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Poésies (Federico Garcia Lorca) tome 2 sur 4
EAN : SIE92252_887
Gallimard (30/11/-1)
4.08/5   53 notes
Résumé :
Traduit de l'espagnol par André Belamich, Darmangeat P., Supervielle J. et Prévost J. Préface de Jean Cassou. Classification Dewey : 860-Littératures espagnole et portugaise
Que lire après Poésies, tome 2 : Chansons, Poèmes du Cante Jondo, Romancero gitanVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
Ce recueil " Poésies II " de la NRF Gallimard regroupe trois ensembles poétiques (Chansons, Poèmes du Cante Jondo et Romancero gitan) que je trouve très différents tant par la forme que par le fond et que je ne place pas du tout au même niveau. C'est la raison pour laquelle je préfère donner des avis séparés.

— CHANSONS —
Il s'agit d'une compilation assez homogène de 86 poèmes, tous assez courts et bâtis sur un schéma comparable. C'est de très loin l'ensemble que je préfère du recueil.

Ici, la poésie de Federico García Lorca est très sobre, très courte, très épurée. Pas de rime, peu de rimes, peu de lexique, peu de pieds, peu de vers calibrés. Ce n'est pas une poésie de rythme ni une poésie de musique. Pourtant, pas de doute, ces quelques mots posés là, côte à côte, sont bel et bien de la poésie. C'est une poésie de l'idée, de l'association et de la métaphore.

À beaucoup d'égards, j'aurais tendance à rapprocher cette forme poétique du haïku et de l'esthétique d'Extrême-Orient. Il a le pouvoir de faire jaillir en peu de mots (parfois seulement deux ou trois) un univers, une ambiance, un sentiment, un souvenir.

En fait, c'est un poète du pourtour et de la béance ; il pose deux points et c'est le lecteur qui trace le trait pour les relier avec ce qu'il a en lui. C'est un parti pris risqué car il n'emmène pas son lecteur visiter d'autres cieux, il n'embarque jamais son lecteur hors de ce qu'il connaît. Il est le révélateur et le fixateur de la poésie qui était déjà présente en nous et qui se taisait.

Je dis que c'est risqué parce que s'il n'y a rien en nous, alors il n'y a rien à révéler ni à fixer. Mais quand il y a un terrain favorable chez son lecteur, beaucoup de matière poétique inflammable en réserve, la magie opère souvent, quasiment à tous les coups. Pour ma part, ça ne démarre pas à tous les coups mais parfois je prends beaucoup de plaisir à ses métaphores. À d'autres, ça sonne creux en moi et ça ne me fait strictement rien passer.

Quand la magie opère, c'est un grand raffinement, un pépiement de toutes ces petites choses sans vie qui se mettent à gazouiller autour de vous sans que vous les ayez jamais remarquées. Tous les objets inanimés se mettent à avoir une âme qui s'attache à notre âme et la force d'aimer, comme aurait suggéré Lamartine.

Ce premier ensemble, c'est comme un écran blanc et une main qui prend des poses. Pour que le spectacle commence, il faut allumer la petite lampe et regarder l'ombre projetée. Oserez-vous allumer la petite lampe ?

— POÈMES DU CANTE JONDO —
Ce second ensemble m'a lui fortement déplu. Il regroupe 55 poèmes ayant une structure et une longueur très comparables à ceux de l'ensemble précédent, mais un propos tout autre.

Federico García Lorca y célèbre, ou en tout cas y dépeint l'Espagne du sud, celle qu'il nous livrait aussi dans Noces de Sang. L'Espagne rurale, rude et brûlante. Parfois, ce sont aussi des incursions dans les grandes Villes d'Andalousie que sont Séville, Cordoue, Grenade ou Malagá.

Ici, il n'est plus du tout question de lyrisme, c'est l'âpre vie des gens, la noirceur crépusculaire, une célébration triste de l'Andalousie, de ses meurtres incessants et sans nombre.

Je ne m'attarde pas trop sur ces poèmes car ce que j'en pense est équivalent à ce que je pense du troisième et dernier ensemble :

— ROMANCERO GITAN —
Il s'agit d'un regroupement de 18 poèmes. Ceux-ci sont beaucoup plus longs et ont une forme rimée et cadencée beaucoup plus classique que ceux des deux ensembles précédents. C'est beaucoup moins expérimental quant à la forme.

Quant au fond, aïe, aïe, aïe, on est exactement dans le même registre qu'avec les Poèmes du Cante Jondo et c'est insupportable, très pénible à lire. Certes, et avant toute chose, je tiens à préciser que toute poésie pâtit de la traduction et celle-ci ne déroge pas à la règle. Je m'interroge même sérieusement sur la pertinence éditoriale de toute traduction en matière de poésie, tellement liée à la langue dans laquelle elle a été fondue puis coulée dans un moule si particulier et non transposable.

Mais, outre ce débat que je n'ouvrirai pas maintenant, il n'est question dans ces deux ensembles que de meurtres, que de coups de couteau, que de massacres ou de viols, que de sang, que de règlements de comptes, que de gens bafoués, que de morts injustes et inutiles. C'est déprimant au possible et ça s'accorde si mal avec ma conception de la poésie et du lyrisme !

