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EAN : 9782841725922
544 pages
L’Atalante (21/06/2012)
4.12/5   228 notes
Résumé :
Le réchauffement climatique s'est emballé au point que la Terre devient une planète hostile à la vie. Partout la civilisation s'effondre, les hommes n'en ont plus pour longtemps, et ils le savent.
Va-t-on, comme Pradeesh Gorayan et sa famille, dans l'enclave sous dôme de Genève, poursuivre notre train-train comme si de rien n'était ?
Va-t-on, comme Mercedes Sanchez, en Espagne, se réfugier dans la religions et attendre des Anges venus du ciel qu'ils no... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (49) Voir plus Ajouter une critique
4,12

sur 228 notes
Ce livre m'a tout tourneboulé.
Un roman « apo », me direz-vous ! Un de plus. C'est la mode, ces derniers temps. On aime à se faire peur. J'en ai déjà quelques-uns à mon actif. Des plus ou moins bons. Mais « Exodes », je vous le certifie, a résonné fort à mes oreilles. Il ne m'a pas épargné.
Je l'ai trouvé diaboliquement réaliste. Car « Exodes », c'est notre monde multiplié par 100. le réchauffement climatique a atteint un point de non-retour, et transforme des continents entiers en déserts brûlants. Les algues sont hautement toxiques, et les méduses ont pris possession des océans dont les vagues grignotent implacablement les terres. de monstrueux ouragans se déchainent et caracolent tels des hordes de walkyries déchainées. Une nouvelle écologie s'installe dont les Hommes sont exclus. Parlons-en des Hommes ! de pauvres hères accablés par la chaleur et la soif qui survivent dans les ruines du glorieux passé. Des misérables, hagards, dépenaillés, qui vont, qui viennent, à la recherche d'un peu de paix. Pour juste se laisser vivre avant la fin. Des Hommes sans rêves, sans avenir, qu'ils subsistent sous les éléments déchainés ou qu'ils soient, transis de peur, protégés sous un dôme illusoire.
Tous les personnages sont forts. Certains sont touchants, avec leur reste d'espoir et d'humanité. D'autres, qui courent après leur propre folie destructrice, sont effrayants. D'autres encore, sont pathétiques, quand ils font leurs petites affaires avec les débris de l'humanité.
C'est un thriller haletant ; une danse macabre âpre, acharnée, féroce, cruelle…
« La chute finale dans la fournaise ».


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A l'heure où rien ne va plus, nous choisirons : se battre (dans le vide ?), fuir (au nord ?), se tuer. Les jeux sont faits.

En Belgique, les étés caniculaires deviennent d'une dangereuse banalité. La Méditerranée n'attire plus, on veut de la fraîcheur.
Les grands de mon âge se souviennent avec nostalgie des hivers enneigés d'il y a 20 ans, des étés frisquets propres à notre plat pays. Pour nos enfants, c'est trop tard, ce monde n'existe plus.

Je voulais lire un roman à forte résonance climatique et écologique. Je me suis souvenue du retour de mon ami Éric, et j'ai sauté sur ce livre alors que la SF n'est pas mon domaine. Pourtant ce genre se prête à merveille pour anticiper le futur et nous en mettre pleins les yeux de ce que pourrait devenir notre monde si nous continuons à le piétiner.

Exodes, prix Utopiales de 2013 dessine un monde apocalyptique où la terre exploitée à son maximum n'est plus qu'un monde hostile. Il n'y a plus que deux saisons, l'hiver les températures avoisinent les 30 degrés, l'été, ça devient un four, irrespirable, incultivable. Les torrents, les trombes d'eau, les méduses par million, les maladies, l'humain s'est auto-exterminés.

Dans ce contexte, quelques enclaves abritent des nantis qui vivent reclus sous un dôme, loin de la réalité extérieure. Les jeunes se droguent à longueur de journée car ils n'ont aucun d'avenir. Rêver n'existe plus. Ou dans les bad trip.

Dehors, il y a les outers, quelques malheureux qui tentent de survivre, la peur au collet. On va suivre ici plusieurs personnages qui sont autant d'exemple d'adaptation forcée. Paula Rossi et ses deux jeunes enfants. Paula a quitté son Italie pour rejoindre la France ou elle espère trouver un médecin pour soigner son jeune fils gravement malade. Mélanie, qui dans sa petite ferme délabrée sauve les quelques rares animaux blessés.
Mercedes qui veut rejoindre le Vatican pour se rapprocher de Dieu.
Olaf et Karen un couple au nord qui veulent fuir au sud.

