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EAN : 9782073017949
112 pages
Gallimard (09/11/2023)
3.83/5   27 notes
Résumé :
« C’est très simple, je voudrais retrouver le moment où soudain Marguerite s’est arrêtée de me parler et que tout s’est suspendu. Nous étions assises l’une en face de l’autre, Marguerite Duras et moi, un après-midi d’automne, chez elle, rue Saint-Benoît numéro 5, je portais un gilet en grosse laine rouge et blanc et un petit foulard de soie léopard tacheté noir et blanc. À un moment, et c’est celui-là précisément que je voudrais retrouver, elle m’a fixée, légèrement... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (8) Voir plus Ajouter une critique
Colette Fellous éprouve une admiration particulière pour Marguerite Duras. C'est à l'occasion de la parution d' « Emily L. » qu'elle se rend au domicile de l'auteure pour un entretien autour de cet ouvrage. La rencontre va rapidement prendre une dimension à laquelle Colette Fellous ne s'attendait pas. Pour l'occasion, elle avait enfilé « un gilet en grosse laine rouge et blanc et un petit foulard de soie léopard tacheté noir et blanc ». Soudain, son interlocutrice la fixe et lance : « Tu vois, j'étais exactement comme toi. le même foulard, les mêmes couleurs, pareille. »
En sortant, Colette écume les boutiques du quartier à la recherche de cet accessoire, afin de l'offrir à son idole. Et bien plus tard, en détaillant des photos de l'auteure, Colette Fellous se rend compte que celle-ci a porté son cadeau sa vie durant. C'est un lien de plus qui se tisse entre elles deux.
Au fil de pages, Colette Fellous raconte des épisodes de la vie de Marguerite Duras, se perdant souvent en digressions. Tantôt, elle explique certains passages des oeuvres qui l'ont marquée. Ici, Marguerite assiste à des répétitions de pièces adaptées de ses livres, là, elle dirige des acteurs lors du tournage d'un de ses films. Elle l'évoque jeune, lorsque sa mère se battait contre le Pacifique, ou encore dans sa vie quotidienne. Elle parle de ses amours, notamment avec Yann Andrea. Elle fait allusions aux problèmes de santé. Yann arrange « les plis de son foulard léopard, pour bien cacher les traces de sa trachéotomie récente. »
Elle-même met ses pas dans ceux de la jeune fille au centre de « L 'Amant ». Elle visite la maison de celui-ci et reconnaît « le petit foulard léopard sur deux photos dans l'entrée ». Elle évoque « ses yeux bleus et purs », sa voix : « ce sont des ordres, le ton est presque militaire » lorsqu'elle conseille les comédiens. Elle s'est « modifiée après cette opération, mais elle avait gardé les mêmes intonations, les mêmes suspens entre les mots ».
Comme un fil rouge, tout au long des pages sont semées des descriptions de vêtements, de tissus : « sa robe, je crois qu'elle était bleue », « j'étais debout, en robe noire », « toujours élégante, vêtue de blanc », « une laine usée, un peu rêche », « elle regarde à travers la soie noire », « jupe droite pied-de-poule et bottines Weston », « magnifique robe de satin jaune », ou, sur la représentation du bandeau de couverture : « ce feutre marron, les bagues, le foulard, la chemise blanche ».
Car cet ouvrage est parsemé de photos, ce qui est très agréable, et parfois, Colette Fellous les détaille, y entre, revit un moment hors du temps.
Elle mentionne des noms célèbres qui ont côtoyé Marguerite Duras, ou se sont approprié ses romans : Jean-Luc Godard, Jean-Jacques Annaud, Bulle Ogier, Jean-Louis Barrault et tant d'autres.
Colette Fellous écrit : « un foulard, lorsqu'il est imprimé, cache toujours son motif, il ne laisse apparaître une fois noué autour du cou que des couleurs, des lignes, des taches, il faut le déplier entièrement pour voir son dessin ».
Je pense que c'est ainsi qu'elle a construit son texte : des petits détails à droite et à gauche, sans lien apparent. A la fin de l'ouvrage, lorsqu'on y réfléchit, on voit se dessiner la silhouette de Marguerite Duras dans sa totalité. C'est très réussi.
En refermant le mince opuscule, on a l'impression d'avoir passé quelques heures entre Colette et Marguerite.
Ce récit m'a plu.
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Marguerite Duras c'est avant tout un univers son univers et comme dit Colette Fellous "Si l'on n'accepte pas sa méthode, on ne pourra pas l'aimer, c'est sûr" ou encore "L'aimer c'est prendre en vrac sa mémoire et sa vie entière".
Personnellement je prends tout et c'est pour ça que je l'aime. J'ai donc été séduite par "Le petit foulard de Marguerite D." un récit pour la faire revivre un peu.
Colette Fellous raconte qu'elle a rencontré Marguerite Duras pour un entretien à la sortie de son roman "Émilie L.". Elles se connaissaient déjà. A cette occasion, Marguerite a regardé son foulard en précisant qu'elle avait exactement le même, qu'elle était pareille. Elle avait l'âge d'être sa mère (73 ans et Colette Fellous 37 ans, les mêmes chiffres mais à l'envers) mais l'intensité de son regard en disait long. Alors, le lendemain Colette lui a offert un foulard de soie presque identique.
C'est aujourd'hui, en regardant des photos, qu'elle s'est rendu compte que Marguerite Duras le portait souvent. Elle a donc illustré ce livre avec ces photos et d'autres car ses souvenirs sont nombreux.
J'aime beaucoup cette idée du lien qu'elles ont tissé avec ce foulard, comme celui d'un magicien. D'ailleurs, le textile revient souvent dans leurs échanges et dans les romans de Marguerite Duras, ainsi les robes que portent ses héroïnes qu'elles soient pauvres comme sa mère ou riches comme Anne-Marie Stretter. Et puis quand les deux femmes parlent d'"Emily L." Marguerite Duras demande à Colette Fellous si elle a aimé sa robe.
Ce sont donc de beaux souvenirs, un témoignage ponctué d'anecdotes qui montrent une femme entière et souvent drôle.
Je terminerai avec une phrase que j'aime beaucoup et qui casse certaines idées reçues : "On peut penser ce qu'on veut d'elle, la railler ou la caricaturer, Marguerite a toujours été d'une totale sincérité, c'est là sa puissance et sa simplicité."


