AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
EAN : 9782246146544
339 pages
Grasset (12/06/1996)
3.64/5   32 notes
Résumé :
Au début du siècle, près de Rouen, une grande bourgeoise, Madame Herpain trompe son mari avec un autre notable, le docteur Guérin. La bonne société normande condamne la "mauvaise mère". De ses trois jeunes enfants, c'est Denise très liée à son père, qui souffre le plus cet adultère. En grandissant, cette ravissante, orgueilleuse, exaltée, grandira en se forgeant plus qu'une morale, une mystique, l'indignité de sa mère en décidant de ne jamais lui ressembler.
... >Voir plus
Que lire après Le cercle de familleVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (4) Ajouter une critique
Publié en 1932, le cercle de famille est un roman qui pourrait légitimement avoir vieilli et sentir la naphtaline, être caractérisé par le style hypertrophié propre aux productions du début du XXème siècle, ou propager des idées moralistes ou misogynes. Or, il n'en est rien, et c'est bien ce qui m'a frappée lors de cette lecture : le cercle de famille est un roman intemporel et donc moderne, tant dans son style que dans son intrigue.


L'écriture d'André Maurois m'a époustouflée ; elle correspond quasi-parfaitement à l'idée que je me fais de la perfection : des phrases dégraissées au plus près de l'émotion ; un vocabulaire à la fois riche mais sans boursouflure ; des phrases composées de l'exact nombre de mots, ni plus ni moins ; un usage modéré des adjectifs ou adverbes ; la métaphore légère et appropriée... Bref, un enchantement que l'auteur ne pollue pas de son ego surdimensionné ou de mièvreries nombrilistes n'intéressant personne. Si j'ajoute la syntaxe irréprochable et sans lourdeur, une concordance des temps qui transforme l'imparfait du subjonctif en une gourmandise, et une histoire à la portée universelle, le tableau est complet.


L'auteur – né dans une famille de drapiers - a choisi de mettre en scène une famille bourgeoise et provinciale dont la fortune s'est édifiée sur le commerce du coton, puis qui a sauté plus tard avec plus ou moins de succès dans le train lancé à toute vitesse de la colonisation après avoir fourni du drap garance ou bleu horizon aux soldats français ainsi déguisés en cibles. le récit s'étend de la fin du XIXème siècle au mitan des années trente et le personnage principal est Denise, l'aînée des 3 filles Herpain, qui a découvert tôt dans l'enfance que sous la surface hypocrite et lisse de la vie familiale, couvent mensonges, trahisons, adultères. Denise constate que personne ne dit la vérité, et que les êtres qu'on lui a appris à considérer comme sacrés agissent mal : sa mère est frivole, trompe son mari faible, silencieux et fatigué avec le médecin de Pont de l'Eure, alimentant les cancanages des grenouilles de bénitier bien pensantes promptes à juger une femme et ricaner du cocu qui nie les problèmes pour éviter de les résoudre.


Denise se rebelle et se jure de ne jamais reproduire un tel modèle. Dotée d'un fort caractère teinté d'exaltation religieuse et voulant échapper à l'asservissement des femmes dans une vie conjugale, maternelle et domestique, elle fait des études, partage un temps des idées progressistes en vogue dans le milieu étudiant, pour finalement épouser sans amour un homme falot dont la seule qualité est d'être un riche héritier, qu'elle finit par tromper. Mais rongée par la culpabilité, elle s'abandonne à « une dépression mystique » dans une luxueuse villa de la Côte d'Azur.


Et voilà ! Denise qui s'était promis de transformer le cercle de famille en cercle vertueux, se contente au final de perpétuer le cercle vicieux. Faut-il comprendre que l'on ne peut échapper au déterminisme social capitaliste  ? Je suis tentée de répondre et ce n'est que mon avis, qu'il est risqué pour Denise de fuir son milieu d'origine riche, aisé, privilégié, dominant... D'ailleurs, au moment du choix crucial, elle opte pour la sécurité plutôt que d'aller goûter de la vache enragée avec un amoureux pauvre. Sacrée Denise qui aurait voulu faire croire aux lecteurs qu'elle allait tout faire péter et révolutionner son petit monde douillet alors que l'aisance matérielle est si confortable, quel qu'en soit le prix à payer, et que la religion, si souple grâce à la confession, permet d'absoudre les péchés de chair et tous les autres.


André Maurois dresse un portrait vitriolé de la bourgeoisie d'un réalisme stupéfiant. le roman est émaillé de brèves considérations saisissantes qui plantent avec justesse le décor historique et politique  : 1ère guerre mondiale, crise de 29, colonisation en plein essor... Au final, une lecture savoureuse.


