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Éléonore Bakhtadzé (Traducteur)
EAN : 9782714450050
800 pages
Belfond (05/05/2011)
3.99/5   75 notes
Résumé :
La redécouverte d'un livre-culte qui a marqué des générations de lectrices. Un roman psychologique d'une émotion poignante, une inoubliable peinture de l'obsession amoureuse doublée d'un portrait de femme du siècle dernier aussi troublant que Tess d'Uberville ou LesHauts de Hurlevent.

Ayant quitté sa ferme natale, Agnès Dempster découvre du haut de ses seize ans la vie citadine. Quand Frank Holt, tailleur de pierres de son état, fait irruption dans sa... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (25) Voir plus Ajouter une critique
3,99

sur 75 notes
Enfin... Il était temps, j'avais très soif, de boire une bière, et accessoirement de découvrir LE livre-culte qui a marqué des générations de lectrices. Un bouquin qui rentre dans mes cordes sensibles, tout à fait mon genre de romans, me mettre dans la peau d'une lectrice lisant une histoire d'amour et de passion, ah non, pardon, une histoire de folie, mais peut-être que l'amour ou la passion rend fou, oups, folle. Et laisser ma part de féminité prendre le dessus. D'ailleurs, je me suis préparé une petite infusion détox et ventre-plat pour me mettre en condition.

« Ne condamne pas les filles malades d'amour... lut-il, car c'est à force d'aimer qu'elles sont malades... »

Ne condamne pas les filles malades d'amour… Je grimpe ainsi sur mon vieux cheval, au-delà de la colline, des vergers s'étendent sur l'horizon, le soleil se couche sur le Vermont, je me couche à même la neige. Une neige d'un autre temps, qui colle aux sabots, un temps où les femmes portaient d'ailleurs au moins trois jupons en dentelle avant de dévoiler un coeur de chair. Mais le coeur a ses raisons et la raison d'Agnès se trouve être Frank Holt, tailleur de pierres et de poussières. Une poussière ocre qui en plus de donner soif, soif d'amour et de bibines, se dépose sur la blancheur d'âme et de jupons de la jeune Agnès...

« elle avait offert son âme à quelqu'un, elle lui avait fait confiance aveuglément et finalement elle s'était aperçue qu'il n'en faisait aucun cas et elle, elle était totalement incapable de reprendre son âme car l'autre l'avait détruite. Il l'avait transformée en coquille vide, un corps sans âme. »

Offrir son âme à quelqu'un, il faut être fou ou complètement amoureux... Oups, désolé, je n'ai pas l'habitude d'écrire au féminin, pourtant je m'épile de temps en temps... Folle et amoureuse donc, je disais. Un gros poids sur le coeur, une envie pressante de vivre le grand amour avec l'homme de sa vie. 1 Kg 105 g de passion et de folie, ça en fait des caisses de bières à soulever et à décapsuler, un pavé lourd qui prend de la place dans son sac à main. 800 pages pour s'immerger dans le Vermont, dans la vie d'une jeune fille, dans l'amour. Mon coeur de guimauve se ramollit sous les braises incandescentes d'un feu de cheminée, devant les émois d'une jeune fille presque indécente pour l'époque, cette époque qui voudrait qu'elle se trouve un mari fiable, musclé et pas trop buveur qui lui ferait trois enfants les trois premières années, avant de se détourner vers les femmes qui louent une chambre au-dessus de la taverne aux odeurs de vieux whiskys.

800 pages, cela laisse donc bien le temps de respirer l'air frais du Vermont, de prendre le pouls de cette campagne, de cette ère, dans quel état j'erre au milieu de ces bouteilles vides, 800 pages, cela laisse le temps d'en boire, le temps de laisser accumuler la poussière dans le sillon du rocking-chair, le regard porté vers le soleil rouge sombrant dans l'au-delà des collines. le temps aussi de partager des émotions, et surtout de vivre de grands sentiments, de l'amour passionné et passionnel, de la rage intérieure, et... putain, j'ai encore soif, 800 pages, malgré quelques longueurs n'a pas étanché toute ma soif, tant j'ai été pris dans ce tourbillon d'amour et de folie, je te l'ai dit, en préambule, LE livre-culte qui a marqué des générations de lectrices.
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« Folie d'une femme séduite » a l'étoffe d'un grand roman classique de la passion amoureuse, l'intensité de l'histoire happe le lecteur du premier au dernier chapitre.

Agnès Dempster alors femme d'un grand âge, narratrice et héroïne de ce roman, adresse ses mémoires à son amie Margaret, elle évoque son histoire hachurée d'événements tragiques dans un récit entrecoupé de retour en arrière et retour au présent. Tout en se confiant Agnès s'analyse et essaie de comprendre sa vie. A-t-elle été maître de son destin ou la fatalité est-elle inéluctable !...