Challenge Riquiqui 2022
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🧣 « La seule émission que j'ai faite à la télévision, je voulais qu'elle soit unique. Ce jour-là elle avait mis son pull caméléon à petites côtes et un gros gilet noir, mais par la suite, elle l'a porté jusqu'au bout de sa vie, ce foulard léopard, c'est ce qui m'a émue lorsque des années plus tard j'ai découvert toutes les photos. (…) Et c'est ce qui me pousse aussi à écrire aujourd'hui ces pages. le petit foulard léopard est devenu notre secret. »

🧣 Il suffit de peu de choses parfois. Une discussion, un échange, des souvenirs, et une odeur, une mélodie, un objet : un foulard, par exemple. Qui amène d'autres souvenirs, d'autres voyages, d'autres idées, d'autres horizons : la possibilité de créer un lien, indéfectible, éternel, indestructible. Ce foulard sera désormais pour l'autrice le témoin unique d'une amitié sincère, le complice d'un secret méconnu de tous, la preuve irréfutable d'une affection incontestable.

🧣 A travers lui, Colette nous raconte la grande Marguerite Duras, et voilà que le lecteur devient le dépositaire d'un héritage merveilleux, d'une complicité inédite. Cette étoffe devient le chemin que l'on suit dans la vie de Duras, ses amours compliquées et tourmentées, sa jeunesse si peu ordinaire, ses blessures, ses déceptions et désillusions, ses espoirs intarissables, et qui ont fait d'elle la grande auteure qu'elle est devenue. En lisant le récit de Colette Fellous, on devine l'empreinte de Duras, son impact aussi, et cette envie, cet élan naturel, comme irrépressible, de faire et d'écrire comme elle.