Désolée, Señor Gacía Lorca, mais cette Andalousie-là, cette poésie-là ne me fait pas du tout rêver, elle ne m'enchante pas, telle que la fine dorure, telle que la broderie de mots qu'elle est censée être, telle que l'invitation à la rêverie, à l'enivrement et à l'extase qu'elle est censée être. Les coquelicots qui fleurissent sur les chemises blanches, ça va cinq minutes, mais à longueur de poèmes, ça finit par faire beaucoup de boudin et la charcuterie, c'est pas trop mon truc !...

De même, je ne suis pas convaincue que l'écrit poétique soit le meilleur médium pour véhiculer et soutenir la lutte politique ou la contestation sociale, telles que les pratique souvent l'auteur.

En somme, une première partie assez plaisante avec de temps en temps des trouvailles poétiques auxquelles j'adhère complètement mais les deux parties suivantes me sont pénibles à tous égards, même poétiquement parlant. Cependant, souvenez-vous que ce que j'exprime ici n'est que mon avis, un tout petit avis solitaire, c'est-à-dire, pas grand-chose.
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Lu en espagnol, relu en français, écouté dans sa version incantatoire par Marcel Lupovici, sur fond de guitare andalouse, le Romancero Gitan m'a fait aimer et connaître l'Espagne et farouchement détester ceux qui la mirent à genoux pendant de si longues années.

Le Romancero Gitan évoque sur le mode poétique , fleuri , musical et exalté( qui peut en horripiler certains) un épisode sanglant de l'histoire espagnole qui n'en manque pas: le massacre par la Guardia civil de la cite des gitans de Grenade. Il parle donc d'un fait réel. Il prend parti. Il s'engage. Ouh! le vilain mot!!

Je ne vois pas pourquoi il serait interdit à la poésie de s'enflammer pour faire revivre une telle atrocité si elle le fait avec talent.

La poésie serait-elle assignée à la pure fonction d'un langage désincarné, façon Mallarmé? Faut-il jeter aux orties Les Tragiques d'Agrippa d'Aubigné sous prétexte qu'il évoque la Saint Barthélémy? Déchirer les feuillets d'Hypnos qui sont les carnets de la résistance poétique et armée de René Char? Demander à Eluard et Aragon de ne pas dire l'horreur de la guerre de 14, eux qui avaient 20 ans et n'avaient que leurs mots pour haïr la guerre? Dire à Desnos de continuer à parler du Pélican de Jonathan et de ne pas nous miner le moral avec le Sol de Compiègne?

Tout ça pour dire que le Romancero Gitan est un poème magnifique, bouleversant et fort, qu'on le lise en français- où il n'a pas manqué d'excellents traducteurs-, ou bien sûr en espagnol!

J'ajoute que Garcia a payé de sa vie son engagement , assassiné par les franquistes en 1936 , que sa fougue, ses images baroques et raffinées , son verbe savant, sa versification variée, musicale ont néanmoins réussi le petit miracle de faire de lui le poète espagnol le plus populaire, et ce, de son vivant déjà.

Qui dit mieux?
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Défaut de traduction ou défaut de thème, les poèmes de Federico Garcia Lorca ne contribueront pas à me rapprocher de la poésie. Ce qu'il trouve beau, ce qui le rend vivant, ce qu'il a envie de chanter n'éveille en moi aucune inclination émotive. Peut-être convenable à un autre moment de ma vie, voire dans une autre vie.
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Citations et extraits (37) Voir plus Ajouter une citation
Tu voulais que je te dise
le secret du renouveau.
Mais je garde le secret
tout autant que le sapin.

Arbre dont les mille doigts
indiquent mille chemins.

Je ne te dirai jamais, mon amour,
pourquoi si lentement le fleuve coule.

Mais je mettrai en ma voix d'eau dormante
le ciel cendré de tes regards.

Tourne autour de moi, ma brune,
et prends bien garde à mes feuilles.
Tourne encore, tourne toujours
jouant à la noria de l'amour.

Quand je le voudrais, je ne puis te dire,
hélas, le secret du renouveau.

CHANSONS, Amour : Idylle.
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Ils montent de noirs chevaux
dont les ferrures sont noires.
Des taches d'encre et de cire
luisent le long de leurs capes.
S'ils ne pleurent, c'est qu'ils ont
du plomb au lieu de cervelle
et une âme en cuir vernis.
[...]
Ô la ville de gitans !
Aux coins de rues, des bannières.
La lune et la calebasse
et la cerise en conserve.
[...]
Ils avancent deux par deux
vers la ville en fête.
Une rumeur d'immortelles
envahit les cartouchières.
Ils avancent deux par deux.
[...]
La ville multipliait
ses portes, libre de crainte.
Quarante gardes civils
pour la piller y pénètrent.
[...]
Les gitans se réfugient
au portail de Bethléem.
[...]
La Vierge applique aux enfants
de la salive d'étoiles.
Pourtant la Garde Civile
avance en semant des flammes
dans lesquelles, jeune et nue,
l'imagination s'embrase.
Rosa, fille des Camborios,
gémit, assise à sa porte,
devant ses deux seins coupés
et posés sur un plateau.
Et d'autres filles couraient,
poursuivies par leurs tresses,
dans un air où éclataient
des roses de poudre noire.
[...]
Ô la ville des gitans !
Les gardes civils se perdent
dans un tunnel de silence
tandis que les feux t'encerclent.

