AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
EAN : 9782070372324
320 pages
Gallimard (14/10/1980)
3.99/5   132 notes
Résumé :
Joseph Wayne et ses frères Thomas, Burbon et Benjamin vont exploiter une grande ferme en Californie. Bien que Joseph ne soit pas l'aîné des frères Wayne, c'est lui que tout le monde reconnaît comme le chef de famille. Il est fort, tranquille et juste. C'est à lui d'ailleurs que son père, le vieux John Wayne, a donné sa bénédiction solennelle, tout comme un patriarche de la Bible. John Steinbeck ne se borne pas à faire vivre des personnages d'une grandeur tragique, m... >Voir plus
Que lire après Au Dieu inconnuVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (19) Voir plus Ajouter une critique
3,99

sur 132 notes
5
6 avis
4
6 avis
3
5 avis
2
0 avis
1
0 avis
Etonnante découverte que ce roman méconnu de Steinbeck, que l'on découvre ici sous un nouveau jour !
A travers l'histoire de la famille Wayne, guidée par l'aîné des frères Joseph, homme puissant vouant un véritable culte à la terre, « Au dieu inconnu » est une ode aux accents bibliques envoutante, brute et presque dérangeante à la nature féconde et cruelle, aux éléments et aux astres, aux ancestraux rites païens des hommes pour la célébrer et prier sa mansuétude.

Baigné de la bénédiction de son père, Joseph devient à son tour à la fois patriarche rassembleur et sorte de passeur de vie entre les hommes et l'univers, avec lequel il communique à travers le vieux chêne présent sur la terre de Californie sur laquelle il vient s'établir. Nourri d'une foi tellurique, il croit en sa fertilité, et ne veut entendre ni les paroles des anciens sur la malédiction des épisodes de sécheresse qui ont marqué la région, ni celles des croyants effarés par ses pratiques sacrificielles. Aussi, quand la pluie viendra à manquer, Joseph ne pourra-t-il plus reculer devant le sacrifice ultime…

On savait Steinbeck amoureux de sa terre et de sa fameuse vallée de la Salinas ; mais dans ce roman cet amour prend sous sa plume enfiévrée et animale une dimension quasi mystique, qui permet de découvrir une nouvelle profondeur à l'un des plus attachants des grands auteurs américains du 20ème siècle.
Commenter  J’apprécie          380
Joseph Wayne est obsédé par la terre et sa fertilité. Dans sa concession de Californie, à la tête de la communauté qu'il a constituée avec ses frères et leur famille, il rêve d'une propriété féconde où la procréation est le maître-mot. « Quand il se remit en selle, il avait la certitude que l'amour de la terre était ancré en lui à jamais. » (p. 18) Son lien avec son terrain vire au paganisme, avec des offrandes bien peu chrétiennes, et d'autant plus à l'approche de la sécheresse qui frappe régulièrement la région. Jeune marié et futur père, Joseph ne peut pas croire que le sol si riche la saison précédente devienne si sec et si ingrat. « Il surveillait sa terre et il lui semblait qu'elle était en train de mourir. » (p. 213) Refusant de quitter sa propriété et tout ce qu'il a construit et perdu, Joseph devient ce patriarche un peu fou que l'on craint et que l'on moque dans la vallée.

Steinbeck se livre à une réécriture moderne de l'épisode biblique de Joseph et des sept années de famine qui dévastent le royaume de Pharaon. En l'inscrivant dans l'Amérique des colons, il déplace le cadre, mais pas le message. Il est toujours question de foi dans un monde tourmenté. le paradis est pourtant à portée de main à qui sait le voir, sous la forme d'une clairière étrangement verdoyante et d'un rocher moussu. La sécheresse inexorable met à l'épreuve le croyant et conforte l'impie, mais tous attendent désespérément les nuages et la pluie salvatrice.

Il y a dans ce texte foudroyant de beauté un mélange de deux autres romans de John Steinbeck, À l'Est d'Éden et Les raisins de la colère. D'une part, on retrouve l'attachement à la terre et à la propriété familiale, avec l'obsession de la multiplication et de la transmission. D'autre part, il y a la poussière morbide qui recouvre tout et envahit la moindre faille, pour dessécher jusqu'au plus petit atome d'espoir du cultivateur. Quant à moi, je suis encore et toujours plus subjuguée par l'oeuvre de John Steinbeck. Je le veux en Pléiade. Je le veux !
Commenter  J’apprécie          242
J'ai déjà lu - et aimé - plusieurs livres de Steinbeck et j'ai été un peu étonnée par celui-ci.