Ils ont tous un seul but : sauver leur peau et trouver ailleurs ce qui est mort chez eux. Mais les dangers affluent. Les Mangemorts raffolent de la viande humaine, les Boutefeu n'ont qu'une idée en tête : exterminer les derniers humains responsables du massacre mondial.
Sans compter, les pilleurs, les voisins, plus personne n'aide gratuitement, c'est chacun pour soi, on crève de chaud, de soif, de faim, l'humain s'est déshumanisé par peur et nécessité faisant loi.

Utopie ou prémonition ? Exodes est un roman passionnant qui glace le sang. L'histoire n'est jamais alourdie par des informations théoriques trop pédagogiques mais enrichie d'exemples concrets basées sur la recherche scientifique.

Les jeunes ont peur, Greta Thumberg hurle sa colère, les climatologues tirent la sonnette d'alarme, les ministres dans leur jet privé boivent du whisky en riant, des arbres centenaires sont déracinés pour 5 jours de fête foraine, et un jour des livres comme Exodes risquent bien de virer de genre, ce ne seront plus des livres SF mais des romans réalistes.
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Pourquoi je l'ai choisi:

Je souhaitais connaître enfin cet auteur de Science-fiction, et bien sûr la couverture et le résumé ont fini de me convaincre à tenter cette aventure bien réchauffée à point. Je tiens à remercier chaleureusement donc, le site Babélio et son opération Masse Critique, qui m'a permise de découvrir un gros coup de coeur littéraire, ainsi que les éditions Folio pour l'envoi de ce livre!
Ce que j'ai ressenti:…Un sombre exode vers un coup de coeur…

Six destins qui nous racontent l'Europe en post-apocalyptique, cela nous donne 600 pages d'une intensité incroyable, un livre qui ne s'oublie pas, une lecture qui marque les consciences.

« A croire que se défoncer est devenu plus vital que manger. »

Qu'on se prenne d'affection pour cette douce Mélanie, qu'on allume le feu comme Fernando, que l'on se prosterne devant les anges comme Mercedes, que l'on navigue sur les flots comme le couple Eriksson, que l'on protège ses enfants avec une rage maternelle convaincante comme Paula, que l'on se batte pour la survie de l'humanité comme Pradeesh: suivre ses personnages, c'est traverser des terres hostiles, des mentalités ravagées, des corps meurtris avec pour seul objectif de rentrer, à l'abri, dans les dômes, et échapper à l'enfer sur Terre.

« Mais comme dit le proverbe, si le pire n'est jamais sûr, le meilleur l'est encore moins. »

Mais quel roman!!!!Sombre et suffocant, il n'en reste pas moins que c'est une lecture qui vous imprègne! Un triste constat de la nature humaine qui ne reflète que trop bien, des probables conséquences que ces humains, sans foi ni loi, font subir aujourd'hui à la Nature. On reste abasourdis de ce monde chaotique décrit, fatal résultat du réchauffement climatique, et ses lieux de perdition deviennent le théâtre des pires atrocités. La fin des temps a sonné dans ses pages, et l'heure n'est plus à l'espoir, mais en même temps, les Hommes l'ont bien cherché…Jean-Marc Ligny se permet donc de leur faire subir toutes sortes de châtiments pour leurs comportements irresponsables actuels, en leur faisant entrevoir dans ce roman d'anticipation, une évolution future qui pourrait advenir: du déchaînement météorologique, en passant par la faune mutante et une flore inexistante, les humains vivent un vrai calvaire…Et le pire chez eux, va en ressortir…Les chocs seront empreints d'une incroyable violence, et le moindre rapprochement sera teinté de fatalité implacable…

« Maintenant, c'est la vie entière qui est une catastrophe, et toute l'humanité qui en est victime. »

Dans la mesure, où l'on ressent de plein fouet, toutes sortes d'émotions diverses, mais ô combien bouleversantes, que la plume de cet auteur et son intention sont d'une grande intelligence, je peux clairement affirmer que ce livre est un gros coup de coeur. Je me suis attachée à chacun de ses personnages, même les plus sombres, je ne voulais pas sortir de ce monde, pourtant hostile, et j'ai pris un grand plaisir à faire durer cette lecture, pour mieux l'apprécier. Ses Exodes nous font voyager, autant que trembler: c'est tout le bonheur de se caler tranquillement un bon pavé de Science-Fiction…Je le recommande avec toute l'intensité d'un Boutefeu…

« Ce qui était encore apocalyptique il y a vingt ans est devenu banal aujourd'hui. »

Meilleurs Moments du livre:
•J'ai adoré la vie auprès de Mélanie, sa douceur, son engagement. J'ai admiré sa force dans sa tendresse, et j'ai eu un énorme coup de coeur pour ce bout de femme. C'était ma petite lueur dans ces ténèbres.

