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EAN : 9782246800637
304 pages
Grasset (03/09/2012)
2.72/5   169 notes
Résumé :
"Jusqu'où faut-il remonter pour trouver la source d'une tragédie personnelle?

Aux mensonges de la guerre à la génération des grands-parents?

A ceux de mon "héros" de père, parti à la conquête du sommet mythique de l'Annapurna en 1950 et laissant dans les cimes de cette ascension glorieuse une part de lui-même qui le rendra perpétuellement metteur en scène de sa légende?

A la liberté d'une mère séductrice et moderne, trop ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (52) Voir plus Ajouter une critique
2,72

sur 169 notes
Depuis « Vipère au poing » je ne me souviens pas avoir lu un réquisitoire aussi féroce que celui que Félicité Herzog (épouse du financier Serge Weinberg) prononce contre ses parents.

Filleule de Geneviève de Gaulle, fille de la philosophe Marie-Pierre de Cossé Brissac, Félicité est le petite fille de Pierre, polytechnicien et XII duc de Brissac et de Marie Zélie Antoinette Eugénie, dite May Schneider héritière du groupe éponyme.

May, sa grand-mère serait une fille naturelle du célèbre dandy Boni de Castellane. Sa proximité avec la fille de Pierre Laval et la famille Jardin durant l'occupation lui valut ainsi qu'à son mari une brève incarcération à la Libération avant que la justice reconnaisse l'absence de charges et les disculpe. Cet épisode constitue la trame du roman « le Rubis » publié par Marie-Pierre de Cossé Brissac en 2005. Le Duc, descendant d'une longue lignée comprennent Marie Stuart, la Veuve Clicquot, la Duchesse d'Uzés (égérie du Général Boulanger) présida de longes années le Jockey Club, refuge de la tradition.

La mère de Félicité, la Folcoche de cet ouvrage, née en 1925, épouse sous la 4° république le résistant Simon Nora et se remarie sous la 5° république avec Maurice Herzog, ministre des sports du Général de Gaulle et héros national suite à sa conquête de l'Annapurna.

Le moins que l'on puisse dire, à la lecture de cet ouvrage, c'est que le père et la mère avaient une vie sociale particulièrement active qui les accaparait beaucoup plus que l'éducation de leurs deux enfants Laurent et Félicité. Abandonnés et livrés à eux mêmes, les adolescents ne croisaient leurs parents infidèles que lorsque les photographes étaient là pour immortaliser cette famille et faire rêver les lecteurs de la presse People. La romancière écrit des pages féroces sur les aventures extra conjugales de ses géniteurs qu'elle voue aux gémonies allant jusqu'à émettre un doute sur la réalité de l'exploit alpestre de son héros de père ...

Laurent meurt d'une crise d'anévrisme à 34 ans après plusieurs internement psychiatriques. Félicité entre chez Lazard à New York puis chez JP Morgan à Londres, épisodes féroces qu'elle peint d'une plume assassine.

