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3,77

sur 1494 notes

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Ce roman porte l'ADN de tout ce que j'aime chez Thomas Mann : la faculté de multiplier les regards sans rien perdre en acuité. J'ai aimé l'exigence et la précision du style au service d'un récit sur une rencontre fortuite qui déclenche un besoin d'évasion du coeur, de donner libre cours à ses fantasmes et à ses penchants inconscients.
L'auteur pointe la remise en question de notre rapport à la vie lorsqu'on arrive à l'automne de nos existences et qui prend ici des airs de tragi-comédie grecque.

Thomas Mann traite les thèmes qui lui sont chers avec des références à d'autres oeuvres et à la beauté comme un étendard sous lequel on devrait se battre, comme un idéal à atteindre. Il a volontiers reconnu la part autobiographique de cette nouvelle.

Il a les bons mots pour décrire l'ivresse des sens lorsqu'on oublie de refréner nos sentiments et que mus par la beauté qui déclenche la passion nous renonçons à la raison et à la dignité.
Seule une passion dévastatrice permet le dévergondage du coeur et l'appréhension honteuse d'un comportement non conventionnel. La passion, à n'importe quel âge, pour n'importe quel être, oblitère le sens critique, prend les rênes de nos pauvres âmes en peine en otage et fait de nous de simples marionnettes.

Venise comme toile de fond de cet égarement amoureux est une parfaite maîtresse de maison. La « Serenissima » souvent idéalisée par la beauté de son art, de sa musique et de son éclat cache dans ses profondeurs putrides la mort, ainsi comme le personnage principal essaye de cacher ses penchants homosexuels.

Oscillant entre comédie romantique et drame doux-amer, La mort à Venise est un classique intemporel.


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C'est admirablement bien écrit. Peut-être même, trop bien écrit. Ce chef-d'oeuvre, unanimement reconnu, m'a laissée à l'extérieur.
Je l'ai lu sans émotion particulière, pratiquement de manière scolaire ; revenant trois fois sur certains paragraphes pour en saisir toute la portée. Je comprenais la signification des mots mais ne captais pas immédiatement le sens des phrases.
Ce n'est qu'à la moitié du livre que je suis parvenue à m'accoutumer à ce style sophistiqué. Quoique... "accoutumée"... je dirais plutôt, résignée. Résignée à ne pas être certaine d'avoir compris ce que je pensais comprendre.

Il n'en ressort pas moins que, à la toute fin, j'ai eu le sentiment d'avoir passé un moment d'exception s'apparentant à celui que l'on peut ressentir à la contemplation d'une toile de maître dont la qualité de chef-d'oeuvre est indiscutable.
Et pourtant... même le plus grand des chefs-d'oeuvre ne résonne pas en chacun de nous avec la même intensité.
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Aschenbach n'est vraiment pas le genre de type qu'on accueille avec une bourrade dans le dos, ni qu'on a forcément envie d'inviter à boire une bière pour parler de tout et de rien. Non non. Il est plein de principes, il a un haut sens du devoir, il s'est construit à la force de la discipline, il est fier de mériter ce qu'il est et il prend ça bien au sérieux.

Seulement voilà, cet homme en fer forgé a sa petite faiblesse et il la découvre lors d'un voyage à Venise en la personne d'un petit garçon de 14 ans. Il est joli, blondinet. Çà lui fait tourner la tête, tant et si bien qu'il ne peut s'empêcher de le suivre partout, dans une Venise putréfiée, quand il ne peut pas l'épier tranquillement, avec un soupçon de culpabilité, de sa chaise longue de son hôtel. On l'aura compris ce jeune éphèbe devient son obsession inavouable. Le désordre s'installe dans l'ordre qu'il a mis tant de temps à établir, la déchéance le guette, l'artiste se meurt. Le beau est destructeur, il passe outre les convenances.