« Et maintenant qu'elle a arraché un Boutefeu à sa propre folie, elle compte bien ne pas en rester là: elle va lui apprendre les gestes qui sauvent, les gestes qui soignent, les gestes d'amour. «
•Le bateau du couple Eriksson qui traverse les villes allemandes. Je pense que c'est vraiment mon passage préféré du livre, j'ai visualisé à la perfection cette intrusion navale dans les rues, autant dire que l'auteur a une vraie force pour ouvrir notre imaginaire et donner une scène saisissante…

« Peut-être est-il mort, il ne s'en est pas rendu compte avec ce capharnaüm, et maintenant il chevauche l'écume de la mer en compagnie des dieux… «

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Depuis longtemps, je ne m'étais pas plongé avec autant de plaisir et de stupeur dans un long récit de science-fiction.
La science-fiction, la bonne, provoque à tous coups plaisir et stupeur.
Et "Exodes"est un récit stupéfiant.
Il projette dans le futur, dans un de ces glauques futurs qui n'appartient plus tout à fait à la littérature, les problèmes qui se posent à nos sociétés depuis un moment déjà.
Cela commence par des nantis terrorisés, des gangs de pillards sans foi ni loi, des camps de réfugiés hagards et des migrants par millions sur les chemins de l'espoir ...
"Exodes" résonne, aujourd'hui, comme un pressant avertissement.
C'est un récit bien imaginé, un récit plein d'humanité et parsemé d'inhumanité, un récit pessimiste mais non désespérant.
Mais c'est, aussi et surtout, un roman, un bon, un excellent roman qui, plus moderne, plus abouti, se place dans la lignée de "Malevil".
Il est articulé en quatre parties.
La première parcourt un monde apocalyptique, sombre héritier du notre.
Elle présente une galerie de personnages aussi crédibles qu'attachants.
Le livre est écrit avec brio.
Le récit s'installe dans la première puis se déroule avec efficacité dans les trois dernières parties.
Jean-Marc Ligny est un bon écrivain, doublé d'un technicien redoutable.
Il s'empare de son lecteur et ne l'abandonne, le souffle coupé, qu'à l'épilogue de son puissant récit.
Je le remercie de m'avoir offert son roman.
Je fais désormais partie de ses lecteurs.
Je remercie aussi les éditions "Gallimard", pour m'avoir adressé ce livre, mais aussi pour l'exigence et la qualité de leurs choix et de leurs collections. Elles m'ont donné tant à lire depuis toutes ces années ...
Et je remercie, forcément, nos amis de la "masse critique".
Mais ça, ils s'en doutaient un peu ...
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Quatre ou cinq étoiles ? J'ai longtemps hésité, mais ce roman d'anticipation qui nous miroite le monde de demain mérite bien les cinq, pour l'écriture qui sait restituer de manière vivante et visuelle un univers que nous souhaiterions encore loin, très loin de notre quotidien...mais pour combien de temps encore ?
Et c'est bien ce que Ligny sait faire...nous faire (très) peur dans ce roman extrêmement noir. J'ai mis beaucoup de temps a terminer ce livre...arrivee a la moitié du roman, je suis allée faire le plein de livres d'images a la bibliotheque municipale pour avoir des "bulles d'air" en provision... A force d'être balayée par des tempêtes de sables ou de l'eau, des ouragans, de trainer les pieds dans le sable omniprésent sous un soleil accablant, de me mesurer a la soif, la faim, les maladies, les insectes et autres parasites...et pire...devoir me confronter quotidiennement a la pire menace qui existe : les hommes qui n'ont plus grand chose en commun avec ce qu'on appelle "l'humanité"... Ces hommes et femmes qui pour survivre, n'ont plus que les moyens les plus primitifs...brûler, manipuler, voler, trucider, tuer...et pire encore... Ne plus pouvoir contempler la nature, dilapidée par les prédateurs qui n'ont que "hommes" de nom (!)...parce que il ne restera plus rien...L'auteur ne m'a pas permis de lire un livre, il m'a permis de le vivre ; vivre et ressentir aussi ce que vivent et subissent une poignée d'hommes et femmes qui affrontent des conditions de vie innommables...
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Citations et extraits (41) Voir plus Ajouter une citation
