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EAN : 9782020206242
484 pages
Seuil (03/10/1998)
4.12/5   8 notes
Résumé :
Amérique latine
L'Amérique latine est depuis Colomb le continent des malentendus; aussi notre vision de l' "autre Amérique" échappe-t-elle rarement à l'exotisme insignifiant ou aux généralisations superficielles. Privilégiant une approche transversale, Alain Rouquié a écrit, en comparatiste, la première synthèse qui rend compte de la diversité d'une région qu'on aurait tort de traiter de manière indistincte, en fonction d'une apparente homogénéité perçue... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
« Amérique latine » est un ouvrage complet et riche dont le seul défaut est d'être aujourd'hui légèrement daté et de mériter sans doute d'être actualisé au vu dernières et passionnantes évolutions de la situation internationale.

Malgré cela, « Amérique latine » réussit à dégager des tendances générales dans l'évolution de ces dizaines de pays, tout en soulignant par instants certaines spécificités (Cuba, Salvador).

J'ai été surpris de constater le poids de l'héritage colonial forcément douloureux car sanglant et inégalitaire sur les relations entre les différentes ethnies pourtant au premier abord souvent mélangées aux yeux d'un Européen.
Ce poids se fait sentir dans toute l'organisation sociale, économique et politique du continent avec son système d'oligarques descendants des grands propriétaires ou entrepreneurs coloniaux, ces locomotives agricoles et industrielles choyées par les classes politiques dominantes auxquelles elle se confondent parfois.

Prisonniers de leur passé et de son modèle archaïque, victimes de l'affairisme des États-Unis, les pays latino-américains peinent à prendre leur envol vers le développement et les rôles de premier plan internationaux que le Brésil, le Mexique ou l'Argentine pourraient pouvoir prétendre.