J'ai failli abandonner aux premières pages à cause du style. J'ai eu du mal à faire la transition avec le précédent ouvrage que j'avais lu qui était plus accessible (les phrases faisaient moins de 10 lignes:p). Passé le cap de la description de cet austère personnage la lecture a été plus facile sans pour autant qu'elle me transporte. Je ne nie pas la qualité littéraire de l'ouvrage, loin de là, parce que Thomas Mann a l'art de rendre beau et humain cet amour platonique, mais je n'ai pas été pris dans le récit malgré des descriptions assez fascinantes de Venise et surtout de l'âme humaine. Je suis passé à côté cette fois, peut être à une prochaine M. Aschenbach...
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Que l'on parle de l'oeuvre (littéraire) de Thomas Mann ou de celle (cinématographique) de Visconti lorsque l'on évoque "La mort à Venise", il s'agit incontestablement d'un chef d'oeuvre.

Néanmoins, je vais limiter ma critique à l'oeuvre littéraire. Chef d'oeuvre c'est certain mais je dois reconnaître que j'ai eu beaucoup de mal à rentrer dans l'histoire parce que le style employé par l'auteur m'a assez dérangé. C'est certes bien écrit mais les phrases sont longues, le texte peu aéré, souvent contemplatif, et contenant de longues digressions qui font perdre le fil d'un récit en réalité assez court en terme de pages.

"La Mort à Venise" est donc le récit sinon la chronique d'une mort annoncée d'une part dans le titre mais également, d'autre part, dans le dessein de l'artiste et principal protagoniste qui semble entièrement se vouer à elle, mais qui n'est pas sans de nombreuses contradictions ou noeuds gordiens. Par exemple, la mort est souhaitée et dans le même temps il y a une volonté réelle de la fuir.

Ce qui est certain, c'est que la Mort apparaît comme un personnage à part entière dans cette oeuvre : aussi bien officielle que masquée (à l'image du gondolier qui apparaît comme un passeur d'âmes, ou encore de l'aveuglement d'Aschenbach pour un jeune garçon qui peut s'entendre de la violation d'un interdit, le Mal incarné par l'épidémie de choléra qui sévit, etc.).

Avec cette oeuvre magistrale, Thomas Mann raconte ainsi par le biais d'un récit en lieu clos (un hôtel dans la cité de Venise), une passion amoureuse soudaine d'un artiste en villégiature pour un jeune éphèbe, et à travers ceci, la décadence du début du 20ième siècle, brisée par un fléau, le choléra. Il souligne également l'attrait qu'exerce la beauté physique réelle d'un jeune garçon sur le héros qui, concevant, dés lors que la beauté rêvée peut donc être dépassée s'avoue vaincu et constate que la mort est pour lui inéluctable.

Au final, un récit court, triste mais cependant intense qui mérite d'être lu, bien que délicat d'accès à première vue.



