MON CHER RIVIÈRE,
Une grave maladie m’empêche malheureusement de vous donner, je ne dis même pas une étude, mais un simple article sur Baudelaire. Tenons-nous en faute de mieux à quelques petites remarques. Je le regrette d’autant plus que je tiens Baudelaire — avec Alfred de Vigny — pour le plus grand poète du XIXe siècle. Je ne veux pas dire par là que s’il fallait choisir le plus beau poème du XIXe siècle, c’est dans Baudelaire qu’on devrait le chercher. Je ne crois pas que dans toutes les Fleurs du Mal, dans ce livre sublime mais grimaçant, où la pitié ricane, où la débauche fait le signe de la croix, où le soin d’enseigner la plus profonde théologie est confié à Satan, on puisse trouver une pièce égale à Booz endormi. Un âge entier de l’histoire et de la géologie s’y développe avec une ampleur que rien ne contracte et n’arrête, depuis
La Terre encor mouillée et molle du Déluge
jusqu’à Jésus-Christ :
En bas un roi chantait, en haut mourait un Dieu.
Ce grand poème biblique (comme eût dit Lucien de Rubempré : « Biblique, dit Zifine étonnée ? ») n’a rien de sèchement historique, il est perpétuellement vivifié par la personnalité de Victor Hugo qui s’objective en Booz. Quand le poète dit que les femmes regardaient Booz plus qu’un jeune homme, c’est ou bien pour rappeler de récentes bonnes fortunes, ou pour en provoquer. Il cherche à convaincre les femmes que si elles ont du goût, elles aimeront non un freluquet, mais le vieux barde. Tout cela dit avec la syntaxe la plus libre et la plus noble. Sans parler des vers trop illustres sur les yeux du jeune homme comparés à ceux du vieillard (avec préférence naturellement pour ce dernier) de quelle familiarité Hugo n’use-t-il pas, dans ce couplet même, pour asservir, aux lois du vers, celles de la logique
Le vieillard, qui revient vers sa source première,
Entre aux jours éternels et sort des jours changeants
En prose on eût évidemment commencé par dire « sort des jours changeants ». Et il ne craint pas de jeter à la fin du vers où elles s’anoblissent, des phrases tout à fait triviales :
Laissez tomber exprès des épis, disait-il
A propos de Baudelaire
La Nouvelle Revue Française, Tome XVI, 1921 (pp. 641-663).
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