AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
EAN : 9782070776184
160 pages
Gallimard (05/01/2006)
3.95/5   48 notes
Résumé :

" Je suis Sadiq. Tout le monde m'appelle Sad. Entre tristesse et cruauté, la ligne est mince. Eve est ma raison, mais elle prétend ne pas le savoir. Quand elle me croise, son regard me traverse sans s'arrêter. Je disparais. Je suis dans un lieu gris. Ou plutôt brun jaunâtre, qui mérite bien son nom: Troumaron. Troumaron, c'est une sorte d'entonnoir ; le dernier goulet où viennent se déverser les eaux usées de tout un pays.

Ici, on recase ... >Voir plus
Que lire après Ève de ses décombresVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (19) Voir plus Ajouter une critique
3,95

sur 48 notes
5
5 avis
4
6 avis
3
5 avis
2
2 avis
1
0 avis
Que l'écriture est belle ! Que ce livre est beau dans sa douleur !

Une "cruelle" poésie suinte à chaque page au travers du désenchantement !

Si juste, il écorche les coeurs, cogne les vies, détruit les cartes postales !

La rage - le désespoir
* les désirs d'une jeunesse oubliée, cabossée, enterrée à Troumaron au bas des immeubles construits sur des marécages qui n'a pas réussi à combler l'odeur du goémon ni l'incertitude du sol où ne poussent que les cadavres des ronces et des rêves. (p.29)

La douleur des âmes s'infiltrent dans les mots qui vous prennent aux tripes et se gravent en larmes d'océan sur le sable du soleil brûlant.

Le silence d'Eve est celui qui grandit , naufragée d'un visage noyé - Une si grande solitude !

* L'étoile a pleuré rose au coeur de tes oreilles, l'infini roulé blanc de ta nuque à tes reins et l'homme saigné noir à ton flanc souverain.
Je suis jeune : prenez moi la main *.

Gribouillis d'humanité qui ne croit en rien mais souffre quand même.

Eve, Sarita, Clélio, Sad et les autres les oubliés de Port Louis, à l'Ile Maurice .

*Les enfants ont des ailes de plomb et persistent à croire qu'ils peuvent voler, jusqu'à ce qu'on les retrouve, ordures parmi un tas d'ordures *. (p.114)

L'auteure originaire de l'Ile nous raconte le verso de la carte postale entre tristesse et cruauté de la vie.

Livre trouvé en boîte à livres, une pépite !

Commenter  J’apprécie          284
Je me demande pourquoi Ève se fait toujours malmener. Cette histoire semble mal partie : elle sent trop le péché qui a perdu en chemin ses raisons d'être. Des millénaires et une subtile variation, le mal décrit avec une gaucherie embarrassante dans un langage qui n'est ni original, ni perturbant.

Pourtant, Ève a un karma qui détonne. Malgré le parasitage de son environnement, elle parvient à irradier autour d'elle et c'est la raison pour laquelle elle suscite sans cesse le désir d'hommes qui ne comprennent pas ce qui leur arrive (il y en a même un qui lui écrit des poèmes, c'est le plus touchant de tous car il essaie d'être personnel et perd du temps dans l'accomplissement d'un acte qui ne changera rien au cours de l'histoire). Si Ève avait eu plus de chance, elle aurait pu être Jésus par exemple, ou quelque chose du même genre, mais c'est une gamine de banlieue alors elle ne peut pas vraiment. On retombe dans le convenu : Ève n'a pas les mots pour se dire ni pour se comprendre et elle ignore les horizons que son karma pourrait lui faire atteindre. Elle croit peut-être se venger de son impuissance lorsqu'elle se livre à des hommes qu'elle n'aime pas (à tous) mais si elle s'écoutait, elle saurait qu'elle aime l'humanité et qu'elle espère l'apaiser globalement en procédant localement, individu par individu.


Perdus dans cette histoire, on découvre Sévita et Clélio, personnages secondaires qui ne servent pas à grand-chose. Ils apparaissent seulement pour figurer l'évolution classique de ceux qui ne connaissent pas l'horizon. Sans eux, le récit se serait envolé beaucoup plus loin que les moyens narratifs d'Ananda Devi ne le permettent. Ici, on se contente d'être triste et malheureux. Eve ne peut pas sauver l'humanité car elle n'a pas compris que la souffrance ultime et rédemptrice ne peut être atteinte qu'en chérissant sa douleur. le jour où elle cessera d'haïr les hommes –ou de se haïr- elle y parviendra enfin.


