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EAN : 9782909240114
439 pages
L'Archipel (27/10/1993)
4.22/5   9 notes
Résumé :
Trois jeunes soldats engagés dans la Grande Guerre se retrouvent sur le front français. De milieux très différents, ils seront indifféremment dupés, broyés par la machine militaire. Roman sur l'injustice et la bêtise guerrière, ce fut la première oeuvre américaine d'importance (1921) à traiter de la guerre sur un ton irrespectueux.
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Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
Andrews, Fuselli et Chrisfield, 3 conscrits américains venant de 3 villes différentes, vont vivre les 3 temps d'un même conflit : avant, pendant et après la Première Guerre mondiale.

Trois soldats de John Dos Passos – traduit par René-Noël Raimbault – nous plonge dans le quotidien de ces trois jeunes boys, d'abord cantonnés dans une attente interminable dans un camp d'entraînement américain, avant d'être enfin débarqués en France en 1917 et plongés dans l'horreur quotidienne du conflit. L'armistice signé ne leur rendra pas forcément leur liberté…

C'est une drôle d'oeuvre, finement écrite, qui monte en puissance dans son approche du conflit : classique et engagé au départ, le livre tourne peu à peu au réquisitoire assumé sur l'absurdité de ce gâchis de jeunesse, et à une réflexion sur ce qu'est réellement la liberté à 20 ans quand les possibles semblent encore ouverts.

C'est profond mais un peu long, et pas forcément enthousiasmant pour une première découverte d'un auteur devenu un classique américain, que je ne connaissais pas encore mais dont j'attendais beaucoup. A retenter donc avec un livre plus abordable.
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Je poursuis mon tour d'horizon (au long cours) des écrivains témoins de la première guerre mondiale et qui ont écrit sur le sujet. John Dos Passos fut mon premier américain, mais pas le dernier, puisque Compagnie K de William March attend sagement sur ma pile à lire.
Nous voici donc en compagnie des soldats Fuselli, Chrisfield et Andrews, que nous allons suivre de leur mobilisation ou de leur engagement en 1917, jusqu'aux combats de 1918 (à peine abordés, l'armistice étant signé à peine à la moitié d'un livre bien long), puis enfin en 1919 alors que leur hiérarchie les maintient en France pour "l'armée d'occupation" (de l'Allemagne) ou d'autres motivations qu'elle se garde bien de leur donner, et cette opacité est un trait commun à toutes les autres armées belligérantes.
Enfin très exactement, c'est surtout Andrews que nous allons suivre, les autres s'effaçant progressivement et n'étant bientôt plus évoqués que de loin en loin, et même très loin pour Fuselli, dont on ne saura même pas ce qu'il est devenu, et c'est dommage car son côté "carriériste" était assez intéressant et changeait de la désinvolture des deux autres.
Il s'agit d'un roman clairement engagé dans la veine pacifiste, antimilitariste et anticléricale. L'armée et les hommes d'église en prennent pour leur grade de façon parfois assez savoureuse, et d'une façon ou d'une autre, les trois protagonistes finissent tous par déserter, chacun pour une raison qui leur est propre. Andrews, anarchiste notoire, n'hésite pas à sympathiser pour les manifestations pro-bolcheviques de 1919, dans des passages qui m'ont semblé particulièrement intéressants.
Il semblerait que ce livre, écrit par un ambulancier engagé volontaire avant même l'entrée en guerre de son pays, ait eu beaucoup de succès aux US en 1921, ce qui ne laisse pas d'étonner quand on voit son niveau d'athéisme et d'antimilitarisme, dans un pays réputé pour son patriotisme et son obsession religieuse.
Malgré ces points d'intérêt, l'ensemble de cette lecture ne fut pas une expérience des plus agréables, hélas.
C'est trop descriptif, trop contemplatif... On s'ennuie parfois à mourir, surtout dans la deuxième partie, quand Andrews est à Paris. Par ailleurs, je n'ai jamais vu autant d'adjectifs de couleur. À ce stade-là, c'est un toc : parfois une dizaine par page ! Même les personnages sont systématiquement décrits par leur teint, et l'on finit par ne plus voir que ça. Jugez de ces quelques exemples : "ils entrevirent la vallée de la Seine, où la brume bleutée mettait sa patine sur les feuilles nouvelles couleur de pois vert. Puis le train pénétra dans de vastes plaines où, sur la brume violacée de l'horizon, chatoyait le vert glauque des jeunes avoines et le vert doré des champs de blé nouvellement ensemencés. L'ombre bleue du train filait rapidement..." Ou ici : "La péniche était la dernière d'une file de quatre, en train de décrire une large courbe au milieu d'une étendue de fleuve argentée, couverte de plaques étincelantes et claires vert paon et gris lavande, bordée de chaque côté par des plantations de frêles peupliers bleus. le ciel était d'un gris marbré lumineux, moucheté de place en place de taches couleur d'oeuf de rouge-gorge."
Les chapitres sont extrêmement longs et auraient gagné à être raccourcis, surtout qu'au sein d'un même chapitre on passe parfois d'un lieu à l'autre, d'un personnage à l'autre, brutalement et sans préavis.
Les dialogues sont parfois d'une trivialité déprimante, bien que pouvant à l'occasion être très longs, et ce sont hélas souvent d'ailleurs les dialogues les plus longs qui sont aussi les plus triviaux, la victime principale de tout cela étant l'intérêt du lecteur.
La vision des Français (les "grenouillards") n'est pas brillante... Les femmes, en particulier, ne sont pas farouches.
En résumé, un texte bien long et pompeux dont l'aspect idéologique est l'unique intérêt, même si la fibre anarcho-communiste de Dos Passos ne fut qu'une brève passade, puisqu'il fut, à la fin de sa vie, un ardent Maccarthyste et un farouche partisan de la guerre du Vietnam.
Comme quoi, y a que les cons qui changent pas d'avis. Ou pas.
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Trois soldats donc. Chris, Fuselli et Andrews, attendant en cette année 1917 d'être incorporés dans l'armée états-unienne pour participer à la première guerre mondiale en France et se battre contre l'ennemi Allemand. Fuselli l'immigré italien orphelin de mère et ambitieux (il souhaiterait tellement devenir caporal), Chris, un fermier illettré de 20 ans, et Andrews, musicien brillant de 22 ans, instruit, anarchiste, pacifiste et parfaitement athée. Ils ne vont pas tarder à rejoindre l'Europe, chacun de son côté, et enfiler l'uniforme de soldat. Là-bas, comme les autres, ils vont vivre l'enfer au coeur d'une guerre sanglante. Ils vont y côtoyer l'alcool et les femmes, les ennemis et les cadavres quotidiens.

