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EAN : 9782361830786
190 pages
Les Moutons Electriques (03/04/2014)
3.61/5   14 notes
Résumé :
Une fois par an, lors de la nuit de la Saint-Sylvestre, arrive le Changement. Tout change: les identités de chacun, les professions, les statuts sociaux... Le riche peut devenir pauvre, le pauvre peut devenir riche, tout change. Un an seulement pour vivre cette vie-là, avant le prochain Changement: cette fois, l'année était 1963, quelle sera la prochaine? Paris est une gigantesque spirale à étages et la réalité n'a plus rien de solide.
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Critiques, Analyses et Avis (4) Ajouter une critique
Imaginez un peu une ville, ici celle de Paris, dans laquelle tout ce que vous êtes, tout ce qui vous défini en tant qu'individu, change tous les ans à la même date... Oubliez vos déboires amoureux, vos galères de boulot ou bien la précarité de votre mode de vie : le 1 janvier de chaque année, à minuit pile, toutes les cartes sont redistribuées. Les clochards et autres individus mis au ban de la société d'aujourd'hui sont peut-être les milliardaires et les privilégiés de demain, voilà qui a de quoi faire relativiser ! Mais le problème, c'est qu'il n'y a pas que le statut social qui soit concerné par ces changements annuels. Votre nom, vos souvenirs, votre famille, votre âge, voire même parfois votre sexe : à chaque fois, tous est remis en jeu. En cette année 1963, Léo le Lion craint justement l'arrivée du Changement, d'abord parce qu'il pressent qu'il n'aura sûrement pas autant de chance l'année prochaine, ensuite parce qu'il ne veut pas quitter Labelle, une jeune femme dont il est l'amant depuis peu. Mais quelle n'est pas sa surprise lorsqu'il se réveille en ce matin de premier janvier avec ses souvenirs et pas de nouvelle place attribuée : pour la première fois, un homme a échappé au Changement !

Le scénario imaginé par Dominique Douay ne manque pas d'attrait et, comme on s'en doute, permet en filigrane d'amorcer une réflexion sur des sujets autant d'actualité aujourd'hui que dans les années 1970. Propagande, uniformisation des règles et des modes de vie, aliénation des individus..., l'auteur lance à travers cette petite histoire quelques pistes de réflexion intéressantes, sans pour autant aller assez loin à mon sens. le principe m'a beaucoup fait pensé à Alain Damasio et son roman « La Zone du dehors » dans lequel il mettait en scène un système basé sur la hiérarchisation des individus dont le nom changeait régulièrement et indiquait la place exacte occupée dans la société, mais le tout y était abordé avec un regard plus acéré. En ce qui concerne l'aspect « histoire alternative », on peut là aussi regretter que l'auteur n'aille pas assez loin : le fait que l'action se déroule en 1963 n'a finalement que peu d'importance et il en va de même pour De Gaulle, jamais nommé explicitement mais que l'on devine aisément derrière la figure centrale du Général. le protagoniste est pour sa part plutôt réussi si bien qu'il est aisé au lecteur de s'émouvoir de son sort et de la solitude qui est désormais la sienne maintenant qu'il est le seul à se rendre compte de son ancienne vie.

Avec « Car les temps changent » Dominique Douay dresse le portrait glaçant d'une société dans laquelle chacun a perdu tout ce qui faisait de lui un individu unique et où tout le monde est devenu interchangeable. Mais au -delà de l'originalité de l'idée et de la sympathie éprouvée pour le protagoniste, il faut avouer que le roman souffre d'un certain nombre de lacunes qui empêchent le récit de véritablement prendre son essor, et le lecteur de bien comprendre la démarche de l'auteur.
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Un mois après L'Impasse-temps, bien plus qu'une agréable surprise, paraît Car les temps changent, du même auteur. Quiconque les lira de manière rapprochée pourra noter quelques concordances dans ces romans, concordances qui n'auront pas à voir qu'avec leur titre.

1963. La Saint-Sylvestre s'annonce et tous les habitants, tandis que le visage du Général apparaît sur les écrans, ne vivent pas l'événement de la même manière. Certains l'attendent presque depuis le 1er janvier dernier tandis que d'autres s'inquiètent de ce qu'ils vont devenir, de qui ils vont devenir. Chaque année en effet, on remet les compteurs à zéro, la loterie des personnalités est ouverte. On change de statut social, de carrière. le directeur de banque peut devenir le clochard du quartier, le barman troquer son bistrot pour les bureaux d'une agence de voyage... sans se rappeler sa vie d'avant. du passé, on fait table rase. Sauf que cette fois-ci, une personne, une seule, garde en lui l'intégralité de ses souvenirs passés, sait tout de la personne qu'il était lors du dernier Changement. Mais comment faire pour continuer à vivre dans un monde qui révèle bien plus de surprises que ce à quoi on aurait pu s'attendre ? Comment rester le même quand tous les autres ont changé, quand le monde que vous croyiez connaître, dont vous pensiez maîtriser les codes, aussi injustes vous paraissent-ils, repose sur des fondations branlantes ? A moins que ce soit vous le problème... ?