� court ouvrage dit tant et si peu à la fois : pas seulement de la relation entre les deux femmes, mais de ce qui est l'essence d'un sentiment, ce qui fait qu'il existe, ce qui fait naître l'espoir. Dans certains actes transparaissent des messages, des appels au secours ou des déclarations d'amour (si tant est qu'il s'agisse de deux choses confondues…) ; lorsque l'autre disparaît, tout devient possible, plus rien n'est démenti. Les non-dits prennent un sens, on invente une histoire, on relate des paroles et des faits que plus personne ne saurait contredire. Certains gestes sont-ils anodins ou volontaires ? Comment savoir ? Tout le mystère réside en cela : les mots valent autant que les silences. Et les parfums, les souvenirs, quels qu'ils soient, deviennent un ailleurs accessible.
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Le court livre de Colette Fellous a cette ambition de retrouver un instant suspendu, celui où Marguerite Duras s'est arrêtée de parler. L'autrice veut saisir quelques secondes de silence et les déployer comme le foulard offert à la grande romancière, serré autour de son cou et dont nous, lecteurs, ne percevrons pas une vue d'ensemble. Ce roman ne se veut ni un bréviaire de l'oeuvre durassienne ni un portrait. Colette Fellous raconte le lien concret et indicible de sa relation avec Duras. Les détails comptent, les silences tout autant et tout cela se lient dans une profonde affection qui a survécu à la mort de Duras. L'anecdotique de ce livre vibre de nombreuses émotions. Il y a de la tendresse, de l'admiration, de l'écoute et une certaine observation face à la vie de Duras. Qu'il s'agisse de son quotidien avec Yann Andrea ou de son rapport à l'écriture, instants esquissés à chaque fois, Colette Fellous regarde en rappelant la place qu'elle avait. Elle n'envahit pas une intimité mais dresse le paysage de ces moments offerts à sa vue. La rencontre entre Godard et Duras est un passage marquant du roman, rappelant l'importance de l'incompréhension dans les relations, la distinction entre aimer quelqu'un et la difficulté de le lui dire. Ainsi, il pourrait s'agir d'un rendez-vous manqué. Mais non. Les deux génies se voient, se respectent, échangent tout en connaissant pertinemment les particularités de leur propre mécanisme. Leurs rythmes de parole sont différents mais dans les interstices de leur dialogue, se niche un lien infime et bouleversant. Colette Fellous parvient, avec légèreté et joie, à capter son lien avec Duras, un lien riche de mots et de silences. Elle raconte la possibilité de la rencontre et tous les vestiges qui demeurent dans le monde d'après.
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La photo en couverture montre Marguerite Duras et Yann Andréa, se regardant de manière complice à travers une vitre. Marguerite Duras porte autour du cou un foulard léopard, qui est le point de départ et le fil conducteur de ce récit écrit par Colette Fellous. À travers ces pages, elle nous parle de son admiration pour l'écrivaine, fait surgir de sa mémoire des souvenirs qui la lient à elle, l'évoque avec tendresse. le lecteur perçoit combien Marguerite Duras a compté pour elle ; il sent aussi toute la discrétion et le respect de Colette Fellous pour celle qui a écrit Emily L., roman qui revient beaucoup au fil du texte, considéré comme son meilleur par l'auteur de ces lignes.
Le récit est illustré par des photographies de Marguerite Duras, avec ou sans son foulard. Il donne envie de la lire et relire encore. Sans être une biographie, il nous donne accès à elle de manière personnelle et parcellaire.

(...)
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Citations et extraits (10) Voir plus Ajouter une citation
Un dialogue intenable de cruauté et d’innocence mêlées, entre deux amants. L’homme dit à la femme qui veut écrire leur histoire qu’il n’y a pas eu d’histoire entre eux, jamais eu aucune histoire. La femme dit qu’il ne veut pas admettre qu’il l’aime mais il l’aime et ne peut pas le dire, alors elle va l’écrire cette histoire, cela fait longtemps qu’elle y pense. Et quand c’est écrit, ça devient vrai. Elle l’écrira et ça deviendra vrai.
Il n’y a rien à raconter, il n’y a jamais rien eu, il n’y a pas eu d’histoire, répète l’homme. Des mots crus, tranchants, impitoyables, désespérés aussi. Il ajoute qu’elle a inventé l’histoire pour lui, qu’il n’est pour rien dans l’histoire qu’elle a eue avec lui. Elle lui répond qu’il avait dit le contraire, une fois, au début. Il sourit : « Je dis n’importe quoi et puis j’oublie, vous le savez, mais je suis toujours près de vous dans le désespoir que je vous procure. »
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Elle est à la fois celle qui veut s’oublier et se perdre, la femme qui est indifférente à elle-même, comme si elle n’était qu’un lieu de transit, les mots et les personnages la traversent mais elle, elle s’est absentée d’elle-même depuis longtemps, elle s’est dissoute, elle a disparu. Et aussi l’autre Marguerite, reine du monde, tranquille et innocente, radieuse, parfois péremptoire et injuste
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Comme on s'en veut de ne pas avoir posé davantage de questions aux parents, maintenant qu'ils sont morts, on ne saura plus rien, on reste vide, avec nos tourments abandonnés, orphelins, qui ne servent plus à rien.
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C'est par le manque qu'on dit les choses, le manque à vivre, le manque à voir. Par le manque de lumière qu'on dit la lumière, le manque de désir qu'on dit le désir, par le manque de l'amour qu'on dit l'amour. Je crois que c'est une règle absolue.
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Le roman ressemblerait à un diamant qui aurait vingt-quatre mille reflets, impossible de les saisir tous, le regarder d’un point puis d’un autre puis d’un autre encore et recommencer jusqu’au vertige.
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Colette Fellous - Le petit foulard de Marguerite D.
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