"A quoi nous servira d'avoir maintenu en France un îlot relativement tranquille si nous sommes éclaboussés, submergés par un désastre universel ? Si le reste croule, croyez-vous que nous tiendrons ?"
Commenter  J’apprécie          50
Quel plaisir ! L'histoire de Denise Herpain, traumatisée dans son enfance par les infidélités de sa mère, blessée par la faiblesse de son père et bien décidée à mener une autre vie, loin de cette ville de province, industrieuse et étriquée qui l'a vue naître. Elle bâtit sa vie en ligne droite, fait des études, renonce à un mariage qui l'aurait ramené dans la ville de son enfance et, ne croyant pas à l'amour, épouse un banquier, bien décidée à lui être fidèle. Elle est, à ses côtés, comme une coéquipière attentionnée et solidaire. Elle le trompe, cependant, une première fois et s'en rend physiquement malade. Par la suite, elle le trompera encore mais de manière « bourgeoise » et non ostensible. Parallèlement, elle multiplie les amitiés masculines, en toute liberté, chastement mais sans égard pour sa réputation. Elle est une femme libre pour son milieu et son époque. Mais lorsqu'elle voit dans les yeux de ses enfants un regard qui évoque le sien, petite, elle éprouve le besoin de revenir dans la ville de son enfance. Elle constate qu'elle a cessé d'haïr sa mère. Elle est, enfin, en paix et, o grand paradoxe, elle constate que sa mère - qui a épousé son amant de l'époque - vit précisément ce grand amour qu'elle n'a pas connu. Un magnifique roman d'époque, prémisse du féminisme. Il témoigne de la manière dont les blessures de l'enfance orientent une vie. Il révèle aussi que le bonheur n'est possible qu'en dépassant, qu'en digérant ces blessures. Celles-ci sont la vérité d'un moment et il faut oser le comprendre et l'assumer, pour donner à son existence la liberté et l'espace qui seuls peuvent en offrir la réussite. Comme dans « Climats », André Maurois livre, avec une très belle écriture, le portrait intimiste d'une époque tout en brossant des sentiments qui demeurent universels.
Commenter  J’apprécie          81
Ce roman est un des meilleurs d'André Maurois; il lui a été inspiré par une connaissance de son épouse qui, après avoir été traumatisée enfant par l'adultère de sa mère, ne pouvait s'empêcher de reproduire dans sa propre vie sentimentale les mêmes égarements.
Mais il ne s'agit pas seulement d'un roman psychologique ; en effet, l'héroïne, Denise, est en avance sur son temps en essayant de conquérir son indépendance par les études, en recherchant un amour libre et absolu, et en tentant de s'affranchir de toute contrainte, y compris celle de la maternité: c'est une féministe avant l'heure.
Et André Maurois, loin de l'abandonner au cercle vicieux des répétitions familiales, lui permet à la fin de trouver une solution pour s'en échapper, afin, peut-être, de parvenir à la sérénité.
Commenter  J’apprécie          80
On retrouve dans cette histoire une famille bourgeoise, qui alimente les ragots d'une ville de province. La mère trompe son époux, ce qui scandalise les bien-pensants et sa fille aînée, qui lui en gardera une rancune tenace pendant des années. Bizarrement, le père a lui aussi une maîtresse, mais là ça ne choque personne. Denise, la fille, reproche aux adultes leur hypocrisie, et se voudra exempte de ce défaut. Mais, il y a des voeux qui ne peuvent être exaucés et des comportements qui se répètent d'une génération à l'autre. Elle trompera son mari, comme jadis sa mère, cumulera les amants, tout en restant sincère selon ses critères personnels, en ne leur laissant jamais de faux espoirs. Ce personnage ne m'a guère touchée. Au-delà de cette histoire de famille, j'ai davantage apprécié en apprendre plus sur le contexte économique et historique de cette période.
Commenter  J’apprécie          00

