Le flou suggère qu'il n'existe pas de traits communs mais des réseaux qui s'enchevêtrent. Les visages entrent en relation à partir de cette indistinction, ils prennent des airs de famille selon les angles de vue et des cohérences contextuelles. (...) La netteté du portrait anthropométrique faisait croire (...) à une vérité physionomique. Cependant les visages sont des composés de ressemblances enchevêtrées. Lorsque nous les reconnaissons, nous (...) mobilisons des souvenirs, des affects, des cohérences ou des échos, du déjà-vu et des préjugés. La photographie floue pourrait valoriser une indéfinition permanente des traits toujours en débord sur leur anatomie. Elle suggère davantage : la sédimentation jamais définitive, c'est-à-dire une accumulation de traits qui rendent le visage disponible, selon les circonstances, à des communautés de style.
François Noudelmann - Les enfants de Cadillac