Liste Otto, ainsi nommée en référence à l'ambassadeur d'Allemagne à Paris Otto Abetz.
La « liste Otto », publiée le 4 octobre 1940 dans la Bibliographie de la France, comporte 1 060 titres signés d’auteurs aussi divers que Malraux (L’Espoir), De Gaulle (Vers une armée de métier), Freud ou Vicki Baum. Cette liste est présentée comme établie par les éditeurs.
Voici le Préambule.
"Désireux de contribuer à la création d'une atmosphère plus saine et dans le souci d'établir les conditions nécessaires à une appréciation plus juste et objective des problèmes européens, les éditeurs français ont décidé de retirer des librairies et de la vente, les œuvres qui figurent sur la liste suivante et sur des listes analogues qui pourraient être publiées plus tard.Il s'agit de livres qui, par leur esprit mensonger et tendancieux ont systématiquement empoisonné l'opinion publique française. Sont visées en particulier les publications de réfugiés politiques ou d'écrivains juifs, qui, trahissant l'hospitalité que la France leur avait accordée, ont sans scrupules poussés à une guerre, dont ils
espéraient tirer profit pour leurs buts égoïstes. Les autorités allemandes ont enregistré avec satisfaction l'initiative des éditeurs français et ont de leur côté pris les mesures nécessaires".
(Paris, Septembre 1940).
Même si ce préambule gomme la diversité de leurs attitudes, il est évident que, dans leur très grande majorité, les éditeurs souhaitent, par ces concessions, convaincre l’occupant qu’ils sont prêts à mettre en œuvre eux-mêmes la politique de contrôle qui leur sera imposée. Ils espèrent obtenir ainsi la reprise de leur activité en évitant une intrusion directe dans leur entreprise. Leurs espoirs ne sont que partiellement réalisés. Si les maisons d’édition rouvrent et peuvent approvisionner leur clientèle de la zone non occupée, celles qui sont la propriété de Juifs (et l'on peut noter au passage leur naïveté) n’évitent pas « l’aryanisation » de leur direction et de leur capital. Ferenczi et Calmann-Lévy changent de nom et, sous la direction d’actifs partisans de la Collaboration qui profitent de l'aubaine, deviennent les instruments de la propagande allemande.
Les interdictions se font de plus en plus contraignantes. À partir de juillet 1941, il est interdit de publier ou de rééditer une œuvre anglo-saxonne postérieure à 1870 ; en mars 1942, une seconde liste Otto bannit tous les livres traduits de l’anglais (sauf les classiques) et du polonais, tous ceux (livres scientifiques exceptés) dont les auteurs sont juifs ou qui retracent la biographie d’un Juif.
Les livres scolaires font l’objet de deux autres listes d’interdiction publiées en 1941 et 1943 ; les manuels doivent dorénavant présenter les relations internationales sous un jour plus favorable à l’Allemagne et éliminer l’étude d’auteurs allemands d’origine juive comme Heine. À l’inverse, les éditeurs sont vivement incités à publier certains auteurs allemands pour lesquels le papier leur est généreusement alloué.