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EAN : 9782081229921
Flammarion (24/10/2009)
3.62/5   40 notes
Résumé :
En 1990 paraissait ce "brûlot" qui proposait d'élever la Nature au. rang de sujet de droit. L'état de violence "sans limites" entre l'Homme et le Monde appelait L'élaboration d'un nouveau, droit, à fonder sur un Contrat naturel qui compléterait le Contrat social établi, entre les hommes. Cette solution, juridique, commence à pénétrer les textes législatifs de nombreuses nations, y compris ceux de la France, où l'on parle enfin de citer quelques éléments de nature da... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (7) Voir plus Ajouter une critique
Il est toujours agréable et stimulant de retrouver la parole si personnelle et singulière de Michel Serres, même si c'est, comme ici, dans un ouvrage déjà ancien (1990) rappelé d'urgence au coeur de nos préoccupations actuelles par cette nouvelle édition (2020) accompagnée d'une préface posthume. En effet, sensible aux « doigts de rose » des aurores homériques (p. 63), le philosophe, décédé en 2019, n'avait pas attendu que se lève la chouette de Minerve (à la tombée d'une nuit que tout annonce d'apocalypse) pour prophétiser le pire si nous tardons encore à réagir. Car le constat est sans appel : le contrat sur lequel se sont accordées nos sociétés, et peu à peu toute l'humanité moderne, (le fameux « contrat social » de la philosophie des Lumières) a tout simplement oublié, dans son préambule comme dans ses dispositions, la Nature à laquelle nous appartenons ; et celle-ci, aujourd'hui, nous rappelle violemment à l'ordre. Michel Serres trouve les mots et le ton justes pour nous alerter sur la catastrophe encourue si nous ne savons pas renégocier ou réviser à temps ce contrat, et il se fait avocat passionné et convaincant pour dénoncer les clauses caduques de l'ancien contrat et défendre la cause d'une Nature outragée, bâillonnée et déchaînée. On ne peut que le suivre dans son plaidoyer en faveur d'un « contrat naturel » qui, avant l'issue fatale, mettrait fin aux hostilités (guerre séculaire engagée par l'homme contre une nature pillée, exploitée et aujourd'hui menacée de destruction et réactions de plus en plus violentes et étendues de celle-ci contre l'espèce-parasite) et qui poserait enfin les conditions d'un mariage de raison, à défaut d'une entente plus cordiale.


Michel Serres parle la langue imagée et colorée des prophètes de la Bible, dont il prend les accents pour vitupérer le cours du monde, et en même temps celle, généralisante et parcimonieuse, de ces sages populaires et taiseux qu'étaient les paysans ou les marins d'antan. Langue donc, à la fois et paradoxalement, diserte et elliptique, savante et rustique, charnelle et diététique... Ce qui lui donne un charme unique mais ambigu, séduisant et maléfique, qui porte autant de conviction que de confusion. Car cette langue, esthétiquement savoureuse, n'est guère rigoureuse, philosophiquement. On assiste à un brassage impressionnant, émaillé de pépites d'intelligence qui étincellent un peu partout, et éblouissent, mais qui échouent à produire une lumière capable d'éclairer et de conduire le raisonnement. le chemin en est trop erratique pour une raison qui demande, elle, à aller tout droit.


Or le projet du livre (au moins tel qu'il est redéfini dans la préface récente) est on ne peut plus explicite et ambitieux : « le Contrat naturel prétendit, au scandale des spécialistes, conférer aux choses du monde [« l'eau, l'air, le feu ou l'énergie, la terre et les vivants… l'eau de la mer ou les glaciers des montagnes » était-il précisé juste avant : soit —dirions-nous aussi— les écosystèmes, les biosphères ou les espèces vivantes, chacune indispensable à l'équilibre et à la richesse de la biodiversité] une dignité juridique égale à celle des humains » (p. 13). À quoi Michel Serres ajoute encore, pour préciser, à la fin de cette même préface, que ce livre apporte une « solution juridique », laquelle « commence à pénétrer les textes législatifs de nombreuses nations, y compris ceux de la France, où l'on parle enfin de citer quelques éléments de nature dans la Constitution » (p. 21). Autrement dit, si je comprends bien, il pense le « Contrat naturel » comme le fondement rationnel sur lequel asseoir, juridiquement, la revendication de droits nouveaux pour des non-humains.


