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Morgane Saysana (Traducteur)
EAN : 9782290375631
640 pages
J'ai lu (03/01/2024)
4.25/5   30 notes
Résumé :
Guerre et paix à travers les Balkans

« Dans notre lignée de femmes, je représente la quatrième génération à émigrer. » C'est pour rompre cette spirale de l'exil que Kapka Kassabova se rend aux sources de son histoire maternelle, les lacs d'Ohrid et Prespa, les plus anciens lacs d'Europe. Au gré de ses rencontres (gardien d'église troglodyte, guide oupêcheur), elle collecte les histoires agitées de cette région des Balkans située à cheval entre la Macé... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (12) Voir plus Ajouter une critique
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Rentrée littéraire 2021 #33

« Peut-être l'épopée de ceux qui ne sont pas nés est-elle déjà inscrite dans les signes tracés par les vents sur le lac, comme par des calligraphes cosmiques. Dessinés et sans cesse redessinés, car les vents viennent de partout et se chevauchent en une conversation polyglotte qui n'est pas près de s'achever, pas avant que le lac ne soit asséché et que le vent n'ait cessé de geindre et de rire comme la samovila des ballades folkloriques ... avec une voix humaine. »

L'auteur revient sur les terres de ses ancêtres, à la source de son histoire maternelle, d'où est originaire son arrière-grand-mère : les lacs d'Ohrid et de Prespa, les plus anciens lacs européens, à cheval entre la Macédoine du Nord, l'Albanie et la Grèce. Elle qui appartient à la quatrième génération de femme. Elle qui est née en Bulgarie, avant de grandir en Nouvelle-Zélande pour vivre actuellement en Ecosse. Elle veut comprendre d'où vient cette douleur héritée comme un fardeau, née de la malédiction de l'exil qui semble frapper les femmes de sa famille. Au-delà de cette psychologie transgénérationnelle à questionner, elle veut découvrir comment l'histoire et la géographie de nos ancêtres nous façonnent au plus profond, comment ces historio-géographies sculptent son paysage intérieur, les nôtres plus largement.


Kapka Kassabova n'est pas une aventurière en quête d'exploits, elle ne se contente pas de traverser les régions explorées, elle veut raconter des lieux, faire resurgir des mémoires. En fouillant dans l'histoire intime de sa famille autour des lacs Ohrid et Prespa, elle s'ouvre aux autres. le récit, pétri de générosité, s'épanouit à leur contact et le talent de conteuse, enveloppe le lecteur dans une odyssée éclatante d'humanité.

A chaque rencontre ( des pêcheurs, gardiens de monastères, guides de montagnes etc ), elle recueille des anecdotes par dizaines, elle collecte des histoires subjectives qui tissent un récit-gigogne riche mêlant passé et présent, mythes enfouis et épisodes historiques, guerre et paix, ville et nature, totalement à contrepied du récit de voyage traditionnel. Avec une fluidité impeccable, ce vagabondage digressif ne perd jamais le fil et interroge avec intelligence sur l'identité et l'appartenance dans une région aux frontières nationales mouvantes dans lesquelles l'enchevêtrement culturel et religieux a été la norme avant que d'être broyée par les guerres ( première et seconde guerre mondiale, guerre de Yougoslavie entre autres ) et des régimes dictatoriaux ( de l'empire Ottoman à Tito ou la dictature des Colonels ). Les Balkans sont la région où la dichotomie guerre / paix s'est déployée avec le plus de férocité en Europe.

Le travail passionnant de Kapka Kassabova rend parfaitement intelligible les mécanismes des conflits et de la division, comme celui de la réconciliation. Et lorsqu'on referme le livre, c'est son message de paix, d'une paix possible, affranchie de la culture guerrière, qu'on retient. A l'image de la tombe de Saint Naum, en Macédoine du Nord, où Chrétiens et Musulmans viennent se recueillir. C'est bien une culture commune qui palpite au travers des destins brisées des habitants des Balkans.
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C'est par hasard que j'ai découvert "L'écho du lac" et je peux dire que c'est une belle surprise. Quelques jours après la lecture 'L'écho du lac,' résonne encore dans ma tête.
J'ai beaucoup apprécié ce voyage proposé par Kapka Kassabova, aux côtés des gens simples qui racontent leur vie dans les régions balkanique, dont l'autrice est originaire.
Je pense que ce n'est pas très difficile de recueillir des témoignages, mais il faut savoir tout raconter pour pouvoir garder l'attention du lecteur tout au long du récit. Je peux dire que Kapka Kassabova excelle dans l'art de l'écriture, elle a du talent.
A la fois historique, géographique, humain, ce livre émouvant touche surtout par la sincérité. C'est un livre instructif, riche, rempli de témoignages des gens qui ont vécu le communisme, la séparation de l'exil, la pauvreté. On découvre aussi des légendes intéressantes.
Un livre qui m'en a rappelé un autre que j'avais lu il y a quelques années : ' Si la Chine était un village' de Hong Liang. Comme dans l'Echo du lac', il s'agit pour l'autrice d'un retour aux sources.
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Lisière fut un  véritable coup de coeur l'an passé! Kapka Kassabova, écrivaine bulgare emmenait le lecteur dans les forêts sauvages de la zone frontalière entre Bulgarie, Turquie et Grèce, aux frontières de l'Europe, sur l'ancien Rideau de fer. Elle nous conduit sur les routes d'exils, à travers une histoire millénaire qui remontait aux Romains, aux Thraces. Rencontre avec des gens simples qui ont traversé des frontières pour garder leur identité, leur langue ou leur religion. Exils volontaires, échanges de population, ou réfugiés chassés. 