Ananda Devi ne nous présente pas cette éventualité. Elle divague sur les mots et le pouvoir de l'écriture et conclut son histoire dans une rêverie littéraire aussi cotonneuse qu'insipide.
Commenter  J’apprécie          170
Ce court roman raconte, à travers le « destin » de quatre adolescents coincés dans une « banlieue » misérable de Port-Louis, la face cachée de l'île Maurice. Troumaron, c'est ainsi que s'appelle le quartier dans lequel vivent Sad, Clélio, Eve et Savita et ils prennent de plein fouet la misère, la violence, l'ennui, le désespoir qui ronge cette banlieue oubliée, oblitérée. Entre colère et fatalisme, sexe et dépendances, les mots de Rimbaud s'offrent sur les murs pour tenter de conjurer le sort. Dans la chaleur poisseuse de Troumaron, le corps est mis à rude épreuve, particulièrement celui des femmes. C'est presque une tragédie shakespearienne que vivront les quatre jeunes gens.

« Seulement » 154 pages mais des pages denses, âpres, qui donnent la parole à chacun des protagonistes, des pages où la langue française virevolte et traduit les états d'âme au plus près. Une belle découverte.
Lien : https://desmotsetdesnotes.wo..
Commenter  J’apprécie          170
Eve, Sadiq, Clelio, Savita, quatre adolescents à l'ïle Maurice.
Tous meurtris par la vie, la pauvreté, la misère, la violence.
C'est Eve le personnage central.
Sadiq, plus intellectuel, est fou amoureux d'elle.
Savita est son amie, qui veut la débarrasser de ses démons.
Clelio est le plus violent et le plus démuni des quatre.
Les personnages alternent dans le récit.
J'ai eu un peu de mal au début.
Et puis je me suis laissée emporter par la beauté et la poésie de l'écriture.
Je me suis attachée à ces quatre jeunes en perdition.
C'est une très belle et triste histoire, racontée avec une grande délicatesse.
Le quartier de Troumaron, à Port-Louis va me rester en tête un bon moment, ainsi que la désespérance de ces jeunes.
Commenter  J’apprécie          121
La quatrième de couverture est très juste, incisive mais franche, Ananda Devi fait planer dans l'horreur une certaine poétique. Poétique des décombres, ces destins déjà brisés dans un bidonville, ces hauts murs qui ne laissent aucun avenir, ces gamins sans rêve, ce monde de pauvreté et de violence, où même les usines ont fermé où l'espoir n'existe plus du tout, dégage une poétique du désespoir.

Les destins de quatre ados s'entremêle dans ce roman, dont la lecture nous laisse somme toute sans surprise. On se laisse porter par leurs déboires, les violences, les viols, l'alcool… Ils tentent de se sauver, eux-mêmes, les uns les autres, par la poésie, l'amour ou l'amitié, pourtant bien conscient de la vanité de leur existence.

Loin du Sari vert qui m'a durablement marqué, je pense que celui-ci ne va pas me coller à la peau ou à la mémoire…. Parce que tout compte fait, malgré la poétique omniprésente et même quelque part un peu forcée en contraste avec la dureté et la tristesse des drames qui se déroulent, finalement, tout ce récit nous coule un peu dessus. On ne s'attache pas tant aux personnages, on lit seulement… Ca passe.
Commenter  J’apprécie          30

Citations et extraits (42) Voir plus Ajouter une citation
Par blessure. Par mystère. Pour confirmer, avec rage, avec hargne, avec désespoir, ce qu'ils pensent tous, là bas, dehors.

pour être. Pour devenir. Pour ne pas disparaître à tes propres yeux. Pour sortir de la gangue des passifs, des oisifs, des ratés, de la sciure des regards, du plomb des jours, du tranchant des heures, de l'ombre des vivants, de l'absence des morts, du gravier des médiocres, du moisi, de la nudité, de la laideur, de la moquerie, des rires, des pleurs, des instants, de l'éternité, du bref, du lourd, de la nuit, du jour, de l'après-midi, de l'aube, des madones effacées, des diablesses disparues.

Rien de tout cela n'est toi.

Sortir de tout cela, déjouer les chercheurs, les suiveurs, quitter la piste, tromper les chiens, changer de forme, achever ta mue et tes métaphores et tes métamorphoses, laisser une traînée argent qui fleure la femme et les plis de la nuit, suivre un chemin de broussailles qui mène loin au fond des mythes et permet d'en sortir refaite à neuf, récurée de ta peau, marchant sanglante au rouge de tes vies, être, devenir, ne pas disparaître.