Hélas, la suite du livre ne tient pas vraiment l'engagement. Certes Michel Serres montre très bien : 1°) comment le « Contrat social » des XVIIe et XVIIIe siècles a été conçu pour sortir de la nature (de « l'état de nature ») et non pour l'intégrer ; 2°) que des siècles d'« arraisonnement » de la nature ont renversé le rapport de forces entre l'espèce humaine et la nature et qu'aujourd'hui c'est la première qui tient la seconde à sa merci ; 3°) qu'en remettant de la réciprocité dans leur relation, le « Contrat naturel » est le seul moyen d'assurer leur survie à l'une et à l'autre. Mais au-delà de la description et de l'exhortation, fournit-il la démonstration (ou au moins l'argumentation) annoncée ? Jugeons-en plutôt :

• « Nous pensons le droit à partir d'un sujet de droit » (p. 84). La Nature et les objets qui la composent peuvent-ils donc être considérés comme des sujets de droit ? Réponse : La Nature « conditionne la nature humaine qui, désormais, la conditionne à son tour. La nature se conduit comme un sujet » (p. 85) ; « les objets eux-mêmes sont sujets de droit et non plus simples supports passifs de l'appropriation, même collective » (p. 86). Autrement dit, je te tiens tu me tiens par la barbichette… et le tour est joué ! Un peu court, on en conviendra pour balayer toutes les objections humanistes…

• « Dans quel langage parlent les choses du monde pour que nous puissions nous entendre avec elles par contrat ? » (p. 90). Réponse immédiate : « En fait la Terre nous parle en termes de forces, de liens et d'interactions, et cela suffit à faire un contrat. » (p. 90). Un peu court là encore ? Alors M. Serres précise plus loin sa pensée en évoquant le « contrat naturel passé en silence et par peur et respect entre l'ire grondante du gros animal social et la noise, bruit et fureur de mer. » (pp. 92-93). Ire grondante et noise bruyante et furieuse se font certes entendre, mais juriste ou philosophe peuvent-ils les tenir pour un échange verbal et contractuel ?

• En fait le nerf de l'argumentation de Michel Serres, beaucoup moins simpliste, semble être ailleurs : celui-ci évoque en effet avec insistance le contrat épistémologique, interne à la communauté scientifique et sorte d'engagement professionnel tacite, qui fixe les règles, méthodes, procédures, le champ de compétence ou de juridiction, les codes et la déontologie etc. des spécialistes et qui, dans les sciences expérimentales, intègre aussi la nature elle-même comme pierre de touche décisive de la vérité. Sur la base ou la foi donc d'un tel contrat où la science se fait l'interprète autorisée de la nature, la solution que semble préconiser l'auteur consisterait à mettre cette science (représentée par les experts) « à la barre » (du tribunal comme du gouvernail, c-à-d du gouvernement des hommes et des choses). Paraphrasant le texte célèbre de Jean-Jacques Rousseau : « Galilée le premier enclot le terrain de la nature, s'avise de dire : ceci appartient à la science […], il fonde la société scientifique en lui donnant son droit de propriété, du coup fonde en profondeur la société moderne. le contrat de connaissance s'identifie à un nouveau contrat social. » (pp. 166-7). Solution verbeuse encore ? Rêvée, souhaitée, imaginée ? En tout cas, elle ne paraît pas s'imposer d'évidence, ni logique ni pratique.

