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EAN : 9782376650348
120 pages
Contre Allée (06/05/2022)
4.26/5   41 notes
Résumé :
Une allée est au centre de ce texte : une allée sur laquelle vont et viennent les familles, les proches, qui rendent visite à des patient·es, dans un hôpital psychiatrique. Au bout de cette allée, se trouvent ces patient·es, des jeunes qui décompensent, comme ces baleines échouées, égarées par le bruit du monde. Si ces familles se trouvent confrontées à leur propre douleur, leurs propres difficultés, toutes forment néanmoins un ensemble, un groupe uni, un « troupeau... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (12) Voir plus Ajouter une critique
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L'engravement, fait allusion aux baleines qui s'échouent volontairement sur les plages sauf qu'ici les baleines sont des jeunes échoués en hôpital psychiatrique.

Eva Kavian nous fait partager la vie du 'troupeau' qui traverse le parc les jours de visite, le désarroi des parents devant ces jeunes qui ne s'aiment pas, qui veulent en finir avec la vie, le maigre espoir que laissent les psychiatres souvent maladroits, la culpabilité qui détruit.

De si petits moments de bonheur, un rayon de soleil dans le parc, la première sortie autorisée malgré le regard des gens sur ta fille bourrée de neuroleptiques qui a pris 30 kilos en six mois.

On dit que l'amour est le combustible de l'espoir, un espoir qui peut détruire ou faire grandir.
Une bouleversante leçon d'amour qui moi aussi m'a grandi.
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« Certains pensent que les baleines bleues sont capables de se suicider en s'échouant sur une plage mais il semblerait plutôt que ce soit le bruit du monde, le bruit de notre monde moderne, qui perturbe leur outil de navigation, de communication, puis pousse leur stress à un paroxysme ingérable, et qu'ainsi s'engravent ensemble, le long de certains rivages, plusieurs baleines égarées, après une vie pourtant solitaire ».

C'est le seul extrait que je vais citer car tout le reste est MAGNIFIQUE et PATHETIQUE et je ne pourrais objectivement faire un choix.
J'adore cette auteure belge, empathique au possible, et qui écrit si bien !

Ce livre parle-t-il des cétacés ? Non ! Il parle des humains, des pauvres humains, des pauvres parents qui ont un enfant interné dans un hôpital psychiatrique.
Il parle de leurs visites hebdomadaires.
Il parle de leur souffrance inouïe.
Il parle de leur solitude, entourée d'autres solitudes
Il parle de leurs espoirs vite déçus par le corps médical, de leur culpabilité engendrée par ce même corps médical.
Il parle des traitements inhumains de ce corps médical.

Ce livre est noir, très noir. Désespéré. Mais ô combien juste, humain, et au plus près de l'émotion.
Magistral.
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Où se dirige ce troupeau, hétéroclite, mais uni par une même détresse, une même souffrance, un même espoir malmené , vacillant mais entretenu par la proximité des autres ? Il va vers cet endroit où leurs proches sont enfermés parce que leur vie , telle celle des baleines échouées sur les plages, n'a pas su s'adapter au bruit du monde, parce que ce bruit a poussé "leur stress à un paroxysme ingérable".
Ce sont ainsi différents parcours qui se donnent à lire via ce roman choral, entrecoupé par des discours souvent violents, révélant au passage les dysfonctionnements du système de santé. Nous voyons ainsi, par petites touches l'évolution des patients, celle de leurs aidants qui trimballent des sacs puant la pisse ou le sang, mais charriant surtout leurs minuscules victoires et leurs immenses échecs.
L'émotion  est toujours là, mais sans voyeurisme et c'est tout un pan, souvent caché, de la société qui se donne à voir dans ce roman d'une force inouïe et bouleversante . Un très grand coup de coeur. 




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Je ne me souviens plus comment je suis tombée sur ce livre...
Mais ce dont je me souviens, c'est l'évidence, il me le fallait!

"Dans L'Engravement, vous lirez à la deuxième personne les pensées qui agitent ce troupeau de visiteurs alors qu'ils vont et viennent. Inlassablement. Ceux-là ont assisté à la transformation parfois soudaine d'un intime, souvent d'un enfant, dont l'état mental a été jugé trop instable pour « la vie normale ".

On est toujours l'enfant de quelqu'un, de 2 personnes. Mais nous ne sommes pourtant pas forcément Enfant lorsqu'on se retrouve en HP ( hôpital psychiatrique).
C'est souvent l'Enfant qui est en nous, qui est si mal...
Oh oui, si mal...
Malade...

Et ceux qui les entourent, les parents, la famille, les amis, les enfants, comment vivent t il, la transformation souvent brutale, d'un proche qui sombre dans une Dépression Sévère ?

