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EAN : 9782342163568
398 pages
Publibook (22/10/2018)
4.75/5   2 notes
Résumé :
" J'ai rêvé que mon fils, car c'est un garçon que je porte, me reprochait ses origines [...]. Puis il s'enveloppait dans un grand drap de lin blanc avant de s'allonger sur un gigantesque lit, le visage enfoui dans l'oreiller. Curieusement, la toile restait immaculée malgré la grande quantité de sang ; sa peau semblait avoir joué le rôle d'un puissant buvard périodique. Affolée, je me précipitais sur lui et le retournais sur le dos pour qu'il puisse respirer normalem... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (2) Ajouter une critique
Sangs-mêlés est un très bon roman, d'une force indéniable et d'une construction irrécusable. J'y ai pris un réel plaisir de lectrice. La force vient d'abord des personnages. Quel travail incroyable ! Tous sont parfaitement construits et d'une grande richesse, dans le cheminement et le démêlé de leurs vies respectives mais surtout psychologiquement. J'ai eu un vrai coup de coeur pour Marion la mère pour laquelle j'ai vibré et que je n'arrivais pas à quitter ; une réelle affection pour Alexandre, en empathie avec lui, paradoxalement non pas par rapport à ses drames existentiels mais pour sa dualité : noirceur limite cruelle versus romantisme exacerbé. J'ai moins accroché avec Marion la petite-fille parce que sa moindre consistance psychologique liée à son jeune âge et à son inexpérience dénote par rapport aux deux autres, aussi parce qu'elle devient quelque part un personnage de film d'aventures, tranchant avec Alexandre et Marion qui eux ont des aventures de vie. L'attachement aux personnages est d'ailleurs parfois déroutant. Tous, à des degrés différents et pour des raisons diverses, ont une noirceur mais aussi une certaine cruauté. Je ne parle pas des personnages naturellement cruels tels que Adrien, Marcelle et Alexandre Lemaire mais des autres, qui lorsqu'ils ne sont pas ‘down', transforment leur ‘up' en ‘down' : ne rien laisser exister, ne rien vouloir garder, racheter mais détruire, finalement accepter à leur corps défendant un lâcher-prise qui n'engendre que du négatif plutôt que de l'ouverture. Mais malgré cela, je les ai aimés ces personnages !
La force du roman vient également de ce qu'il est : combattant et anti-raciste. Combattant car tous tes personnages sont des lutteurs, chacun à leur manière, en bien ou en mal, volontaires, engagés, militants ou malgré eux. Combattant car anti-raciste mais sans jamais sombrer dans un militantisme primaire. La lutte et la forte implication dans les combats menés restent justement dosées et gardent une subtilité et une finesse. Anti-raciste : racisme culturel, blancs / noirs, racisme social, racisme sexuel, racisme intra-clanique même. Je ne suis donc pas d'accord d'annoncer le livre comme une saga gay. C'est restrictif. La question Gay n'est pas plus présente que la question Blancs / Noirs, ou la question riches / pauvres, bien nés / mal nés etc. Pour moi c'est un vrai roman social. Les problématiques de société sont sainement abordées, ne versent pas dans la polémique en gardant un vrai point de vue d'auteur et des positions claires et assumées. La complexité de rendre l'Humain dans toute sa cruauté et son côté méprisable, sans 'taper' parce qu'argumenté, est un exercice difficile, relevé haut la main. Pour résumer ce roman social, j'ai beaucoup aimé une phrase de Nathanael: ‘Pour moi, Noirs et Gays ne faisaient qu'un dans une lutte pour une reconnaissance citoyenne et humaine.' Tout y est là-dedans.
La force de Sangs-mêlés vient aussi de sa construction millimétrée. C'est assez dingue d'arriver à ce que tout s'imbrique et se dénoue parfaitement naturellement quand on a autant de personnages et donc une multitude de vies à gérer en parallèle de l'intrigue principale. Je me suis laissée prendre par la montée progressive du suspens. D'où une frustration quant à la scène finale, frustration qui ne déboule pas comme ça dans les dernières pages mais dont on s'aperçoit avec le recul qu'elle est subtilement installée. C'est bien joué ! Lecteur frustré = lecteur qui lit -et achète- la suite !
J'ai une seule réserve, le choix des temps principaux du récit : imparfait et passé simple qui créent une distanciation avec les personnages. le présent permettrait d'être avec les personnages, de marcher dans leurs pas et non à côté d'eux. Avec le passé, je les regarde et cette mise à distance ne permet pas l'identification possible du lecteur aux personnages. Comme ils sont excessifs et excessivement forts, ça marche quand même. J'ai beaucoup aimé le phrasé. Je n'ai rien à dire sur la syntaxe, tout est fluide, ni sur le vocabulaire, riche sans être prétentieux, c'est très agréable.
Bref, dans la tête de l'auteur il y a sacrément du monde et des mondes mais c'est passionnant et non dénué de passion. Quelques corrections dans la forme, sans toucher à la substantifique moelle de Sangs-mêlés, pourraient faire de cet actuel très bon roman, un putain d'excellent roman !
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Ah, quel livre riche et dense ! Et mon Dieu qu'il est lourd ! Je ne parle en aucun cas du contenu, mais du poids du roman broché, que l'auteur a eu la gentillesse de me faire parvenir ; de taille plus grande que la moyenne et avec ses 400 pages, ce livre m'a fait gagner plusieurs centimètres de tour de biceps, à n'en pas douter. Mais le jeu en valait la chandelle, et il va être difficile de réellement rendre justice, par ma fiche de lecture, à ce bijou.

