AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet

Joël Cornette (Autre)
EAN : 9782410015690
Editions Belin (27/09/2023)
4.5/5   5 notes
Résumé :
Il y a près de 40 000 ans, le Japon n’est pas encore l’archipel que l’on connaît : reliées au continent, ces terres aux reliefs hostiles et aux conditions climatiques et géologiques capricieuses – une trentaine de volcans sont en activité – accueillent les premiers hommes, une dizaine de milliers tout au plus, venus de Corée, de territoires plus au Sud ou encore de Sibérie. Son immensité longitudinale a des conséquences sur le développement des sociétés et, au cours... >Voir plus
Que lire après Le Japon: Des chasseurs-cueilleurs à HeianVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (2) Ajouter une critique
La collection "Mondes anciens" de Belin propose un volume sur le Japon des origines, de -36000 à l'An Mil. Deux auteurs ont veillé à cette publication, Laurent Nespoulous et Pierre-François Souyri, et leur livre relate l'histoire de l'archipel japonais des premières traces d'occupation humaine jusqu'à la fin de "l'Antiquité" locale, qui correspond au milieu de notre Moyen-Age.

Le volume bouscule un peu nos habitudes, car son découpage chronologique ne correspond en rien à ce que nous connaissons, et pour cause. Tardivement peuplé, l'archipel japonais a une histoire décalée par rapport à celle du continent eurasiatique. Les auteurs fixent à -36000 le premier peuplement, mais la fixation des périodes est rendue difficile par l'acidité des sols volcaniques, qui dissolvent vite les restes humains. D'autre part, l'archéologie permet d'observer que des phénomènes originaux se sont produits au Japon, qui distinguent cet espace des autres : la néolithisation, l'agriculture, les premiers états et chefferies doivent être repensés à la lumière des fouilles et des trouvailles. Les progrès techniques n'ont rien de linéaire, et certaines découvertes sont abandonnées si elles ne conviennent pas à leurs inventeurs. En somme, les grands schémas académiques ne sont pas toujours utilisables dans cette histoire ancienne, ce qui vient confirmer les observations d'Alain Testart sur l'esclavage et les sociétés de chasseurs-cueilleurs de l'Alaska, par exemple, ou de la Sibérie.

On se souviendra que ces périodes et ces concepts ne sont souvent que des commodités pour l'enseignement et l'étude : peu importe donc, si l'on nomme "Antiquité" les sociétés et la culture japonaises du VII°s au XII°s, alors que d'un point de vue européen, "notre" Antiquité commence avec l'écriture, vers -3000, et se termine au V°s. La lecture de la partie consacrée à la préhistoire plaira aux amateurs de poteries, de pointes de flèches et d'amas de coquillages ; pour ce qui est de l'Antiquité, née avec l'introduction de l'écriture chinoise (la première attestation est un sceau en or reçu par un chef japonais en 57 ap. J.C.), ce qui la distingue de la suite des temps est la présence d'un pouvoir impérial de plus en plus centralisé, utilisant à ses fins les apports de la culture chinoise filtrés par la Corée ou reçus directement. A la fin de la période, l'état japonais du XII°s établi à Kyoto se dissout dans les luttes entre grands féodaux.

C'est donc un magnifique volume, extrêmement bien illustré, mais écrit dans un style lourd et incorrect, à l'image du néo-français universitaire actuel. Les auteurs ne s'aventurent pas en un terrain inexploré : l'archéologie au Japon, associée au récit des origines, est née sous les Shoguns au XVII°s, a prospéré avec la restauration Meiji du XIX°s, et les questions qu'elle soulève touchent la nation et ses récits fondateurs. Un peu comme en Israël, l'histoire est d'une brûlante actualité.
Commenter  J’apprécie          190
Excellent ouvrage qui nous permet de nous plonger aux sources de la civilisation japonaise, tellement différente des civilisations occidentales.

Différence tout d'abord dans son approche puisque nous avons eu une civilisation de chasseurs cueilleurs qui ont utilisé la céramique mais qui n'ont pas fait évoluer leur cadre de vie vers des sites urbanisés et agricoles durant de nombreuses années.

