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EAN : 9782253053798
159 pages
Le Livre de Poche (01/06/1990)

Note moyenne : /5 (sur 0 notes)
Résumé :
Un écrivain et sa mémoire. Lieux, rêves, mots, souvenirs, tout un fourmillement savoureux et coloré qui compose ce que l'on nomme un " univers intérieur ". Avec Œil de chèvre, Leonardo Sciascia offre en pâture son alphabet intime, cortège et fête du passé. Anecdotes, historiettes, légendes, mais aussi scènes prises sur le vif, et encore présentation d'objets ou rappel d'une tradition. Il y a des chevaux, des ânes, des chiens, des chèvres et des escargots ; des ouvri... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
C'est toute la Sicile qui défile au cours des entrées de ce dictionnaire des expressions siciliennes. Une Sicile oubliée dont on découvre des traditions ancestrales, souvent très imagées. Parfois ces locutions sont uniquement employées dans certaines localités, comme celle de Racalmuto, village de Sciascia. C'est aussi toute son enfance que l'écrivain expose au lecteur à travers ses recherches étymologiques. Lorque l'on commence la lecture, on est tout d'abord un peu surpris de ce choix alphabétique mais, en le parcourant, on s'immerge vraiment dans ce milieu paysan de la Sicile profonde, aussi bien que pourrait le faire un roman. Chaque locution est explicitée en détail et replacée dans son contexte. On n'est finalement pas très loin des nouvelles de « La mer couleur de vin ».
Je connais très peu cette région de l'Italie, n'y ayant fait qu'un bref passage, dans les années 80, une brève nuit dans l'attente du ferry pour la Tunisie le lendemain matin à l'aube. Pourtant j'en garde un souvenir fugace. C'était à Trapani à l'extrême pointe occidentale de l'île. Attablé à une terrasse du petit hôtel le soir de mon arrivée, dans une ambiance quasiment nord-africaine, au bout du bout de l'Italie. Ce petit port avait une allure complètement différente de l'Italie du Nord d'où je venais. Et, à travers le texte de Sciascia, où l'on trouve plusieurs références à Pirandello, me revient en tête un souvenir de mon passage lié aux « Nouvelles pour une année », interprétées par Vittorio Gassman et sa troupe lors d'un spectacle. Je retrouvais, ce soir là à Trapani tout cet univers sicilien un peu suranné, comme quelque chose d'irréel, tout comme la traversée du détroit de Messine en train dans le ferry que l'on retrouve dans « La mer couleur de vin ». J'ai toujours beaucoup de difficulté à ne pas lier un livre à un contexte, un souvenir. Comme Pirandello, Sciascia nous immerge dans son univers sicilien, d'où l'on a parfois du mal à s'extirper. Un livre que je conseille à tous les amateurs d'Italie et de littérature italienne.
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Sous forme d'un abécédaire de termes et expressions siciliennes, voire même typique d'une seule localité, l'auteur parle de son enfance, de souvenirs, des marques d'une culture. D'allusions à Pirandello, le plus connu, jusqu'au chien de Monsieur T. (Je réinvente), des faits et faits-divers.
Ces entrées sont parfois intéressantes, parfois un peu moins. En tout cas, elles sont vivantes, et l'écrivain est un chercheur passionné.

ARSU.
A TUA M'ARRACCUMANNU LAMPIUNI / QUANNO PASSU DI CCA LUSTRU M'HA' FARI.
CU TUTTU CA SUGNU UORBU, LA VITA NIERA.
C'È CORI E CURUZZU.
FUOCU ALL'ARMA.

