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Saga maorie tome 0 sur 3
EAN : 9782070442850
832 pages
Gallimard (27/10/2011)
3.94/5   125 notes
Résumé :
Il y a vingt-cinq ans, Jack Fitzgerald s'est engagé dans la police néo-zélandaise avec l'espoir de retrouver sa femme et sa fille, mystérieusement disparues. Aujourd'hui capitaine de la police d'Auckland, il cherche à travers les affaires du quotidien un lien qui pourrait le délivrer de sa névrose. La jeune fille que l'on vient de retrouver morte sur une plage n'est que le premier d'une effroyable série de cadavres... Secondé par Ann Waitura, une jeune et brillante ... >Voir plus
Que lire après Saga maorie : Haka - UtuVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (19) Voir plus Ajouter une critique
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La Nouvelle-Zélande n'est pas le paradis perdu, loin s'en faut : avec « Saga maorie HakaUtu », Caryl Férey nous plonge dans l'ultra violence, le carnage et l'horreur. Les gangs rivalisent avec la police, laquelle n'intervient qu'épisodiquement dans des quartiers pauvres abandonnés aux délinquants de tous acabits. Les innocents sont massacrés à coups de machette, de massue ou de bâton de guerre traditionnel, puis énucléés, émasculés ou dépecés à moitié vifs. Avec la crise, le néolibéralisme et l'argent sale, les bandes s'organisent, l'autorité de la police recule et les zones de non-droit prolifèrent. Une violence à peine contrôlée par ceux qui la génèrent. Souvent sans travail, les Maoris ruminent des rancoeurs colportées par leurs ancêtres depuis le vol organisé de leurs terres d'origine par le Royaume-Uni. Malgré les accords passés, les avantages donnés aux premiers natifs et les restitutions de terres de la reine d'Angleterre, les jeunes autochtones ont la sensation d'être nés en marge de la société et que tout est fait pour qu'ils y restent. Ces jeunes découvrent, par le récit des anciens, l'existence de rites initiatiques où des prêtres revêtant robes et tatouages, honoraient les dieux au cours de cérémonies où le Mal, Tané, servait de repère. Car, sans notion de bien et de mal, quelles barrières fixer au peuple Maori ? Les colons avaient imposé leur religion et chassé les dieux multiples que les autochtones adoraient. Cet échange n'avait conduit qu'au chaos, à la désorganisation du lien social et familial, à la mort des croyances, à la désolation et au chômage. Aujourd'hui, Caryl Férey –qui est resté 4 mois sur place afin de se documenter- nous montre l'existence d'une forme de retour aux sources concernant ceux qui, esclaves d'hier, souhaitent revenir aux anciennes formes de vie et de croyances, souhaitent honorer leurs dieux au grand jour, refusant ces villes criardes et perverses où ils ne peuvent trouver de place. Dans cette course au retour aux sources, il se trouve des extrémistes, des individus qui n'hésitent pas à envisager la mort des colons comme seule solution envisageable. Drogués, hallucinés, revêtus de peintures de guerre qui ornent leurs visages farouches, ces extrémistes veulent avoir l'honneur de sacrifier l'ennemi selon les rites. « Haka », la guerre et « Utu », la vengeance : tout est dit dans une région où, il y a deux cents ans, les villages s'organisaient en complète autarcie et vivaient en costume traditionnel dans le respect et le culte de leurs dieux. Dans ces temps reculés, les mangeurs d'hommes régnaient et l'ennemi était éventré après quoi on dévorait son foie, on jetait ses organes génitaux dans le feu sacré, on sculptait ses os pour confectionner des heï-tiki aux figures grimaçantes, on jetait les restes humains au charnier après avoir dévoré les morceaux de choix. La symbolique du trophée était évidente et masquait la barbarie. A cette époque, pour combler le déséquilibre au sein d'un groupe où les hommes étaient souvent polygames, on imposait à certains hommes de tenir le rôle de la femme, et l'homosexualité n'était pas un problème. Aujourd'hui, la vengeance sauvage est donc proposée par ces fanatiques comme seule ligne de conduite possible pour ce peuple primitif, opprimé, écrasé et anéanti par la loi des Blancs. Proposée comme seule possibilité de se départir de ces villes où règnent les cravatés des agences financières, les voitures électriques aux carrosseries déformables, le « world food », le jazz et tout un cocktail d'enfantillages tapageurs, pollué par le fric facile et les magouilles, le tout au service de la propriété privée, de la célébrité à tous prix, et de l'artifice.

