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EAN : 9782715258334
128 pages
Le Mercure de France (14/04/2022)
3.29/5   54 notes
Résumé :
« Dans mon quartier habite une personne surnommée "la femme à la jupe violette". On l'appelle ainsi car elle porte toujours une jupe de couleur violette... Régulièrement, à quinze heures, elle se rend à la boulangerie pour y acheter une brioche à la crème, puis traverse la galerie marchande pour rejoindre le parc tout proche. Là, elle va s'asseoir sur le banc le plus au fond, toujours le même, et déguste sa brioche en utilisant sa main comme soucoupe... Elle ne chan... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (23) Voir plus Ajouter une critique
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Quelle étrange lecture…! Au-delà de l'atmosphère de ce récit singulier qui me poursuit une fois le livre terminé, je ne cesse de m'interroger sur les intentions de l'auteure, Natsuko Imamura. Qu'a-t-elle voulu nous dire ? Chaque lecteur se fera sa propre idée et c'est à mon avis ce qui fait la force de ce livre dans lequel il ne se passe quasiment rien…et beaucoup à la fois mais de manière discrète, légère, lente, presque invisible, onirique. Tout se niche dans les détails et surtout les interprétations du lecteur. Une ambiance japonaise.

La femme à la jupe violette est un petit livre, proche de la nouvelle, dans lequel nous suivons les observations, pensées et étonnements d'une femme qui se présente comme étant La femme au cardigan jaune. Obnubilée, voire obsédée par une femme de son quartier, celle qu'elle prénomme La femme à la jupe violette, avec laquelle elle aimerait devenir amie, elle ne cesse de prendre acte de tous ses faits et gestes, de la suivre, de l'épier. Au point de noter tout dans un carnet.
Au début du livre cette femme à la jupe violette, qui s'appelle en réalité Mayuko Hino, semble fragile, frêle, en errance telle une adolescente, alternant les périodes d'activité et d'inactivité, et ayant ses petites habitudes dans un parc public, dégustant une brioche à la crème toujours assise sur le même banc sous les regards complices et envieux des enfants qui jouent dans ce parc. Guidée discrètement par la femme au cardigan jaune qui laisse trainer sur ce banc des journaux contenant des annonces d'emploi, la femme à la jupe violette va trouver un travail de femme de ménage dans un hôtel, l'hôtel où travaille déjà précisément la femme au cardigan jaune. Une façon commode de l'observer encore davantage. Nous voyons alors la transformation de la femme à la jupe violette qui va s'intégrer dans ce monde professionnel déployant une motivation et une efficacité surprenante, s'épanouissant physiquement, pour ensuite retomber brutalement de son piédestal, objet de moqueries et de commérages lorsque ses collègues vont comprendre qu'elle est devenue la maitresse du directeur.

Le fait de l'espionner jusqu'à chez elle, d'épier le moindre de ses gestes donne au livre une atmosphère particulièrement oppressante, voire inquiétante :
« En bref, ce que j'essaie de vous dire, c'est qu'il y a longtemps que j'aspire à devenir amie avec la femme à la jupe violette. Soit dit en passant, il y a un petit moment déjà, que j'ai mené mon enquête pour savoir à quoi ressemblait le domicile de la femme à la jupe violette. C'est un immeuble délabré, situé non loin du parc. Proche de la galerie marchande, aussi, bien entendu. le toit est en partie couvert d'une bâche en plastique, la rampe de l'escalier extérieur rongée et brunie par la rouille. La femme à la jupe violette ne pose jamais la main dessus lorsqu'elle monte à l'étage. Elle occupe l'appartement du fond : le numéro 201 ».

On ne sait pas grand-chose sur la femme au cardigan jaune si ce n'est qu'elle est une des cheffe, cheffe Gondô, peu reconnue dans son travail car médiocre employée du fait de ses absences répétées (son espionnage lui prend beaucoup de temps il faut dire), et invisible. On ne la remarque pas, elle n'intervient jamais, sauf à la toute fin du livre.
Est-ce par jalousie qu'elle est obsédée par Mayuko Hino qui, elle, capte le regard, capte la lumière ? le message de l'auteure est-il de dénoncer l'invisibilité sociale ? Existe-t-elle vraiment d'ailleurs cette femme au cardigan jaune ? Les deux femmes ne forment-elles pas une seule et même personne, la jupe violette et le cardigan jaune étant une seule et même tenue ? Dans ce cas n'est-ce pas la femme à la jupe violette qui tente de se voir de l'extérieur ? de s'observer ? de se raconter ? Ou encore la femme au cardigan jaune n'est-elle pas son ange gardien, celui qui voit tout et qui veille ?
Les questions, nombreuses,défilent dans ma tête…d'autant plus que la fin du livre est très mystérieuse quant aux intentions réelles de la femme au cardigan jaune. Une fin sibylline pour mieux nous perdre, qui pourrait laisser un goût amer d'inachevé, qui, pour ma part, m'a laissé un gout délicieux de mystère.