Tu n'es pas d'ici, te dis-tu. Tu le diras jusqu'à la fin des choses.
Commenter  J’apprécie          70
Elle est saisie par une lumière d'étoile. Son visage semble décousu. D'étranges couleurs, les couleurs des coups, brouillent ses traits. Ses yeux sont si profonds et leur résonnance si métallique que j'ai du mal à la regarder. Ils vont au-delà de cette maison au-delà de Port Louis, au-delà du présent.
Ses yeux sont à demain, et demain n'existe pas.
Commenter  J’apprécie          120
Sad :

On me dit que je réussirai. Il faut savoir que réussir, ça ne veut pas dire la même chose pour tout le monde. C’est un mot à déclinaison variable. Dans mon cas, cela veut simplement dire que les portes fermées pourraient s’entrebâiller et que je pourrais, en rentrant bien le ventre, me glisser entre elles et tromper la vigilance de Troumaron. Tout le monde sait que la pauvreté est le plus féroce des geôliers. Les profs, eux, disent que tout est possible. Ils me racontent qu’eux aussi apprenaient leurs leçons à la lumière de la bougie. Je vois d’ailleurs dans leurs yeux l’obscurité de penser qui en a résulté. Ils me disent, il faut saisir votre chance, vous ne devez pas freiner le développement du pays. C’est qui vous ?
Commenter  J’apprécie          50
Eve :

Un mouchoir de dégoût. Oui, moi aussi on me l’a enfoncé dans la bouche dès la naissance.

Debout près de la fenêtre, je crache la fumée du tabac dans la nuit. Je la regarde se dissoudre comme si elle emportait une part de moi. Ma mère, quand elle viendra dans ma chambre après avoir longtemps hésité devant la porte fermée, ne dira rien, ne sentira rien. Elle s’est délibérément insonorisé la chair pour ne pas avoir à ressentir la vie et à la regretter. Une existence à l’abri de tous les remous, voilà ce qu’elle voudrait. Mais peut-être est-ce la seule vision possible, pour ceux qui sont accouchés par le besoin ?
Commenter  J’apprécie          50
Personne ne sait qu'on peut aimer comme ça, à dix sept ans. Je baigne dans l'eau nocturne d'Eve. Je plonge dans sa vision trouble. Je me noie dans sa boue, dans son innocence. Je me fous de ce qu'elle est, et de ce qu'elle fait. Je suis le clin d'oeil noir au-dessus de la ceinture de son jeans. Je suis le talon arrondi de son pied nu dans ses sandales. Je suis le souvenir de son rire si rare, de sa force, de son défi.
Je ne vois rien d'autre. Les phrases sur mes murs ne sont plus écrites à l'encre noire mais blanche, et le stylo se remplit et se désemplit tout seul, en un incomparable jaillissement.
Commenter  J’apprécie          50

Videos de Ananda Devi (27) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Ananda Devi
À l'occasion du Forum des libraires 2023, Olivier Nora, Président-Directeur général, présente la rentrée littéraire des Éditions Grasset - @editionsgrasset7893
Au programme de la rentrée d'automne 2023 : 0:00 Introduction 1:01 *_perspective(s)_ de Laurent Binet* 1:15 *_À ma soeur et unique_ de Guy Boley* 1:29 *_l'enragé_ de Sorj Chalandon* 1:55 *_Rose nuit_ d'Oscar Coop-Phane* 2:30 *_strange_ de Geneviève Damas* 2:50 *_Le Jour des caméléons_ d'Ananda Devi* 3:06 *_Adieu Tanger_ de Salma El Moumni* 3:17 *_Le Grand Feu_ de Léonor de Récondo* 3:47 *_Comédie d'automne_ de Jean Rouaud* 3:58 *_Croix de cendre_ d'Antoine Sénanque* 4:11 *_Impossibles adieux_ de Han Kang* 4:39 Conclusion
Un événement @livreshebdo_ en partenariat avec @babelio
© Livres Hebdo
#rentréelittéraire #édition #livres #nouveautés
+ Lire la suite
autres livres classés : île mauriceVoir plus
Les plus populaires : Littérature étrangère Voir plus


Lecteurs (107) Voir plus



Quiz Voir plus

Le rire des déesses

Que signifie Chinti, le nom que décide de se donner la petite fille à l’âge de neuf ans ?

Abeille
Coccinelle
Fourmi
Papillon

13 questions
2 lecteurs ont répondu
Thème : Le rire des déesses de Ananda Devi NirsimlooCréer un quiz sur ce livre

{* *}