L'évolution chronologique de cette civilisation nous fait découvrir une préhistoire très longue, suivie d'une antiquité non moins longue avant de basculer dans une époque féodale puis différentes périodes qui s'accélèrent.

L'ouvrage met bien en avant les relations avec les Chine impériale et la péninsule Coréenne. Il permet de bien positionner l'institution que représente l'Empereur que l'on pourrait voir comme assez monolithique de notre lointain occident, mais qui mis du temps à s'imposer et qui sera concurrencé sur le plan politique par le shoguna.

Ouvrage très clair, pédagogique et passionnant.
Commenter  J’apprécie          100


critiques presse (2)
LaViedesIdees
12 avril 2024
Des premiers paysans à l’âge des chefs, de la chasse à la riziculture, de l’outillage lithique au développement du fer, le Japon nourrit une histoire complexe qu’il faut relire avec les découvertes archéologiques.
Lire la critique sur le site : LaViedesIdees
LeMonde
29 septembre 2023
Fondé sur les apports récents de l’archéologie japonaise [...], il représente une parfaite introduction à une histoire dont la singularité fait voler en éclats maints préjugés sur l’évolution des sociétés humaines.
Lire la critique sur le site : LeMonde
Citations et extraits (3) Ajouter une citation
Dans les premières sources chinoises évoquant l'archipel, il est question d'un peuple, celui des Wa (Wo en chinois). Wo/Wa était une manière péjorative de désigner certaines populations barbares. A l'époque archaïque des grandes tombes, les rois désignent le pays qu'ils dirigent sous le nom de Yamato, du nom de la région du Kinai où se trouvaient les bases géographiques des lignées des souverains. Mais les Chinois continuaient de parler des Wa. Dans les documents diplomatiques officiels, les sinogrammes se lisant Wa étaient lus Yamato dans l'archipel. Au sinogramme Wa signifiant les barbares fut substitué dans l'archipel le caractère Wa signifiant la paix ou l'harmonie, et on y adjoignit un autre idéogramme signifiant grand, si bien que Yamato pouvait se comprendre comme "le pays de la grande harmonie." Mais avec l'établissement des Codes et la montée en puissance de la monarchie dans l'archipel, l'appellation traditionnelle chinoise résonnait comme une injure et n'était plus acceptable. C'est pourquoi sous Tenmu (672-686), le nom officiel du pays fut modifié et devint Nihon, le Japon ou "pays du soleil levant".

Nihon ou Nippon ("soleil levant") n'est ni un nom d'ethnie ni un nom de lieu. Il signifie la direction de l'est, là où le soleil se lève. Le nom du pays est donc bien associé à des croyances liées à un culte solaire. Cette dénomination officielle se situe dans un rapport évident à la Chine qu'on fait semblant de prendre pour "le pays du soleil couchant", mais dont on sait très bien qu'elle est "l'empire du Milieu" ! ...

En fait, au cours de l'histoire, les habitants de l'archipel n'ont que très peu désigné leur propre pays sous le terme de Japon qui était surtout une appellation à destination des étrangers, et tout particulièrement des Chinois. Nihon, en chinois Riben (prononcé "jeubenne"), ou Ribenguo ("pays du soleil levant"), a donné naissance à diverses désignations en langues occidentales, depuis le Cipango (ou Xipangu) de Marco Polo jusqu'au Japao des Portugais. Le terme de Japon est donc d'origine chinoise et non japonaise.

Dans l'archipel, on parlait plus volontiers de "honpô" ("ce pays-ci") et de "hôjin" ("les gens d'ici") pour désigner les Japonais. On évoquait aussi "honchô" ("cette cour impériale-ci"). Ce n'est qu'avec l'ouverture de l'archipel dans la seconde moitié du XIX°s que le mot de Nihon pour désigner le pays est passé dans l'usage courant. En 1889, avec la constitution moderne, l'appellation officielle du pays devient "empire du Grand Japon". Depuis l'après-guerre et la fin de son empire en Asie orientale, le pays se désigne plus modestement sous le nom de Japon.

p. 271
Commenter  J’apprécie          90
L'essentiel de la documentation que nous avons sur la circulation des biens produits dans l'archipel renseigne sur une économie fondée sur le paiement de taxes et d'impôts. Aux individus masculins âgés de plus de 16 ans, l'Etat confiait 2400 mètres carrés de terre, et aux femmes, les deux tiers des rizières. Cet "octroi", dans un contexte où depuis la naissance du régime des codes les textes proclament que le sol appartient à l'Etat, rend redevable d'impôts la majorité de la population, payables principalement en riz ou en corvées. S'ajoutait également une taxe particulière sur les productions et les tissus propres aux différentes régions. Sur ces derniers était accroché un "mokkan" (document sur bois) portant le nom et l'adresse du contrôleur fiscal, ainsi que sur la quantité de marchandise.

