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Jusuf Vrioni (Traducteur)
EAN : 9782253044970
153 pages
Le Livre de Poche (20/01/1988)
3.81/5   139 notes
Résumé :
Dans un bourg de l'Albanie médiévale, une vieille femme et sa fille - seules survivantes d'une famille dont la guerre et la peste ont fauché tous les enfants mâles - succombent à un épisode troublant sur lequel l'inspecteur local est chargé de faire la lumière: Doruntine a été mariée "au loin", selon la tendance moderne de l'époque; son frère Constantin avait, de son vivant, juré à leur mère de lui ramener sa fille chaque fois qu'elle exprimerait le désir de la revo... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (21) Voir plus Ajouter une critique
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Me voilà reparti pour un deuxième voyage avec Ismaïl kadaré.
Cette fois, il ne s'agit plus d'un général qui cherche les mort dans la terre d'Albanie..
Cette fois, dans ce court roman, c'est un frère défunt qui serait allé chercher sa soeur mariée au loin pour la ramener près de sa mère.
La légende de Doruntine est née.
L'histoire est envoûtante, de cette chevauchée sous les étoiles qui s'achève dans le village où une lignée va s'éteindre définitivement.
Le mystère semble épais et impénétrable comme cette brume froide de l'automne qui absorbe les cris et les appels.
La légende naît et se répand comme un feu que l'on ne saura maîtriser.
L'église et le gouvernement, redoutant l'orage religieux et les troubles, pressent l'autorité de faire la lumière sur le retour de Doruntine.
Quelle vérité, s'il en est une, découvrira le capitaine Stres au bout de son enquête?
Et qui ne rêve pas, au moins une fois, de revoir un être défunt?
Le roman est puissant, emmené dans la tragédie d''une famille anéantie et la malédiction d'une promesse non tenue car intenable: Cette terrible bessa.
Cette solennelle promesse qui marque le peuple d' Albanie.

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Petite incursion dans la littérature albanaise avec ce court roman d'Ismail Kadaré paru aux éditions Zulma.
Un roman que l'on peut qualifier de fantastique, basé sur la légende et ballade albanaise "Constantin et Doruntine" ou " le serment de Constantin".

Qui a ramené Doruntine de la lointaine Bohème où elle a suivi son mari après leur mariage ?
Est-ce Constantin, son plus jeune frère, soucieux d'honorer la promesse (la "bessa") faite à leur mère ?
Mais Constantin est mort à la guerre ainsi que tous ses frères...
Maudit par sa mère, il se réveille de sa tombe et ramène sa soeur ignorante du drame, avant de rejoindre son trépas.

" Oh Dhoqina, Dhoqina
Ne te languis-tu pas de ta famille ?
Des larmes coulent sur le visage de ta mère
Qui pleure pour voir sa fille.." (traduction de Robert Elsie)

Le choc de la révélation provoque la mort quasi instantanée des deux femmes.

Dans sa version, Kadaré fait intervenir un enquêteur qui, sur fond de rivalité religieuse entre catholiques et protestants, va mettre en doute l'intervention surnaturelle et analyser toutes les hypothèses de cet étrange phénomène.
Car personne ne peut accepter la résurrection des morts.

Ismail Kadaré puise essentiellement son imagination dans l'histoire des Balkans et de ses légendes anciennes.
Il revisite le folklore et les mythes de son pays natal dans une prose d'une ironie parfois mordante et avec un talent de conteur volubile.
Il s'attache également à dénoncer le totalitarisme à travers des métaphores habiles.