Je vois également ce petit livre comme un pamphlet, sans leçon ni pathos, contre le monde du travail qui transforme notre vraie nature, nous métamorphose en nous plongeant dans un bain social contraint dans lequel il nous faut jouer un rôle, rôle pouvant aussi vite être reconnu, apprécié que méprisé. le monde du travail est violent et éprouvant, même s'il nous permet d'avoir des liens sociaux. C'est ce que Natsuko Imamura veut faire passer comme message au travers de la femme à la jupe violette à mon sens.

Ce fut au final une lecture agréable, fluide tout en étant mystérieuse, une lecture avec sa petite musique personnelle, son odeur bien caractéristique, sa voix si particulière et donc, étonnamment, je sais que je m'en souviendrai alors que la trame narrative est ténue. L'épure a parfois du bon…
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Dans ce cours roman qui s'apparente à une nouvelle on retrouve bien l'esprit japonais il y a une sorte de lenteur qui ne lasse pourtant pas on est pris dans une sorte de voyeurisme à travers les yeux de la narratrice celle au cardigan jaune en épi et on scrute le moindre mouvement de la femme à la jupe violette cela on devient même une obsession en quelque part on va de surprise en surprise ce roman nous plonge dans une atmosphère bien particulière au-delà de notre position de voyeur nous en apprenons sur les conditions de vie et de travail des prolétaires japonais. Je ne parle pas du côté mesquin, des ragots et des jalousies entre le personnel qui n'est pas spécifique au Japon mais bien plus des conditions de travail.
C'est un roman agréable à lire un roman singulier un roman qui nous fait voyager dans la culture japonaise mais aussi je dois l'avouer un roman qui me laisse un peu dubitative je ne suis pas sûr d'avoir tout saisi il me reste une interrogation à laquelle je n'ai pas encore trouvé de réponse. Certes j'aimerais être éclairée mais même en restant avec mon questionnement, j'ai apprécié cette lecture qui sort des sentiers battus.
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La narratrice, dont on ne sait pas grand chose, est obsédée par une femme qui vit dans son quartier et qui porte tout le temps une jupe violette.
Cette femme semble avoir des habitudes particulières, comme s'acheter une petite brioche et la manger sur le même banc dans un parc.
La narratrice va peu à peu s'immiscer dans la vie de la femme à la jupe violette.
J'ai bien aimé l'ambiance étrange qui règne dans le livre et l'histoire prend une tournure inattendue mais il faut accepter de rester un peu dans le flou concernant l'identité de cette femme à la jupe violette et du lien qui l'unit ou pas à la narratrice.
Un roman dépaysant, pas désagréable à lire, mais dont on ressort sans être certain d'avoir compris la finalité.
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Voici un bien étrange roman, dominé par deux héroïnes féminines. La narratrice, toujours vêtue d'un cardigan jaune, passe son temps, comme une obsession, à espionner une femme repérée pour être la femme à la jupe violette. Celle-ci, oisive au début de l'histoire (elle alterne des périodes de contrats courts et d'inactivité) a ses habitudes dans un parc public, toujours à la même place du même banc, et déguste systématiquement sa brioche à la crème sous le regard envieux des enfants qui jouent. Elle ne paye pas de mine, pas bien jeune, pas bien belle, pas bien sociable non plus…

Pourtant, la narratrice s'est mise en tête de se faire une amie de cette femme. Elle va monter un stratagème en déposant anonymement des offres d'emploi sur le banc, et dans la boîte aux lettres de la femme à la jupe violette, qu'elle suit, pour qu'elle postule dans le grand hôtel où elle-même travaille. Et cela marche, elle s'y fait embaucher comme femme de ménage. On se dit que cette femme mal dégrossie va avoir du mal à s'y faire, mais le directeur, les cheffes d'équipes Tsukada et Hamamoto, et les collègues font le nécessaire pour la former et l'intégrer, l'incitant notamment à ne pas se gêner pour utiliser et consommer certains petits suppléments habituellement offerts aux clients dans ces hôtels de luxe, confiseries, couverts et autres petits linges.