L'écho du Lac décrit autre région balkanique : la Macédoine à cheval sur trois états actuels : Macédoine du Nord, Albanie et Grèce mais aussi revendiquée par la Bulgarie, la Yougoslavie hier et même l' Empire ottoman. Rien ne la symbolise mieux que cette salade macédoine, faite de divers morceaux mélangés. Diverses langues, Macédonien, Bulgare, Albanais ou Grec, Turc, musulmans ou orthodoxes, avec toutes les combinaisons possibles. Et tout cela sur un mouchoir de poche : sur les rives du Lac d'Ohrid entre deux petites villes Ohrid la macédonienne et Pogradec l'Albanaise, quelques villages, un monastère fameux, des grottes autrefois habitée par des ermites, des montagnes sauvages où vivent encore des ours et des loups...Non loin du Lac d'Ohrid, les Lacs Prespa sont également à cheval sur l'Albanie, la Macédoine du Nord et la Grèce. leur histoire est aussi dramatique et sanglante, Komitas et andartes mais aussi souvenirs des guerres civiles grecques. Exils et emprisonnements dans les camps albanais d'Enver Hoxa, ou sur les îles de Makronissos. Identités complexes façonnées par les exils jusqu'en Australie. Totale tragédie quand la Besa ( serment à la parole donnée et au Kanun albanais)  façonne des vendettas qui courent sur des générations. 

L'écho du Lac correspond à une démarche très personnelle : la mère, la grand-mère, les tantes et cousines de Kapka Kassabova sont originaires d'Ohrid. C'est donc un  retour aux sources de sa famille maternelle. Les titres des deux premiers chapitres Fille de Macédoine et A qui appartenez-vous? situent l'autrice dans la position de l'exilée qui rentre au pays et qui reconstitue l'histoire de sa famille sur des générations. Quand elle rencontre des personnes qui ne lui sont pas apparentées, elle est considérée comme une fille du pays. Rien à voir avec une aventurière ou une journaliste qui viendrait explorer un pays étranger. Il en résulte un accueil toujours bienveillant et confiant. de parfaits inconnus lui livrent des secrets de famille, racontent leurs exils, leurs retours impossibles, leurs enfants perdus de l'autre côté d'une frontière infranchissable. Et toutes ces histoires sont très touchantes. 



Il n'est pas indifférent que ce livre soit écrit par une femme dans cette région où hommes et femmes voient leur rôle défini par une tradition patriarcale presque féodale. Il n'y a pas si longtemps au XXème siècle une fille n'avait pas le droit de passer deux fois dans la rue principale dans la même journée. Elle était assignée à un code de conduite très précis. de même, les femmes macédoniennes revêtaient très jeunes le noir du deuil pour ne pas le quitter, "veuves" d'un mari parfois vivant, exilé, emprisonné ou en fuite.

Il faudrait parler d'histoire, d'Alexandre à Ali Pacha de Janina, de guerres greco-bulgares, des divers communistes grecs (partisans souvent staliniens) de la Yougoslavie de Tito, des outrances d'Enver Hoxa et de la terreur qu'il inspira, de ce conflit identitaire pour le nom "Macédoine" ou pour le drapeau qui sépare les habitants du Lac Prespa par une frontière invisible... Evoquer le monastère Naoum et Clement, les fresques, les miracles....

J'ai enfin compris les mystères de Psarades, où nous avons passé quelques jours. Nous avions essayé de parler avec une vieille dame en Grec, elle ne nous comprenait pas, et la femme du restaurant ne savait pas déchiffrer le menu en Grec. Elle n'était pas illettrée, nous ne savions pas que le macédonien s'écrivait en cyrillique.