Au XIX siècle au coeur du Vermont, Agnès jeune fille de 17 ans d'une beauté parfaite, éprise de liberté, mais surtout tourmentée par les affres de ses parents dont le passé douloureux pèse sur leur quotidien), décide de quitter la ferme familiale afin de s'exiler en ville.
Elle s'installe dans une auberge et trouve rapidement un travail de couturière. Fascinée par le milieu citadin, Agnès se libère, s'épanouit et fait la connaissance de Franck tailleur de pierre.
Très attirée par ce dernier, la jeune fille en tombe atrocement amoureuse, de cet amour naît une passion obsessionnelle qui hante toute son âme et son être jusqu'à s'y perdre. Dorénavant Agnès ne respire et ne vit que pour Franck. L'exclusivité de cet amour la fait vaciller dans une délirante exaltation, elle idéalise son bien aimé et lui voue un culte démesuré. Afin de pouvoir garder Franck elle va jusqu'à sacrifier l'enfant qu'elle porte de lui.
Franck étouffé par cet engouement amoureux prend peur et la quitte. Il retrouve la douce Jane un ancien amour avec laquelle il aspire à une vie équilibrée, sécurisée et sereine.
Mais cette rupture plonge Agnès dans un profond abîme et lui déclenche une névrose qui gangrène son état psychologique, elle sombre au fil des jours dans une folie qui lui fera commettre l'irréparable.

Inspirée d'un fait réel, Susan Fromberg schaeffer nous confronte à travers l'héroïne aux ravages et dévastations de la passion amoureuse, elle dénonce les conditions barbares et anachroniques de l'internement psychiatrique mais également l'impuissance des plus démunis face au système judiciaire de l'époque.
Dans un style pittoresque, l'auteure dépeint les paysages comme sous l'effet d'un pinceau, sa plume est d'une magie époustouflante, sa faculté à exprimer avec grandiloquence l'obsession, la possession et la folie provoquent chez le lecteur des frissons d'effroi et l'héroïne Agnès nous marque par son amour extrême pour Franck.
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Plus qu'un coup de coeur, ce roman m'a complètement retournée, il m'a possédée, hypnotisée, séduite. Un coup de foudre ! Une passion ! 1110 pages (édition France Loisirs) englouties en 2 jours. Impossible de le lâcher, même la nuit !
La crainte qu'on pourrait avoir avant de se plonger dans Folie d'une femme séduite, ce serait d'avoir affaire à un de ces romans à l'eau de rose mièvre et niais. Mais, on en est très loin.

Le roman se présente sous la forme d'une longue lettre écrite par une Agnès âgée à celle qui l'aura accompagnée dans les moments pénibles de sa vie : son amie Margaret.
Elle y livre en quelque sorte ses Mémoires et reprend toute son histoire depuis le début, nous décrit son enfance, sa famille, le milieu dans lequel elle a grandit et nous dévoile ainsi les raisons qui l'ont poussée à fuir sa famille pour s'installer en ville.
Viennent ensuite le récit de sa relation avec Frank puis le drame et ses conséquences.
Le procédé de la lettre permet l'utilisation de la première personne du singulier en guise de narrateur, on entre ainsi dans la tête d'Agnès. Je me suis beaucoup identifiée à elle, nous trouvant nombre de points communs ce qui explique que j'ai pu être aussi bouleversée par cette lecture.

Susan Fromberg Schaeffer a écrit ce roman dans les années 1980 se basant sur un fait divers ayant défrayé la chronique à la toute fin du XIXème siècle. Elle nous transporte dans cette époque et on jurerait lire un roman classique digne des soeurs Brontë.
Elle nous dépeint le quotidien et la condition des femmes du siècle dont le destin et l'horizon se résument au mariage et aux enfants. Les femmes de la famille d'Agnès vont toutes vouloir se révolter contre cette fatalité et cet avenir qu'elles rejettent. Elles ont soif de liberté, de se sortir d'une « prison » dont elles ne veulent pas. Seule Agnès aura l'audace de vraiment s'en échapper encouragée par les exemples des vies désabusées de sa mère et sa grand-mère. Toutes sont en quête du bonheur. Mais quel est-il ce bonheur ? Comment être heureuse dans cette société qui laisse si peu de place aux femmes ?