Et pourtant, pourtant, toute le monde le sait, leur potentiel surtout naturel est colossal et ne demande qu'à fructifier…
Lien : https://lediscoursdharnois.b..
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Citations et extraits (6) Voir plus Ajouter une citation
A partir de 1933, et avec l'arrivée de F.D. Roosevelt à la Maison-Blanche, face à la montée des dangers dans le monde, les relations interaméricaines adoptent un style nouveau. C'est la politique du « bon voisinage » qui entérine l'abandon tactique de l'intervention directe et s'efforce de réduire ainsi les tensions. Afin de neutraliser « l'anti-américanisme » et de pouvoir compter sur des alliés sûrs en cas de besoin, Washington met un terme aux occupations militaires. Les États-Unis veulent ainsi pouvoir rassembler autour d'eux l'ensemble de leurs voisins méridionaux dès que la guerre éclatera en Europe. A la suite d'une série de réunions de consultation des chancelleries américaines, l'entrée en guerre des États-Unis après Pearl Harbor en 1941 doit entraîner les États du continent.
Les États-Unis accroissent à la faveur de la guerre leur mainmise politique sur leurs voisins méridionaux, cette fois bien au-delà du canal de Panama. L'alignement quasi-automatique des « alliés » malgré eux sur les États-Unis n'est pas une simple formule diplomatique. Les États-Unis imposent aux nations du continent l'entrée en guerre contre les puissances de l'Axe. Ils n'hésitent pas à déclencher un véritable blocus diplomatique contre les États les plus récalcitrants, parmi lesquels l'Argentine. S'ils craignent que le Reich hitlérien n'installe une tête de pont sur le continent en profitant des actives et prospères colonies allemandes du Brésil, de l'Argentine ou du Chili, ou bien que les pays les plus liés à l'Europe, loin d'épouser la querelle des « nations unies », ne s'ancrent dans une neutralité anti-américaine (et populaire), les États-Unis semblent tenir avant tout à faire partager à leurs vassaux l'effort de guerre. Au nom de la lutte contre le nazisme, et pour la liberté, les États-Unis fixent unilatéralement le prix des matières premières qu'ils payent en dollars inconvertibles. Peu de pays tireront leur épingle du jeu. Seul le Brésil de l'Estado novo gétuliste, après avoir un temps flirté avec l'Allemagne, embrasse avec un zèle inattendu la cause des démocrates.
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Ces régimes dits populistes apparaissent donc comme des systèmes de transition qui s'efforcent d'intégrer les classes populaires dans l'ordre politique et social existant à travers une action volontaire de l’État. On peut insister à cet égard sur l'aspect de collaboration de classe de ces formules politiques, sur la subordination, ou du moins l’absence d'autonomie, des organisations ouvrières ; on peut également souligner le rôle de « vaccin contre la révolution » que jouent dans de tels régimes les politiques sociales, la rhétorique populaire, et la reconnaissance sous l'égide de l’État des syndicats ou des organisations paysannes. Mais ce qui frappe par-dessus tout et apparaît donc au cœur même de la singularité de ces régimes, ce sont les rôles contradictoires qu'ils assument : ils font appel à la mobilisation des classes dangereuses et tentent de garantir, en même temps – on pourrait presque dire par ce moyen même - , le maintien du modèle de domination. Se substituant à des modalités passives et traditionnelles d'obtention du consentement des masses subordonnées, ces régimes ne pratiquent pas l'exclusion par la force mais ne reposent pas pour autant sur les mécanismes intériorisés et volontaires en œuvre dans les démocraties libérales.
De là vient sans doute l'aspect de psychodrame bruyant et parfois incompréhensiblement chaotique qui caractérise l'idéologie populiste. La violence verbale y est généralement à l'honneur. La « mise à mort » des oligarchies, voire des capitalistes ou des sociétés étrangères, est fréquemment invoquée. C'est « le chaos au nom de l'ordre ». De fait, on ne touche guère aux intérêts des groupes ainsi attaqués. Les réformes de structure, quand on en effectue, ce qui est rare, ne dépassent pas le stade embryonnaire.
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Aujourd'hui, le processus d'accaparement des terres se poursuit, même si des réformes agraires plus ou moins approfondies et les divisions par héritage des propriétés semblent parfois contredire cette tendance ininterrompue. La lutte des communautés et des petits exploitants contre l'emprise ou l'empiètement des grands domaines est loin d'appartenir au passé. Elle rythme l'histoire agraire actuelle : à l'expropriation brutale des métayers ou des "précaristes" répond l'invasion collective des terres inoccupées ou non cultivées. Le Pérou indien apparait, jusqu'aux réformes de 1968, comme le lieu classique de ces affrontements séculaires dont atteste, de Ciro Alegria à Manuel Scona, une riche littérature indigéniste. En Colombie, dans les zones indiennes du Cauca, les indigènes relégués dans les resguardos des terres hautes et pauvres ne sont pas à l'abri des pressions domaniales. La violencia, cette guerre civile rampante qui a déchiré le pays pendant une dizaine d'années à partir de 1948, aurait eu entre autres conséquences de hâter la modernisation capitaliste du secteur agraire au prix notamment de l’expulsion des fermiers et des petits propriétaires des terres qu'ils cultivaient. Une enquête faite dans une région "violente" du département du Valle au sud du pays (Caicedonia) indiquerait que 80% des paysans sans terres en 1970 étaient propriétaires avant 1940.
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En Argentine, l'accueil enthousiaste réservé par la hiérarchie [catholique] aux régimes militaires successifs n'a rien d'exceptionnel. En 1966, l’archevêque de Buenos Aires, entouré d'une équipe de chrétiens « préconciliaires » et messianiques, bénissait le coup d'état du général Onganía d'un « c'est une aurore pour notre pays » retentissant. En dépit des assassinats de religieux, de catéchistes, et même d'un évêque, qui avaient tous pris le parti des « classes dangereuses », la compromission d'une partie du clergé et de la hiérarchie avec la sanglante dictature militaire du général Videla et de ses acolytes en 1976 fut particulièrement voyante. Le vicaire aux armées (Mgr Tórtolo) alla jusqu'à exalter l'action purificatrice de l'armée débarrassant le pays de la subversion. Si certains évêques participèrent dès 1979 aux différentes institutions de défenses des droits de l'homme, ce n'est qu'en août 1982 que l’Église institutionnelle manifesta sa préoccupation au sujet des 8000 à 10 000 « disparus » de la « guerre sale » qu'elle avait ignorés jusque là. En revanche, sous la démocratie rétablie, la promptitude de la Conférence épiscopale à fustiger la licence des mœurs et l'éventuel rétablissement du divorce est significative d'une bonne conscience conservatrice et souvent antidémocratique qui ne s'est jamais démentie.
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Si le Brésil doit son nom à un arbre tinctorial, la zone da mata, zone sucrière par excellence du littoral de Pernambouc, rappelle son origine forestière - mata signifiant "grande forêt". On reconnaît là la marque d'un continent jeune, récemment mis en valeur après avoir été conquis par l'Européen. Cette agriculture dévastatrice de la forêt est conforme aux modalités d'exploitation d'un continent où seule compte la rentabilité immédiate, où la préoccupation de l'avenir est secondaire : le profit rapide que donne l'exportation est à l'origine de cette "agriculture de rapine".
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