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EAN : 9782226035493
423 pages
Fonds Mercator (01/09/1989)
3/5   1 notes
Résumé :
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
Véritable étude sociologique du manger et du boire dans nos cultures européennes, ce document est riche d'enseignements et presque une encyclopédie. Il est richement illustré par de nombreux tableaux issus de notre patrimoine culturel, tableaux, objets, ... !
A lire ou à feuilleter sans retenue.
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Citations et extraits (11) Voir plus Ajouter une citation
L'internationalisation de la « grande cuisine », d'origine française, laquelle s'étend (avec des succès divers) à l'Europe occidentale tout entière ; le succès du fast food, phénomène de société s'il en est, intimement lié à l'éclatement de la famille traditionnelle et du « socle » culturel sur lequel s'élevait le repas familial ; la multiplication, dans tous les pays d'Europe, des restaurants étrangers ou exotiques, chinois, indonésiens, grecs, arables, qui tout en rompant la régularité des cuisines nationales et en diversifiant les goûts, participent à la formation d'une certaine unité nutritionnelle européenne ; les magasins à rayons multiples, grandes surfaces ou négoces spécialisés qui présentent, dans chaque pays, le même richissime assortiment de mêmes produits nouveaux ou « désaisonnalisés », venant, hors saisons, de toutes les régions du monde, et présentés de la même façon, sous cellophane, lavés, coupés, surgelés, lyophilisés – si bien que l'extrême diversité aboutit à l'extrême monotonie ; les succès de la « nouvelle cuisine » qui, passé le très mauvais moment des extravagances et des erreurs de goût, a réussi à s'imposer, un peu partout en Europe, la légèreté de ses préparations (sinon de la note!), la beauté de sa présentation, sa volonté de libérer la cuisine de l'homme moderne des codes et des carcans du siècle dernier. Enfin, il n'est pas jusqu'à la multiplication des voyages, des croisières et des séjours à l'étranger qui, en amenant les cuisines locales à se plier aux goûts du touriste, quand ce n'est pas en essayant d'imiter la grande cuisine internationale, ne finisse par homogénéiser dans la pire direction, les goûts et les saveurs du monde entier, au détriment de toute authenticité. Certaines régions de l'Italie, de l'Espagne, de la Tunisie, sont, à cet égard, véritablement sinistrées, du moins du point de vue gastronomique.

L'ouverture spontanée de la société européenne à la nouveauté agit évidemment pour décloisonner, volens nolens, les cuisines nationales. Il est bien, personne ne le contestera, qu'il en soit ainsi ; mais c'est un peu de notre âme qui s'affadit, comme une vieille photographie, émouvante à force d'être fragile.

Bref, il y a quelque chose de fatal dans l'homogénéisation de la civilisation mondiale. C'est là, me semble—il, une des bonnes raisons de nous accrocher aux cuisines du terroir. Elles sont ce qui survit de nos racines lointaines (ou ce qui nous permet d'entrer en contact avec les autres terroirs de notre pays et de l'Europe entière).
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Les vertus du cuisinier :

Les Coutumiers précisent ce que doit être un cuisinier (coquinarius) digne de ce nom. Voici ce qu'en dit par exemple, celui de l'abbaye anglaise d'Eynsham : «le cuisinier sera de cœur humble, d'âme bénigne, ruisselant (exuberans) de miséricorde, regardant pour lui-même, le refuge des malades : sobre et réservé, il sera le bouclier des pauvres, le père de la communauté ». L'Encyclopédie (XVIIIe siècle) va jusqu'à écrire que les cuisiniers ne boivent pas de vin, de crainte de se blesser le goût : avis à nos grands chefs !

