Une couverture qui interpelle, un titre qui évoque la Sérénissime, une quatrième de couverture qui donne envie d'ouvrir le livre. C'est ainsi que le Passeur des Lagunes s'est imposé à moi. Il y a des livres comme cela que vous n'attendez pas et qui deviennent évidents. Sans faire une mauvaise parodie, la tentation de
Venise a été incontournable.
J'avais déjà une expérience de lecture sur
Venise à travers
Hugo Pratt pour la BD et Dona Léone pour la littérature policière. J'avais flashé sur le travelbook de
Jiro Taniguchi. Et là j'ai découvert une autre partie de
Venise, une
Venise secrète, peut-être celle des Vénitiens.
D'entrée les auteurs évoquent l'Organisation qui contrôle
Venise. Nous découvrons la lagune. le père de Paolo fait découvrir les secrets oubliés de la lagune à son fils. Il lui demande aussi de faire des observations pour lui. Mais le père de Paolo disparaît et son fils le recherche.
Les recherches de Paolo vont nous mener au coeur de
Venise et de la vie des vénitiens. Nous découvrons aussi la vie de Paolo et de son groupe d'amis. Ils sont tombés dans des combines et trafiquent en lien avec l'organisation mais il va s'avérer que cela peut-être dangereux, l'organisation pouvant se montrer sans pitié. Ahmad, l'ami de Paolo, le découvrant à ses dépens.
La lagune est propice aux trafics mais aussi à dissimuler des autres vies, la vie de ceux qui veulent être oubliés de
Venise. La lagune est divisée en lagunes et on peut circuler d'îles en îles mais pour cela il faut connaître les pièges et les secrets des lagunes. La lagune permet aussi de cacher des réfugiés qui sont dans l'attente de passer ailleurs en Europe.
L'histoire de la lagune ou des lagunes, c'est une histoire et une tradition de passeurs. Dans la famille de Paolo a toujours été dans la culture du passage des traditions. Tradition de la connaissance des lagunes et de la circulation au sein de celles-ci, circulation si différente de celle sur les canaux traditionnels de la ville des Doges. le grand-père a formé le père et celui-ci a formé Paolo et lui a laissé les carnets reprenant tous les parcours à connaître. Ce sont des taiseux qui ont du mal à dire les choses, à se dire les choses. Paolo sera aussi un passeur pour son grand-père puisqu'il va favoriser le dernier voyage de celui-ci, il va lui permettre de passer.
On découvrira aussi que le père de Paolo s'était racheté une conduite en favorisant le passage des réfugiés.
Ce roman graphique est un autre moyen pour parler de
Venise qui reste en arrière plan. Les auteurs nous font circuler sur la lagune, c'est une autre vision. Les couleurs sont grises, les décors sont parfois un peu sordides, c'est l'envers du décor loin de la
Venise des touristes même si les auteurs nous montrent au hasard des cases des bateaux de croisière. Les décors, les couleurs sont oppressants, le soleil est absent, sauf dans les dernières cases où Paolo semble partir vers la lumière.
C'est une histoire complexe qui montre la complexité de la
Venise des lagunes. On est très loin de la ville du Carnaval, du Pont des Soupirs ou de la place
Saint Marc mais on est très près d'une autre
Venise, celle de personnes qui cherchent à survivre et à faire vivre les traditions.
C'est une belle émotion de lecture qui donne une envie de retourner à
Venise et de sortir des sentiers battus, des canaux connus pour aller au plus près de la
Venise profonde et de ses habitants.