Le chiffre de construction du travail littéraire de DOS PASSOS est souvent le 3. Là encore, Les deux premières parties (l'attente puis la guerre) s'étendent jusqu'à la première moitié du roman. Puis la troisième partie représentant l'autre moitié se focalise sur la vie après la guerre, notamment celle d'Andrews, sillonnant la France et en particulier Paris, faisant de nombreuses rencontres, avec des femmes surtout, mais aussi des soldats déserteurs comme lui ou démobilisés. DOS PASSOS nous fait suivre ce soldat errant, rêvant en vain d'un monde meilleur enfin débarrassé des haines et des guerres, avide de liberté et de simplicité, et ne se privant pas pour tacler brutalement un allié dans un élan de compassion : « Il y a des prisonniers allemands qui viennent à l'hôpital tous les soirs à six heures pour enlever les ordures. Alors, si vous les haïssez réellement autant que ça, vous n'avez qu'à emprunter le revolver d'un officier de vos amis et à canarder la corvée ».

Ce roman est dense, c'est pourtant seulement le deuxième de l'auteur. le premier, « L'initiation d'un homme : 1917 » traitait déjà de la première guerre mondiale, guerre à laquelle DOS PASSOS avait participé en tant qu'ambulancier, et qui l'a marqué à vie. À seulement 25 ans il écrit « Trois soldats », l'écriture est déjà pointilleuse, extrêmement précise. Il est par ailleurs très à cheval (ce sera l'une de ses autres marques de fabrique) sur le langage tenu par ses personnages car, si la narration est poussée et limpide, ses « héros » sont issus de diverses classes sociales et s'expriment tantôt de manière élégante, tantôt bourrue voie populaire. Et le rendu est ici parfait, saluons au passage l'excellente traduction de René-Noël RAIMBAULT.