Dans ce gros volume de 814 pages, les deux romans « Haka » et « Utu » forment un tout, une saga colorée, exotique et hyper-violente. Un point commun : deux aventures policières sur fond de meurtres inexpliqués, avec enquêtes et courses poursuites menées dans un style très personnel par des flics au passé douloureux, des flics à la marge, alcooliques ou violents. Les espaces encore vierges côtoient les artères des villes ultramodernes du pays. Les morts sont légions et le sang coule à profusion. le style est efficace, l'écriture est crue, il y a de la noirceur comme s'il en pleuvait. Les personnages sont bien croqués, héros d'un soir, tueurs, victimes, affairistes, politiciens véreux, honnêtes artisans, bref, tout un monde finement décrit avec des passions parfois exacerbées et ses suites imprévisibles. Dans ce livre qui tient autant du « Livre sans nom » pour sa violence, que de « Las Vegas Parano » pour son côté drogue-et-sexe-à-tous-les-étages, mais aussi de n'importe quel ouvrage de le Clézio pour les superbes descriptions de paysages, Caryl Férey ne fait pas de l'ethnologie de pacotille et son thriller est particulier : au-delà de la folie destructrice et du cauchemar, il y a une quête désespérément humaine de la vérité. Pour le premier flic, il s'agit de retrouver la trace de sa femme et de sa fille, disparues dans des conditions inexpliquées ; pour le deuxième, il s'agit de vérifier si son meilleur ami s'est réellement suicidé ; et pour nous, lecteurs, il s'agit de constater que, bien que s'étant repentie des crimes perpétués par les soldats britanniques et solennellement excusée pour la confiscation des terres maories, la Nouvelle-Zélande affronte aujourd'hui, après sa repentance, les revendications d'individus de conditions modestes, coupés de leurs racines, étrangers à leur langue (l'auteur émaille son livre de quelque phrases en Maori), déroutés et relégués dans l'exercice d'un folklore pour touristes pressés. Superbe : je mets 5 étoiles.
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Haka.
Un polar comme un uppercut...Cru, excessif, violent, lyrique....
"Too much", c'est une évidence.
Trop de morts, trop de bagarres, trop de rails de coke et trop de sexes scalpés, mais malgré tous ces défauts, malgré le poncif du héros recru de tourments, cédant à sa part d'ombre et virant lonesome bad boy, on ne peut s'empêcher de saluer le panache de ce polar hystérique et fiévreux.
La Nouvelle Zélande, ses paysages pour surfeurs blonds et ses rites pour sorciers cannibales; le massacre comme seule issue à une intrigue saturée de violence; le sexe comme on se noie, la mer comme on on s'étreint; tout le livre malgré une saturation de bruit et de fureur est un frénétique HAKA hurlé à la face du lecteur.
On peut détester. On peut aussi capituler et avouer une certaine fascination.