Cet oeil de chèvre a réussi à me toucher par moments, c'était pas évident...
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Dans cet ouvrage, le grand intellectuel sicilien rédige, presque en forme de dictionnaire, un compte-rendu de dictons de son village. Mais la traduction mot-à-mot en italien est incapable de rendre le sens sans un paratexte explicatif. Serait-ce finalement un exemple d' "intraduisible"? En tout cas un admirable document ethnographique et littéraire.
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Citations et extraits (6) Voir plus Ajouter une citation
UOCCHIU DI CAPRA - Oeil de chèvre. Se dit du soleil, lorsqu'à son coucher il est coupé obliquement par des bandes de nuages : on dirait alors une pupille qui regarde en louchant. On l'interpréte comme un indice de pluie pour le lendemain à la même heure.
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ARSU. - Brûlé. Mais c'est aussi l'as des cartes à jouer. "Cu havi assa', havi arsu", qui le plus a l'as : dans le jeu de la vie, face à la mort. Pas l'as qu'on tirerait adroitement de sa manche, pur gagner : mais toujours en perdant.
Le Pasqualino (Vocabulaire sicilien, 1795) enregistre seulement le terme "assu" : "nom d'un seul signe". Ce qui est aussi le sens de "arsu" puisqu'un joueur à qui j'ai demandé une fois pourquoi on appelait l'as "arsu" m'a répondu : parce qu'il est seul. Brûlé de solitude donc. Et il faut peut-être entendre un écho affaibli de la solitude de l'"arsu" dans la nouvelle de Pirandello Lontano, où une série de circonstances retient pour toujours à Porto Empedocle le héros, un marin scandinave qui s'appelle lars ; et les gens pensant précisément à la carte à jouer, son nom devient un surnom : "l'Arso". Lars est véritablement brûlé : brûlé de solitude et de nostalgie.
On peut encore ajouter qu'une devinette populaire sur les cartes à jouer - elle est en italiuen, mais l'évidence on l'a concoctée à Racalmuto, ou dans une localité voisine - commence ainsi "Arso, signori miei, son dalla sete" [Brûlé, messieurs, je suis par la soif], ce qui veut dire que l'italianisant versificateur lui-même était convaincu qu'en italien aussi, l'as se disait "arso".
Dans le Journal de Jules Renard, l'as est également l'image de l'extrême solitude : "Son coeur délaissé, abandonné, isolé, plus solitaire qu'un as de coeur au milieu d'une carte à jouer" ; et il se peut u'elle lui soit venue du monde paysan qu'il connaissait si bien, et qui n'est pas sans nombreuses correspondances avec celui que j'ai connu.
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Luigi Pirandello intitula son théâtre "Masques nus". Nus devraient être les visages, une fois les masques enlevés. Mais, au contraire, ils sont invisibles, inconnus, peut-être n'existent-ils pas. Il n'y a que des masques. Nous ne sommes que des masques.
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ASTURA. - Comme "asture" en ancien français (Montaigne) : à cette heure. Mais l'expression mérite un petit commentaire quand elle est prononcée toute seule, et de façon suspensive et exclamative. Alors elle se charge malicieusement, comme dans certaines pages de Brancati, d'images gaillardes et érotiques. Par exemple ; un ami qui vient de se marier, ou on sait qi'il est en train de filer une aventure amoureuse : il suffit qu'entre les amis restés à leurs occupations habituelles, leurs rencontres coutumières au cercle, quelqu'un ajoute à l'évocation de son nom l'exclamation "astura !" pour que les imaginations érotiques se déchaînent jusqu'à leur paroxysme : comme si l'autre, absent, ne pouvait faire, à toute heure, à toute minute, que ce qu'inépuisablement ils imaginent.
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A TIA M'ARRACCUMANNU LAMPIUNI/QUANNO L'ASSU DI CCA LUSTRU M'HA' FARI. - Je me confie à toi, lampion / quand je passe par ici, de la lumière tu dois me faire. Afin que ma bien-aimée qui attend à la fenêtre me voie.
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Videos de Leonardo Sciascia (3) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Leonardo Sciascia
Le 1.10.2022, Hubert Prolongeau présentait “Actes relatifs à la mort de Raymond Roussel” de Leonardo Sciascia dans “Mauvais Genres” (France Culture).
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