En voilà un qui s'est vu adapté sur de multiples supports, s'attirant les foudres des uns, les applaudissements des autres. Thriller sombre et glauque comme on l'attend avec impatience, signé de la main de
Jean-Christophe Grangé,
Les Rivières Pourpres se distingue déjà par son titre qui intrigue et donne le ton ! Sachez aussi que c'est le premier opus d'une série, avec
La Dernière Chasse et
le Jour des Cendres.
Et si par hasard, nous doutions encore de ce que nous allions trouver entre ces pages, le tout premier chapitre envolera toutes nos questions, tant il y a de violence et de tension ! Ce qui n'est pas forcément pour déplaire devient pourtant très vite irritant, à commencer par le surplus de violence que je ne trouve personnellement pas nécessaire.
Viennent ensuite les deux enquêteurs qui feront leur route séparément sur deux affaires qui pourraient bien se rejoindre : Pierre d'un côté, encore un flic cogneur, dragueur à souhait, et torturé. Karim de l'autre, cliché ambulant du flic des cités aussi violent que son compatriote, avec ceci de plus qu'il se permet de déroger à toutes les règles de la police, allant jusqu'à tuer sans remords juste pour venger des potes déjà perdus de son ancienne cité. Charmant tableau, complété par une irritation présente à chacune de leurs scènes ! C'est bien embêtant quand l'essentiel du roman se passe via leurs yeux et leurs pensées, et si l'auteur prend soin de développer quelques facettes des personnages, ils restent malgré tout lointains, presque inaccessibles.
Dents qui grincent souvent à l'approche des deux flics, certes, mais qu'en est-il du reste ? Les deux enquêtes mettent du temps à se rejoindre, elles s'enchaînent néanmoins sans qu'on voit le temps passer, sur des chapitres clairement distincts qui permettent de voir toutes les étapes de chaque affaire. le rythme et l'intérêt restent toujours très forts alors que les chapitres défilent, et les fausses pistes et découvertes avec. Bref, au départ sans lien, on suit pourtant le fil avec passion. Une écriture très maîtrisée, des éléments de tension toujours présents, c'est au moins ça de très bon ! Même si j'avais saisi le gros des retournements de situations et des révélations à la moitié de l'histoire,
Jean-Christophe Grangé n'étant pas très déterminé à nous faire exploser une bombe de secrets au visage.
Alors oui, je n'ai apprécié aucun des personnages principaux, les enquêteurs en premier, mais les intrigues ont su me séduire, à tel point qu'il me fut impossible de lâcher la brique avant les dernières lignes. Un manque d'intérêt, de compassion et de sympathie évident pour des personnages que j'ai trouvé assez plats, mis à part les clichés qu'ils se traînent et l'amourette ridicule de Pierre et Fanny, invraisemblable au passage parce que trop rapide, ceci dit, ça ne m'a pas empêché de m'investir dans les problèmes que chacun a rencontré. Un peu plus dur, mais pas impossible.
Ça, c'était juste après la lecture. Quelques semaines se sont écoulées depuis, et je peux maintenant poser le doigt sur les bémols qui m'ont empêché de réellement apprécier, et c'est dommage, parce que l'histoire dans son ensemble était explosive. La fin, déjà, qui apparaît trop lisse et surtout trop facile, compte tenu du contexte et des événements : j'avoue ma déception, surtout concernant le personnage de Pierre, qui s'en sort trop bien. Oui, je pèse mes mots, et pourtant, j'ai lu ce que j'ai lu. En comparaison de ce qu'il a fait, et de la fin qu'on lui réserve prétendument, parce que la suite a vite fait de me faire comprendre que c'est vraiment trop facile. Ah, les séries publiées qui annoncent le sort d'un personnage… J'aurais donc bien aimé que Pierre descende de son piédestal, et qu'il se trouve autre chose que la violence comme trait principal. Peut-être plus tard ?
Les Rivières Pourpres a une trame qui déborde de profondeur, tordue, malsaine. Mais c'est aussi une intrigue invraisemblable sous de nombreux aspects, sans parler de la durée de l'enquête. Est-il réellement possible de résoudre un tel noeud en si peu de temps ? Malheureusement, si on se laisse emporter à la première lecture, la réflexion nous fait considérer les choses autrement, et le tout manque cruellement de crédibilité. Il faudrait juste lire sans s'inquiéter de la cohérence de l'univers, et ne plus y revenir, ça éviterait de croire trouver un coup de coeur et se rendre compte de tous les défauts qu'il contient.
Alors, déception ? Mi-figue, mi-raisin, plutôt. J'en garde un bon souvenir en dépit de mon manque d'investissement dans des personnages trop caricaturaux à mes yeux, mais rien que pour l'histoire, rien que pour les thèmes qu'on y retrouve et les noeuds disséminés partout, ça vaut le coup d'oeil, assurément. Et pour répondre à cette question qui plane toujours : La perfection vaut-elle qu'on sacrifie son humanité ?
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