Dans chaque roman de DOS PASSOS, il y a une part d'autobiographie. C'est encore le cas ici. Il est important de noter que ce roman a été écrit en 1921, à cette époque DOS PASSOS fréquente les milieux anarchistes et communistes des Etats-Unis, il est pacifiste et radicalement athée. On peut donc imaginer une facette non négligeable de DOS PASSOS dans le personnage d'Andrews, mais aussi chez Fuselli puisque DOS PASSOS était petit-fils d'immigré portugais. Tout comme Andrews, DOS PASSOS était donc athée, c'est d'ailleurs l'un des rares auteurs de son époque où la religion, tout comme Dieu, n'existe pas, il n'y est jamais fait allusion : il s'est débarrassé de Dieu.

DOS PASSOS va passer par toutes les couleurs politiques, déplaçant ses idées de l'anarchisme au pur conservatisme de McCarthy. Cette évolution sera entreprise après sa participation à la guerre d'Espagne, où il a assisté à des horreurs commises par les staliniens, notamment l'assassinat de l'un de ses proches. Ironie de l'histoire : plus DOS PASSOS se place à la droite de l'échiquier politique, moins son oeuvre littéraire est encensée : il a paraît-il perdu son génie, son talent, son esprit visionnaire. Ses ouvrages sont de moins en moins traduits dans le monde. Aujourd'hui encore, et alors qu'il fut un écrivain très prolifique, la plupart de ses bouquins écrits après 1951 (il a disparu en 1970) ne sont toujours pas traduits en France.

De ce fait, DOS PASSOS est un écrivain relativement « oublié », ce qui semble un comble puisqu'il fut sans aucun doute l'un des romanciers états-uniens les plus remarqués et les plus talentueux du XXe siècle, l'un des plus originaux aussi. Souvenons-nous de sa trilogie (encore le chiffre 3 quelque part) tentaculaire et labyrinthique de plus de 1200 pages : « U.S.A. », une oeuvre majeure quoique parfois absconse par la structure même du récit (histoire fictionnelle entrecoupée de biographies succinctes, de pensées ou souvenirs, mais aussi de montages de coupures de presse ou de citations, aucun roman ne ressemble à celui-ci, tentez-le un jour où vous avez envie de vous initier à la littérature d'un genre parallèle et sans fond, pour moi l'une des oeuvres les plus ambitieuses et les plus obscures du XXe siècle). DOS PASSOS possède un don très développé : l'observation du monde qui l'entoure, qu'il ressert de manière chirurgicale, avec une écriture brillante et souvent journalistique et dégagée.

Ce « Trois soldats » est essentiel car il fut écrit par un jeune écrivain revenant de la guerre, sans avoir encore bâti ce recul nécessaire à la fabrique de l'Histoire, ce n'est pas le roman d'un ancien soldat français ou allemand mais bien celui d'un nord-américain (ayant certes grandi en Europe), de surcroît porté par des valeurs pacifistes et internationalistes. Après cette guerre, en 1921 donc, il semble gardé le cap, même si ce roman laisse entendre que quelque chose vient de se briser chez DOS PASSOS : il ne croit plus à la paix, il ne croit plus à la pensée individualiste.

Un détail peut toutefois paraître gênant dans « Trois soldats » : les diverses rencontres fortuites à plusieurs reprises dans des situations totalement invraisemblables, notamment en plein Paris après l'armistice, ce qui rappelle ce début d'un volet de Tintin, où le héros et le capitaine Haddock sortant d'un cinéma font référence au général Alcazar qu'ils n'ont plus vus depuis longtemps. L'échange à peine terminé ils télescopent ce même général. Mais soyez rassurés : ce léger manque de rigueur dans le roman n'en handicape absolument pas la lecture.