Car les temps changent est un roman diablement et efficacement déroutant. Pour autant, cela ne veut pas dire que le lecteur sera égaré en cours de route, quand bien même, tel un Philippe K. Dick auquel on ne peut manquer de l'associer, Dominique Douay se joue de la réalité... ou de l'idée que l'on se fait de la réalité, allez savoir... le rapprochement avec Dick paraît pour la peine évident, mais sous la brûlante et brillante écriture de l'auteur, j'ai aussi retrouvé l'inventivité et la folie d'un Boris Vian. Dans les images parfois, dans la représentation de Paris, le vertige des Citésobscures de Peeters et Schuitten, les perspectives d'un Escher...

Une fois les bases du Changement accepté, les perceptions du lecteur s'altèrent progressivement. Les éléments que l'on considère comme acquis se troublent peu à peu, se défragmentent avec pour conséquence de générer une surprise croissante, jusqu'à nous faire douter de tout. Pour jouer de cet effet, Dominique Douay n'hésite pas à jongler avec les genres, le récit faisant alterner sans transition, le je, le tu, le il... le tout avec une fluidité déconcertante. Ces éléments servent de faire-valoir à la dualité de Léo, le narrateur. En devenant le seul être à ne pas subir les turpitudes du Changement, il est à la fois libre, exempt des contraintes du système, mais aussi prisonnier de sa nouvelle condition, soumis à une forme d'enfermement à la fois mental, temporel et géographique... La question se pose alors de savoir comment il va pouvoir jouer de ces dimensions sans perdre la raison ou sombrer dans la folie. Comment il va pouvoir s'affranchir de cette dualité.

Sans dénigrer l'intensité de son récit, Dominique Douay nous invite aussi à emprunter des pistes de réflexion variées ayant trait au contrôle des masses, à la propagande et, indéniablement, à la place de la liberté individuelle dans la société, à ses enjeux, ses limites... brillant de bout en bout.
Lien : http://bibliomanu.blogspot.com
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Ce que j'ai aimé dans Car les temps changent :

L'histoire est tout simplement passionnante ! Certains passages, surtout au début, tournent trop autour du sexe à mon goût. Avec un tel concept et un tel monde, il y a tant à dire que je trouve dommage de se limiter aux seules pulsions du personnage. Mais c'est finalement une façon d'amener la suite de l'histoire de façon originale et d'autres sujets sont vite abordés.

On suit donc Léo le Lion qui, disons-le toute de suite, échappe au Changement. D'un côté, j'ai trouvé ça dommage, je brûlais d'impatience de découvrir les vies successives du personnage, les époques qui se mélangeaient, etc. Alors qu'au finalement, ce concept n'est amené que pour le détourner. Tandis que c'est une routine pour les personnages, l'élément déclencheur ne pouvait qu'être que l'un d'eux échappe à cette mécanique bien huilée, sans raisons apparentes. C'était inévitable et bien pensé, quand bien même on est déçu au début.

La suite nous fait vite oublier ces déceptions. Au menu : philosophie sur la vie, la place de chacun, les rôles que l'on joue de force, le travail, la famille, le sexe, l'art et sa façon de transformer le monde (d'essayer du moins), la personnalité de chacun, la construction même d'un individu, la manipulation, et pour aller plus loin dans la SF, boucle temporelle, ville animée et dystopie pure.

C'est beaucoup de thématiques, en moins de 200 pages seulement, mais tout s'agence avec fluidité. Une fois le livre refermé, on y repense encore. C'est clairement le genre de lecture mémorable dont on parle autour de soi encore des mois plus tard.


Ce que j'ai moins aimé :

Le style est paradoxal. C'est entrainant mais j'ai vraiment peu aimé cette alternance entre la première et la troisième personne. Au début, je pensais que c'était pour aller avec l'histoire, car une telle alternance s'y prêtait bien. Mais en fait non, c'est principalement hasardeux.

De façon générale, la « mise en page » est une vraie plaie. On se dit à plusieurs reprises que l'éditeur voulait caser cette histoire dans un nombre de pages précis, et qu'il a condensé certains passages pour ce faire. Vraiment dommage.