Le type qui les a amenés là depuis un bled paumé dans le désert, à bord d'un engin foutraque et bricolé, les a déposés non loin des restes d'un échangeur autoroutier où est installé un campement à moitié troglodyte, à l'abri précaire des ponts et tunnels effondrés. La route passe en plein milieu. Alentour s'étend une morne plaine, stérile et vide, parsemée de vestiges d'un peuplement jadis plus dense : squelettes d'usines, bâtisses en ruine, traces de jardins. Des reliques de la guerre, aussi : cratères de bombes, tas de décombres, pans de murs calcinés. Juste avant l'échangeur, la route franchit une petite ravine où pousse une végétation chétive, abreuvée par un mince filet d'eau sinuant entre les pierres. D'où le campement, établi à côté de cette ressource aussi précieuse que volatile.
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Le reste de la traversée de la Hollande ne constitue qu'une morne platitude liquide, rompue ça et là par des parcs d'éoliennes dressées hors des flots tels des arbres métalliques ( la plupart décapitées par les tempêtes ), des digues qu'Olaf peut franchir parfois mais doit longer le plus souvent jusqu'à trouver un canal ou une écluse, des canopées décharnées de bois déjà minéralisés, des ruines pointant comme des chicots, des ponts ou échangeurs d'autoroutes à moitié engloutis qu'Olaf franchit ou contourne avec prudence. Parfois, il traverse des lacs ou suit des canaux, ce qui constitue un moment de répit, n'étant plus obligé de surveiller constamment le sondeur pour savoir où se situe le fond de cette mer grisâtre, quels obstacles invisibles il risque de heurter. Tout cela est figé dans une totale immobilité, comme si la mer aussi était morte, empoisonnée d'avoir envahi ce pays totalement construit de main d'homme.
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Leçon numéro quatre, jeune homme : personne n'est maudit pour ce qu'il fait, ni béni non plus du reste. Nous sommes totalement responsables de nos actes de et de leurs conséquences. Si tu brûles ta maison, c'est ta seule et entière faute si tu ne peux plus y habiter. Si c'est une tornade qui la détruit, ce n'est pas de chance pour toi, mais la tornade n'avait rien contre toi personnellement : elle ne faisait que passer par là, et ta maison se trouvait juste au mauvais endroit. En revanche, si tu crées un sanctuaire, un havre de paix qui permet à un certain nombre d'animaux de vivre et prospérer dans les meilleures conditions possibles, alors la nature te le rendra d'une façon ou d'une autre : tu vas contribuer à rétablir un écosystème qui, indirectement, profitera à ton jardin. Ton action bénéfique aura des conséquences bénéfiques, pour toi et l'environnement dont tu fais partie. Tu comprends, Fernando ?
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- J'ai des dossiers remplis de familles désespérées, renchérit Carmilla, une collègue de Karin (une italienne plantureuse, toujours engoncée dans des tenues sexy trop serrées). De gosses qui meurent d'une simple infection, qu'on pourrait facilement soigner ici. De femmes enceintes et anémiées, obligées de se prostituer pour se nourrir. De bébés dévorés par les Mangemorts si on ne…
- Carmilla, nous ne pouvons pas recueillir toute la misère du monde, la coupe le directeur en écartant de nouveau les bras.
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À l’abri du monde hostile
Comme chaque soir, Pradeesh Gorayan vérifie que tout est en ordre dans son labo avant d’en fermer les portes pour rentrer chez lui. Il a laissé partir son assistante Mathilda un peu plus tôt afin de faire sa tournée de contrôle dans le calme et la sérénité – c’est presque un rituel chez lui. Les paillasses nettoyées, les produits rangés à leur place, les cultures de cellules souches actives et bien isolées… et les souris, ses chères souris, en vie et en forme autant que possible. C’est dur d’obtenir des rongeurs de nos jours – du moins génétiquement purs -, il ne peut se permettre de les gaspiller. Jusqu’à présent, ses deux groupes de sujets tests, Gilgamesh (les témoins) et Mathusalem (les traitées), se comportent de la manière prévue par le protocole.
En passant, Pradeesh s’arrête devant l’une des fenêtres du premier étage et jette un oeil sur le lac – ça aussi, c’est un rituel. Le lac s’étend à l’extérieur du dôme, et son aspect lui indique souvent le temps qu’il fait dehors. Quoique, aujourd’hui, il n’ait pas besoin de l’observer pour cela.
Car dehors c’est l’enfer.