• Bien qu'il postule, in principio, la sortie de la nature, le « Contrat social » entérine (du moins dans la version de John Locke) des droits naturels antérieurs inhérents à la nature humaine. Mais à celle-ci exclusivement ; car, avant une époque récente, la nature extérieure restait indifférente aux actions locales des groupes humains, lesquels pouvaient donc ne s'occuper que d'eux-mêmes. Il en va différemment aujourd'hui où, à l'action globale des humains, la Terre réagit aussi globalement. À partir de là, Michel Serres élargit considérablement la notion de droit naturel : en l'étendant à toute la nature, au lieu de le réserver à l'homme ; en le sortant des seuls mots pour lui donner aussi la dimension de liens matériels attachant étroitement les hommes et la nature dans tout un jeu d'interactions. « Un contrat [d'après l'étymologie : contractorium, noeud coulant] ne présuppose donc pas forcément le langage : il suffit d'un jeu de cordes. » (p. 205). Ainsi « nous vivons contractuellement avec la Terre […] le contrat naturel ressemble à un contrat de mariage » (p. 210).

Ressemblances, analogies, évocations, associations verbales… C'est là le péché mignon de l'auteur, de s'abandonner à une sorte de rêverie poétique, ou de dérive langagière et ludique, au détriment d'une pensée plus rigoureuse et logique. À preuve, le dernier chapitre, un peu vacillant entre hauteur de vue et vertige, vagabondage et divagation, souplesse et élasticité du raisonnement. Par exemple : grisé par le jeu des mots, on cascade de « corde » en « cordée », puis [mélangeant corde et coeur] en « concorde » et en « cordialité », pour finir [C.Q.F.D. ? « Qui s'étonne que la corde lie encore le savoir rigoureux et le droit ? », p. 207], à la faveur de l'étymologie précédemment évoquée, en « contrat », que, du coup, on ne pourra certes pas dire établi « en bonne et due forme » ! Mais, nonobstant, pourquoi s'arrêter en si bon chemin ? le « contrat » implique des « traits », donc il s'écrit, et il lie d'autant plus fortement les signataires ; mais par là il évoque aussi l'« attraction », donc Newton, le système des planètes… et le « contrat naturel » des sciences physiques qui conduit les savants à la barre ! Retour donc au nerf de l'argument, de quoi se sentir passablement étourdi…
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J'avais vraiment très envi de lire Michel Serres, aillant beaucoup aimé sa série de documentaire sur L Histoire des Sciences, sur un ton très philosophique...
J'ai eu un peu peur, je l'avoue de le lire quand je me suis aperçue qu'il y avait un épais chapitre sur la Guerre... Et pourtant, même si quelques détails sont exagéré, oui, Michel Serres a vraiment une vision claire de la situation... J'y reviendrai...
Son livre commence par une Préface à la Nouvelle édition... Et on a envie de dire, laquelle??? Car oui, il y a au moins 3 éditions : 1990 (l'originale sans la préface) 2018 et 2020 ? On aimerai que les préfaces qui ne figurent pas dans l'Edition originale, soit daté... Mais à part cela rien à redire... Dès le début, Michel Serres a un discours compréhensible par tous... Et la préface est vraiment utile... Elle parle de politiques qui parlent d'écologies sans interroger les Ecologues (le livre de Ferry qui ne mentionne pas les biologistes dans son livre sur les 7 écologies en est un parfait exemple, et à lire le Pr Didier Raoult, on s'aperçoit qu'on n'écoute pas plus les médecins, il n'y en a pas un seul dans la commission gérant la crise!).
