mon sens – est extrêmement bien choisi et rend bien compte de cet « avant » et de cet « après » du roman, de la vie de Rosamond.
Quant au style, il est classique, précis, parsemé d'idiomes, il respire la bonne vieille Angleterre comme on l'aime avec ses soleils d'automne, ces feuilles dans le jardin, le morceau de beurre sur un toast au breakfast... C'est un peu une chanson des Beatles de 278 pages, genre « Eleonore Rigby », « She's Leaving Home » ou encore bien sûr « A Day In The Life » mais tout ça remixé en une grande histoire. Car évidemment, Coe ne peut s'empêcher d'évoquer la musique, lorsque dans les années soixante-dix, Thea, mère d'Imogen rencontre un roadie velléitaire et sans talent.
Un livre que je recommanderais de 18 à 95 ans ! Avant c'est trop jeune, après… on ne sait jamais.


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Rosamond vient de mourir, mais sa voix résonne encore, dans une confession enregistrée, adressée à la mystérieuse Imogen. S'appuyant sur vingt photos soigneusement choisies, elle laisse libre cours à ses souvenirs et raconte des années quarante à aujourd'hui, l'histoire de trois générations de femmes liées par le désir, l'enfance perdue et quelques lieux magiques. Et de son récit douloureux et intense naît une question, lancinante: y a-t-il une logique qui préside à ces existences ?



Ce roman est l'histoire d'une blessure transmise de mère en fille sur trois générations, la narratrice dévoile l'envers des sourires affichés sur les photos et se révèlent ainsi pour celle qui écoute les cassettes, et donc pour le lecteur, des secrets de famille sous forme de scènes inattendues: un chien qui s'échappe à toute allure ce qui aura des conséquences dramatiques, deux femmes amoureuses au bord d'un lac d'Auvergne, chérissant une petite fille qui n'est pas la leur: un défi cher payé à la morale bien-pensante. L'auteur montre la façon irrationnelle et inévitable dont parfois s'organisent les histoires de famille, et à la fin on se demande avec Gil, qui a écouté l'histoire avec ses filles, pourquoi tant de chagrins, de malentendus, de sentiments contradictoires, de conflits...Y a-t-il un sens à tout cela ? le destin n'est-il qu'une chimère comme la pluie , avant qu'elle tombe ? Une formidable écriture qui vous met dans la position de celle qui écoute les cassettes et la gorge un peu serrée vous donne envie d'en savoir plus et vous laisse à la fin du livre un peu groggy mais fascinée par ces destins de femmes...
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Comment narrer la vie de plusieurs femmes en 25 photos?
Ce livre ne nous parle que de femmes.
Il nous parle d'amour et de la difficulté ou de la facilité à aimer et à le montrer, de rejet.
Il nous parle aussi de blessures et de silences, d'indifférence, de violence physique mais aussi psychologique, de naïveté et de manipulations.
C'est pourtant une lecture agréable, avec un procédé narratif original et on se laisse vite prendre au jeu pour connaitre la suite.

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