AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
EAN : 9782864325857
115 pages
Verdier (27/08/2009)
3.33/5   3 notes
Résumé :

Un homme se souvient de son enfance marocaine, tout entière captive de l'amour inquiet et jaloux qu'il voue à sa mère - elle-même séparée de son fils par ses rêves mélancoliques, ses attentes vides, et plus tard les secrets de l'adolescent. Désir, effroi, tendresse et provocation peuplent moins leurs paroles que leurs silences, car rien de ce qui constitue leur jeu, dans ce qu'il pourrait avoir de trouble et de... >Voir plus
Que lire après Assise devant la merVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
L'éclat inaltérable de l'amour maternel.

Publié en 2009 aux éditions Verdier, l'avant-dernier roman de Pierre Silvain (1926-2009), dont le somptueux «Julien Letrouvé colporteur» m'avait déjà transportée, évoque les souvenirs, gravés dans la mémoire d'un homme, d'une enfance au Maroc et de la relation d'amour possessif et tourmenté avec sa mère, une mère qui lui tenait lieu de monde dans la ferme de son enfance, une maison blanche isolée non loin de l'océan, où son père, agriculteur taciturne, semble avoir été une ombre inaccessible.

«Là où depuis un moment elle se tient assise, face à l'océan, une vague plus forte de la marée montante déferle sans violence, l'entoure puis la dépasse, pour s'étaler et mourir derrière elle sur le sable que barre comme d'un trait d'écume pétrifiée un dépôt de coquilles blanches. Leur crissement, s'il arrive que le flux les atteigne, ne la fait pas se retourner, elle demeure les yeux fixés sur le large, sur le lointain, sur rien qui soit visible à l'enfant assis, lui aussi, en retrait, au-delà des coquilles. Dans l'abrupte lumière de l'après-midi, il ne voit que le dos découvert par l'échancrure en pointe du maillot de bain, la nuque au hâle léger, mais non les cheveux dont pas une mèche ne déborde d'un bonnet en caoutchouc noir enfoncé jusqu'au-dessous des oreilles. L'immobilité du corps, au bout d'un moment, finit par l'angoisser, de même que le silence de ce coin de plage où il a cessé peu à peu d'entendre, à cause de sa monotonie, la rumeur de l'océan. Ici, il n'y a personne qu'eux deux. Aucune autre présence, maintenant que la journée décline, si ce n'est l'ombre gigantesque qui recouvre l'enfant fatigué, l'ombre du père.»

La posture immobile de cette femme dans cette scène fondatrice, assise face à l'océan par lequel elle est arrivée sur cette terre marocaine, reflète sa solitude dans ce lieu perdu, et le lent écoulement des jours d'une vie pétrifiée, en dehors des jeux avec l'enfant et de fugaces moments d'une révolte vaine. Embarquée en 1921, loin «des verdures, des chemins creux et des prés humides» du centre de la France, elle a rejoint au Maroc un mari qu'elle connaissait à peine, et qui s'était établi quelque temps auparavant comme fermier, profitant de l'attribution d'un lot de colonisation.

Ces souvenirs d'une vie archaïque sont marqués par la proximité avec sa mère, par l'ordre familier et rassurant des jours que surplombe la menace, présente dès l'enfance, de la perte inéluctable de leur relation d'amour exclusive et de son existence même. L'arrière-plan historique du siècle, en particulier la seconde guerre mondiale, se fait entendre en échos assourdis depuis cette ferme recluse, comme si la grande histoire n'avait rien d'essentiel au regard de cette narration intime, jusqu'au moment de la décolonisation qui mettra un terme à cette vie marocaine, lorsque les parents aborderont sur les rives de la vieillesse de nouvelles solitudes.

«Ce sont maintenant un homme et une femme vieillis gardant, enfouie, la marque inaltérée de leurs années d'Afrique. Bien qu'ils n'en parlent pas entre eux, chacun en ressent l'emprise, dissemblablement, sans possible partage, sans nostalgie, sans regrets communs. Lui, a-t-il eu conscience, a-t-il jamais su que la solitude et l'âpreté du bled s'accordaient d'emblée aux siennes, qu'il attendait depuis toujours de pouvoir satisfaire, en le retrouvant là-bas, son tourmentant besoin d'une activité qui ne connaît pas de repos ? Son existence ici, bornée, vacante, il l'endure comme un congédiement, comme l'exclusion d'une autre vie qu'il n'avait pas choisi d'abandonner de son plein gré. Il donne peu à peu des signes de l'absence, de l'égarement où il va sombrer.»

Ce récit intime, situé dans le temps malléable des rêves ou des souvenirs, est bouleversant dans la narration d'une vie archaïque et solitaire et d'une relation entre une mère et son fils dont le souvenir intense brille de l'éclat d'un amour éperdu.

Retrouvez cette note de lecture sur mon blog ici :
https://charybde2.wordpress.com/2015/12/31/note-de-lecture-assise-devant-la-mer-pierre-silvain/

Pour acheter ce livre à la librairie Charybde, sur place ou par correspondance, c'est par là :
http://www.charybde.fr/pierre-silvain/assise-devant-la-mer
Commenter  J’apprécie          60
N°416 – Avril 2010
ASSISE DEVANT LA MER - Pierre Silvain – Éditions Verdier.