Ô la ville des gitans !
Comment perdre ta mémoire ?
Qu'on te cherche dans mon front.
Jeu de lune, jeu de sable.

ROMANCERO GITAN, XV : Romance de la Garde Civile espagnole.
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“AÏE!

Le cri laisse dans le vent
une ombre de cyprès.

(Laissez moi dans ce champ,
pleurer.)

Tout s’est brisé dans le monde
il ne reste que le silence.

(Laissez moi dans ce champ,
pleurer.)

L’horizon sans lumière
est mordu de brasiers.

(Je vous ai déjà dit de me laisser
dans ce champ,
pleurer.)”
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Rumeur.
Dût-il ne rester que la rumeur.

Arôme.
Dût-il ne rester que l'arôme.

Mais arrache-moi le souvenir
et la couleur des heures anciennes.

CHANSONS, Chansons Pour Finir : Angoisse de statue.
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Haute pinède !
Quatre colombes s'élèvent dans l'air.

Quatre colombes
sont revenues.
À leurs quatre ombres
une blessure.

Basse pinède !
Quatre colombes gisent à terre.

CHANSONS, Théories : Chasseur.
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Videos de Federico Garcia Lorca (30) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Federico Garcia Lorca
Découvrez l'émission intégrale ici : https://www.web-tv-culture.com/emission/sylvie-le-bihan-les-sacrifies-53498.html Elle est présente en librairie depuis plusieurs années et Sylvie le Bihan a prouvé la qualité de sa plume même si elle reconnait elle-même ressentir encore le syndrome de l'imposteur quand elle voit ses livres en vitrine. En 2013 parait son premier ouvrage, « Petite bibliothèque du gourmand », une anthologie de textes littéraires autour de l'art culinaire, un livre préfacé par son mari, le chef Pierre Gaignaire.
Elle est présente en librairie depuis plusieurs années et Sylvie le Bihan a prouvé la qualité de sa plume même si elle reconnait elle-même ressentir encore le syndrome de l'imposteur quand elle voit ses livres en vitrine.
En 2013 parait son premier ouvrage, « Petite bibliothèque du gourmand », une anthologie de textes littéraires autour de l'art culinaire, un livre préfacé par son mari, le chef Pierre Gaignaire.
L'année suivante, choisissant la plume romanesque, elle signe « L'autre », récompensé au festival du 1er roman de Chambéry, histoire saisissante sur le pervers narcissique. le livre est fortement remarqué. Dès lors, Sylvie le Bihan devient un nom qui compte. « Là où s'arrête la terre », « Qu'il emporte mon secret », « Amour propre » ont crée autour de la romancière un lectorat fidèle qui se retrouve dans ses intrigues, dans les sujets abordés, dans la fragilité des personnages, dans la subtilité de son écriture
Voici son nouveau titre, « Les sacrifiés ». Et quelle réussite ! Sylvie le Bihan choisit cette fois-ci la fresque historique et nous entraine dans l'Espagne des années 30, celle qui de l'insouciance va sombrer dans la violence et la guerre civile. Juan est le personnage central de cette histoire de soleil et de sang. Il est encore gamin quand on lui fait quitter son village d'Andalousie pour devenir le cuisinier du célèbre torero Ignacio Ortega. Dès lors, dans l'ombre, le jeune Juan va découvrir une nouvelle vie de luxe et d'insouciance où les stars de la tauromachie côtoie tous les artistes de l'époque. Fasciné, il va surtout devenir le témoin d'un trio exceptionnel, celui que forment, entre amour et amitié, le sémillant torero Ignacio, la belle danseuse Encarnacion et le fragile poète Federico Garcia Lorca. Mais bientôt, le ciel d'Espagne vire à l'orage. Juan et tous les protagonistes de cette histoire vont être balayés par le vent de l'Histoire.
Là est la force du livre de Sylvie le Bihan. A l'exception du personnage fictif de Juan, tous les autres sont authentiques. Au prix de plusieurs années de travail et de recherches, elle leur redonne vie dans ce roman foisonnant, flamboyant, douloureux, qui résonne étrangement avec notre époque contemporaine et interpelle : qui sont les sacrifiés d'aujourd'hui ?
Hommage à l'Espagne et à son histoire, hommage à la littérature et à Federico Garcia Lorca, Sylvie le Bihan signe un livre au souffle puissant, parfaitement construit, à l'écriture remarquable, un livre que vous refermerez le coeur déchiré
C'est un coup de coeur ;
« Les sacrifiés » de Sylvie le Bihan est publié aux éditions Denoël.
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