Un dicton affirme que "ce qui est excessif est insignifiant" … cet ouvrage plus proche du pamphlet que du roman en est la triste illustration. Un livre affligeant à oublier ... en souhaitant à son auteur de trouver le bonheur loin de cet héritage qui la mine.
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Passionnée de montagne, grande lectrice de romans d'alpinisme, je ne pouvais qu'être intriguée par ce livre. Mais j'étais méfiante : n'allais-je pas assister à un énième déballage de linge sale familial, exercice que je n'apprécie pas ?
Bon, le livre n'est pas très épais, je ne risque pas grand-chose, je me lance.
Félicité Herzog déboulonne la statue de son héros de père, et elle n'y va pas de main morte. Maurice est présenté comme un père défaillant ne se souciant pas de ses enfants, un intrigant prêt à tout pour réussir, et surtout un obsédé sexuel de première catégorie, sautant sur tout ce qui bouge. De l'alpiniste, elle ne dit rien ou presque. À peine murmure-t-elle du bout des lèvres cette interrogation-accusation déjà formulée par tant d'autres : et si la conquête de l'Annapurna n'avait été qu'un mensonge ? Et si son père n'avait pas atteint le sommet ? Accusation ridicule, car si l'on peut reprocher beaucoup de choses à Maurice Herzog, toutes les personnes sérieuses s'intéressant un tant soit peu à l'alpinisme ne mettent pas en doute son ascension victorieuse. Entres autres arguments imparables : la description qu'il a faite du sommet est très précise et correspond en tout point à ce qu'ont vu ceux qui y sont allés après lui, il n'aurait pas pu inventer cela sans y avoir été.
Non contente de démolir son père, Félicité Herzog s'en prend à toute sa famille. Sa mère est présentée sous un jour peu reluisant. L'auteur lui reproche entre autre ses nombreux amants, qu'elle s'amuse à appeler Numéro 1, Numéro 2, ... Quelle élégance !
Mais ce n'est pas tout. La demoiselle remonte loin : elle égratigne ses grands-parents, et même ses arrière-grands-parents, dans des pages entières que j'ai trouvées totalement sans intérêt.
Et ce n'est pas fini ! Félicité Herzog nous raconte un peu son expérience professionnelle aux États-Unis, et devinez quoi ? Ses collègues et supérieurs en prennent pour leur grade : une "psychopathe", un "imposant bellâtre brun"... les portraits étant suffisamment détaillés pour que les intéressés se reconnaissent. Stop ! Trop, c'est trop !
La première chose que je retiens de ce livre, c'est qu'il m'a profondément ennuyée. La seconde, c'est que l'ensemble est confus, on tape sur l'un et sur l'autre dans le désordre.
Si cracher par écrit sur toute sa famille et plus a pu faire du bien à son auteur, cette lecture n'a aucun intérêt pour le lecteur. Mademoiselle Herzog est loin d'être la seule à avoir eu une enfance difficile. Elle aurait pu régler ses problèmes entre les quatre murs d'un cabinet d'un psy au lieu de nous offrir tout ce déballage indécent et inutile.
Les seuls moments où j'ai éprouvé de la compassion pour elle, c'est quand elle parle de son frère schizophrène. Mais cela ne constitue qu'une toute petite partie du livre ; dommage, c'est la plus intéressante.
Ce livre n'a rien de palpitant, passez votre chemin. Et si voulez découvrir Maurice Herzog l'alpiniste, lisez "Annapurna premier 8000", et l'excellent complément "Annapurna, une affaire de cordée" de David Roberts. Après, libre à vous de vous faire votre opinion sur ce "héros".
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Et bien déception pour moi aussi , je l'ai terminé mais j'ai passé des pages .
Que penser de l'écriture ? Mais je me suis demandée ( et bien étonnée d'être la seule à poser la question ) si ce livre n'avait pas éte rédigé par un nègre , pour ma part j'en suis presque sûre , on dirait un style d'une autre époque , enfin moi l'écriture ne m'a pas plu du tout .
Le fond maintenant , déjà relevée par certains , qu'est-ce que c'est que cette appelation ' roman ' , ce n'est pas un roman , sans doute a-t-elle écrit roman pour moins choquer son père ;
Le début du livre me plaisait un peu , j'aime beaucoup les histoires de famille mais je n'ai pas toujours bien compris la généalogie ou pas eu trop envie de faire l'effort mais après 100 pages , je renacle l'histoire part dans tous les sens .
Heureusement , il y a quelques moments de grâce comme le dit aussi un autre menbre de Babélio qui ont fait que je me suis accrochée à ma lecture , les passages qui m'ont plu sont le passage sur l'ascension de l' Annapurna avec ce qu'elle suppose être un acte manqué de son père , perdre ses gants et ceux où elle évoque la psychose de son frère , là on ressent un peu d'émotions .
Bien sûr avoir un père comme Maurice Herzog n'a pas dû être facile , c'est le moins qu'on puisse dire mais pouvait-il envisager une autre attitude que celle qu'il a eue au retour de son exploit , je ne le pense pas , il avait quand même perdu ses doigts et puis voir les exploits des années 50 à l'éclairage des années 2010 ne me paraissent pas réalistes .
Le portrait de sa mère et de celui de toute sa famille maternelle est hallucinant , Félicité H. a vraiment vécu sur une autre planète .¨et ce côté est intéressant , surtout les anecdotes chez ses grands -parents Pieer et May .
Pour une note finale , je vais essayer de ne pas être trop sévère , je dois m'en prendre à moi-même car je savais qu'en lisant ce livre cela m'apporterait pas grand chose à ma vie de lectrice . Ce n'est pas un livre que je recommande pour ses qualités littéraires ni pour sa profondeur mais il fallait que je le lise , les critiques m'en avaient donné envie .
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Un livre très difficile à lire, non pas par son style, mais uniquement par le fait qu'il est plutôt déprimant. Félicitée Herzog évoque sa famille, c'est à dire un père assez mythomane et ayant des penchants incestueux; une mère distante accordant plus d'importance à sa carrière qu'à ses enfants; des grands-parents anciennement collabos et surtout un frère violent, écorché vif, sombrant dans la folie et mourant brutalement. Ceci n'est guère réjouissant, et j'ai mis 10 jours pour lire moins de 250 pages de ce qui est plus un récit autobiographique qu'un roman. Si je comprends bien l'auteur lorsqu'elle a voulu régler les comptes avec sa famille et surtout ce "héros" de père qui n'en était pas vraiment un, je pense par contre que les chapitres 23 et 24, racontant la vie de l'auteur dans l'univers de la grande finance à New York, n'apporte rien au récit et auraient pu être largement raccourcis.
Un ouvrage que je suis quand même heureuse d'avoir lu jusqu'à son point final.
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Félicité HERZOG. Un héros.