Ajouté à ça des coquilles en pagaille, avec les apostrophes à l'envers notamment. L'auto-édition a souvent une mauvaise réputation à ce sujet, alors que l'édition semble intouchable. Ce genre de livres prouve bien que ce ne sont là que des stéréotypes, quasiment toutes mes lectures d'auteurs autoédités sont clairement mieux corrigées et mises en page que Car les temps changent


Ce que j'en retiens au final :

Une lecture unique en son genre ! Ce type d'histoires est souvent casse-gueule car quitte ou double. On accroche ou pas. Ça m'a rappelé à ce titre, et pour les approches utilisées, le syndrome du scaphandrier de Serge Brussolo, le K de Dino Buzzati ou encore La morsure de l'ange de Jonathan Carroll.

A lire de toute urgence !
Lien : http://murphypoppy.canalblog..
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Fable sociale, humaniste dans ce qu'elle a de plus brutale, cette histoire secoue les termes définissant l'univers de Léo le Lion, et semble vouloir propager l'onde de choc à nos mondes intimes.

Ainsi, chaque détail nous éloignant de notre réalité, aussi insignifiant soit-il, n'est pas là par hasard: tout est pensé, construit, et ce n'est qu'à la fin du roman que la construction de Dominique Douay, nous apparait dans toute son horrible nudité.

Dissonant, ce roman est perturbant dans la réalité fixée par les yeux du héros, Léo, réalité fluctuante, dans un Paris de 1963 où la figure du général De Gaulle, jamais citée nominalement, flotte telle une ombre floue. Commençant comme une uchronie, ce roman se joue des catégories existant dans la science-fiction et m'a rappelé la perdition ressentie à la lecture de le maître du haut château ou encore de le Guérisseur de cathédrales. La force de l'engouement des foules, mouvante, engluante, semble poursuivre le désir de découverte de soi du héros tout au long du roman, menace d'engloutissement et de perte de soi. Mais qu'est ce qui définit le Soi ?

Le procédé d'écriture correspond également à la maestria d'un Dick ou d'un Barjavel. Au début du roman, le lecteur est projeté dans ce monde, sans qu'aucun apprentissage ne lui soit fourni: le Changement à eu lieu pour le lecteur, injecté dans la peau de Léo sans préambule. Peu à peu, Léo se découvrant et se perdant dans la réalité qui se dessine à ses yeux, la place devient plus confortable pour le lecteur qui s'est retrouvé dans sa tête. Procédé de sabliers inversés, la perte de repères de Léo, inexorable et rampante comme la folie, permet une compréhension de plus en plus nette de ce drôle d'univers par le lecteur.
Lien : http://unlivresurmeslevres.b..
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Citations et extraits (4) Ajouter une citation
Vous y croyez, vous, à cette histoire d'un monde qui existerait en dehors de Paris ? Moi, je n'y crois plus. S'il existait d'autres villes, leurs habitants viendraient bien nous rendre visite, non... ? La vérité, c'est qu'en dehors de Paris, il n'y a rien, rien de rien. Paris et le monde, c'est du pareil au même. Mais cette vérité, qui serait prêt à l'admettre ? Alors on a inventé cette fable de villes extérieures. Le Havre, Tombouctou... du vent tout ça ! Les gens ont besoin de rêver, et nous sommes là pour leur fournir le matériau dont ils façonneront leurs rêves.
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Si. On les invente au fur à mesure. D'un coté, nous avons le répertoir des villes, de l'autre celui des principales spécialités touristiques et notre travail consiste à élaborer une documentation à partir de ces deux listes. Au début, juste aprés le Changement, on faisait un boulot plutôt, heu, routinier. On prenait un nom de ville, on ouvrait le répertoire des spécialités locales et on recopiait tout ce qui se trouvait sur la page. Avec le temps, bien sûr, on s'est arrangés pour compliquer un peu le systéme, pour laisser faire le hasard - ou notre sens de la poésie. Ca devenait fastidieux, à la longue.
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Combien de fois ai-je déjà éprouvé les même sentiments, combien de fois me suis-je arrêté, au seuil du Changement, figé par des yeux emplis d'une fatale tristesse ? Combien de fois i-je vécu cette scéne ou une autre, toute pareille ?
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Mais rapellez-vous ce que vous a dit votre correspondante, tout à l'heure au téléphone; grâce à ces épreuves, vous avez découvert le libre-arbitre...
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Videos de Dominique Douay (3) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Dominique Douay
La vidéo par actusf.com de la conférence "Quel sexe dans la Science fiction ? Une discussion sérieuse, mais pas trop", qui s'est tenue le 1er décembre 2017 à la Librairie La Virevolte, à Lyon avec Jeanne A. Debats, Dominique Douay et Sylvie Lainé.
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