Utu.
A la question : Fitzgerald - le héros de Haka- peut-il décemment avoir un fils spirituel aussi brutal, aussi toxico, aussi testostéroné – et néanmoins aussi fleur bleue- que lui, Caryl Ferey dans Utu répond : oui, Paul Osborne !
Il est juste un peu moins Maori. Quand même, pas un de ces pakehas, ces pâles petits blancs colonisateurs- un métis, sans père, mais avec des yeux jaunes, des yeux de bête sauvage, ce qui compense largement..
Paul Osborne, donc, prend la relève en terre maorie, après la disparition apocalyptique de Fitzgerald et de quelques dizaines d'autres…
Un flic, lui aussi.
Pas plus clean que son prédécesseur : toujours chargé à tout ce qui se sniffe, s'injecte ou se fume, prêt à en découdre sans se faire prier, n'hésitant pas à tirer une balle dans le genou de son supérieur hiérarchique pour avoir les coudées franches sur une enquête, pas avare de sa personne non plus : Rosemary, la femme de son coéquipier, Ann, une ravissante top-model, Amelia, la toute jeune assistante du coroner, toutes y passent allègrement , même si aucune ne remplace son seul et unique amour de jeunesse, Hana, la belle et sombre Maorie, éternellement poursuivie, et éternellement insaisissable…
Voilà pour les poncifs…mais ce serait manquer aux attentes du lecteur- petit –poucet-amateur- de -polar que de lui refuser ces cailloux pour baliser sa route…surtout en terra incognita !
Tout le reste, en effet, est profondément et vigoureusement original : la Nouvelle-Zélande, le « pays du long nuage blanc » est cette fois nettement plus présente que dans Haka - et toujours plus dépaysante.
Au fil des péripéties, et avec autant de rigueur que de doigté, nous voilà instruits des rites et coutumes maoris, comme les élèves de ces kohangareos, ces écoles maories où s'apprennent les hakas.
Ni les mokos, ces tatouages rituels des guerriers maoris exécutés par le tohunga, chaman et homme-médecine de haut savoir-faire, ni le uhi, ce couteau à inciser les chairs, bistouri du tatoueur expérimenté…taillé dans un fémur humain, ni le culte de Hauhau, institué anciennement pour résister à la colonisation britannique et brutalement ressuscité, ni le mana qui est l'âme et la force d'un Maori , ni son attachement à sa terre- son turangawaewae, littéralement lieu où il peut se tenir droit- ne nous demeurent étrangers..
Et enfin, moko sur le mana (ou cerise sur le gâteau), Tu-Nui-a-Ranga, la hache de guerre, la hache sacrificielle , la hache à décapiter les ennemis - qui devait servir à aiguiller sur une fausse piste notre beau métis aux yeux jaunes, loin des magouilles politicardes et immobilières qui font les beaux jours des nantis et de leurs hommes de main, police comprise… ce qui aura pour effet, évidemment , (avec l'aide de quelques substances psychotropes), de décupler ses facultés neuronales et de le jeter, au contraire, sur les traces encore fraîches du scandale et de l'horreur…
Je vous laisse découvrir ce que sont les mokomakaïs…
Un indice : Utu veut dire vengeance…
Un superbe polar, lyrique, hystérique et fou, dopé à l'humour noir, mais totalement maîtrisé et construit comme une symphonie…le final vaut son pétant de dynamite… Des personnages attachants et bien campés : Paul, Hana, Amelia- et moi, qui ai toujours un faible pour les kupapas (non, je ne traduirai pas…) sans espoir de pardon, j'ajouterais Jon Timu, vieux policier maori doublement condamné et père d'un enfant trisomique, Mark.
Mark, un innocent : le seul peut-être de cette sombre course vers l'abîme…
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HAKA : On peut dire que le flic Jack Fitzgerald est à la Nouvelle-Zélande ce que le commissaire Erlendur Sveinsson est à l'Islande...

Le parallèle est facile face à deux flics non-conventionnels, ayant souffert tous deux d'une disparition, n'hésitant pas à tutoyer la dive bouteille et menant leurs enquêtes d'une manière un peu particulière et bien à eux.

La différence étant que Jack, métis maori, est aussi un cocaïnomane (et il ne se contente pas d'une solution à 7%, lui !) et que, pour calmer ses rages, il utilise ses poings pour cogner la racaille et autres truands qui lui tombent sous la main. Les interrogatoire, avec lui, c'est sans l'avocat mais avec le tabassage compris dans le prix ! Bon, il a la carrure qui le lui permet aussi.

C'est vous dire que le cas de Fitzgerald est grave et tout à fait désespéré ! Pourtant, j'ai bien aimé ce flic torturé qui n'hésite pas à alpaguer les malfrats par le collet. Quand il fait de même avec des témoins potentiels, ça l'fait moins...

Et voilà que pour lui changer les idées, nous avons une jeune fille retrouvée sur la plage avec - âmes sensibles, veuillez m'excuser - le pubis tranché et le petit triangle rose jeté négligemment plus loin... Gloups !

L'enquête policière de Fitzgerald est remplie de violence et dedans se greffera le passé culturel de la Nouvelle-Zélande, omniprésent dans le roman, nous livrant quelques informations intéressantes, mais avec parcimonie.

Les Maoris ne sont jamais loin et certaines de leurs anciennes coutumes ont de quoi vous couper l'appétit.

Ce roman est sombre, glauque, noir, oppressant, sordide, lugubre,... avec quelques métaphores dans un style d'écriture qui m'a fait penser à Frédéric Dard, mais la comparaison s'arrêtera là.