En une petite journée, j'ai lu le roman autobiographique que Félicité hERZOG consacre à son père, Maurice HERZOG, héros et grand vainqueur de l'Annapurna en 1950. Suite à cette victoire, ce dernier sera le premier ministre de la Jeunesse et des Sports sous le mandat du Général de GAULLE, Président de la République. Elle nous dépeint son géniteur et brise la carapace de ce héros. Il y a à peine un mois, j'ai lu le récit consacré à sa mère, Marie-Pierre COSSE-DE- BRISSAC, alliée aux SCHNEIDER, les sidérurgistes, « Une brève libération ».

Maurice HERZOG n'est pas le père parfait. c'est un homme volontaire, fortement imbu de lui-même, et qui présente plusieurs facettes. Un bel homme, cavaleur et qui dès le lendemain de ses noces, entame une double vie. Plusieurs femmes partageront sa couche, ayant même des enfants et il divorcera peu après la naissance de son fils, Laurent, le frère de Félicité. Cet homme, élevé sur un piédestal, suite à son ascension d'un haut sommet de l'Himalaya connaîtra les ors de la république.. Par contre, au cours de l'enfance, de l'adolescence de ses enfants, il brillera par son absence, laissant la garde, l'éducation de ses enfants à son ex-épouse.

Laurent, enfant surdoué, élevé de façon militaire afin de succéder à son père, ne peut y parvenir. C'est un être sensible, très perturbé par son éducation, qui traîne une volonté de fer afin de réussir pour donner toutes satisfactions à ce père héros, fantasque, hypocrite… Ce jeune homme va être victime de crises de paranoïa à répétitions, de bouffées délirantes. Interné, il se jettera d'un pont pour mettre fin à ses jours, ayant entendu une voix lui ordonner cette action... Sa chute sur un camion lui sauvera la vie. Il sera enfermé en asile psychiatrique puis rendu à sa famille et décédera dans la propriété des grands-parents à l'âge de 25 ans d'une mauvaise chute dans un escalier…

Pour Félicité, ce père n'a pas une conduite exemplaire. Comment un père peut-il dire à sa fille : « Tu verras, ma petite, comme toutes les femmes, c'est cela que tu aimeras, un sexe dur qui te fera bien jouir. ». Ce père qui photographie sa fille, comme Hamilton, un peu incestueux ne prend que rarement des nouvelles de ses enfants. Comment se conduit-il dans la nouvelle famille qu'il a composé ? de conquêtes en conquêtes, c'est un père inexistant. Aussi Félicité déclare : «  S'il y avait alors eu un marché d'occasion des pères, je l'aurais cédé pour un franc symbolique » ( page 185).

Porté aux nues grâce à un évènement sportif de haut niveau, cet homme n'est pas vertueux. Je comprends le raisonnement et l'attitude de Félicité et de Laurent, face à ce véritable despote. C'est un père absent et démissionnaire. Les enfants sont livrés à leur libre arbitre. Leur mère s'implique fortement dans son travail au ministère. Félicité est horrifié par les relations qui unissent son père à Jean-Marie le PEN. Cette jeune femme renverse le héros et nous offre un portrait pathétique de celui qui fut un grand héros ; elle émet même de fortes présomptions sur son rôle lors de son escalade. Elle doute de son honnêteté face à ses compagnons de cordée, dont Louis LACHENAL, Gaston REBUFFAT, etc....