Eva Kavian à travers ce livre tente de faire témoigner, ceux qui arpentent cette allée entre le parking et l'hôpital psychiatrique.
"Tu sais, aujourd'hui, que d'autres parents, comme toi, en ont fini avec le bonheur, ils marchent dans la neige. Ils vont rendre visite à leur drame"
Entrecoupé d'interventions du corps médical.
Je souhaitais prendre la main d'Eva Kavian, pour peut-être mieux comprendre ceux qui vivent à côté des personnes qui sont au bord de ce gouffre.
J'espérais trouver des réponses mais rapidement je me rends compte que chaque vie, chaque malade, chaque proche est different et que ce livre ne sera qu'un plus à ma connaissance de ce sujet.
Et c'est énorme !
On sent le désarroi, l'incompréhension, la peur, l'impuissance de chacun...
On sent s'installer ce traumatisme désormais éternel pour chacun d'entre eux. Chacun à leur manière.
Ce livre est fort.
Au départ on est perdu, un peu perdu, beaucoup perdu,  on ne comprend pas bien, qui est qui, la construction, les petites interventions qui s'intercalent entre chaque témoignage.
Puis tout s'éclaire sans pour autant s'apaiser, tout devient plus facilement lisible, compréhensible.
On ne peut entrer de façon aisée dans un tel chaos.
Combien de fois ai-je eu envie de prendre la parole!

Un sujet complexe, un sujet si tabou, un sujet douloureux,
un sujet où les médecins naviguent à vue, où les patients naviguent à vue, où l'entourage navigue à vue...
Où on s'enlise si fréquemment, où il nous arrive de reprendre notre souffle, sans jamais savoir si cet Alien parviendra à nous entraîner aux fins fonds des ténèbres, un combat de chaque jour....
Et non! si un jour ces patients perdent le combat, je refuse d'entendre qu'il est peut-être mieux désormais, non!!!!!!
Demandons nous plutôt si finalement l'Amour n'est pas un devoir ?....
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« Vous êtes les compatriotes d'un pays non cartographié, personne ne vous connait, personne ne parle de vous. Quand vous quittez cette allée, quand vous rejoignez votre bus, quand vous remontez sur votre vélo, quand vos mains se retrouvent par-dessus le trottoir de la honte, plus personne ne vous reconnait, vous n'existez plus, la frontière elle est là, tracée autour du troupeau, là où l'écorce terrestre a craqué en profondeur, vous isolant définitivement de ceux qui ne vivent pas ça.

Le schéma de narration est original, c'est un narrateur qui s'adresse à des personnes qui font le même chemin régulièrement, elles vont d'un parking, d'un arrêt de bus jusqu'à l'hôpital psychiatrique où un de leurs enfants, grand adolescent ou adulte est hospitalisé. Ils sont ces compatriotes faisant partie du troupeau .

Il ne s'agit pas d'un roman autobiographique mais malgré tout nettement inspiré de son histoire personnelle, de son coeur blessé. Sa fille a passé du temps dans cet univers, et l'autrice est une de ces mamans, parents, proches, qui font les aller-retour vers l'établissement, qui viennent rendre visite à leur enfant en souffrance.

Qui sont ces baleines engravées sur la plage ? Ce sont ces jeunes en pleine décompensation, en souffrance psychique, en pleine dépression, qui souvent sous l'effet des médicaments, des neuroleptiques, des anti-dépresseurs, des psychotropes, marchent et vivent au ralenti, prennent énormément de poids, trouvent refuge dans la nourriture, le chocolat, les chips.

Ils n'arrivent pas à fonctionner dans la norme, la société leur enjoint à être beaux, performants, intelligents, … Tous ne sont pas à même de faire face à une telle pression.

Les tranches de vie relatée par le narrateur ne sont pas nominatives, on ne sait jamais vraiment de quel jeune il s'agit, mais les récits s'enchaînent et par un fait, une action, un prénom parfois, on fini par reconstituer les différents cercles familiaux qui évoluent autour de ces jeunes.

Chaque chapitre est constitué de quelques pages relatant un aller et un retour et entre ces pages l'autrice insère une page blanche ne comprenant qu'une ou deux phrases, souvent dénuées d'affect, sentences lapidaires prononcées par un médecin, un soignant aux parents. Non pas qu'ils soient sans empathie ou sans coeur, mais ils ont plus de recul que les parents directement affectés, et puis ils en côtoient tellement, ils sont dans le factuel alors que les parents sont dans l'émotionnel, évidemment.

Les parents se croisent, s'observent, certains se font parfois un sourire, mais ne nouent pas de sympathie particulière. Pourtant ils sont tous, seuls, face au désarrois, voire au désespoir de leur enfant. de semaine en semaine, les jeunes quittent le centre hospitalier, parfois pour un simple séjour dans leur famille, parfois pour plus longtemps. Parfois aussi parce qu'ils ont réussi à mettre fin à leur jour.