Notre narratrice, la Cheffe Gondô, observe tout cela, toujours avec discrétion, sans se dévoiler à la femme à la jupe violette, Mayuko Hino, dont elle ne perd pas une miette des gestes et comportement. Bientôt, Hino s'avère très douée et prend de l'assurance. Elle bénéficie des bonnes grâces du directeur. Elle qui prenait toujours le bus pour aller au travail se met à ne plus le prendre…elle embellit…des rumeurs se font jour parmi les collègues. Elles jasent, il paraît qu'on a vu Hino dans la voiture du directeur, cet homme marié ! Et son salaire, vous avez vu ça ?! Un scandale ! Gondô veut en avoir le coeur net, et poursuit l'espionnage. Oui, Hino et le directeur se retrouvent au restaurant. Oui, ils ont très probablement une liaison. Bientôt, une dénonciation anonyme à la maison-mère révèle des disparitions excessives et suspectes de produits…Les tourtereaux sont sous pression…jusqu'à une dispute entre eux, qui se termine en accident gravissime. Gondô, décidément témoin omniprésente, met aussitôt en branle un plan de sauvetage rocambolesque au profit de cette femme, mais aussi et surtout pour son propre bénéfice.

Un roman qui se démarque par son originalité, intéressant parce qu'il sort du feel-good facilement dégainé par des éditeurs français surfant sur une japanophilie suscitée par un soft-power nippon très efficace. Je ne sortirai toutefois pas le couplet des thèmes qui explorent les travers de la société japonaise, car pour le coup les histoires de cancans, de jalousies et coucheries au travail existent partout. le style d'écriture est simple, ni indigent ni indigeste, mais on cherchera en vain des passages où la beauté des mots prime, la priorité absolue est de relater les faits et gestes de la femme à la jupe violette, sous l'oeil de l'espionne-narratrice. Cela ressemble plutôt à un journal, sans longues descriptions, mais avec insertion de dialogues, assez nombreux et éloquents, notamment pour permettre au lecteur de capter sans grand effort l'évolution du regard porté par les cheffes, tant sur la femme à la jupe violette que sur le directeur de l'hôtel. Et sous cet aspect, l'hypocrisie est de mise !

L'impression générale est celle d'un roman qui se lit agréablement, d'une traite, parce qu'il est court et que l'auteure sait maintenir le mystère, et ce sur les deux personnages centraux, le lecteur s'interrogeant peu à peu autant sur la narratrice que sur la supposée héroïne en violet. Ce qui interroge notamment, et qui paraît assez peu crédible, c'est une quasi-invisibilité de Gondô. On comprend qu'elle est jugée médiocre employée, mais de là à ne jamais intervenir nulle part, jamais prise à partie dans les conversations, et n'avoir comme jamais été remarquée ni de Hino, ni du directeur, jusqu'à deux scènes distinctes d'échanges, cela semble assez improbable. Ceci dit, le message est peut-être de dénoncer l'invisibilité sociale voire exclusion de ceux qui ne sont pas socialement conformes, et les injustices dans le monde de l'entreprise (cancans, promotions canapés ?) Mystère...

La fin du roman est énigmatique, et laisse un léger goût d'inachevé. Précipitée, elle est volontairement allusive sur le sort de la femme à la jupe violette, et dévoile ce qu'on pressentait, que la véritable personne centrale de l'histoire est au moins autant la narratrice, cette femme au cardigan jaune, les deux faisant une paire bien complémentaire. On croit comprendre que la narratrice avait un dessein bien précis dès le départ. Plus que de simplement se faire une amie de la femme à la jupe violette, l'énigmatique narratrice Gondô avait des ambitions plus ambigües voire perverses, dans une recherche d'un profitable mimétisme avec celle qui l'aura obsédée.