Merci Félicité pour ce récit plus ou moins autobiographique ; au travers de ce livre, vous rendez un bel hommage à votre frère trop tôt disparu. Vous dissipez des brumes enveloppant l'aura de votre père et accompagnez d'amour votre mère. Je n'ai donc pas lu dans l'ordre vos deux oeuvres mais je n'ai aucun regret et cela importe peu. Bien au contraire, je connaissais déjà votre maman grâce à « Une brève libération ». Je recommande la lecture de ces deux histoires, toutes les deux, basées sur des faits réels.
( 06/11/2022).
Lien : https://lucette.dutour@orang..
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critiques presse (3)
LeMonde
17 décembre 2012
Le portrait est féroce. Félicité Herzog ne se contente pas de mettre en cause un père négligent, elle déboulonne minutieusement la statue de cette légende française.
Lire la critique sur le site : LeMonde
LaLibreBelgique
04 décembre 2012
En un livre saisissant Félicité Herzog dévisse son “héros” de père.
Lire la critique sur le site : LaLibreBelgique
Lexpress
30 octobre 2012
[Un] premier roman a la portée d'un vrai coup de maître.
Lire la critique sur le site : Lexpress
Citations et extraits (32) Voir plus Ajouter une citation
La perspective qu'Arsène Lupin fût le produit de l'imagination d'un écrivain était inadmissible. Je ne voulais entrer à aucun prix dans ce qui aurait pu me sortir de cette fiction. Le dernier des ouvrages, pourtant, trahit cruellement mon pacte de complicité imaginaire.

L'Ile aux trente cercueils me ramena, malgré moi, dans un enfer dont je voulais sortir. En sixième, dans mon institution pour jeunes filles catholiques, j'étais restée un après-midi à la maison pour lire, prétextant un rhume, enfermée dans ma chambre en écoutant une réédition du 33 tours du Sergent Pepper des Beatles sur un pick-up rouge que ma mère m'avait acheté au Bon Marché. Dès les premières pages, je compris que ce dernier livre était d'une autre nature. Une séquence dantesque de meurtres et de trahisons progressait inexorablement sur l'île bretonne de Sarek selon un ordre tout aussi inéluctable que tragique. Une chambre redoutable, dont le sol
basculait selon des mécanismes complexes et souterrains, mettait a mort ses occupants après les avoir soumis aux pires cruautés. Plus rien ne correspondait à la logique morale constamment démentie par de noirs calculs. Les personnages dont on attendait la grande retenue se comportaient dans les faits de manière monstrueuse.

Une scène ultime m'achevait : deux enfants, demi-frères révélés brusquement l'un à l'autre lors de ce coup de théâtre insulaire, dotés d'une gémellité physique quasi parfaite, se battaient à mort sous les yeux de leurs mères dans un combat organisé par leur père mythomane et pervers, le Comte Vorski. L'un des enfants, François, courageux et vertueux, était l'opposé de son demi-frère, Raynold, haineux et de surcroît entraîné à tuer. Pétrifîée par cette scène, je ne pouvais plus seulement toucher des doigts
toucher des doigts les pages d'un tel livre qui n'était de fait plus un livre mais un objet toxique qui vivrait dorénavant son sort indépendamment du mien. Même l'arrivée de Don Luis Perenna, un nouvel avatar de Lupin, ne suffit pas à compenser le trouble suscité par cette séquence macabre. C'était la fin de ma passion pour Arsène Lupin, gentleman cambrioleur. Maurice Leblanc avait poussé le bouchon de cristal trop loin.
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Prenant une tasse de thé, j'avais exposé à mon oncle mes projets professionnels avec l'enthousiasme ingénu des jeunes cadres financiers. Je voulais alors, comme Laurent aurait souhaité le devenir, être associé-gérant, ce qui suscita chez lui des commentaires hilares. Une biographie de la comtesse Greffulhe, la vie d'une parente écrite par une autre parente, venait d'être publiée. Elle alimentait mes reproches pour cette société qui ne donnait d'autre choix à une femme que d'être une femme du monde, sauf à s'en libérer, un idéal à mes yeux d'un sexisme ridicule et désuet.