A travers sa fuite, Agnès se cherche aussi. Elle veut s'affranchir de cet héritage identitaire que lui ont légué les femmes de sa famille. Sa rencontre avec Frank représente pour elle la possibilité d'une autre voie. Mais son amour se transforme vite en passion voire en dévotion. Et on assiste impuissant à la progressive perte de contrôle d'Agnès. Son amour pour Frank est si fort qu'elle en fait son unique raison de vivre jusqu'à s'oublier elle-même. Elle va jusqu'à vouloir fusionner avec l'objet de sa passion, lui confiant plus que son coeur, toute son âme.


La folie et la violence ( pas uniquement physique mais aussi psychologique) sont sous-jacentes durant tout le récit. On les sent à l'état latent lors de l'enfance d'Agnès. On les voit à l'oeuvre chez sa grand-mère et sa mère. La personnalité d'Agnès est profondément fouillée, le doute s'insinue parfois, est-elle vraiment folle ou simplement très naïve ? Peut-être les deux ? La frontière est parfois très ténue entre l'amour-passion et l'amour-folie. le lecteur s'embrouille, tour à tour Agnès agace le lecteur ou suscite sa compassion.

Chaque personnage est parfaitement dépeint, on ne peut que s'attacher à eux. Susan Fromberg Schaeffer les fait évoluer dans des décors magnifiques et tellement réalistes. On s'y croirait !
Les descriptions des paysages sous la neige sont sublimes, cette neige qu'on retrouve souvent tout au long du récit, celle qui gèle l'activité et les mouvements des hommes les emprisonnant chez eux tout comme Agnès s'enferme dans son amour pour Frank.

Les parties relatant le procès et l'internement d'Agnès sont tout aussi passionnantes. On fait la connaissance de Maître Kingsley, l'avocat chargé de la défense d'Agnès, ainsi que du Dr Train qui sera amené à décrire le cas d'Agnès comme exemple d'une nouvelle forme de folie qu'il nommera la « Folie de la femme séduite ».
On a ainsi de belles pages sur la justice et l'état des recherches et des thérapies psychiatriques trop peu développées encore à cette époque.

Je n'ai trouvé aucun défaut à ce roman, tout sonne juste, les dialogues sont vivants, le style est limpide et agréable, les pages se tournent toutes seules.
Ce roman raconte la difficulté d'une femme à se trouver elle-même et à trouver sa place. Il est aussi l'illustration de la sempiternelle lutte entre l'amour-passion et l'amour-raison et pose la question de déterminer quel est le meilleur chemin vers le bonheur. Il n'y répond pas forcément mais en montre plusieurs exemples.

Un roman magnifique qui m'aura beaucoup marquée et que je garde en première place dans mon coeur. Je n'avais encore jamais été à ce point bouleversée par un roman.
Je ne peux que le recommander !

Lien : http://booksandfruits.over-b..
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En ouvrant ce roman, j'étais persuadée de découvrir une histoire exceptionnelle au vu des critiques quasi unanimes à saluer un livre majeur à lire absolument.
Au bout de 100 pages, j'ai senti poindre un très désagréable sentiment de lassitude que j'ai repoussé en me disant « sois patiente, ce n'est que le début ».
Hélas, cet ennui n'a fait qu'empirer, rendant ma lecture tellement indigeste qu'à plusieurs reprises j'ai refermé le livre en attendant un moment plus propice. Mais rien à faire, je termine ce pavé au bord de l'épuisement littéraire proche du burn-out !
Aurais-je besoin de mettre mes neurones en vacances ?

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Rarement un roman a produit cet effet sur moi. J'ai littéralement dévoré celui-ci, abandonnant tout pour le lire et ne pensant plus qu'à ça dès que j'avais deux minutes de temps libre. Pourtant peu adepte des romans d'amour, là, je me suis laissée embarquer dans l'histoire. Dès le chapitre d'exposition, on remarque que l'histoire va être peu commune puisque le roman s'ouvre avec l'abattage d'une vache par le père de l'héroïne, Agnès Dempster. le champ lexical de la violence et de la mort est bien présent et ce sont justement ces deux thèmes qui vont être non seulement les fils conducteurs de la narration mais encore tout ce qui va caractériser la vie de la narratrice.

Cette dernière nous raconte son enfance sous forme de flash-backs. Ainsi, le lecteur apprend qu'Agnès déteste son prénom, ce qui n'est pas anodin ici puisque dès les premières pages (page 35 ici) on peut déjà se dire que la psychologie va jouer un rôle primordial.

