Le temps du Risorgimento fut une période étrange. Un temps de foisonnement culturel, d'exaltation de la patrie, d'enthousiasme populaire et de répression. En somme, l'une de ces périodes comme nous aimerions tous vivre au fond de nous, où l'on sent que l'histoire est arrivée à un noeud. Peu connu en France,
Ugo Foscolo en fut l'un des grands écrivains, et un peu le père spirituel. Un
Goethe épris de politique en quelque sorte.
Du reste, ‘
Les dernières lettres de Jacopo Ortis' peut assez bien se résumer à une version nationaliste des ‘Souffrances du jeune
Werther'. Ici l'être aimée, inaccessible, se confond avec l'idéal d'une patrie unie et libre, tout aussi inaccessible. Bien évidemment, ça ne finit pas bien…
Il est difficile de comprendre aux gens d'aujourd'hui comment ces histoires d'amours édifiantes et larmoyantes ont pu faire vibrer des milliers de jeunes gens et les précipiter au combat – ou au suicide, dans le cas de ‘
Werther'. Il faut imaginer une société sans cinéma, sans téléfilms à la guimauve, sans comédies musicales, sans films à l'eau de rose, sans ‘Autant en emporte le vent', sans ‘Orgueil et préjugés' ; un monde où un livre était un objet rare et précieux, qu'on s'échangeait avec respect.
Pour une jeunesse exaltée et à l'espérance de vie plutôt courte, ils représentaient le summum de la modernité. L'ouverture sur un monde nouveau, et un idéal : le romantisme. Quand on est jeune, on a l'impression que le monde vous appartient. Cela fut vrai de tout temps. Mais eux savaient qu'ils n'avaient que quelques années pour en profiter…