Le coquinarius devra veiller en outre à ce que ses aides ne fassent pas de bruit en cuisine durant les repas ; à ce que la vaisselle et les casseroles soient propres, et propre aussi le fond des plats afin de ne pas salir la nappe.
Les coutumiers ne cessent de l'affirmer : dans la cuisine, il est le seul maître à bord. Il y est dit que l'abbé lui-même ne doit y mettre les pieds que pour des raisons impératives qui n'ont rien à voir avec ce qui mijote dans les pots. « On doit lui obéir, dit un texte des Jésuites, avec beaucoup d'humilité en tout ce qui touche au travail, et lui rendre toujours une obéissance parfaite ». Il ne doit pas « prier » de faire ceci ou cela, mais commander (« avec modestie »), en disant : « Fais ceci ou cela ». De la sorte, écrivent encore les Constitutions, « celui qui obéit doit considérer.... les paroles qui sortent de la bouche du cuisinier … comme si elles sortaient de la bouche du Christ ».
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Étrange destin que celui du mot "recette". Il vient du latin recepta, qui est le participe passé du verbe recipere, "recevoir". Le premier sens (XIe siècle) est celui de "lieu où l'on se retire" (sens que le mot italien ricetto a encore : "refuge", "asile"). De là, par on ne sait quel merveilleux détour, il passe, au XIIIe siècle, à l'un des sens actuels : "ce qui est perçu en argent", puis "action de recevoir de l'argent pour le compte de quelqu'un" (d'où au XVIIe , "charge du receveur des contributions et bureau où il en fait l'exercice"). .... Parmi la douzaine d'acceptions proposées par Littré, voici enfin notre définition, au sens d'indication reçue (on voit le lien) : "procédé dont on se sert dans les arts, l'économie domestique" (1393). Et de citer Voltaire parlant de la recette d'un potage. Le mot dans ce sens apparaît au XIVe siècle. Mais il ne devait pas être familier, car Furetière (XVIIe siècle) l'ignore.
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Ceux qui déplorent le raffinement en cuisine mais qui poussent au maximum la recherche et ses accomplissements dans les autres secteurs de l'art, non seulement sont en contradiction avec eux-mêmes, mais encore oublient, ou, s'efforcent d'oublier, tout ce qu'il y a d'affectif, à côté du gustatif et du symbolique, dans le fait de la convivialité et de l'hospitalité, au sens premier du terme, l'art de bien recevoir. « Convier quelqu'un, écrit Brillat-Savarin, c'est se charger de son bonheur pendant le temps qu'il est sous votre toit ». Tamquam Christus, dit la Règle bénédictine plus sobrement. Le plus humble des foyers qui reçoit des amis, fût-ce « à la bonne franquette », comme on dit, ne raffinera-t-il pas sur son menu ? Leur offrira-t-il ce qu'il mange tous les jours ? Ou bien par quelque recherche culinaire, quelque nouveauté, fût-elle coûteuse, quelque raffinement exceptionnel, ne voudra-t-il pas leur signifier toute l'amitié qu'il leur porte ? …..
Le véritable chant d'amour que Michel Serres prononce en l'honneur du Château Yquem (et comme on le comprend) n'est pas du « bavardage ». Le raffinement en cuisine,la recherche de la nouveauté, les rappels subtils du passé, de la vie paysanne, d'un pays lointain, insérés dans les courants d'une tradition créatrice, la rupture des goûts dans le déroulement d'un repas – tout cela est-il superflu ? Pour l'ignorant, tout peut se réduire à dire : « ce vin est bon ». Pris sous cet angle, les cinq actes de Phèdre peuvent se résumer en une sombre histoire de belle-mère sur le retour. Mais pour les gens évolués, cultivés, raffinés précisément ?
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Certains goûts peuvent nous paraître peu raffinés, et ils le sont par rapport à nos critères de civilisation. Je crois pourtant qu'à l'intérieur d'un système culinaire qui, pour nous, est barbare, ou grossier, il est possible de déceler des formes de recherches et de raffinements qui attestent que nous ne sommes pas les seuls à être « civilisés » en matière de cuisine.
Le grand cuisinier romain Apicius (1er siècle après J.C) donne une recette de « tétines de truie ». Nous nous récrions. A la lecture, il s'avère qu'il s'agit du ventre de la truie : c'est du lard maigre. En outre, il est question d'une truie tuée le lendemain du part, autrement dit : de la mise bas. Le fait important, à mes yeux, c'est que notre maître-cuisinier fasse la différence entre la chair d'une truie non pleine, la chair d'une truie pleine et la chair d'une truie qui a mis bas, et cela, à un jour près. C'est du raffinement au sens premier du terme : « acte qui dénote de la recherche, une grande et subtile délicatesse de perception et de goût ». L'équivalent de l'oreille musicale sur un autre plan. On peut répondre que cela ne nous plaît guère ou, même, ne nous tente pas. En avez-vous fait l'expérience ? Vous reprochez à cette recherche d'aller trop loin : pour beaucoup de gens, la différence entre un Beaujolais primeur et un Romanée-Conti 1969 n'est pas évidente et, dans tous les cas, ne vaut pas l'écart des prix.
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