C'est un texte, roman, qui est empreint d'une humanité folle, de souffrance et de questionnement. J'ai beaucoup pensé en le lisant à une jeune de mon entourage, amenée à effectuer régulièrement des séjours dans un centre de ce type.
Au texte de Stromae « l'enfer ».
Et à quelques jeunes dont j'ai appris le geste fatidique.

J'ai aussi beaucoup pensé à moi en tant que maman, qui heureusement, jusqu'à présent, n'est pas confrontée à ce genre de situation, mais ces pathologies peuvent arriver à toustes et à tout moment. Il y a énormément d'amour dans ce livre, j'ai été tellement émue par ce jeune qui demande l'euthanasie pour qu'enfin son mal-être cesse, et par cette maman qui comprend que cette fois ci la grosse bêtise de sa fille est plus qu'un appel au secours …

Ce n'est pourtant pas un texte qui ne tombe ni dans le misérabilisme ni dans le pathos, il y a aussi des jeunes qui arrivent à s'en sortir, et ce sont ces victoires là dont on veut se souvenir.
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Citations et extraits (8) Voir plus Ajouter une citation
— Nous avons une approche comportementale. Nous ne pouvons accepter les passages à l'acte. Dans la société c'est pareil. Si un patient dépasse les limites acceptables, il va en section fermée. S'il met sa vie en danger il va en isolement. C'est comme cela que petit à petit ils vont comprendre. En isolement les contacts avec l'extérieur sont exclus. En section fermée, ils ont accès à leurs portables de seize à dix-huit heures. Comprenez bien. Il cherchent à dépasser les limites. Borderline. État frontière. Nous donnons un cadre, des limites. À ce jour l'approche comportementale est la plus efficace pour ses patients.
Eva Kavian, L'engravement, La contre allée, 2022, p. 109.
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Vous êtes trente ou vingt, parfois dix, peu importe, vous rampez sur l'allée, écrasés, vidés, fautifs, égarés sur le chemin que vous connaissez si bien. Pas de chance, aucun échafaud n'est dressé au bout de l'asphalte. Il y a un parking, un arrêt de bus, une rue que personne ne veut habiter, et votre vie, qui continue. La voilà la sentence : Vivez avec.
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Si un patient dépasse les limites acceptables, il va en section fermée. S’il met sa vie en danger, il va en isolement. C’est comme cela que petit à petit ils vont comprendre.
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Un infirmier fouille ton sac à main et le cabas avec les vêtements propres. Il enlève les cordons, les ceintures. Te rend le sac, comme si cette situation ne te défonçait pas les tripes. Tu ne dis rien. Si tu parles tu pleures. Ou tu deviens méchante. Et tu ne veux pas que ça retombe sur Loreen. Tu l’as repérée du coin de l’œil. Elle est couchée sur le sol de la section fermée, elle gratte le film plastique opacifiant posé sur la porte, tu vois son œil, collé à la vitre, sa langue qui pend dans l’effort, qui bave. Elle gratte. Comme un chien. L’infirmier a vingt clés à son trousseau mais il sort la bonne au premier essai, il t’ouvre. Tu as droit à deux heures et tu as envie de disparaître.
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Bonjour mon chéri (c’est bien ou pas bien de dire mon chéri à son fils de vingt-trois ans ?) je suis contente de te voir (je ne suis pas oppressante, là ?) comment vas-tu aujourd’hui (intrusive ?) Papa n’a pas pu venir mais il t’embrasse (c’est vrai qu’ils sentent quand on ment ?) ne t’inquiète pas je n’ai plus mal (ne pas dramatiser, de toute façon « il ne ressent pas les choses comme vous »). Tu hésites. Est-ce un jour où tu peux le toucher ? Vos corps se rapprochent, mais vous n’allez pas l’un vers l’autre. L’autre en toi n’existe plus pour lui. Ça veut dire quoi ? Et l’autre en lui, c’est qui ? Il est devenu qui ? Quoi ? Pourquoi ? Pourquoi lui ? Toi ? Tu l’as porté dans ton ventre, tu as marqué chaque centimètre de sa croissance sur l’embrasure de chêne, tu as raconté les histoires, chanté les comptines et un jour il est devenu fou.
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Videos de Eva Kavian (2) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Eva Kavian
Morgane 14 ans a lu Tu es si belle d'Eva Kavian, paru chez Oskar éditeur. Elle en parle dans ce nouveau SpeedBook. ------------------------------------------ Abonnez-vous à notre chaîne Youtube : https://tinyurl.com/ya2scuvg
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