Bien qu'il s'agisse d'un homme qui fait tellement corps avec la terre qu'il recréé au fond de son coeur une foi paganiste, j'ai trouvé quelque chose de biblique dans ce roman. La bénédiction paternelle, le départ pour un pays de lait et de miel de Joseph, rejoint par ses frères.

Un homme qui exploite une ferme avec ses frères sous le regard bienveillant du père déclare vouloir partir en Californie pour obtenir de nouvelles terres car la ferme ne pourra plus nourrir tout le monde.
Joseph ne veut pas croire ce que disent les gens du pays, qu'il y a déjà eu des sécheresses et qu'il y en aura d'autres. Comment y croire devant cette herbe haute et si verte, ce troupeau qui se multiplie. A la mort du père il est rejoint par ses frères et le domaine s'agrandit. Mais bientôt arrivent les premiers signes d'une sécheresse tandis que Joseph rend un culte à son père à travers le chêne qui pousse près de sa maison. Il sera de plus en plus persuadé que c'est par son corps que la vallée peut vivre.

Challenge USA un livre un état

Commenter  J’apprécie          230
Bien caché à l'ombre de ses romans mastodontes, « Au dieu inconnu » n'est sans doute pas le titre de Steinbeck le plus connu alors qu'il mériterait amplement de prendre sa part de lumière.

L'histoire apparaît à première vue comme une fable steinbeckienne standard. Un père du Vermont donne sa bénédiction à l'un de ses quatre fils, Joseph, pour qu'il parte en Californie. Joseph s'installe dans une vallée, près d'un grand arbre, un endroit idéal pour construire une ferme. Il a de grands projets pour la terre qu'il a choisi et refuse d'écouter les anciens qui le mettent en garde contre les années sèches qui pourraient se reproduire. Et en effet, à force de travail et de passion, la ferme devient florissante, si florissante qu'il invite ses trois frères à le rejoindre. Sauf que la sécheresse va revenir…

C'est là que l'auteur nous surprend. Il n'est plus simplement question de la dure vie des fermiers, de la misère des petites gens. « Au dieu inconnu » est un conte païen et mystique. Steinbeck tisse le christianisme, les mythes indiens, grecs, les rituels profanes et la simple superstition. Un panthéisme inhabituel chez l'auteur vient recouvrir cette histoire qui semblait si simple.
Joseph Wayne se sent intimement lié à la terre, à la nature. Pour lui l'acte de cultiver est un acte d'adoration, il faut montrer du respect, de l'humilité pour pouvoir prospérer.
On assiste aux tentatives d'un homme pour entrer en communion avec les forces de la nature, pour en apaiser la fureur et le personnage de Joseph devient l'incarnation du sacrifice de tous les hommes qui ont cultivés la terre.

Un roman d'une richesse symbolique incroyable et d'une effroyable beauté, car une fois de plus, Maitre Steinbeck ponctue son histoire par un final bouleversant. J'ai tourné la dernière page quasiment dans le même état que Les raisins de la colère ou que Des souris et des hommes. Joseph Wayne rejoint mon mémorial personnel des plus beaux personnages croisés en littérature.

Traduit par par Jeanne Witta-Montrobert
Commenter  J’apprécie          180
Pas le plus connu de Steinbeck. L'histoire d'une famille de pionniers au début du 20ème siècle,venue exploiter une ferme en Californie, tributaire des caprices d'une nature tour à tour généreuse et cruelle.... Cette nature qui devient au fil des pages le personnage principal du livre, une entité déifiée par la plume de Steinbeck. Et quelle plume!!! Lyrisme et poésie transcendent cette magnifique histoire d'une lutte toujours recommencée, dans un univers sauvage et grandiose. Poignant, bouleversant et terriblement inspiré....