Sa mère, Helen Saltonstall, quitta le domicile familial à la mort du pater familias, Ed. Selon Agnès, « elle était persuadée que ma grand-mère avait tué ma mère (P69) ». le ton est donné ! Elle part alors dans la pension de famille d'une amie, Béa Brown. C'est là qu'elle rencontrera le père d'Agnès, Amon Dempster. Ils auront un premier enfant, un garçon, qui mourra à deux ans d'une épidémie de choléra. Helen ne s'était pas attachée à cet enfant car elle voulait une fille. Celle-ci arriva lors d'une tempête. Helen dut être accouchée par sa propre mère. Prénommée Majella, elle était qualifiée d'enfant magique. Elle était celle qu'Helen attendait par-dessus tout. Malheureusement, encore une fois, le malheur s'abat sur le jeune couple puisqu'à l'âge de 5 ans, alors qu'Helen faisait la lessive, la petite s'est faite tomber le chaudron bouillant sur elle. Helen tombe enceinte de son troisième enfant, Agnès. Celle-ci dira (P91) : « Comme le mauvais temps, j'approche. Songeant au passé, c'est ainsi que je vois mon arrivée : comme une subite attaque de chaleur, comme un ciel torride, et pas une goutte d'eau à espérer ». Comme on pouvait s'y attendre, la petite Agnès est rejetée dès sa naissance par sa mère. Pourtant, elle ne lui en voudra pas mais elle haïra sa défunte soeur. « Comment croire que je n'étais pas là durant ces jours torrides ? (…) Je n'existais pas encore, mais déjà j'avais besoin de réconfort car, déjà, leur souffrance m'habitait ». On comprend dès lors l'état psychologique de la narratrice et surtout le fait qu'elle n'aimait pas son prénom. Elle aurait voulu être Majella, ne pas être maltraitée par sa mère. Lorsqu'Eurydice, sa grand-mère, meurt, elle lui lègue tous ses biens. Agnès a 16 ans. Elle part, réglant ses comptes avec la figure génitrice. A Montpelier, dans le Vermont, elle réside à la pension d'Iris Trowbridge. Elle fait alors la connaissance de Charlie et, surtout, de celui qui lui fera perdre la tête, Frank Holt. Après un premier flirt avec Charlie, elle tombe dans les bras de Frank. Et, finalement, bien qu'elle se pense heureuse, elle met un doigt dans l'engrenage du malheur.

Je n'en raconte pas plus car ce serait dévoiler l'histoire. Ces quelques 800 pages se lisent avec une facilité déconcertante car on veut toujours en savoir plus. Bref, dès qu'on y met le nez dedans, on n'en ressort plus. L'histoire me rappelle, bien sûr, Les Hauts de Hurlevent d'Emily Brontë, ouvrage mentionné par ailleurs dans le roman puisque la narratrice le lira, mais aussi Madame Bovary de Flaubert et sa non moins excellente suite, Mademoiselle Bovary de Maxime Benoît-Jeannin. Et lorsque l'on sait que ce livre s'inspire d'une histoire vraie qui a défrayé la chronique au XIXe siècle, le charme opère d'autant plus.

A lire sans attendre !

Un grand merci à l'équipe de News Book ainsi qu'aux Éditions Belfond pour ce partenariat.


