Une
jézabel, une femme séductrice, égoïste et cruelle...
Irène Némirovsky fait le portrait de cette femme qui n'a pensé toute sa vie qu'à l'amour, la séduction, la jeunesse, uniquement à elle-même.
Superbe femme, extrêmement riche et obnubilée par la crainte qu'elle a de vieillir et de perdre sa beauté, Madame Gladys Eysenach est jugée pour meurtre ; le livre s'ouvre sur son procès, elle aurait tué son amant, un jeune homme de vingt ans.
Petit à petit pendant toute la procédure, le lecteur découvre une partie de l'histoire de cette femme, la partie la plus visible, la plus accessible : son obsession d'être aimée, de séduire, de ne pas vieillir.
Une femme qui répond à peine aux questions du juge, qui semble indifférente et lasse. Payait-elle vraiment ce jeune homme pour qu'il l'aime ? L'a-t'elle tué parce qu'il la faisait chanter ?
On sent bien qu'il y a autre chose : " Non, non, murmura l'accusée en cachant son visage dans ses mains : que l'on ne m'interroge plus, je ne dirai plus rien... J'ai avoué, tout ce qu'on a voulu !... "
Elle est condamnée à cinq ans de prison, et la seconde partie du livre commence, où l'on va découvrir la véritable histoire de cette femme qui a poussé le plus loin possible son incapacité à vieillir... Telle un Dorian Gray fait femme, Gladys Eysenach est capable d'absolument tout pour rester la plus belle... Sa fille, qu'elle aimait sincèrement mais à sa manière, en paiera le prix fort.
Ce qu'on ne saura pas précisément, ce sont les causes de ce comportement ; mis à part qu'elle détestait sa mère "froide, sévère, à demi folle, une vieille poupée fardée..."
Ce que décrit
Irène Némirovski, c'est une sorte de pathologie humaine poussée à son paroxysme, le mythe de la jeunesse et de la beauté éternelles parfaitement adapté à son époque (première partie du XXème siècle), mais en fait une obsession humaine qui a existé en tout temps.
L'écriture est parfaite, le livre passionnant, un grand "classique" à ne pas oublier !
Première phrases : " Une femme entra dans le box des accusés. Elle était belle encore, malgré sa pâleur, malgré son air hagard et las ; seules, les paupières, d'une forme délicieuse, étaient fanées par les larmes et la bouche affaissée, mais elle paraissait jeune. On ne voyait pas ses cheveux cachés sous le chapeau noir."