Pour un Européen, pour qui Antiquité et cité sont deux notions qui vont souvent de pair, le Japon antique peut paraître bien singulier. En effet, si la capitale est indubitablement une ville, elle est la seule (hormis le port situé à l'endroit de l'actuelle Hakata, à Kyûshû) qui constitue une petite agglomération. En l'absence de réseau urbain, donc, et avec une seule ville pour un territoire si vaste, on pourrait même douter de la réalité d'un Etat japonais allant de Kyûshû jusqu'aux actuelles Akita et Sendai, dans le Nord-Est. Pourtant, grâce aux mokkan, il est possible de comprendre la réalité de la centralisation de ce système, par les flux des différentes productions, des provinces vers la capitale.

pp.346-347, Le Japon des capitales, fin VII°-VIII°s.
Commenter  J’apprécie          100
Avec la toute fin du VII°s, l'âge des premières capitales, et surtout le VIII°s, la documentation écrite franchit un cap qualitatif et quantitatif avec les "mokkan", les chroniques officielles, mais aussi les premières oeuvres littéraires. Parmi ces dernières, le Man.yôshû, qui peut être traduit littéralement par "Recueil des dix mille feuilles (d'arbre)", mais dont le sens serait plutôt "Recueil de dix mille poèmes", les oeuvres littéraires étant souvent comparées à des feuillages.

Avec le Kaifûsô ("Anthologie de la nostalgie") daté de 751 (première compilation japonaise connue de poèmes en chinois), c'est l'une des plus anciennes anthologies poétiques. Sa compilation date probablement des années 760 et la plus ancienne version qui nous est parvenue de ce texte est un manuscrit du XI°s. Le Man.yôshû est le premier recueil de poèmes japonais waka qui célèbre l'expression de sentiments amoureux. L'anthologie regroupe environ 4500 poèmes, pour la plupart de haute tenue littéraire, dont les plus anciens datent sans doute de la première moitié du VII°s. On attribue la compilation de l'ouvrage à Ôtomo no Yakamochi (718-75), un fonctionnaire de la cour impériale, lui-même grand poète. Cet ouvrage est considéré comme un chef-d'oeuvre de la littérature ancienne.

p. 316
Commenter  J’apprécie          90

Videos de Pierre-François Souyri (4) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Pierre-François Souyri
Rencontre avec Pierre-François Souyri autour de Nouvelle histoire du Japon aux éditions Perrin et de le Japon chez Belin éditeur.


Pierre-François Souyri, après avoir enseigné à l'Inalco puis dirigé la Maison franco japonaise de Tokyo, est professeur à l'Université de Genève où il enseigne l'histoire du Japon. Il a publié de nombreux ouvrages sur l'histoire japonaise dont Nouvelle Histoire du Japon (Perrin, 2010), Histoire du Japon médiéval, le monde à l'envers (Perrin, 2013), Kamikazes (avec Constance Sereni) (Flammarion, 2015), et plus récemment Moderne sans être occidental, Aux origines du Japon d'aujourd'hui (Gallimard 2016).
--
16/01/2024 - Réalisation et mise en ondes Radio Radio, RR+, Radio TER
+ Lire la suite
autres livres classés : antiquitéVoir plus
Les plus populaires : Non-fiction Voir plus


Lecteurs (30) Voir plus



Quiz Voir plus

Quelle guerre ?

Autant en emporte le vent, de Margaret Mitchell

la guerre hispano américaine
la guerre d'indépendance américaine
la guerre de sécession
la guerre des pâtissiers

12 questions
3179 lecteurs ont répondu
Thèmes : guerre , histoire militaire , histoireCréer un quiz sur ce livre

{* *}