Utilisant à de nouvelles fins les personnages des contes de Perrault, l'auteur les transpose à sa guise. Cendrillon devient un garçon persécuté par ses frères. le Petit Chaperon rouge, doté d'un pantalon vermeil, s'attache à Barbe-Bleue et le délivre de sa malédiction grâce à sa science du loup. Quant à l'Ogre, nous découvrons qu'il avait une compagne, plus digne d'attention que lui-même. Tout cela ne va pas sans entraîner quelques anachronismes et une charge érotique qui se substitue quelquefois aux discrets sous-entendus de la tradition.
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Une revisite des contes de notre enfance avec des héroïnes décoiffantes.
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Une jolie façon de redire les contes, et de donner en effet aux dames une grande place... C'est drôle et bien écrit!!!!!
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Dans une chaumière, à quelque distance d'un village, vivait une petite fille, la plus vive qu'on pût voir. Sa mère, qui n'avait point d'époux, et sa mère-grand, qui en avait eu plusieurs, en étaient folles. Elles lui firent faire un petit pantalon rouge qui lui seyait si bien que désormais partout on l'appelait "Petit Pantalon Rouge".
Petit Pantalon Rouge croissait en force et en sagesse. Sa mère lui enseigna à ne point craindre les sentiers gris de l'aube, ni les brouillards qui trainent au crépuscule d'étranges fantômes, ni le vent qui hurle d'affreuses folies, ni la pluie si triste qu'elle décompose le coeur, ni les tempêtes qui parlent de la fin de toute chose. Elle plongeait dans les tourbillons et les cascades, grimpait aux pointes des arbres les plus hauts, et bientôt, comme sa mère qui était une forte et solide femme, elle sut refaire la toiture que le temps disjoignait, labourer les champs que le gel ou le soleil désolait, et si bien assembler un mur que rien ne pouvait le renverser.
Sa mère-grand, quant à elle, lui racontait les aventures qu'elle avait eues dans le vaste monde, et l'instruisait par ses livres et ses souvenirs de mille choses que les paysannes du village eussent été bien étonnées d'apprendre.
Mais ces femmes, qui étaient prudentes autant que courageuses, avaient toujours pris soin que Petit Pantalon Rouge ne se trouve seule le soir dans les lieux écartés. Autour de la chaumière en effet, tournaient de nombreux loups, et lorsque la neige tombait, l'un ou l'autre, plus hardi ou plus affamé, quittait l'orée du bois et s'avançait sur le sentier. Aussi Petit Pantalon Rouge fut-elle bien surprise lorsqu'un jour sa mère lui dit :
- Petit Pantalon Rouge, voici la gomme-qui-colle-tout, va et joue avec le loup.
Petit Pantalon Rouge sortit de la maison et fit ainsi que sa mère lui avait dit. Lorsqu'un loup fut venu assez près, elle jeta la gomme entre ses longues dents pointues. Celui-ci, croyant avoir attrapé une main et peut-être même un bras, referma aussitôt les mâchoires, mais lorsqu'il voulut les rouvrir pour mastiquer sa proie, il s'en trouva bien empêché. Petit Pantalon Rouge sauta alors sur son dos.
- Loup, promène-moi, dit-elle.
Le loup surpris, fit deux fois le tour de la maison. Et Petit Pantalon Rouge le trouva supérieur aux chiens, aux ânes, aux gorets qu'elle avait jusque-là chevauchés.
Pendant que la vieille reine maugrée, le roi est parti faire sa guerre à un peuple très petit, au bout de ses terres. Les nouvelles des victoires et des morts arrivent tous les jours et le soir, parmi la foule qui se réjouit de tant de gloire, on voit la reine, pâle et hagarde, pleurer dans l'ombre des arbres. La reine est une Ogresse, qui voudrait manger les cadavres, la nuit, sur le champ de bataille.
Maison de la poésie (4 juin 2019) - Texte et Lecture de Alban Lefranc, extrait du Dictionnaire des mots parfaits (dirigé par Belinda Cannone et Christian Doumet, éd. Thierry Marchaisse, parution mai 2019).
Le Dictionnaire des mots parfaits :
Pourquoi certains mots nous plaisent-ils tant ? S?adressant à notre sensibilité, à notre mémoire ou à notre intelligence du monde, ils nous semblent? parfaits.
Bien sûr, parfait, aucun mot ne l?est ? ou alors tous le sont. Pourtant, chacun de nous transporte un lexique intime, composé de quelques vocables particulièrement aimés.
Après ceux consacrés aux mots manquants et aux mots en trop, ce troisième dictionnaire iconoclaste invite une cinquantaine d?écrivains à partager leurs mots préférés.
Il vient parachever une grande aventure collective où la littérature d?aujourd?hui nous ouvre ses ateliers secrets.
Auteurs : Nathalie Azoulai, Dominique Barbéris, Marcel Bénabou, Jean-Marie Blas de Roblès, François Bordes, Lucile Bordes, Geneviève Brisac, Belinda Cannone, Béatrice Commengé, Pascal Commère, Seyhmus Dagtekin, Jacques Damade, François Debluë, Frédérique Deghelt, Jean-Michel Delacomptée, Jean-Philippe Domecq, Suzanne Doppelt, Max Dorra, Christian Doumet, Renaud Ego, Pierrette Fleutiaux, Hélène Frappat, Philippe Garnier, Simonetta Greggio, Jacques Jouet, Pierre Jourde, Cécile Ladjali, Marie-Hélène Lafon, Frank Lanot, Bertrand Leclair, Alban Lefranc, Sylvie Lemonnier, Arrigo Lessana, Alain Leygonie, Jean-Pierre Martin, Nicolas Mathieu, Jérôme Meizoz, Gilles Ortlieb, Véronique Ovaldé, Guillaume Poix, Didier Pourquery, Christophe Pradeau, Henri Raynal, Philippe Renonçay, Pascale Roze, Jean-Baptiste de Seynes, François Taillandier, Yoann Thommerel, Laurence Werner David, Julie Wolkenstein, Valérie Zenatti
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