Je suis totalement conquise par cette littérature et je suis bien décidée à découvrir les nombreux autres livres de l'auteur.
Si vous aimez les contes et légendes des pays lointains, je vous engage à faire de même.
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On retrouve dans ce roman de Kadaré, toute la particularité de l'Albanie. Pendant longtemps, ce petit pays, maintenant aux portes de l'UE, fut tiraillé entre l'empire Ottoman musulman et l'Autriche-Hongrie catholique. On y trouve une multitude de petits villages de pierres, aux ruelles pentues, avec ses maisons à encorbellements typiques de l'architecture ottomane. Et puis, n'oublions pas la dictature de Hoxa, une des plus terribles d'Europe. Ajoutons encore, ces vieilles légendes de revenants et cette fameuse "bessa", cette promesse, qui fait ressortir les morts de leur tombeau pour être honorée. C'est sur ce terreau que Kadaré tisse son intrigue. Qui a raccompagné l'infortunée Doruntine chez les siens ? C'est la terrible question à laquelle le lieutenant Stres devra répondre. C'est un roman-enquête captivant pour peu que le lecteur se laisse charmer par cet environnement médiéval vaguement inquiétant.
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Qui a ramené Doruntine de sa contrée lointaine ?, telle est la question centrale de ce roman d'Ismail Kadaré, un auteur albanais dont je découvre la plume, qui nous occupe tout au long du récit tout autant qu'elle préoccupe le capitaine Stres : est-ce son frère Konstantin qui en a fait la bessa à sa mère, telle qu'elle l'affirme, et si c'est le cas, comment cela peut-il être possible, vu la série de drames ayant touché la famille Vranaj ? Bien vite les villageois vont adhérer à une explication surnaturelle, au grand dam de l'Église qui charge Stres de trouver une explication plus rationnelle… Ismail Kadaré reprend une légende albanaise avec Qui a ramené Doruntine ?, Kostandini e Dhoqina, originellement écrite sous la forme d'une ballade chantée, à laquelle il joint un enquêteur qu'il charge d'élucider l'affaire. Construit autour de la notion de bessa, « la notion fondamentale du droit coutumier albanais », on nage en plein mystère, pour notre plus grand plaisir. Un auteur que je vais très certainement relire.
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Qui a ramené Doruntine, ou comment débunker les fake news au Moyen-Âge.
Vers l'an mil dans une riche et ancienne famille albanaise, Doruntine Vranaj est l'unique fille d'une fratrie de dix. Elle épouse un homme d'un pays lointain, ce qui est déjà une entorse aux traditions. Encore que ça se discute, les traditions, surtout quand on voit Palok, l'idiot - consanguin - du village.
Bref, Doruntine traverse "la moitié d'un continent" pour aller vivre en Bohême chez son mari, mais son frère Konstantin a promis qu'il irait la chercher si elle leur manquait trop. Ce n'est pas une promesse anodine : c'est la "bessa", c'est une affaire d'honneur.
Mais la guerre et la peste emportent Konstantin ainsi que les huit autres frères, et les brus quittent avec leurs enfants la maison endeuillée. La pauvre mère solitaire, devant la tombe de Konstantin, le maudit de n'avoir pas tenu sa promesse.
Qu'à cela ne tienne : Doruntine reparait chez sa mère, et assure à tous que c'est bien Konstantin qui l'a ramenée.
De cette légende albanaise, Kadaré fait... un polar.
Eh oui, c'est l'anachronique policier du village, Stres, un homme rationnel, qui mène l'enquête pour découvrir Qui a ramené Doruntine ?
Et c'est bien compliqué de démêler le vrai du faux, dans cette ambiance complotiste où "il leur fallait à tout prix apprendre quelque chose, vite même, car ils constituaient le premier cercle que les nouvelles devaient atteindre pour se propager ensuite par vagues à travers le monde entier."
(Kadaré a anticipé Twitter.)
Pour les pleureuses aux obsèques, c'est la construction d'un mythe : le frère lié par la "bessa" qui sort de sa tombe pour accomplir son devoir.
Pour les Églises, en conflit entre catholiques et orthodoxes, il n'est pas question de parler de la résurrection d'un mort, ce serait une concurrence déloyale : il va falloir trouver une explication plus politiquement correcte.
Pour l'adjoint qui enquête dans les archives de la famille Vranaj, il y a un secret croustillant mais inavouable - que je ne dévoilerai pas.
Pour le témoin... et bien il avouera volontiers tout ce qu'on veut, au vu des circonstances - que je ne dévoilerai pas non plus.
Et à la façon d'un Hercule Poirot, le policier Stres rassemblera tout le village pour la révélation... et le twist final.
Un roman remarquable, court mais dense, qui décortique tous les ressorts de la propagande et de la manipulation, avec une grande ironie et un grand talent.
Traduction impeccable de Jusuf Vrioni.

(J'aurais dû éviter l'édition Larousse, faite pour des scolaires et plombée par de multiples notes en bas de page : je déteste les notes en bas de page. Même la numérotation des lignes a perturbé ma lecture. Et "Niveau recommandé : collège" c'est vite dit, lorsqu'on explique par exemple le mot "hérésie" par "doctrine contraire au dogme officiel" : au lieu d'un mot compliqué, mettez-m'en deux !)

Challenge Globe-Trotter (Albanie)
LC thématique de juillet 2022 : "Les prénoms, saison 2"
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Citations et extraits (15) Voir plus Ajouter une citation
INCIPIT :