C'est que la division littéraires et scientifiques est grande, les uns ne comprenant pas les autres, parce que oui, la sélection sélectionne des spécialistes après une mauvaise éducation dans l''Education Nationale, et les rares personnes multi disciplinaires de talents ne sont écouté ni par les uns ni par les autres (Philippe Charlier, Michel Serres, Hubert Reeves.... Même pas par le Pr Didier Raoult, pourtant très bon chercheur, mais qui s'enferme dans sa spécialité... même s''il a la bonne démarche pour être ouvert, il est enfermé dans le monde médical, tout cela pour dire, que nombreux sont les exemples que Michel Serres ne cite pas, mais vont dans son sens.)
Après avoir parler de la séparation Science / Littérature qui nous divisent, il parle de non dialogue, amplifié par le brouillage sonore de la télévision... Comme le brouillage pendant la Seconde Guerre mondiale des Allemands empêchaient d'écouter radio Londres... On pourrait le sentir un brin antimilitariste, mais je ne l'affirmerai pas... Parce qu''il a raison... Nous faisons la guerre à la planète... et bien avant de lire son livre, je disais, cette guerre, je ne sais pas si la planète la perdra, ce qui est sûr c'est que nous allons la perdre...
De là il explique notre indécisions à régler tous les problèmes.... A travers la guerre,; que oui nous faisons économiquement, pas seulement avec des fusils, (voir les excès de défoliants et de Napalme au Vietnam, mais dans des buts plus économiques, l'histoire du scandale du Teflon, régler qu'en partie judiciairement( voir le Film Dark Water, et comment un agriculteur a tout perdu, y compris la vie!) il y a quelques années, et le film sur les pollutions de l'Eau : Erin Brockovich seule contre tous. Les moyens de télécommunications n'ont jamais servi autant à faire la guerre, y compris économique... Nous faisons une guerre économique aux Chinois, et c'est pareil, là aussi nous perdrons, et cela Michel Serres n'en parle pas, car le Chinois sait se reposer et préparer la lutte pour agir au bon moment, alors que nous nous ne savons pas...
Après nous avoir expliquer pourquoi nous n'y voyons pas clair, Michel Serres nous propose de réfléchir, de nous poser pour y voir plus clair, et d'agir efficacement aussi bien sur le long terme que le très inefficace cours terme... de revoir des notions fondamentales, de sciences, de droit pour agir finalement en étant de temps en temps en paix avec nous même, et donc les autres et la planète... Un livre que tout bon citoyen devrait lire... Et qui met les bases de la vraie réflexion... Sortons de l'ignorance où l'on nous a formaté...
Le livre part d'un constat, même athée nous devons nous aimer globalement en tant qu'humain (et pas seulement nos voisins ce qui conduit au gangstérisme et au racisme) , mais ce n'est que la première condition, le deuxième étant que nous devons, comme un bouddhiste, ou un St François d'Assise, peut importe notre Dieu, aimer le monde...
Et un autre constat, la science est né de la création de problème humain, (sur lesquels d'ailleurs elle ne doit pas créer d'effet négatifs prédictibles, ni de disputes de paternité, d'où elle est postérieure à la loi dans ces limites) et c'est la que le droit de la Nature pèche... car on a oublier de l'incorporer dans le droit, comme question de problème de survie humaine, comme par intérêt on n'a pas tenue compte des noirs dans un texte fondateur des Etats Unis, ou que le droit des femmes à été parfois biaisé alors qu'elle fait partie de l'unité Humanité, donc de l'Homme avec un grand H.
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Michel Serres dresse un bilan qu'il veut serein et objectif de l'état du monde tel qu'il le comprend en 1990. Il comprend, avant beaucoup d'autres, que les rapports de production et d'utilisation des ressources de la nature se sont inversés en moins de 200 ans : de menaçante et dominatrice, la nature est devenue menacée et dominée par les progrès démiurgiques des techniques humaines. Par ce livre pionnier, il tire comme une sonnette d'alarme et verse même dans ce qu'il faut bien appeler un certain catastrophisme peu encourageant.