Sangs-Mêlés, roman découpé en trois parties, retrace l'histoire d'une famille sur plusieurs générations, commençant juste après la Grande Guerre et se terminant de nos jours, peu ou prou. de manière astucieuse, cette histoire familiale ne se déroule toutefois pas de façon classique et linéaire, des aïeux jusqu'aux derniers-nés, mais plutôt en « méandres », j'ai envie de dire. D'abord, l'auteur s'intéresse à la vie du fils, Alexandre Roehrig, jeune homme mal dans sa peau et mal dans sa vie, à l'homosexualité tourmentée et la vie sentimentale torturée. À travers lui, le lecteur rencontre divers protagonistes de cette famille tout ce qu'il y a de plus banale, à première vue : la mère Marion, le père Claude, le frère et la soeur ainsi que bon nombre d'amis qui gravitent autour de ce noyau central (et qui ont tous leur importance pour la suite des intrigues). Ensuite, dans la deuxième partie, l'arc narratif retourne en arrière vers les racines familiales de Marion elle-même et, dans une moindre mesure, vers celles de Claude. Finalement, ce même arc est clos par la petite-fille de Marion, élevant ainsi cette Marion en pivot et de l'ouvrage et de l'histoire (des histoires, il faudrait dire).

Il m'est impossible de raconter tous les tenants et aboutissants, tous les fils, toutes les intrigues et sous-intrigues qui naissent, se mêlent et s'entremêlent, achoppent les un(e)s contre les autres, se font obstacle ou se résolvent mutuellement, dans ce roman, à moins de vouloir écrire un roman moi-même. Mais je peux vous donner quelques thèmes, certains fils rouges qui traversent et le livre et les vies qui y sont exposées de façon magistrale : tout d'abord, le destin de tout un chacun est imprévisible (même si certains membres de cette « famille » dans le sens le plus large ont un don de clairvoyance prononcé et assumé). Ensuite est abordé le danger des secrets de famille, qui, quand ils finissent par éclater au grand jour, s'avèrent souvent moins sournois, moins pernicieux que quand ils sont tus. Puis, le livre s'interroge (et, ce faisant, interroge aussi les lectrices et lecteurs) sur le poids des liens familiaux, qu'ils soient heureux ou contrariés. Finalement, je retire de cet ouvrage la force de l'amour, qui, d'un côté, peut soigner et aider comme il peut, de l'autre, entraîner les souffrances les plus atroces et les conséquences les plus inattendues.

Les sagas familiales, j'en conviens, n'ont pas toujours bonne presse tellement elles ont été galvaudées par des livres à la sentimentalité dégoulinante et cheap. Mais j'ai déjà lu des sagas dont la valeur littéraire allait de pair avec une grande richesse, avec une belle profondeur du propos et des destins ainsi qu'avec un ancrage dans les réalités d'une époque donnée qui en faisait presque un témoignage historique. Parmi ceux que j'ai adorés, je citerais Guerre et Paix de Léon Tolstoï, Les Buddenbrook de Thomas Mann ou Un garçon convenable de Vikram Seth. Deux de mes romans préférés de tous les temps figurent également sur cette liste : Cent ans de solitude de Gabriel Garcia Marquez et La maison des esprits d'Isabelle Allende – deux livres que j'ai dû lire une dizaine de fois.

Pour vous donner une première indication de mon ressenti quant à Sangs-Mêlés, sachez que ce roman… a rejoint cette liste de sagas non seulement incontournables mais surtout si prenantes que l'on se surprend à y penser longtemps après les avoir refermés. Jean-Philippe Fresnoy m'a happé dès les premiers paragraphes et ne m'a pas lâché jusqu'au bout. Comme je l'ai dit au début, ce roman est vraiment riche et dense, mais rythmé à la perfection. Hormis la foultitude d'histoires entrelacées, je dois absolument souligner la beauté de l'écriture – un français lui aussi riche et voluptueux, toujours très approprié sans jamais donner dans la facilité des fioritures baroques. Même les imparfaits du subjonctif, fort nombreux, ne font pas maniérés, et si les dialogues n'ont rien de vraisemblable (personne ne s'exprime en passé simple en se racontant à autrui), ils ajoutent comme un côté féerique à ce livre. Si je devais formuler un petit bémol, je dirais qu'il faudrait ôter la touche du point d'exclamation du clavier de l'auteur si tant est qu'il écrive sur ordinateur.

Sangs-Mêlés a gagné le Prix du roman gay 2019 dans la catégorie saga gay, et je trouve que l'attribution de ce prix est amplement justifiée. Je me suis régalé et de la plume et de l'inventivité de l'auteur, de sa maîtrise de la langue écrite et de son sens psychologique. C'est un livre qu'ultérieurement, je vais sûrement rouvrir pour m'y plonger à nouveau.
Lien : http://livresgay.fr/sangs-me..
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