Mon préféré de Steinbeck....
Commenter  J’apprécie          140

Citations et extraits (9) Voir plus Ajouter une citation
Il entra dans sa maison obscure, alluma les lampes et fit du feu dans le poêle. La pendule, remontée par Élisabeth, faisait entendre son tic-tac, emmagasinant dans son ressort la pression de sa main et les chaussettes de laine qu'elle avait mise à sécher sur la grille d'entourage étaient encore humides. C'étaient des parcelles de vie d'Élisabeth qui subsistaient encore. Joseph méditait lentement sur ce sujet: "La vie ne peut pas être coupée d'un seul coup. Une personne n'est morte que lorsque les choses qu'elle a modifiées sont mortes à leur tour. L'unique preuve de la vie est dans ses répercussions. Tant qu'il demeure d'elle ne ce fût-ce qu'un souvenir plaintif, une personne ne peut être retranchée de la vie, ne peut être morte." Et il pensa: "C'est un long et lent processus pour un être humain que de mourir. Nous tuons une vache et dès que sa chair est mangée, elle n'existe plus, mais la vie d'un homme s'éteint comme un remous à la surface calme d'un étang, par de petites vagues qui s'étendent et qui meurent dans la quiétude."
Il se renversa sur sa chaise et baissa la lampe jusqu'à ce qu'elle ne donne plus qu'une petite flamme bleue. Il resta assis, détendu, essayant de rassembler ses pensées, mais elles s'étaient dispersées sur mille objets différents et sa faculté de concentration l'avait quitté. Il pensa en sons, en courants de mouvement, en couleur, en rythme lent et laborieux. Il regarda son corps affalé, la courbe de ses bras et ses mains sur ses genoux.
Commenter  J’apprécie          30
Joseph méditait lentement sur ce sujet : "La vie ne peut pas être coupée d'un seul coup. Une personne n'est morte que lorsque les choses qu'elle a modifiées sont mortes à leur tour. L'unique preuve de la vie est dans ses répercussions. Tant qu'il demeure d'elle ne fût-ce qu'un souvenir plaintif, une personne ne peut être retranchée de la vie, ne peut être morte." Et il pensa : "C'est un long et lent processus pour un être humain que de mourir. Nous tuons une vache et dès que sa chair est mangée, elle n'existe plus, mais la vie d'un homme s'éteint comme un remous à la surface calme d'un étang, par petites vagues qui s'étendent et meurent dans la quiétude"
Commenter  J’apprécie          80
Le taillis du bois était mort à présent, mais les troncs droits montaient encore la garde auprès du roc. La sécheresse s'était infiltrée d'abord à la surface du sol et avait tué toutes les plantes grimpantes et tous les arbustes, mais les racines profondes des arbres plongeaient jusqu'à l'assise du rocher où elles trouvaient encore un peu d'eau et les aiguilles gardaient leur couleur vert foncé. Dès qu'il eut pénétré dans la clairière, Joseph alla toucher le rocher, pour s'assurer qu'il était encore humide et regarda attentivement le petit ruisseau. Cette fois il planta des repères de chaque côté, au bord de l'eau, pour déterminer à quelle vitesse le débit diminuait.
En décembre, le gel s'abattit sur la montagne. Le ciel était rouge au lever et au coucher du soleil et le vent du nord s'engouffrait dans les vallées, soulevant la poussière et déchiquetant les feuilles mortes. Joseph descendit à la ferme et remonta une tente, pour dormir. Pendant qu'il se trouvait entre les maisons calmes il mit en marche le moulin à vent, l'écouta un moment aspirer l'air dans ses canalisations et actionna la manivelle qui arrêtait les pales. Il gravit la colline sans se retourner pour regarder le ranch. Il fit un large détour afin d'éviter les tombes au flanc du coteau.