Nous avions aussi visité le Parc Drilon à Tushemisht en Albanie sans savoir que les sources étaient celle du fleuve Drin. Tant de choses que les touristes, même consciencieuses ne peuvent deviner!
Lien : https://netsdevoyages.car.bl..
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"Les choses positives provoquaient en nous une sensation inhabituelle. La joie était toujours annonciatrice de chagrin. Les retrouvailles suscitaient la peur de la séparation. Et la séparation était comme la mort."
Quoi de mieux que ces phrases pour exprimer tout ce que ressentent les exilés.
L' écrivaine bulgare, Kapka Kassabova connaît bien l'exil puisqu'elle fait partie de la quatrième génération d'émigrés dans la lignée des femmes de sa famille.
Avec 'L'écho du lac', elle nous fait partager l'expérience de son retour aux sources, à la rencontre de ses origines familiales. C'est dans les régions prés du lac d'Ohrid et de Prespa qu'elle s'est rendue pour recueillir en même temps des témoignages et nous faire découvrir des récits intéressants et émouvants, des légendes, la vie des gens, la séparation à cause de l'exil ... Dans ces régions des Balkans entre la Macédoine du Nord, la Grèce et l'Albanie, les histoires se ressemblent...
Kapka Kassabova a réussi à me toucher, à m'émouvoir, car c'est l'histoire de mon pays d'origine que j'ai re découvert à travers les témoignages et les descriptions : le communisme et ses victimes, les bunkers qu'on voit un peu partout, les monuments que l'on détruit, les gens simples et accueillants et bien sûr l'exil.
J'aurais voulu copier encore plus d'extraits pour parler de ce livre, mais je laisse votre curiosité faire son oeuvre.
L'écho du lac est un livre dense, mais qui se lit très bien grâce à la belle écriture aussi. Pour moi c'est un coup de coeur.



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Méfions-nous des eaux dormantes ! Elles peuvent remonter
à plusieurs millions d'années comme celles du lac Ohrid partagé aujourd'hui entre la Macédoine du Nord, l'Albanie, et la Grèce. Sous leur surfaces limpides et éclatantes, ces eaux gardent la mémoire des tragédies séculaires de cette région balkanique. La majesté du site ne fait pas oublier le mille-feuilles communautaire qui irrigue encore et déchire toujours le lieu. Après "lisières", c'est un tout un pan d'Histoire impénétrable jusque là qui se devine, se fait sentir. L'érudition se mêle au plus intime d'une quête familiale dont les fils ont des ramifications inépuisables. Les vérités rencontrées dans ce labyrinthe sont polyphoniques et résonnent en de multiples échos. de cette traversée, le lecteur n'en sort pas indemne comme un voile se déchirant sous ses yeux.
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Citations et extraits (35) Voir plus Ajouter une citation
Dans le jardin en contrebas, un homme élaguait à la hache un prunier avec une rage vindicative assez déplacée en cette paisible soirée. Il a continué de s'acharner jusqu'à ce qu'il ne reste plus que le tronc. L'arbre m'a-t-il appris, faisait de l'ombre.
Il faisait de l'ombre...
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Et soudain, ma grand-mère surgissait de l'ascenseur fraîche comme la rosée. Elle occupait tout l'espace, qu'elle occupait de son rire désinhibé déferlant par vagues. Cernée par la médiocrité, le conformisme et les faux-semblants dont se repaît un système totalitaire, Anastassia vivait avec pétulance, donnait haut et fort son avis dans une société où la moitié de la population n'en avait guère et où l'autre moitié veillait à le garder pour soi.
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À ma mère et aux enfants des exilés et des réfugiés où qu'ils soient...
Puissiez-vous trouver le chemin qui remonte à la source. Les morts ouvrent les yeux des vivants.
Aux lac aussi. À leur générosité sans limites.
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Le Kanun symbolise un des archétypes fondamentaux de la condition humaine : notre pulsion de mort collective. C'est notre propension à l'autodestruction travestie en volonté de se protéger. J'aurais vraiment préféré que ce phénomène soit exotique, circonscrit aux montagnes maudites, mais au lieu de cela, il m'a rappelé ma propre famille, de nombreuses autres familles de ma connaissance dans les Balkans et, d'une manière générale, les affres de l'existence humaine.

Le Kanun, c'était l'enclume. C'était le châtiment infligé à qui avait le malheur de descendre la même rue deux fois dans la même journée, et l'injonction à la loyauté inconditionnelle pour tous les membres du clan. C'était la culpabilité, la honte, l'orgueil, l'amour qui mutile, la projection par les anciens de leurs ténèbres intérieures sur les plus jeunes; la rage, le chagrin, l'enfermement de l'esprit dans des tours privées de soleil, la volonté d'ajouter de la souffrance aux comptes familiaux déjà foisonnants. Le Kanun veillait à ce que la reproduction l'emporte sur l'évolution.
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A la fin de l'été, à Sofia, l'année de Tchernobyl, nous avons dit au revoir à Anastassia. Parmi les feuilles rouge et or charriées par le vent, il y a ma mère, une ombre vêtue de pourpre et de noir vaporeux. Une forte rafale aurait pu l'emporter, comme une feuille. Elle m'a toujours fait l'impression de n'être attachée à la vie que par un fil, comme si elle était née sans racines, comme si elle avait besoin du concours d'une force extérieure pour rester ancrée au sol.
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2:38 Lisière, de Kapka Kassabova : https://www.babelio.com/livres/Kassab...
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