Moi qui aime, lors de mes lectures de policier, recevoir une bonne claque - pas une claquounette du genre "Fifty shades" avec les formules de politesse - voire un bon coup de pied au cul, je vous avoue que je viens d'être servie au-delà de mes espérances !

J'en suis encore toute retournée ! Encore un peu, le livre m'en tombait des mains.

Les révélations du final sont délirantes, mais pas fantaisistes et j'avais la mâchoire qui béait durant la lecture des dernières pages.

Je dois vous avouer que mon esprit un peu sadique avait émis une théorie sur la disparition un peu trop brutale de la femme et de la fille de Jack et que ma perversité m'avait fait glousser un "tiens, ce serait drôle si..." et puis l'idée un peu folle m'était sortie de la tête et j'avais poursuivi ma lecture.

A un moment, dans ma lecture, j'ai même pensé que je m'étais trompée de personne.

Que nenni ! Mon esprit pervers était bien sur la même longueur d'onde que celui de l'auteur et, bien que j'y ai pensé au début de ma lecture, le fait de lire noir sur blanc, et bien, les bras m'en sont tombés.

Je croyais en avoir fini avec les rebondissements mauvais pour le coeur, vu ce que je venais de me prendre dans la face, mais l'auteur n'en avait pas fini avec moi.

- P***** de b***** de D*** ! me suis exclamée, le souffle court et les yeux hagards (du Nord).

Ce roman, "C'est extraaaa" comme le chantait Léo Ferré, qui n'est pas le cousin de Caryl Ferey ni celui de la gaufrette croustillante à laquelle, dès son appel, on vient au galop.

En tout cas, ce livre porte bien son nom : "Haka" qui veut dire "la danse de la mort"...

Ben, il ne restait pas grand monde pour exécuter quelques pas de danse...

Tiens, "exécuter", que voilà un jeu de mot foireux pour ce roman hallucinant.

PS : A noter que dans ce double roman, il y a un chapitre inédit, uniquement disponible pour cette édition, sous forme de prologue à "Haka" et faisant le lien avec les deux romans.

Critique publiée dans le cadre du challenge "Thrillers et polars" organisé par Liliba.

La suite au prochain épisode... dès que j'ai terminé "UTU"


Lien : http://the-cannibal-lecteur...
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Un thriller terrifiant, exaltant en deux parties.
Dans Haka, Jack Fitzgerald, flic de son état, est métis, d'origine maorie. Sa femme et sa fille ont disparu, volatilisées 25 ans avant que l'histoire commence. Une enquête difficile lui est confié au cours de laquelle : un tueur en série exécute des jeunes filles dans des conditions particulièrement atroces. Il sera secondé par une jeune criminologue.
Dans Utu, c'est Paul Osborne, l'ancien adjoint de Jack Fitzgerald, qui prend les rênes de l'action.
Bref, un polar déconcertant très documenté que j'ai beaucoup aimé.
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J'avais déjà eu un aperçu de l'oeuvre de Caryl Férey après avoir vu et adoré l'adaptation cinématographique de son roman Zulu dont l'action se situait en Afrique du Sud. J'ai profité de la pause hivernale pour me lancer dans la lecture de deux romans consacrés cette fois-ci à la Nouvelle-Zélande et en particulier aux Maoris, Haka et Utu réunis sous un même volume. Un chapitre inédit a été rédigé pour introduire l'histoire.

Il y a 25 ans, Jack Fitzgerald, Maori, s'est engagé dans la police néo-zélandaise avec l'espoir de retrouver sa femme et sa fille, mystérieusement disparues lors d'un voyage familial. Aujourd'hui capitaine de la police d'Auckland, Jack continue, à travers les affaires du quotidien de chercher un lien avec leur disparition et croit toujours à la possibilité de les retrouver. Mais sa quête personnelle est mise de côté lorsque le corps mutilé d'une jeune femme est retrouvé sur une plage. Il s'agit en fait du premier d'une longue série effroyable de cadavres. Secondé par une jeune et brillante criminologiste, Ann Waitura, Fitzgerald s'embarque sans le savoir dans une enquête qui va le mener tout droit à l'enfer, à une guerre (Haka)…
Exilé en Australie après une terrible engueulade avec son ami Fitzgerald, le policier Paul Osborne rentre dès qu'on lui apprend la nouvelle : le chef de la police d'Auckland aurait abattu un chaman maori soupçonné de meurtres atroces, avant de se donner la mort. Or, non seulement le cadavre du chaman n'a jamais été retrouvé, mais la mort de son ami reste inexpliquée. Spécialiste de la question maorie, l'ancien bras droit de Fitzgerald est chargé de remonter la piste. Dans un climat social et politique explosif, épaulé par une jeune légiste fraîchement débarquée en Nouvelle-Zélande, Osborne devra affronter le spectre de Hana, son amour d'enfance, mais surtout le utu des ancêtres du « pays aux longs nuages blancs ». (Utu signifie vengeance).