Un orage apocalyptique assorti d’une averse diluvienne est en train de hacher menu la surface du lac zébrée d’éclairs dantesques, qui éclatent sur le dôme en gerbes crépitantes. Enfin, « apocalyptique » n’est pas le mot correct – il faudrait inventer de nouveaux superlatifs : ce qui était encore apocalyptique il y a vingt ans est devenu banal aujourd’hui. Le plus étrange, c’est le silence : à peine Pradeesh perçoit-il, en tendant l’oreille, les grondements sourds du tonnerre et le vaste bruit blanc de la pluie. Les fenêtres à double vitrage de l’Observatoire atténuent certes un peu le son, mais c’est surtout le dôme – sa triple épaisseur d’altuglas, sa couche de fréon, ses nanofibres de carbone – qui constitue l’isolant idéal contre le bruit, la pluie, le vent, la chaleur, la poussière… contre le monde hostile au-dehors.
Gorayan frissonne à cette pensée, s’efforce de la chasser tandis qu’il poursuit son inspection. Mais elle parasite toujours son esprit, même quand il travaille ou qu’il est bien à l’abri dans sa bulle, entouré des siens… Comme tout le monde, suppose-t-il. Du moins ceux qui ont un abri.
Sa ronde achevée, il ferme soigneusement à clé la porte du vieux bâtiment (les alarmes et verrouillages électroniques sont hors d’usage) et descend les ancestrales marches de pierre. Au pied de de l’escalier, il se retourne et lève la tête pour le contempler : son porche cintré, sa façade grise, ses hautes croisées, son toit d’ardoises et surtout son antique coupole de zinc en forme de cloche qui lui vaut ce nom d’Observatoire – Physikalisch-Meteorologisches Observatorium, pour être précis. Une fonction perdue depuis fort longtemps, bien avant qu’on y installe un laboratoire de biologie génétique. Pradeesh apprécie cet endroit chargé d’histoire, ce vénérable temple du savoir, fort imposant ainsi nimbé d’éclairs, telle la demeure de Jupiter.
Ce qu’il n’aime pas, c’est le boulot qu’il y fait.
Il rejoint la Dorfstrasse, parcourt à pied les six cents mètres le séparant de sa maison, sous l’éclairage doré des photophores que les éclairs déchirent violemment. Ces flashes livides éclaboussent le réseau d’entretoises formant une immense toile d’araignée au-dessus de sa tête. La pluie cingle le dôme en rafales, produisant ce vaste bruissement qu’il perçoit mieux dans la rue. Les roulements de tonnerre en continu provoquent une sorte de saturation infrabasse qu’il ressent au creux du ventre. Le dôme lui-même produit en contrepoint un bourdonnement grave, vibrant de toute sa structure sous les assauts du vent.
Tout cela n’effraie pas Gorayan. La structure est conçue pour résister à un ouragan de force 12. Elle peut supporter une avalanche, un glissement de terrain, un incendie ou un séisme (jusqu’à un certain point). Les variations brutales de température ont peu d’effet sur elle. Long de quatre kilomètres et large de sept cents mètres, ancré sur les contreforts des montagnes environnantes, c’est l’un des plus grands dômes d’Europe, englobant la ville de Davos dans son ensemble (mais pas le lac, ce que d’aucuns regrettent). Cette taille gigantesque n’empêche pas Pradeesh d’avoir l’impression de vivre dans un bocal. Il n’est pas le seul, toutefois la plupart considèrent que c’est un bien, un acquis, un privilège. Qu’ils ont de la chance de vivre dans l’enclave, à l’abri du monde hostile. Lui n’en est pas si sûr, malgré des conditions de vie incomparables. Il trouve malsain d’être maintenu dans l’ignorance, de ne pas savoir ce qui se trame à l’extérieur. Il n’est pas certain, en tout cas, que ça pourra durer longtemps comme ça, malgré ce dôme soi-disant à toute épreuve.
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Videos de Jean-Marc Ligny (11) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Jean-Marc Ligny
Désormais l'eau de pluie est devenue impropre à la consommation humaine, polluée par les particules chimiques éternelles jusque dans les endroits les plus reculés du globe, tandis que la fonte des glaciers compromet l'abondance ou la régularité des précipitations. Nous atteignons la limite de l'eau. Bientôt, sinon dès aujourd'hui, les réfugiés de la soif se masseront aux frontières des nations épargnées alors que nous peinons à recycler nos eaux usées. L'or bleu est déjà coté en bourse et les multinationales tentent de se l'approprier au détriment des populations. L'eau, bien matériel de l'humanité ?
Avec : Jérôme Harmand, Jean-Marc Ligny, Marguerite Imbert Modération : Nicolas Martin
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