« Le meilleur qu'on puisse te souhaiter et qu'une femme peut envisager de l'existence. C’est tout de même mieux que ton ambition triviale et futile ! rétorqua Gilles, caustique, tout en donnant son assiette de gâteaux à manger à son carlin assis sur une chaise.

— Mais la comtesse Greffulhe est l’incarnation de tout ce que je ne veux pas être ! Je veux être indépendante financièrement, avoir une existence libre enfin, ne pas être le simple produit d'un milieu social !

— Mais enfin, pauvre innocente, il est beaucoup plus important d'avoir servi de modèle à un personnage de La Recherche !» conclut-il sur le ton de la raillerie.
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Le jour où Arsène Lupin entra dans mon existence, ma vie terrestre n'eut simplement plus aucune prise sur ma vie imaginative. Si les lecteurs ont sept vies comme les chats, j'en vécus une entière à voyager entre le pays de Caux, la campagne de l'Allier, les bords du Rhin et de la Moselle. Face aux mystères, aux énigmes insolubles, aux assassins fous et aux belles criminelles, rien n'était vraiment grave puisque Arsène Lupin surgirait en héros de papier, un être supérieur qui résolvait toute énigme par une capacité de raisonnement sans précédent et par une dérision désopilante à travers un répertoire personnel de « gamineries » et d'identités pittoresques.
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Je suis entrée dans ce quartier dit de sécurité dont la porte était verrouillée à grand renfort de serrures, ce qui me semble être à la fois précieux, ridiculement inefficace, un peu comme s'il avait fallu la présence d'un grand chambellan couvert de chaînes dans une maison pour annoncer les noms des invités conviés à un simple dîner. Ou que ces verrous étaient en fait destinés à ceux qui devaient se prémunir de la folie et qui, incapables de la comprendre, l'alimentaient d'autant avec leur peur. Un infirmier, qui ressemblait à un moniteur de ski, m'ouvrit et je pénétrai dans un espace où il n'y avait pas de fauves, mais des gens jeunes et des plus vieux qui perdaient leurs pas dans une salle avec une machine à café pour seul meuble et n'avaient pas simplement l'air dérangé mais de s'emmerder royalement.
Je m'installai près de son lit. Pour la première fois de notre existence, Laurent me parlait à visage découvert. Il pensait que l'on avait inséré des circuits électroniques dans son cerveau. Son masque était tombé. Il avait fallu qu'il tente de mettre fin à ses jours pour que l'on prenne la peine d'évaluer son état mental et qu'il parle de ce qui le tourmentait. Je mesurais l'absence sidérante de tout recours relationnel, le manque de lien, de confiance avec qui que ce soit, et de la solution simplement la plus humaine qui aurait pu rompre son extrême isolement : la parole. Depuis des années, sa psychose bouillonnait comme un chaudron sur le feu, il manifestait maints signes d'étrangeté. Apprenait cinq langues simultanément; envoyait des curriculum vitae extravagants de vingt pages à des employeurs potentiels en ayant effectué trois stages d'été dans sa vie; tenait des propos en décalage complet avec la réalité; s'enfermait dans une retraite totale, coupant court à toute communication. Mais personne n'avait réagi.
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Dans les situations de survie, les alpinistes sont des champions de la débrouille, en l’occurrence une paire de chaussettes pouvant protéger ses mains gisait dans son sac à dos. Mon père ne pense pas à les utiliser, ni à la descente, ni même dans la crevasse les abritant, lui, Louis Lachenal et leurs compagnons, Lionel Terray et Gaston Rébuffat, venus à leur rescousse dans la tourmente au cours d'une nuit fatidique. Cela lui coûtera les premières phalanges de ses doigts de main et ses orteils. Voulait-il en fin de compte payer le prix fort pour sa décision désespérée de parvenir jusqu'au sommet ? Se voulait-il en martyr d'un exploit sans prix ?
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Vidéo de Félicité Herzog
Extrait du livre audio « Une brève libération » de Félicité Herzog lu par l'auteure. Parution CD et numérique le 15 mars 2023.
https://www.audiolib.fr/livre/une-breve-liberation-9791035412555/
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