Le tome 5 de la "Contre-histoire de la philosophie", "l'Eudémonisme social", aborde les problèmes sociaux du 19ème siècle liés au développement industriel et à un capitalisme sans limites, et les réponses concrètes qu' y ont apporté quelques philosophes, utilitaristes, utopistes, anarchistes...
Au 19ème siècle l'exploitation de l'homme par l'homme est criante et se fait universelle. Si des Africains sont vendus comme esclaves et embarqués dans de lointaines contrées, la situation des ouvriers européens n'est guère plus enviable. En Angleterre, 75% de la population est exploitée dans les usines, soumise à des cadences infernales pour des salaires de misère. le travail des enfants commence dès l'âge de 6 ans (voir plus tôt parfois). Pas d'écoles ni d'hôpitaux en nombre suffisant, une nourriture de mauvaise qualité, des conditions de logement déplorables.
Flora Tristan sera une des premières à enquêter dans les usines et les prisons...la délinquance étant majoritairement liée aux problèmes sociaux.
La condition féminine n'est pas non plus brillante. Dans tous les milieux, la femme est exploitée ou considérée comme une mineure. L'égalité des sexes n'est encore qu'une utopie...
Quelques esprits vont commencer à réfléchir à une amélioration ou un changement radical de la société, à partir des notions de plaisir, justice sociale, égalité entre classes, entre races, entre sexes. Malgré quelques idées nouvelles, les premiers utilitaristes,
William Godwin et
Jeremy Bentham, restent marqués par le libéralisme et l'austérité protestante. Bien qu'étant l'auteur du terrible système de surveillance, le
panoptique, Bentham prend la défense, au nom de l'utilitarisme, des esclaves et des homosexuels. Mais c'est avec J. S. Mill que la pensée utilitariste va se radicaliser. Il va travailler à l'élaboration d'une société hédoniste et défendre la liberté de l'individu contre la société de masse. Il faut que le plus grand nombre d'individus possible ait accès au bonheur.
Owen, quand à lui, va s'opposer aux religions et surtout mettre en oeuvre concrètement ses idées à la manufacture de New Lamark. Les ouvriers mieux traités, mieux soignés, mieux instruits, mieux nourris et logés, vont s'avérer plus productifs. L'expérience est réussie. Il va tenter de faire appliquer les mêmes règles à l'ensemble du pays. le projet est présenté au parlement mais passablement mutilé...Il va tenter ensuite une expérience de communautés utopistes communistes mais qui s'avèreront un échec. Mais l'idée demeure : l'abolition de la propriété privée, de la religion et du mariage, l'aspiration à l'eudémonisme social, base d'un socialisme humaniste.
La pensée de Fourier semble à première vue très loufoque et ésotérique. Mais il est un des premiers écologistes, dénonçant déjà en son temps l'impact de l'activité humaine sur l'environnement naturel et la mauvaise qualité des aliments consommés par les classes les plus pauvres à cause de la chasse au profit. Il défend également les femmes et propose une vie en Harmonie qui s'oppose en tous points à l'existence en l'actuelle Civilisation.
Bakounine enfin, anarchiste russe, opposant au socialisme autoritaire de Marx un socialisme libertaire, est la dernière figure évoquée ici pour sa défense inconditionnelle de la liberté, du fédéralisme et son antiétatisme.
Tous ces philosophes ont un point commun : ils se sont opposés aux pouvoirs religieux, politiques, économiques de leur époque et ont proposé des solutions pour changer le monde. Leurs pensées, loin d'être marginales, restent d'actualité tant le chemin reste long à parcourir de notre monde à une société idéale...
Un petit ouvrage passionnant pour partir sur les traces de pensées alternatives, utopiques, socialistes, anarchistes...A conseiller à tous ceux qui pensent qu'une vie meilleure pourra devenir une réalité. A condition de ne point se soumettre...