Cet après-midi là, il vit le brouillard s'élever au-dessus de la chaine occidentale. Il pensa: "Je pourrais retourner voir le vieillard. Il sait peut-être d'autres choses qu'il pourrait me dire." Mais sa pensée n'était qu'un jeu. Il savait qu'il ne pouvait pas abandonner le rocher, de peur de voir la mousse se faner. Il revint à la clairière silencieuse et monta sa tente. Il prit le seau et alla pour jeter de l'eau sur le rocher. Il s'était produit quelque chose. Le ruisseau avait rétréci de quatre bons centimètres par rapport aux points de repère. Quelque part sous la terre, la sécheresse attaquait la source. joseph remplit son seau dans la mare, jeta de l'eau sur le rocher et vint l'emplir à nouveau. La mare fût bientôt vide _ il lui fallut attendre une demi-heure, avant que l'anémique filet d'eau ait fait monter l'eau jusqu'aux bords. Pour la première fois, la terreur le saisit. Il se glissa à plat ventre dans l'excavation et regarda la fissure par où l'eau s'infiltrait lentement: il en ressortit à reculons, couvert d'humidité. Il s'assit près du ruisseau et le regarda s'écouler dans la mare. Il eut, en l'observant, l'impression de la voir décroitre. Le vent agitait impatiemment les branches des sapins.
Elle vaincra, dit Joseph tout haut. La sécheresse finira par nous atteindre. » (p280-281
Commenter  J’apprécie          10
Elle caressait doucement le genou d'Élisabeth en parlant, accordant le geste au rythme de ses paroles et ses yeux brillaient avec une intensité telle qu'ils lançaient des lueurs rouges.
- Je connais les hommes, poursuivit-elle. Je connais si bien Thomas que je sens sa pensée à l'instant même où elle naît. Et je connais ses impulsions avant seulement qu'elles soient assez fortes pour mettre ses membres en mouvement. Je connais Burton jusqu'au fond de son âme étriquée. Et Benjy... je connaissais la douceur et l'indolence de Benjy. Je savais combien il était malheureux d'être Benjy et je savais qu'il ne pouvait rien contre.
Elle sourit à ses souvenirs. [...]
- Je les connaissais tous, dit-elle d'une voix qui s'enrouait. Mon instinct ne m'a jamais trompée. Mais Joseph, je ne le connais pas. Pas plus que je n'ai connu son père.
Élisabeth approuvait de la tête, prise par le rythme.
Rama poursuivit:
- Je ne sais pas s'il y a des hommes qui naissent en dehors de l'humanité ou s'il y a des hommes à tel point humains que près d'eux les autres paraissent irréels. Peut-être un demi-dieu vit-il sur la terre de temps à autre. Joseph a une force dont on n'imagine pas qu'elle puisse être ébranlée. Il a le calme des montagnes et son émotion est aussi sauvage, aussi farouche, aussi pénétrante que l'éclair et tout aussi dénuée de fondement, à mes yeux. Quand il ne sera pas là, essayez de penser à lui et vous verrez ce que je veux dire. Sa silhouette prendra des proportions énormes, jusqu'à atteindre le sommet des montagnes et sa force aura la violence irrésistible du vent. Benjy est mort. Vous ne pouvez pas imaginer la mort de Joseph. Il est éternel. Son père est mort et sa mort n'en était pas une.» (p121-122)
Commenter  J’apprécie          10
Il jeta par-dessus son épaule un coup d'œil à la lune d'une blancheur osseuse qui voguait et se balançait dans les rafales de poussière.
"Dans peu de temps, grommela-t-il, elle descendra ici et dévorera l'univers."
Commenter  J’apprécie          130

Videos de John Steinbeck (17) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de John Steinbeck
Retrouvez les derniers épisodes de la cinquième saison de la P'tite Librairie sur la plateforme france.tv : https://www.france.tv/france-5/la-p-tite-librairie/
N'oubliez pas de vous abonner et d'activer les notifications pour ne rater aucune des vidéos de la P'tite Librairie.
A l'heure où beaucoup redoutent une crise économique après la crise sanitaire, voici un grand roman dans lequel chacun puisera des conseils utiles. Il raconte la vie quotidienne des travailleurs pendant la Grande Dépression aux Etats-Unis et n'a hélas rien perdu de son actualité.
« Les raisins de la colère » de John Steinbeck, à lire en poche chez Folio.
+ Lire la suite
autres livres classés : pionnierVoir plus
Les plus populaires : Littérature étrangère Voir plus


Lecteurs (322) Voir plus



Quiz Voir plus

Des souris et des hommes

En quelle année est paru ce roman de John Steinbeck ?

1935
1936
1937

10 questions
907 lecteurs ont répondu
Thème : Des souris et des hommes de John SteinbeckCréer un quiz sur ce livre

{* *} .._..