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J'ai été surprise du tout au tout par ce court roman, m'étant fait des idées par avance. Je m'attendais à une écriture limpide et sèche, allant droit au but comme souvent dans les textes courts et modernes, mais ce texte-ci reste alambiqué, complexe et exigeant... ce n'était pas le bon moment pour le commencer, vu mon état de fatigue.
En soi, je devrais relire la plupart des passages concernant les idées d'Aschenbach - écrivain vieillissant et installé dans sa célébrité - sur la littérature et la création. En revanche, je n'ai rien raté de sa passion soudaine pour un jeune garçon polonais, beau comme un ange, très jeune et au teint maladif. La vieillesse de Goethe aurait inspiré Thomas Mann.
Dans ce récit, c'est un monde -d'avant guerre - qui s'écroule sur lui-même, dans la maladie et la dégénérescence. Porteur de plusieurs symboles, c'est un roman dont la lecture se prépare...
Oui le récit m'a touché et laisse une atmosphère indéfinissable, surtout la fin, sublime. Mais je vais très vite regarder l'adaptation de Visconti me replonger dedans, et j'espère également que la Montagne Magique, qui m'attend sagement, sera moins abrupt!
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Ayant choisi Venise pour destination de Noël, le roman de Thomas Mann s'imposait, d'autant que le souvenir de ma lecture de la biographie de Colm Tóibín était encore vif. La cité des Doges est un fruit mûr qui se savoure. Souvent trop mûr, il provoque l'écoeurement. Pourriture et ravissement s'y confondent sans cesse.
L'histoire, on la connait. L'écrivain Aschenbach s'échoue volontairement sur le Lido, en quête d'un nouveau souffle. D'abord vivifiant, l'air devient fétide. Son adoration du jeune Tadzio, pourtant synonyme de renaissance, l'entraîne vers la mort : il est au centre du combat sans merci que se livrent Éros et Thanatos. Venise est le parfait théâtre de sa lente décomposition.
En relisant ce chef d'oeuvre, il m'a semblé que l'écrivain était tombé dans un piège maléfique, prisonnier d'un jeu de miroirs aux reflets empoisonnés. le vieux beau du vaporetto, d'abord, grimé jusqu'à l'outrance (p43), dont il méprise les vains efforts. La mer, ensuite, qui se joue de son âme accablée. le jeune Polonais, enfin, qu'il s'évertue à trouver fragile, incapable d'en supporter la divine perfection et l'arrogante jeunesse.
Thomas Mann a raison, à Venise, mort et décadence sont omniprésentes, de ces gondoles aux allures de cercueil à ces foules assoiffées d'une beauté de carte postale. C'est plus fort qu'elle, « à chaque fois que Venise commençait à exercer son charme, le mercantilisme rapace de la reine des mers déchue venait avec une insistance désagréable dégriser l'imagination ». Une réflexion qui n'a pas pris une ride : il suffit de voir les hordes de touristes dégueuler de la place Saint-Marc, le regard halluciné, armés de leurs emplettes griffées, repus d'agapes globalisées, ignorant la glorieuse postérité qui les entoure et leur préférant l'éphémère représentation de leurs égos atrophiés par la bêtise et l'ennui.
Bilan : 🌹🌹
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J'ai revu récemment le film de Luchino Visconti et j'avoue que je l'ai trouvé un peu vieilli. Je me suis donc reportée à l'oeuvre originel publiée en 1912 "La mort à Venise" de Thomas Mann, prix Nobel de littérature 1929.
J'ai trouvé ce court roman bien meilleur que le film même si je ne suis pas vraiment tombée sous le charme de Tadzio comme Gustav von Aschenbach.
Écrivain reconnu à la morale sévère, Aschenbach part de Munich pour se rendre à Venise afin de retrouver un certain élan créateur et échapper à l'ordinaire.
C'est au Grand Hôtel des Bains du Lido qu'il croise Tadzio, un jeune adolescent polonais qui le fascine par sa beauté. Il va en être bouleversé sans même pouvoir lui parler. Aschenbach évoque Phaidros de Platon, dialogue centrée sur le thème de la beauté et de l'amour, sans que cela me touche.
Par contre, j'ai trouvé le contexte passionnant avec la progression du choléra à Venise, événement officiellement déguisé qui devient le secret de la ville faisant écho au secret de son coeur qu'il ne souhaite pas dévoiler. Face aux ruelles lugubres de Venise où l'épidémie transforme la ville il y a l'hôtel luxueux, endroit protégé où de riches familles insouciantes se prélassent.
Pourtant, c'est un destin tragique qui attend l'écrivain allemand à la psychologie complexe.
Roman à lire pour sa dimension dramatique sans la musique un peu trop insistante du film mais avec celle des mots de Thomas Mann.


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Romans de Thomas Mann.
La mort à Venise – Gustav d'Aschenbach est un écrivain renommé à la réputation sans tache. Il est soudain pris de lassitude envers Munich et d'une folle envie de voyager, « mais à vrai dire une envie passionnée, le prenant en coup de foudre, et s'exaltant jusqu'à l'hallucination. » (p. 38) Il décide de revoir Venise, une ville qui l'a toujours séduit et réjoui, bien qu'il n'en ait jamais supporté le climat. Mais il n'a que la cité lacustre à l'esprit : c'est là que son besoin de dépaysement sera comblé. « Une paresse enchaînait l'esprit d'Aschenbach, pendant que ses sens goûtaient la formidable et étourdissante société du calme marin. » (p. 73) Installé dans son hôtel du Lido, il rencontre un jeune Polonais en villégiature avec sa mère et ses soeurs. L'enfant est blond, un peu maladif et d'une beauté éblouissante. La fascination d'Aschenbach va grandissant, entre émerveillement et honte. Peut-il rester à Venise ? Ne devrait-il pas partir pour échapper à l'emprise que ce garçon a sur coeur et au malaise que le climat vénitien fait naître en lui ? « Ce qui était si pénible à admettre, ce qui par moment lui paraissait absolument intolérable, c'était manifestement la pensée qu'il ne devait jamais revoir Venise et que ce départ était un adieu définitif. » (p. 79) Entre élans freinés et départs manqués, le voyage d'Aschenbach est un périple d'opérette à la fin dramatique quand le choléra se déclare en ville.
Les premières pages de ce court roman m'ont laissée perplexe, mais la rencontre avec le jeune Tadzio a tout mis en place. L'insupportable épisode du vieux beau sur le bateau a pris toute sa dimension, répété et amplifié, voire déformé en la personne d'Aschenbach. La jouissance de la beauté juvénile n'a finalement d'égale que la cruauté du temps qui s'enfuit. Mourir à Venise, c'est bien beau, mais c'est toujours mourir.