Ce livre de plus de 500 pages n'avait plus été traduit en France depuis il me semble 1993. 25 ans plus tard, et alors que nous célèbrerons dans 2 ans le cinquantenaire de la disparition de DOS PASSOS, les Editions du Castor Astral nous permettent de relire ce roman charnière de la fin d'une époque en le ressortant ces jours-ci.
https://deslivresrances.blogspot.fr/
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Citations et extraits (16) Voir plus Ajouter une citation
— Dis donc Bill, est-ce que ce qui nous pend au nez n'est pas différent de ce que nous nous figurons ?
— Ouais.
— Je veux dire que les types n'ont pas l'air de penser du tout à battre les Boches, tellement ils sont occupés à rouspéter à propos de tout.
— C'est des types qui sont au-dessus de ça, dit sentencieusement Grey.
— Bon Dieu, moi qui me disais que ce serait aussi palpitant que dans les films.
— Je crois que c'était du bourrage de crâne.
— Peut-être bien.
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J'apporte à vot'Président des dépêches importantes de not'quartier général à Rouen. J'm'en allais à travers un sacré p'tit bois pas loin d'ici. J'sais pas comment qu'on prononce le nom de c'sacré patelin... J'tais sur ma bécane, faisant à peu près du treize, pasque la route elle 'tait toute pleine de boue, quand j'ai vu quat' bougres qui s'tenaient en travers de la route... à m'zyeuter d'un air méfiant ; alors j'en ai mis un coup sur ma bécane et j'ai foncé dans l'milieu. Alors ils s'sont mis à tirer et une bon Bieu d'balle elle a bousillé la bécane... J'suis né coiffé, c'est ça qui m'a sauvé la vie... J'me suis ramassé d'l'aut' côté du fossé et j'les ai semés dans l' bois. Alors j'ai trouvé un aut' sacré patelin et j'ai réquisitionné c'vieux clou...
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Oh, mais il faut que vous sachiez un peu ce qu'est la civilisation. J'ai toujours entendu dire que les Américains étaient libres et indépendants. Se laisseront-ils toujours mener à l'abattoir ?
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— (...) Chantons ensemble le cantique "Debout, debout pour Jésus", que, j'en suis sûr, vous connaissez tous.
Les hommes se mirent debout, à l'exception de quelques-uns qui avaient perdu leurs jambes, et chantèrent sans conviction le premier couplet du cantique. Au second couplet, ils s'abstinrent complètement, laissant seuls l'homme de l'Y et le Révérend Docteur Skinner chanter à tue-tête.
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Sais-tu ce que je voudrais? Je voudrais que la guerre continue et que tous ces cochons-là y soient tués jusqu'au dernier.
- Quels cochons?
- Les gens qui nous ont envoyés ici. Il se remit à tousser d'un air épuisé.
- Mais eux sauveront leur peau quand même tous les autres hommes seraient... commença Andrew.
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Videos de John Dos Passos (7) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de John Dos Passos
Paru en 1929, grand succès de librairie, aussitôt traduit en plusieurs langues et adapté à la radio et au cinéma, Berlin Alexanderplatz d'Alfred Döblin est un monument de la littérature allemande au temps de la République de Weimar. Visiblement inscrit dans le sillage d'Ulysse de Joyce (1922) ou de Manhattan Transfer de Dos Passos (1925), même si l'auteur a contesté s' être inspiré d'eux, il participe du renouvellement moderniste du genre romanesque et le procédé du « montage », à l'époque tour à tour exalté et décrié, semble y servir une exploration nouvelle du monde urbain. Pourtant, écrivain prolixe et passionné de questions philosophiques, Döblin n'en était pas en 1929 à son coup d'essai et l'intérêt de Berlin Alexanderplatz dépasse peut-être aujourd'hui celui d'un grand « roman de la ville ».
Retrouvez sur notre webmagazine Balises, le dossier "Berlin Alexanderplatz, portraits d'une ville" en lien avec la rencontre : https://balises.bpi.fr/dossier/berlin-alexanderplatz/
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