Gaston Bachelard écrit quelque part que l'enfance subsiste en nous toute la vie.

Ce récit est celui d'un homme qui évoque cette enfance marocaine à travers la figure de sa mère et de l'amour exclusif qu'il lui porte, avec, en contre-point, la silhouette du père qu'elle rejoint sur cette terre africaine où ils vont s'établir. Il la revoit assise sur une plage, apparemment oublieuse de l'enfant qui l'accompagne, il se remémore l'image du père, mais seulement à travers ses silences, ses absences et ses étreintes d'époux. Il incarne le travail de la terre, il est « ce revenant de l'aube qui, environné d'un silence de tombe à peine froissé, n'est déjà plus là », autant dire un fantôme qu'accompagne cependant le visage tourmenté de Samuel Beckett auquel son fils l'identifie. Il choisit de se souvenir de lui à travers des épisodes de sa vie, sa guerre dans le Rif, son mariage à trente ans, sa nouvelle vie dans une ferme d'Afrique du Nord, de l'histoire et de l'amour de ce pays, de la ferme isolée devenue dangereuse, des attentats aveugles, de la terre que l'on fuit à cause de l'indépendance, pour rester en vie et des tombes qu'on abandonne, la mort du père devenu désoeuvré et le veuvage de la mère. Il parlera aussi de la grande guerre, mais c'est comme si l'histoire du monde autour de lui ne comptait pas au regard de la sienne. Parce que c'est elle, Angèle, qu'il revoit, petite fille dans un village du Limousin. Il ne voit qu'elle, à la fois femme et mère, étrangère et familière qui alterne tendresse, attention et détachement. Il tente de profiter de ses moments de complicité et d'intimité avec elle. le narrateur, qui finit à la fin par décliner son récit à la première personne, lui donnant ainsi un tour plus personnel, refait à l'envers la vie de ses parents avant sa naissance autant qu'il évoque la sienne, en Allemagne, loin de cette mère qu'il adorait.

Bien qu'il ne soit pas un enfant unique de ce couple [deux autres sont restés en France et un autre frère naîtra emporté par le croup], le narrateur donne l'impression d'être seul face à cette mère qu'il nous présente au début, assise face à l'océan. Elle regarde au loin vers l'horizon et paraît absente. Il semble que le temps ne compte pas dans ces instants faits de détachement et de complicité et cette image silencieuse de la vie, évoque celle de cette même femme, face à la fenêtre de sa cuisine, qui entre silencieusement dans la mort. Il choisit de cristalliser son souvenir sur la figure maternelle toujours présente à son esprit malgré les nombreuses années écoulées depuis sa disparition.

Avec de nombreuses analepses[« le temps bouleversant du ressouvenir »], l'auteur, juste avant sa mort en 2009, nous fait revivre cette période de l'enfance, à la fois tendre et tourmentée, grâce à une écriture poétique et fascinante. La langue qu'il emploie pour son cette évocation de l'amour filial donne pour son lecteur un texte bouleversant, un véritable poème ne prose. Cet écrivain qui a été toute sa vie d'une grande discrétion offre là une oeuvre ultime, comme un message destiné autant à l'au-delà qu'à l'humanité du présent et de l'avenir. Son écriture précieuse et simple reste, pour notre plus grand plaisir.

© Hervé GAUTIER – Avril 2010 http://hervegautier.e-monsite.com






.
















Lien : http://hervegautier.e-monsit..
Commenter  J’apprécie          40
Un homme se rappelle les moments qu'il passait enfant au Maroc sur la plage en compagnie de sa mère et comme elle lui semblait lointaine en regardant les vagues se briser à ses pieds. Il se souvient qu'il avait peur de la perdre. le temps a passé. La petite famille est revenue dans son Limousin en 1955 au moment de l'indépendance, abandonnant la ferme familiale et les terres si péniblement défrichées par le père. Puis la mère meurt abandonnant l'enfant devenu homme.
Plus qu'un court roman (116 pages), ce livre est surtout une sorte de long poème en prose impressionniste et minimaliste, un ode à l'amour maternel, aux liens privilégiés entre un fils et sa mère. L'auteur ne se préoccupant pas de chronologie, les allers et retours dans le passé sont fréquents et c'est au lecteur à faire l'effort de s'y retrouver dans une histoire somme toute décousue. « Etrange et fascinante mise en abysse », dit la quatrième de couverture. Voire. A cette construction un peu aléatoire, s'ajoute un style filandreux constitué de phrases à rallonges et à la limite de la construction défectueuse.
Lien : http://www.etpourquoidonc.fr/
Commenter  J’apprécie          00


autres livres classés : amour maternelVoir plus
Les plus populaires : Littérature française Voir plus


Lecteurs (7) Voir plus



Quiz Voir plus

Les Amants de la Littérature

Grâce à Shakespeare, ils sont certainement les plus célèbres, les plus appréciés et les plus ancrés dans les mémoires depuis des siècles...

Hercule Poirot & Miss Marple
Pyrame & Thisbé
Roméo & Juliette
Sherlock Holmes & John Watson

10 questions
5274 lecteurs ont répondu
Thèmes : amants , amour , littératureCréer un quiz sur ce livre

{* *}