Citations et extraits (48) Voir plus Ajouter une citation
Les souvenirs de l'enfance ne sont pas, comme ceux de l'âge mûr, classés dans les cadres du temps. Ce sont des images isolées, de tous côtés entourées d'oubli, et le personnage qui nous y représente est si différent de nous-mêmes que beaucoup d'entre elles nous paraissent étrangères à notre vie. Mais d'autres ont laissé sur notre caractère des traces à ce point ineffaçables que nous reconnaissons leur vérité passée à la force présente de leurs effets.
Commenter  J’apprécie          120
L'abbé racontait l'histoire sainte aux enfants du petit catéchisme d'une voix grave, qui rappelait à Denise celle des orgues. Les sermons de l'abbé Faurie étaient célèbres à Pont-de-l'Eure.(...° Denise aimait à entendre l'abbé raconter l'histoire du Buisson ardent, et celle du sacrifice d'Abraham. Le soir, dans son lit, elle imaginait que sa mère la sacrifiait sur une montagne. Plus tard, elle aima l'histoire de la fille de Jephté, demandant à mourir pour que fût accompli le voue de son père.
Maintenant, dès qu'elle avait un instant de liberté, au lieu de jouer avec ses chiffons, elle ouvrait la Vie des Saints que lui avait donnée sa grand-mère d'Hocquinville. (....)
Elle aimait les histoires de vierges qui étaient mortes pour rester pures, comme sainte Eulalie, qui avait été lacérée par des peignes d'acier, puis brûlée avec des torches ardentes et qui, au milieu de ses tourments, était restée inébranlable, ou comme sainte Agnès qui avait eu la pudeur de s'envelopper de son manteau en recevant le coup mortel.

Première partie. Chapitre VIII
Commenter  J’apprécie          10
Les souvenirs de l'enfance ne sont pas, comme ceux de l'âge mûr, classés dans les cadres du temps. Ce sont des images isolées, de tous côtés entourées d'oubli, et le personnage qui nous y représente est si différent de nous-mêmes que beaucoup d'entre elles nous paraissent étrangères à notre vie. Mais d'autres ont laissé sur notre caractère des traces à ce point ineffaçables que nous reconnaissons leur vérité passée à la force présente de leurs effets.

Première partie. Chapitre I
Commenter  J’apprécie          30
Quel plaisir ! L’histoire de Denise Herpain, traumatisée dans son enfance par les infidélités de sa mère, blessée par la faiblesse de son père et bien décidée à mener une autre vie, loin de cette ville de province, industrieuse et étriquée qui l’a vue naître. Elle bâtit sa vie en ligne droite, fait des études, renonce à un mariage qui l’aurait ramené dans la ville de son enfance et, ne croyant pas à l’amour, épouse un banquier, bien décidée à lui être fidèle. Elle est, à ses côtés, comme une coéquipière attentionnée et solidaire. Elle le trompe, cependant, une première fois et s’en rend physiquement malade. Par la suite, elle le trompera encore mais de manière « bourgeoise » et non ostensible. Parallèlement, elle multiplie les amitiés masculines, en toute liberté, chastement mais sans égard pour sa réputation. Elle est une femme libre pour son milieu et son époque. Elle est progressiste dans un milieu qui l'est peu. Mais lorsqu’elle voit dans les yeux de ses enfants un regard qui évoque le sien, petite, elle éprouve le besoin de revenir dans la ville de son enfance. Elle constate qu’elle a cessé d’haïr sa mère. Elle est, enfin, en paix et, o grand paradoxe, elle constate que sa mère - qui a épousé son amant de l’époque - vit précisément ce grand amour qu’elle n’a pas connu. Un magnifique roman d’époque, prémisse du féminisme. Il témoigne de la manière dont les blessures de l’enfance orientent une vie. Il révèle aussi que le bonheur n’est possible qu’en dépassant, qu’en digérant ces blessures. Celles-ci sont la vérité d’un moment et il faut oser le comprendre et l’assumer, pour donner à son existence la liberté et l’espace qui seuls peuvent en offrir la réussite. Comme dans « Climats », André Maurois livre, avec une très belle écriture, le portrait intimiste d’une époque tout en brossant des sentiments qui demeurent universels.
Commenter  J’apprécie          00
Denise se souvenait. Ce concert avait été l'un des moments les plus beaux de son enfance. L'après-midi, dans la salle du Châtelet, quand après deux coups secs le bâton se leva, elle ferma les yeux pour retrouver ses souvenirs. (...)
Pourquoi ces notes, volant au-dessus de la symphonie comme un oiseau tranquille, entraînaient-ils l'âme vers le bonheur ? (...)
Une ou deux fois déjà, depuis sa difficile adolescence, dans un verger de pommiers d'où l'on découvrirait des clochers, des fumées et la belle courbe du fleuve, dans une rue de Paris, un dimanche soir, la tête renversée en arrière pour mieux regarder les étoiles, une ou deux fois elle avait entendu monter, au-dessus d'une symphonie tumultueuse et triste, ces notes d'espoir, ces premières mesures d'un chant tranquille. Puis la vie, comme l'orchestre, avait noyé cette mélodie. resurgirait-elle ?