Caryl Férey signe ici une fresque épique, puissante et d'une violence que je n'avais pas croisé depuis longtemps. La tension de chaque histoire ne cesse d'augmenter jusqu'au chaos final, dont, il vrai, pas grand monde ne réchappe. Férey voit la vie en noire et vous ôte tout optimisme mal placé. L'éditeur le précise ainsi « chaque page est une déflagration ». Ses histoires sont sombres, très sombres, ici pas de place pour la complaisance ou la compassion, les hommes s'entretuent, violent, se droguent et agissent uniquement par appât ou par vengeance.

Comme dans Zulu, Férey s'intéresse vivement à la question des minorités et ici de la culture Maori. Un néophyte en la matière ressortira de sa lecture avec de nombreuses références et informations pertinentes sur ce peuple encore méconnu, si ce n'est pour le fameux Haka, interprété par l'équipe de rugby, championne du monde, les All Blacks.

Comme les rugbymen dressés tout en noir, Férey plonge ses personnages dans la mort ou le deuil. Il dresse un portrait sans complaisance de ce petit pays au bout du monde. Les Maoris ont perdu leur terre en signant un « protocole » avec la couronne britannique et depuis leur culture et leur mode de vie ont presque été enterrés. Férey dresse un portrait lugubre de ce peuple autrefois conquérant, valeureux et fier. La plupart des hommes quittent l'école très vite et subsistent en participant à des trafics de toute sorte. La violence fait partie de leur mode de vie. L'alcool, la drogue, tout y passe.

Les deux personnages principaux, Fitzgerald et Osborne, sont poursuivis par des fantômes et sont incapables d'avancer dans la vie. Leur métier de policier n'est qu'une façade pour qu'ils puissent mener à bien leur vengeance, chacun de sa manière. Ils se fichent de la loi, désobéissent à leurs supérieurs, mènent des opérations secrètes qui seront souvent fatales à leurs coéquipiers. Car ces hommes-là portent la mort en eux, et ne cessent de la répandre autour d'eux.
Les deux volumes sont de très bons page-turner, le romancier maitrise le rythme, le suspens et même si la violence est presque à chaque page (et finit par vous laisser un goût amer dans la bouche), il est impossible de ne pas vouloir lire la suite. Même si à la fin du premier volume, vous finissez sur les rotules. le second est cependant comme une sorte de bouffée d'air pendant les premiers deux-tiers, Osborne chasse un fantôme qui va l'entrainer dans les entrailles de la terre mais avec lui, vous apprendrez énormément sur les us et coutumes des Maoris (il parle leur langue). Mais pour la lueur d'espoir, à laquelle j'avoue je me suis tenue fébrilement à chaque fois, passez votre chemin. Un roman policier noir, noir comme du charbon. Et une fin explosive !

Je me suis surprise à lui en vouloir d'être aussi violent, pessimiste et si dans Zulu, les scènes violentes paraissaient tout de moins réalistes (l'Afrique du Sud est un des pays les plus violents au monde), j'ignorais qu'il pouvait aller encore plus loin. Un bémol ? J'avoue avoir noté quelques tournures de phrase un peu saugrenues et ayant lu les deux romans d'affilée, j'ai noté certaines redondances (un héros masculin avec une jeune femme à ses côtés, flic ou scientifique) et quelques scènes presque semblables qui ont freiné mon élan. Enfin,une scène m'a particulièrement surprise car je l'ai trouvé vraiment improbable, mais dans l'ensemble, j'ai été accrochée par l'histoire et j'ai dévoré ce pavé de plus de 800 pages.