Mais heureusement, il n'oublie pas qu'il est philosophe et il considère que son rôle est d'apporter à la Cité des solutions pour lui permettre de mieux vivre et c'est ce qu'il livre dans ce Contrat naturel. Il dit en substance : Nous devons nouer un contrat de symbiose avec le monde qui remplacera le contrat de parasitisme, né des effets négatifs des révolutions technologiques des derniers siècles, dont la finalité était conçue au seul profit des hommes. le contrat naturel aura donc pour vocation de compléter – sans le détruire – le contrat social imaginé au seul avantage des humains au XVIIIe pour y ajouter un contrat au bénéfice mutuel des hommes et du monde. Il fait naître ainsi la notion d'un homme Tiers-instruit. Un thème qui lui sera cher toute sa vie.

La prose si particulière de Michel Serres rend 'argument convaincant au point qu'il est difficile de ne pas adhérer à ce constat et à ce conseil.

Il est à regretter de mon point de vue que Michel Serres, comme souvent dans ses écrits, abuse de ce style si particulier qui confine parfois à l'ésotérique et qui vient obscurcir la clarté du message pourtant si important et si bien vu. Mais il fut un si grand penseur qu'on lui pardonne bien volontiers ! Merci, Monsieur Serres pour ce très beau texte.
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J'ai appris à connaître Michel Serres dans cette belle série documentaire diffusée en 1991, Tours du monde, tours du ciel, où avec sa voix de compteur, il explorait l'histoire de l'observation du ciel, des pratiques préhistoriques empiriques jusqu'à l'astronomie scientifique la plus récente.
Je ne connaissais pas encore ses écrits philosophiques et sa grande aptitude à croiser la science, l'histoire et la culture.
J'ai par la suite lu certain de ses ouvrages philosophiques sur les questions environnementales tels La mal propre ou La guerre mondiale. Et bien que j'avais entendu parlé depuis longtemps de son ouvrage phare, le contrat naturel, je n'en termine sa lecture qu'aujourd'hui dans une édition de 2018.
Je découvre avec stupeur que Michel Serres avait près de 30 ans d'avance sur son temps en nous proposant l'idée, improbable alors mais plus évidente aujourd'hui, que la nature qui constitue notre cadre de vie, nous nourrit, nous fournit toutes les matières, l'énergie et l'eau avec lesquels nous nous enrichissons, puisse avoir des droits et être un objet de droit.
En effet, pour protéger une rivière, une forêt, une mer, une montagne, devant la folie destructrice des hommes, seul un statut juridique formel, peut permettre d'ester en justice pour défendre un écosystème non pas comme une simple ressource mais comme un ensemble d'interactions complexes entre des vivants et des milieux géophysiques dynamiques.
Les références dans ce livre sont avant tout philosophiques et vont et viennent de l'antiquité au contemporain (de 1989).
Il s'agit d'une lecture enthousiasmante entrecoupée de passage où si les références culturelles manquent, elle devient alors plus laborieuse car les insinuations culturelles et philosophiques dans les écrits de Michel Serres sont nombreuses. En revanche, aucun propos ne semble de trop et tout semble justement réglé.
Une référence à n'en pas douter dans l'univers des pensées vertes car Michel Serres est toujours resté optimiste et plein d'espoir pour l'avenir de l'humanité.
Un phare dont nous aurions bien besoin aujourd'hui.
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La lecture du Contrat naturel donne une petite idée de l'époustouflante intelligence et de l'universelle culture de Michel Serres.
J'en trouve l'écriture superbe d'originalité, de concision et de légèreté pour la transcription d'une pensée qui tangente des altitudes jusqu'auxquelles elle échoue pourtant quelquefois à embarquer le lecteur.

Mais quelle déception quant à l'apport performatif -pour paraphraser l'auteur- de l'ouvrage!
De quoi s'agit-il?
L'humanité est en passe de détruire son hôte, la Terre, dont elle fait partie pour n'avoir pas considéré que l'ensemble mondial forme un système fermé à l'intérieur duquel toutes les parties sont interdépendantes, et pour avoir laissé néanmoins se développer et perdurer les égoïsmes locaux. Respectons-là plutôt, de toute urgence.
Comment? En légiférant, d'où le contrat naturel

Tout ça pour ça?
Dans sa préface à la nouvelle édition de 2018 (la première date de 1990), Michel Serres écrit "...La question était si neuve que l'on pouvait encore garder son calme et se livrer à des spéculations de théorie."
Voilà!
Nous sommes en présence d'un très beau poème scientifico-juridique dans lequel la théorie plutôt tisse la tapisserie de l'avant qu'elle ne construit le patron de l'après. Toujours dans cette même préface "...mais la vraie solution serait de disposer d'un modèle de remplacement. Il nous manque......Je ne suis même pas certain d'avoir quelque idée sur le modèle d'un tel renouveau politique..."

En somme, un brillant exercice de style dans lequel reconnaissons que Michel Serres excelle.