Deuxième partie. Chapitre IV
Commenter  J’apprécie          10

Videos de André Maurois (21) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de André Maurois
CHAPITRES : 0:00 - Titre
C : 0:06 - CRÉATION - Paul Bourget 0:17 - CRÉATION DE L'HOMME - Jean Dutourd 0:28 - CROIRE - Comte de Las Cases
D : 0:38 - DÉBAUCHE - Restif de la Bretonne 0:51 - DÉCEPTION - Fréron 1:04 - DÉLUGE - Jean-François Ducis 1:15 - DÉMOCRATE - Georges Clemenceau 1:26 - DERRIÈRE - Montaigne 1:36 - DOCTRINE - Édouard Herriot 1:46 - DOULEUR - Honoré de Balzac 1:58 - DOUTE - Henri Poincaré
E : 2:11 - ÉCHAFAUD - Émile Pontich 2:23 - ÉCOUTER - Rohan-Chabot 2:33 - ÉGALITÉ - Ernest Jaubert 2:43 - ÉGOCENTRISME - René Bruyez 3:00 - ÉGOÏSME - Comte d'Houdetot 3:10 - ÉLECTION - Yves Mirande 3:21 - ENFANT - Remy de Gourmont 3:33 - ENNUI - Emil Cioran 3:41 - ENSEIGNER - Jacques Cazotte 3:53 - ENTENTE - Gilbert Cesbron 4:05 - ENTERREMENT - Jean-Jacques Rousseau 4:14 - ÉPOUSE - André Maurois 4:37 - ÉPOUSER UNE FEMME - Maurice Blondel 4:48 - ESPOIR - Paul Valéry 4:57 - ESPRIT - Vicomte de Freissinet de Valady 5:07 - EXPÉRIENCE - Barbey d'Aurevilly
F : 5:18 - FATALITÉ - Anne-Marie Swetchine 5:27 - FIDÉLITÉ - Rivarol
5:41 - Générique
RÉFÉRENCE BIBLIOGRAPHIQUE : Jean Delacour, Tout l'esprit français, Paris, Albin Michel, 1974.
IMAGES D'ILLUSTRATION : Paul Bourget : https://en.wikipedia.org/wiki/Paul_Bourget#/media/File:Paul_Bourget_7.jpg Jean Dutourd : https://www.purepeople.com/media/jean-dutourd-est-mort-a-l-age-de-91_m544292 Comte de Las Cases : https://www.babelio.com/auteur/Emmanuel-de-Las-Cases/169833 Restif de la Bretonne : https://fr.wikiquote.org/wiki/Nicolas_Edme_Restif_de_La_Bretonne#/media/Fichier:NicolasRestifdeLaBretonne.jpg Fréron : https://www.musicologie.org/Biographies/f/freron_elie_catherine.html Jean-François Ducis : https://fr.wikipedia.org/wiki/Jean-François_Ducis#/media/Fichier:Jean-François_Ducis_par_le_baron_Gérard.jpg Georges Clemenceau : https://www.lareorthe.fr/Georges-Clemenceau_a58.html Montaigne : https://www.walmart.ca/fr/ip/Michel-Eyquem-De-Montaigne-N-1533-1592-French-Essayist-And-Courtier-Line-Engraving-After-A-Painting-By-An-Unknown-16Th-Century-Artist-Poster-Print-18/1T9RWV8P5A9D Édouard Herriot : https://www.babelio.com/auteur/Edouard-Herriot/78775 Honoré de Balzac : https://www.hachettebnf.fr/sites/default/files/images/intervenants/000000000042_L_Honor%25E9_de_Balzac___%255Bphotographie_%255B...%255DAtelier_Nadar_btv1b53118945v.JPEG Henri Poincaré : https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/b/be/Henri_Poincaré_-_Dernières_pensées%2C_1920_%28page_16_crop%29.jpg René Bruyez : https://aaslan.com/english/gallery/sculpture/Bruyez.html Yves Mirande : https://www.abebooks.com/photographs/Yves-MIRANDE-auteur-superviseur-film-CHANCE/31267933297/bd#&gid=1&pid=1 Remy de Gourmont : https://www.editionsdelherne.com/publication/cahier-gourmont/ Emil Cioran : https://www.penguin.com.au/books/the-trouble-with
+ Lire la suite
Les plus populaires : Littérature française Voir plus
Livres les plus populaires de la semaine Voir plus


Lecteurs (91) Voir plus



Quiz Voir plus

Retrouvez le bon adjectif dans le titre - (2 - littérature francophone )

Françoise Sagan : "Le miroir ***"

brisé
fendu
égaré
perdu

20 questions
3671 lecteurs ont répondu
Thèmes : littérature , littérature française , littérature francophoneCréer un quiz sur ce livre

{* *} .._..