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Citations et extraits (49) Voir plus Ajouter une citation
Des chemins de terre relient les fermes à la route - pas encore goudronnée à l'époque - qui raccorde North Chittendon à Montpelier et Barre. La route sinue, capricieuse, de ferme en ferme, entre les bâtiments et d'une maison à l'autre. Avant de s'élargir et de prendre l'importance au sortir de la ville, elle marque une pause devant les deux églises blanches, l'église baptiste avec sa tour carrée dotée de quatre pointes, et l'église congrégationaliste, plus pauvre en fidèles mais si fière de sa haute tour blanche et de son carillon qui fait entendre sa voix à chaque heure du jour. Chacune a son cimetière, placé un peut en rentrait et qui accueille les défunts des familles habitant en ville. Les fermiers, eux, ensevelissent leurs morts dans le carré familial ménagé sur leurs propres terres.
En hiver, lorsque se dénudent les ormes ombrageant les deux églises et leurs cimetières, les deux groupes de tombes apparaissent, mélancoliques et esseulées, comme les éléments d'un même troupeau inexplicablement séparés. Ils arrivent que les habitants de la ville y jettent un coup d’œil et se disent : quelle tristesse. Pourquoi séparer les morts quand leurs âmes l'étaient déjà si cruellement de leur vivant.
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D'abord une douce chaleur m'envahit, puis mon corps s'embrasa. Après avoir jeté un coup d'œil alentour, Charlie entreprit de m'ôter mon corsage. Soudain effrayée, je dis :
- Non. Et si quelqu'un venait ?
Sans répondre il glissa une main sous ma jupe. Ma respiration se fit haletante. J'avais trop chaud dans mes vêtements. Je ne portais pourtant rien d'autre qu'un jupon sous ma jupe. Une main puis l'autre glissèrent entre mes cuisses. Je sentis mon corps s'arquer ; mes reins se soulevèrent. Charlie frottait son torse contre mes seins. Mon corps, que je ne contrôlais plus, ruait sous lui. J'étais effrayée, j'avais honte. Qu'allait penser de moi Charlie ? Ainsi faisaient les animaux de la ferme au moment du rut. J'étais comme ces animaux.
Mais Charlie ne semblait pas me condamner. Son doigt entra en moi, et de sentir quelque chose pénétrer cette partie interdite de mon corps me glaça un instant. Mais déjà il s'emparait de moi avec une vigueur qui me submergea. Il allait et venait en moi, m'écrasait et m'emportait. Une chaude moiteur éclose dans mon ventre m'incendia toute entière. Et malgré moi, mon corps soudé au sien se mit en mouvement au rythme du sien. Alors, soudain, au centre de mon corps, quelque chose se contracta, puis se dilata, pour se contracter et s'épanouir de nouveau, se rétracter et s'ouvrir encore et encore. Enfin ce fut cette chaleur intense qui venait du fond de moi... Et Charlie en me lâchant se laissa retomber sur la couverture. Il murmura :
- Je suis désolé. J'ai dû mouiller ta jupe.
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Lorsque nous arrivâmes en vue de la maison, je devins soudain volubile :
- Voilà le jardin, dis-je en montrant une parcelle de terre entourée de grillage. Et là, au dus de la maison, il y a un verger avec des pommiers, des poiriers et des pêchers. En suivant le sentier, on arrive à la tonnelle, couverte de vigne vierge, et de la vigne vierge il en pousse aussi sur tout l'arrière de la grange ; oh, et puis tu devrais voir en été : des ibéris, des boutons-d'or, des pensées, des digitales pourprées, du jasmin trompette, des héliotropes, des œillets de poète, des pois de senteur, des roses trémières, des géraniums, des volubilis, c'est vraiment magnifique !
Un peu plus loin, j'apercevais des branches de lilas, si blanches contre le ciel gris, et je me souvenais d'avoir cherché à m'endormir sous ces fleurs pour ne jamais me réveiller. Je détournai le regard.
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Le monde était un royaume de cendres. Il n'était rien de plus brillant que le soleil et le soleil ne tolérait nulle concurrence. Il brûlait tout ce qui rivalisait avec lui. Le soleil était l'œil du cannibale. Il était affamé de tout et, promptement rassasié, il brûlait tout ce dont il venait se rassasier. Et tout recommençait. En ce monde l'amour ne saurait durer. Le mal, principe de vie, pouvait durer, mais non point dans les individus. Rien ne durait chez les individus. Mensonges et promesses. Grâce à eux, les jeunes continuaient à bouger. Mais les aînés savaient mieux à quoi s'en tenir ; ils cultivaient le cynisme. Ils étaient seulement curieux. La curiosité était la passion qui durait. La curiosité survivait. Je fixais le sol et ne sentais rien. Si la fenêtre s'était ouverte et que mon bras avait explosé en un nuage de cendre, je n'en aurais pas été plus surprise.
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Je regardai autour de moi. En octobre, les feuilles tomberaient des arbres ; les feuilles tombées seraient aplaties par les lourdes pluies et par la première chute de neige. Les hauts-fonds osseux de la terre apparaîtraient, le squelette de la terre se dépouillant de sa chair inutile. La terre. Elle n'avait qu'un seul corps et ce corps était immortel. Elle n'avait pas besoin de mourir elle-même et de se confier à ce qui se réincarnerait dans ses descendants. Elle se réincarnerait indéfiniment elle-même et elle rirait de toutes les créatures qu'elle portait et qui ne pouvaient faire de même. Bientôt les matinées bouillonneraient de brumes qui se lèveraient et se dissiperaient lentement au fur et mesure de la progression du jour. Si des esprits habitaient ces brouillards, comme tant de gens le croyaient dans la région, que cherchaient-ils à nous dire ? Voyez comme nos formes sont imprécises, comme notre prise sur le monde se fait ténue ? Voyez comme nous nous débattons pour revenir, maintenant que nous nous sommes dépouillés de nos peaux, que nous ne sommes plus que de l'eau ? Que faites-vous pour nous ramener ? Ils demandent et répètent sans cesse leur demande, et le soleil se lève, chauffant la campagne, soulevant les brumes, les accrochant aux branches. Et il n'est pas étonnant que nous craignions leur contact. Ils sont insistants. Ils veulent tout de nous.
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