Finalement, cette oeuvre, sans probablement laisser un souvenir impérissable, relève un peu le niveau du prix Akutagawa, dont les dernières oeuvres lauréates étaient décevantes ces dernières années, du moins à mon goût, de Français.
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La femme à la jupe violette est le premier roman publié en France de Natsuko Imamura .Ce roman très court, cette longue nouvelle, m'a laissée pantoise, déconcertée par une fin aussi surprenante que déroutante.
La narratrice , la femme au cardigan jaune ainsi qu'elle se présente, fait une "fixation" sur une femme dite la femme à la jupe violette . Obnubilée par cette femme qu'elle croise quotidiennement dans une galerie marchande , elle l'observe, l'épie en permanence, allant jusqu'à noter ses allées et venues, ses périodes de chômage ou de travail. Elle veut faire sa connaissance mais ne sait pas comment l'aborder ou plutôt n'ose pas aborder cette femme mystérieuse et secrète. Pourquoi veut elle devenir son amie ? nous ne le saurons pas mais elle va s'immiscer de façon "pathologique" dans la vie de cette femme, lui imposant presque de se présenter pour un poste dans l'hôtel situé près de la gare.
Là les évènements vont prendre une autre tournure, la femme à la jupe violette semble s'épanouir , revivre mais ce ne sera qu'un mirage . La femme au cardigan jaune semble être toujours là, prête à tirer les ficelles sauf que si la ficelle vient à casser le pire peut survenir...
Un roman déstabilisant, une fin déconcertante, mais un texte inoubliable
A noter la très belle analyse du monde du travail , du rapport entre collègues, entre subordonnées et supérieurs hiérarchiques, de la place de la femme ouvrière dans la société japonaise .
L'écriture est très fluide. L' humour noir, les situations parfois cocasses ou incongrues, le côté pervers et manipulateur de la narratrice confèrent à ce roman un ton décalé et unique qui peut interloquer. Mais la stupeur passée, je pense que c'est un univers à découvrir ne serait-ce que par le lecteur curieux de la littérature japonaise