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Citations et extraits (50) Voir plus Ajouter une citation
« Qui commande ? (p. 14)

Or les sciences humaines ou sociales s’adonnent plutôt à la description, alors que les exactes expérimentent, expliquent, puis énoncent des lois. Mieux encore, et cela est décisif, les unes évaluent l’état présent de la société, les autres font naître des actions et des entreprises qui transforment, dans sa réalité inerte et vive, l’état du monde présent et à venir, physique, vivant et collectif.

» Or encore, et là gît le point décisif, les gouvernants, administrateurs, journalistes, acteurs des médias en général, bref, ceux qui, dans nos société détiennent la parole publique, donc se font le mieux entendre et, par-là, jouissent d’influence, ont tous, sans exception, été formés aux sciences humaines, économie, sociologie, commerce, finance, sciences politique, etc.
Leur parole a une efficacité majeure sur la société, mais aucun impact sur le monde.

»De leur côté, ceux qui contribuent aux transformations techniques ou biologiques, font basculer le monde et métamorphosent la société. Qui a le plus marqué le siècle, qui s’y est le plus engagé, de Sartre ou de Fleming, l’inventeur de la pénicilline et, par médiation, l’auteur de la progression verticale de l’espérance de vie ; de Bourdieu ou de Turing, l’inventeur de l’ordinateur ? Alors que l’un se trompa lourdement, connaissez-vous quoi que ce soit de l’autre, qui a changé la face du monde et bouleversé nos relations, notre accès au savoir, nos pratiques quotidiennes du temps et de l’espace, nos métiers, le travail en général ? D’un côté, de l’idéologie, de l’autre, un travail de mutation réelle, actif, permanent, réussi. »
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[Préface de l'Edition de Flammarion 2020]
Dans les projets portés par le gouvernement français, le terme "Pacte écologique" a été préférable à Contrat naturel, "Pacte" paraît un on choix, d'autant qu'il arrêterait ce que j'ai nommé, dans un autre livre, La Guerre mondiale, c'est à dire le conflit qui, depuis peut être un temps immémorial, mais plus amplement depuis la révolution industrielle,[Note dde Pégase Shiatsu en faite cela à commencer un peu avant la révolution, avec le café croissant déjà instauré au petit déjeunée par Marie Antoinette, alors que pas en accord avec nos besoins physiologique, qui a conduit à un ersatz de café pendant le blocus britannique sous Napoléon la Chicorée industrielle, qui n'est pas la chicorée sauvage... déjà cela commençait l'escalade!] oppose les humains au monde qui soudain, et comme en retour, s'oppose à l'humanité, à risque mortel partagé.
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P 143 édition 2020
Toute évolution ne nait que des fragilités. Notre contrat moderne de liberté exige, ainsi de la méconnaissance, j'ignore ce que dit et fait mon voisin, je ne rapporte rien de tout cela au cas où cela viendrais à ma connaissance, sauf si je me targue de science sociale, ou si je m'inscris au registre policier des mouchards. Et je compte bien qu'il agit de même à mon égard. Du coup le contrat contemporain inverse en partie celui de Rousseau, écrit ou non écrit, à l'antique.
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P 211 édition 2020
Jusqu'à ce matin même nous échappait la nature : ou nous la limitions à l'expérience courte du petit carré de luzerne ; ou nous faisions un concept abstrait, appliqué à l'homme, parfois ; et si nous l'étudions dans les sciences, nous la découpions en lopins plus petits ; l'une des crises de notre savoir vient de ce qu'il ne saurait fonctionner sans découpage [note de Pégase Shiatsu contrairement à la médecine traditionnelle chinoise qui est holistique] et qu'il doit résoudre les problèmes posés par leur intégration.
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Le parasite prend tout et ne donne rien : l'hôte donne tout et ne prend rien. Le droit de maîtrise et de propriété se réduit au parasitisme. Au contraire, le droit de symbiose se définit par réciprocité : autant la nature donne à l'homme, autant celui-cI doit rendre à celle-là, devenue sujet de droit.
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