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« Quiconque a de ses yeux contemplé la Beauté
est déjà livré à la mort ».
Les Sonnets d'Amour et Sonnets Vénitiens d'August von Platen sont cités par Thomas Mann dans la Mort à Venise, qui nous amène à suivre le parcours, à découvrir le destin, d'un écrivain renommé, Gustav Aschenbach. L'artiste vieillissant est d'ors et déjà formé dès le début du roman ; il mène alors une vie particulièrement réglée, mais celui-ci , cependant, ressent l'envie soudaine de voyager suite à une mystérieuse apparition. Ressentant un inquiétant manque d'enthousiasme, il prend donc la décision de partir pour renouveler son inspiration. Il choisit l'Italie , destination privilégiée d'un grand nombre d' auteurs classiques, en quête de l'Idéal. A Venise, l'auteur se détourne de ses tâches habituelles pour observer un jeune homme d'une beauté accomplie, Tadzio. Tout est dit, le destin d'Aschenbach est d'ors et déjà joué.
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« La mort à Venise » nous dévoile la passion soudaine et fatale d’un écrivain vieillissant pour un jeune adolescent. La mort, la nostalgie et la beauté (artistique) rythment cette nouvelle très célèbre de Thomas Mann.

En 1910, à Munich, l’écrivain Gustav Aschenbach, la cinquantaine, reconnu et anobli, croise au détour d’une promenade un homme portant un chapeau de Manille aux larges bords. De cette rencontre naît une subite envie de partance, une envie d’exotisme. Aschenbach, veuf et solitaire, se décide alors pour un voyage sur la côte adriatique. De la côte d’Istrie, il arrive ensuite à Venise. C’est alors que sous les insistances d’un gondolier, il rejoint l’île du Lido. Là-bas, Aschenbach découvre Tadzio, un jeune adolescent polonais qui le fascine par sa beauté. N’osant l’aborder, il commence à suivre le jeune adolescent et sa famille dans les rues de Venise tandis que des rumeurs d’épidémie commencent à circuler.

Dans cette nouvelle, l’écrivain fait très nettement référence à l’art et à la mythologie grecque. Figure de corps parfait et de jeunesse éternelle, le jeune et beau Tadzio apparaît telle une vision idéale et tentatrice pour Aschenbach. Parallèlement, la mort se répand dans la ville à travers l’épidémie de choléra. La description de la beauté absolue est alors accompagnée de nombreux détails de la pourriture qui rôde et qui gagne la ville, puis les hommes. Passion et mort se mêlent parfaitement pour annoncer au lecteur le funeste destin du personnage de voûte. Tandis que la ville se meurt du choléra, le vieil Aschenbach se meurt de son noir désir, de sa maladie d’amour. Tandis que la chaux recouvre les murs de la ville, la poudre recouvre les joues du vieil homme. L'écrivain qui méprise les « vieux beaux » en devient un pour un amour impossible et tombe dans le laid pour atteindre la beauté.

Bien plus que la passion d’un homme d’âge mûr pour un adolescent, Thomas Mann évoque dans cette longue nouvelle servie par un style absolument éblouissant, une réflexion sur la beauté, celle qui nous sublime, celle que l’on désire, celle que l’on n’arrive jamais à atteindre.
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