Stres était encore couché quand il entendit frapper à la porte. Il fut tenté d'enfouir sa tête sous l'oreiller, dans l'espoir d'étouffer le bruit, mais les coups redoublèrent alors avec vigueur. « qui diable vient frapper à ma porte avant l'aube ? » maugréa-t-il en rejetant sa couverture. Il descendait l'escalier quand on frappa pour la troisième fois, mais, à la cadence des coups du heurtoir métallique, il put à présent deviner qui se tenait derrière. Il fit glisser le verrou, ouvrit la porte en la tirant vers lui. Si sa bouche n'articula pas : « Quel diable te prend de venir me réveiller avant l'aube ? », c'est bien ce qu'exprimèrent sa mine et ses yeux gonflés.
« Il est arrivé quelque chose », se hâta de proférer son adjoint.
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A cause du froid, les gens se déplaçaient moins, mais, curieusement, la rumeur courait tout aussi vite que si le temps avait été plus clément. On eût même dit que, figée par le froid hivernal, cristalline et scintillante, elle filait plus sûrement que les rumeurs d'été, sans être exposée comme elles à la touffeur humide, à l'étourdissement des esprits, au dérèglement des nerfs. Néanmoins, cela ne l'empêchait pas, en se répandant, de se transformer de jour en jour, de s'amplifier, de s'éclaircir ou de s'assombrir.
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...il n'est personne en ce monde que n'habite quelque regret à propos d'un disparu et qui ne se soit dit : ah ! s'il pouvait revenir une fois, une seule fois, que je l'embrasse ( mais quelque chose m'empêche alors de l'embrasser); même si cela ne peut jamais advenir ni adviendra jamais dans les siècles des siècles et c'est là une des plus grandes tristesses en ce bas monde, tristesse qui continuera de l'envelopper comme la brume jusqu'à son extintion.
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Le mariage de Doruntine, en revanche, était un évènement dont tout un chacun se souvenait avec netteté. C'était un de ceux que le temps a la faculté d'embellir, et cela non point parce qu'ils sont inoubliables en soi, mais parce qu'ils ont le don de coaguler tout ce qui, du passé, est beau ou jugé tel, et qui n'est plus.
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Puis la première pleureuse chantait la résurrection du fils maudit et sa chevauchée nocturne vers le pays où s'était mariée sa sœur :

Si pour une joie tu es venu,
Je me vêtirai en fée,
Si pour un deuil tu es venu,
En robe de bure je me mettrai,

et la troisième lui répondait avec les paroles du mort :

Viens, ma sœur, comme tu es.
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Videos de Ismaïl Kadaré (9) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Ismaïl Kadaré
http://www.club-livre.ch#Bessa_Myftiu Interview de Bessa Myftiu réalisée par le Club du Livre en partenariat avec Reportage Suisse Romande
Bessa Myftiu, née à Tirana, est une romancière, poète, conteuse, essayiste, traductrice, critique littéraire, journaliste, scénariste et actrice établie à Genève, en Suisse romande, de nationalité suisse et albanaise. Pour commander un ouvrage de Bessa Myftiu : En SUISSE : https://www.payot.ch/Dynamics/Result?acs=¤££¤58REPORTAGE SUISSE ROMANDE36¤££¤1&c=0&rawSearch=bessa%20myftiu En FRANCE : https://www.fnac.com/SearchResult/ResultList.aspx?SCat=0%211&Search=bessa+myftiu&sft=1&sa=0
Fille de l'écrivain dissident Mehmet Myftiu, Bessa Myftiu fait des études de lettres à l'université de Tirana et par la suite elle enseigne la littérature à l'université Aleksandër Xhuvani d'Elbasan. Elle devient ensuite journaliste pour le magazine littéraire et artistique albanais La scène et l'écran. Elle émigre en Suisse en 1991 et s'établit à Genève dès 1992, passant son doctorat et devenant enseignante à l'université de Genève en faculté des Sciences de l'éducation, tout en poursuivant en parallèle ses activités dans les domaines de l'écriture et du cinéma. Depuis 2013, elle enseigne à la Haute École Pédagogique de Lausanne. Elle est par ailleurs membre de la Société Genevoise des Écrivains BIOGRAPHIE 1994 : Des amis perdus, poèmes en deux langues, Éditions Marin Barleti [archive], Tirana 1998 : Ma légende, roman, préface d'Ismail Kadaré, L'Harmattan, Paris (ISBN 2-7384-6657-5) 2001 : A toi, si jamais?, peintures de Serge Giakonoff, Éditions de l'Envol, Forcalquier (ISBN 2-909907-72-4) 2004 : Nietzsche et Dostoïevski : éducateurs!, Éditions Ovadia, Nice (ISBN 978-2-915741-05-6) 2006 : Dialogues et récits d?éducation sur la différence, en collaboration avec Mireille Cifali, Éditions Ovadia, Nice (ISBN 978-2-915741-09-4) 2007 : Confessions des lieux disparus, préface d'Amélie Nothomb, Éditions de l'Aube, La Tour-d'Aigues (ISBN 978-2-7526-0511-5), sorti en 2008 en livre de poche (ISBN 2752605110) et réédité en 2010 par les Éditions Ovadia (ISBN 978-2-915741-97-1), prix Pittard de l'Andelyn en 2008. 2008 : An verschwundenen Orten, traduction de Katja Meintel, Éditions Limmat Verlag [archive], Zürich (ISBN 978-3-85791-597-0) 2008 : le courage, notre destin, récits d'éducation, Éditions Ovadia, Nice (ISBN 9782915741087) 2008 : Littérature & savoir, Éditions Ovadia, Nice (ISBN 978-2-915741-39-1) 2011 : Amours au temps du communisme, Fayard, Paris (ISBN 978-2-213-65581-9) 2016 : Vers l'impossible, Éditions Ovadia, Nice (ISBN 978-2-36392-202-1) 2017 : Dix-sept ans de mensonge, BSN Press, (ISBN 978-2-940516-74-2)
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