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critiques presse (1)
LeMonde
21 juin 2022
Natsuko Imamura hypnotise son lecteur avec « La Femme à la jupe violette ». Notre feuilletoniste s'est laissée prendre au jeu malsain de sa narratrice.
Lire la critique sur le site : LeMonde
Citations et extraits (4) Ajouter une citation
Dans mon quartier habite une personne surnommée « la femme à la jupe violette ». On l’appelle ainsi car elle porte toujours une jupe de couleur violette.
Au début, je pensais qu’il s’agissait d’une jeune femme. Peut-être était-ce à cause de sa petite stature et de sa chevelure noire, qui lui tombe jusqu’aux épaules. De loin, on dirait une collégienne. Mais de plus près, on s’aperçoit qu’elle n’est pas jeune du tout : elle a les joues constellées de taches, et ses cheveux, bien que longs, sont secs et ternes.
(incipit)
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Ces derniers temps, la femme à la jupe violette se trouve dans la tourmente.
Elle se morfond toute seule, à toute heure de la journée. Ses problèmes ne sont pas de ceux dont on peut discuter avec autrui. De toute façon, elle n'a personne à qui se confier. Car la femme à la jupe violette n'a toujours pas d'amis.
Elle semble bien déterminée à dissimuler la nature de sa relation avec le directeur. Lorsqu'on la taquine à ce sujet sur le lieu de travail, elle nie avec véhémence.
" Nous ne sommes pas ensemble !" qu'elle a dit.
- Ahaha. Tu l'imites très bien.
- Elle espère encore le cacher ?
- Quelle indécence...
- Vous savez, cette manie qu'elle a de verrouiller la porte de l'intérieur quand elle fait le ménage ? C'est dégoûtant. Qui sait ce qu'elle peut bien fabriquer là-dedans !
- Peut-être que le directeur s'y cache. Hahaha.
- Chut !"
La femme à la jupe violette entre dans l'ascenseur. Aussitôt, le silence s'abat dans la cabine. A peine est-elle sortie que les commérages reprennent.
"Quelle puanteur ! Encore cette odeur de banane pourrie !
- Vous avez vu ses ongles ? Ils sont rouge sang !
- Vous savez quoi ? Il paraît que le gérant l'a réprimandée pour ça. Et qu'à la prochaine infraction il va la saquer.
- J'espère bien, qu'il va la saquer. Enfin, tu sais combien elle est payée, celle-là ?
- Combien ?
- Mille cinq cents yens de l'heure, figure-toi, mille cinq cents !"
La rumeur enfle, toujours plus folle. Plus les ragots se multiplient à l'endroit de la femme à la jupe violette, plus l'équipe semble soudée.
Tant et si bien qu'on en vient à évoquer la possibilité d'aller tous ensemble au siège social de l'entreprise afin d'en référer à la direction et d'obtenir le renvoi de "la favorite du directeur", dont on ne saurait plus tolérer la présence. Mais c'est alors qu'un incident se produit, à point nommé.
On rapporte que certains articles mis en vente à la kermesse d'une école primaire pourraient provenir des fournitures de l'hôtel.
L'informateur reste anonyme. On dépêche aussitôt un responsable de l'hôtel sur les lieux, lequel confirme qu'il s'agit bien là d'articles ayant disparu de notre hôtel. Il y a là dix serviettes, dix essuies-mains, cinq tapis de bain...Le nombre et la description des produits correspondent en tous points à la liste des articles portés disparus le mois dernier.
Quant aux vendeurs ? Il s'agit d'enfants fréquentant l'école.
" On nous a juste demandé de tenir le stand ", auraient-ils déclaré. Une dame, selon eux, qui leur aurait promis de l'argent de poche en échange...
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Autre jour, autre rumeur au sujet de la femme à la jupe violette :
" Elle est devenue drôlement belle, la Hino, pas vrai ? fait remarquer une collègue. Je me demande si elle a fait de la chirurgie..."
Je suppose que l'on peut le prendre comme un compliment.
"Pas possible, rétorque une autre. C'est le maquillage.
- Tu crois ? Elle est douée, alors.
- ça, oui.
- Et elle travaille vite.
- Oh oui, très vite.
- Les cheffes n'arrêtent pas de dire qu'on peut lui confier sans problème les ménages de dernière minute.
- Oui, parce qu'elle est très efficace.
- Mais elles disent aussi qu'elle va trop vite, parfois.
- Eh bien, ce n'est pas faux.
- ça me fait mal de le dire, mais il lui arrive de s'économiser.
- Oui, oui, tout à fait.
- Même les cheffes ont dû s'en rendre compte, d'ailleurs.
- Certes, mais elles ont Hino à la bonne.
- Tu sais quoi ? Elle va jusqu'à les saluer différemment de nous.
- Je le sais bien. Elle n'utilise pas tout à fait le même ton avec elles.
- Elle fait bien la distinction, oui.
- Exactement.
- Et puis, elle ne range pas correctement son chariot.
- Mais oui ! Quand on passe après elle, il manque toujours quelque chose.
- L'autre jour, par exemple, il n'y avait plus qu'un savon.
- Elle ne pense qu'à sa pomme, celle-là, sans jamais se soucier des autres !"
Quelques heures après avoir entendu ce commérage, je vais inspecter discrètement le chariot qu'a utilisé la femme à la jupe violette. Elle-même est déjà rentrée chez elle, son service terminé. Conformément aux dires des collègues, il n'y a plus qu'une brosse, et les charlottes n'ont pas été réapprovisionnées. Peut-être a-t-elle prévu de refaire les stocks le lendemain matin, mais c'est justement son jour de congé...D'ailleurs, je suis de service le lendemain. Il doit bien y avoir deux semaines que nos congés n'ont plus coïncidé. Aussi frustrant que ce soit de devoir compter sur les bavardages des collègues pour me tenir au courant de sa situation, c'est toujours mieux que rien.
Il ne me reste plus qu'à attendre la réaffectation des étages, prévue le mois prochain, me dis-je, quand une nouvelle rumeur parvient à mon oreille.
Cette fois, c'est de la bouche des cheffes qu'elle sort. Et elle est particulièrement difficile à avaler. La femme à la jupe violette sortirait avec le directeur. Pardon ? Le directeur...notre directeur ? Cet homme marié, qui a des enfants ? On parle bien du même ? Non, c'est forcément un mensonge.
"Si, si, je vous assure, insiste la cheffe Hamamoto en déballant un bonbon.
- Vous les avez vus ?" s'enquiert la cheffe Tsukada.
Elle déchire l'emballage d'un biscuit de riz. Une odeur de sauce soja se répand dans la buanderie.
" Moi non, mais certaines des filles, oui. Et pas qu'une seule. D'après elles, la petite Hino rapplique tous les matins dans la voiture du directeur.
- Carrément ? Incroyable..."
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Lorsqu'on me demande ce qu'elle portait, je me retiens de justesse de répondre : "Une jupe violette."
Que portait-elle hier soir, de quelle couleur étaient ses vêtements ? Impossible de m'en souvenir.
Où a bien pu passer la femme à la jupe violette ?
Jusqu'à maintenant, je n'en sais rien.
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