Petit message aux âmes sensibles : ce livre n'est pas à mettre entre toutes les mains. J'ai lu ci-et-là que des lecteurs avaient abandonné en cours de lecture, jugeant les histoires beaucoup trop violentes. Les amateurs de Noir y trouveront leurs comptes.

Aparté (cf.photo) : en 2010, le gouvernement français a accepté de rendre à la Nouvelle-Zélande 16 têtes de guerriers Maori, des mokomokais qui étaient détenues depuis longtemps par des Musées dont le muséum d'histoire naturelle de ma ville.
Lien : http://www.tombeeduciel.com/..
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Citations et extraits (11) Voir plus Ajouter une citation
page 662 [...] Ils suivirent la portion de route bitumée jusqu'au village de Claris, dernier bastion de civilisation avant la forêt escarpée. Puis ils dépassèrent un lodge, quelques fermes le long d'une piste poussiéreuse, et s'enfoncèrent dans le bush.
Paul zigzaguait pour éviter les racines. La végétation gagnait sur la route, compacte, brocolis géants rivés à la terre. Bientôt la nature les enveloppa dans ses tiges. Ils roulèrent encore, soulevant un nuage de fumée et d'insectes que des piwakawakas bleus gobaient au passage, atteignirent un premier sommet où l'on apercevait une baie turquoise et filèrent plein nord, en direction de Rangiwhakaea Bay.
Hana n'était jamais venue à Great Barrier. Elle observait le panorama dantesque qui défilait derrière le pare-brise moucheté d'immondices - des plages désertes et la forêt qui se perdait dans la montagne. Ils ne croisèrent bientôt plus que des oiseaux.
Enfin, la vieille guimbarde ralentit à l'orée d'un bois. Hana se tourna vers l'océan, qu'on distinguait derrière une rangée de pohutuwakas, ces grands arbres aux fleurs rouge sang ...
- Tu m'as fait venir ici pour prendre un bain de mer ?
- Avance plutôt que de dire des conneries, dit-il en ouvrant la portière.
Filant sous la voûte des grands arbres, ils atteignirent la plage de sable blanc où se prélassaient une colonie de manchots.
- Par ici, dit-il en l'entraînant sur un lit de coquillages.
A peine visible depuis la plage, un chemin abrupt grimpait au flanc d'une petite falaise. Des marches avaient été taillées à même la roche, renforcée par des pierres et des planches mal ajustées. Paul ouvrit le passage, repoussant les fleurs sauvages. Hana le suivit jusqu'au sommet. Le jardin qui dominait la baie était en friche mais les fleurs autour de la maison commençaient à s'ouvrir.
Des orchidées blanches, ça lui plairait, non ?
- Qu'est-ce que c'est que ça ? dit-elle.
- Une maison. [...]
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[Utu]
- Et toi? reprit-il. Pourquoi tu es partie si longtemps?
- Pour apprendre.
- Apprendre quoi? L'ethnologie? C'est ici que les Maoris vivent, pas en Europe.
- Je voulais connaître le monde des pakehas avant de revenir, dit-elle, apprendre leur mauri afin de mieux défendre le nôtre.
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[Haka]
Vous avez chassé les dieux multiples que nous honorions mais certains sont revenus. Car ceux que vous nous avez proposés en échange avec la cohorte de missionnaires débarqués sur notre terre ne nous ont finalement apporté que chaos, désorganisation du lien social et familial, mort des croyances, désolation et chômage... Aujourd'hui, certains d'entre nous, esclaves d'hier, reviennent aux anciennes formes de vie, de croyances... Nous honorons nos dieux en secret, loin de vos villes criardes et perverses où nous n'avons nulle place...
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La violence était sa drogue, sa faiblesse, le mépris qu'il avait de lui même.
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[Haka]
Quand un crocodile géant les happe au bord du Nil, les zèbres s'attaquent aux yeux de leur agresseur: alors, le monstre les laisse s'échapper. Fitzgerald était cet animal en perdition: il planta ses crocs dans les paupières du sorcier. D'un coup sec, il arracha peau et cils. Le Maori se prit le visage à deux mains et lâcha sa garde. Jack cracha des lambeaux de chair, empoigna le couteau planté dans sa cuisse et le tira d'un coup sec. Les bêtes féroces se déchainèrent dans sa tête.
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Vidéo de Caryl Férey
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