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EAN : 9782213684772
99 pages
Fayard (23/04/2014)
3.5/5   2 notes
Résumé :
Depuis la crise de 2008, de douteux prophètes poussent les jeunes à aller vivre à l?étranger car, disent-ils, le legs de la France à leur génération sera une énorme dette et un avenir médiocre. Je suis scandalisée. Abandonne-t-on pour ces raisons un pays comme la France ? J?ai donc décidé de m?adresser à mes descendants pour leur dire comment nous, adolescents qui avions tout perdu en 1940, avons su, pendant les cinq années noires de l?Occupation, recréer la Nation,... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
Une lecture intéressante à plus d'un titre.

Il me semble que c'est le premier livre que je lis de cette femme, j'en lirai peut-être d'autres. L'auteur ? Evelyne Sullerot, une enfant de la guerre donc. Elle a été jeune pendant la Seconde guerre mondiale et en garde pas mal de souvenirs, de faim, de répression, d'occupation de la France ...
Autant dire une dame qui aurait l'âge d'être ma grand-mère. Une dame de la même génération que d'autres super mamies comme Line Renaud ... et une femme de caractère, avec pas mal de choses à dire.

Elle écrit ici une longue lettre aux "enfants de la crise", ses petits-enfants et arrière-petits-enfants ... à ma génération donc et aux générations suivantes.
Aux enfants et petits-enfants des fameux baby-boomers. Certains d'entre eux sont des pros de la pyramide des âges, ce qui la réjouit !

Passionnante quand elle nous raconte ses souvenirs de jeunesse, d'adolescence, de romantisme. de poésie pour résister à la morosité, pour résister à l'occupant, pour résister dans la vie. D'engagement, d'action.
D'amour et de mariage. de projets à long terme.
Passionnante et passionnée quand elle évoque la francophonie, l'exception culturelle française, l'amour des livres dans sa famille ... et ça me parle.

Passionnante, amusante et lucide quand elle évoque les nombreuses idéologies qui ont traversé le siècle précédent. Enfin une personne âgée qui ne reproche PAS aux jeunes leur manque d'idéologie ... Elle s'en méfie.

Pragmatique donc, et passionnante toujours quand elle évoque avec brio toutes les luttes pour les droits des femmes, eh oui les femmes les "oubliées des Trente Glorieuses" selon elle. Tout occupées à repeupler la France pendant que leurs maris reconstruisaient ce qu'ils pouvaient ... pas assez vite, d'ailleurs, il manquait beaucoup de logements, beaucoup de choses tout court, il fallait faire la queue partout pour nourrir sa famille, faire des enfants ... et à l'époque, on ne s'occupait souvent que de ses enfants et de la maison, l'équipement électroménager n'est arrivé que bien après ... tout comme les plats cuisinés, le prêt-à-porter, et tant d'inventions qui ont fait gagner du temps aux femmes !

Elle parle de la crise du logement après la guerre : sur ce point-là comme sur beaucoup d'autres, ma génération et la sienne pourraient bien être d'accord !
Sur le manque de modes de garde pour les jeunes enfants, aussi ...
Sur le monde du travail et les nombreuses embûches qui attendent les femmes, elle me semble très lucide aussi. Sur ce front-là également elle a lutté, et espère un avenir meilleur pour les générations suivantes.

Les femmes donc : le monde du travail, la contraception et l'avortement, l'égalité avec les hommes, les études et les choix de métiers, le salaire ... Il y a tant à dire ...

L'auteur évoque aussi beaucoup la famille et son évolution. Les nombreux mariages (et divorces aussi) juste après la Seconde guerre mondiale. Les nombreux enfants, alors que les jeunes couples, démunis, parfois orphelins, mal logés, étaient pleins d'espoir et essayaient de dessiner un avenir meilleur, après deux guerres mondiales qui avaient profondément abîmé l'Europe ...
Puis elle évoque les progrès récents, l'évolution de la société française.
Les nouvelles formes de famille, monoparentale, adoptive, recomposée ... le PACS, le mariage pour tous ... le tout, évoqué avec exigence (sur l'avenir à tracer pour nos enfants) et tolérance.

Une lettre qui fait réfléchir, et qui peut inciter à agir, à continuer les luttes, à une heure où la morosité et les annonces dramatiques des médias sonnent faux, où le French bashing est un peu trop à la mode, où l'optimisme semble toujours aussi mal vu, alors qu'il est si nécessaire ...
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Citations et extraits (20) Voir plus Ajouter une citation
Pour nous, un homme et une femme n'étaient pas unis à la manière dont vous concevez aujourd'hui la vie en couple : tous deux en jean, faisant les mêmes études (ou presque), menant chacun son projet de vie, explorant ensemble une sexualité libérée. Non, pour nous, un homme, une femme, c'étaient deux êtres à la fois différents et complémentaires, lui au travail, elle à la maison, destinés à traverser la vie ensemble jusqu'à la mort.

Il faut comprendre qu'à l'époque de nos innombrables mariages, entre 1945 et 1955, la plupart des conjoints étaient complémentaires par la force des choses.

Dans ce pays ruiné, on ne trouvait aucun des équipements ménagers que nous connaissons aujourd'hui. Dans un logement sur deux, il n'y avait même pas l'eau courante. Le ravitaillement était toujours très difficile, il fallait faire la queue partout et y passer des heures ; la cuisine prenait du temps, les aliments vendus n'étaient ni préparés ni conditionnés, le gaz était rare, il y avait des coupures d'électricité (...) L'entretien d'une maison ou d'un appartement sans aspirateur était une corvée, et le lavage plus encore sans machines ni lessives miracles : linge de maison et linge de corps devaient être savonnés à la main, puis mis à bouillir des heures dans de lourdes lessiveuses de fer étamé, avant d'être longuement rincés, étendus, repassés - car les fibres artificielles n'existaient pas encore et le nylon venant des Etats-Unis était un luxe.

D'autre part, le travail accompli par les hommes dans ces années de reconstruction du pays était, pour de très nombreux salariés, physiquement éprouvant. (...) Ils reconstruisirent les routes, les voies ferrées, les ponts et des maisons par centaines de milliers.
La France manquait de tout, de ciment, de pierres, de métaux, d'énergie et, partout, on rouvrait des carrières et de vieilles mines abandonnées, surtout de charbon - travaux physiques, travaux pénibles, travaux d'hommes. (...)

Dans une telle conjoncture, la conciliation de la tenue d'une maison avec un travail professionnel était impossible aussi bien pour une femme seule que pour un homme seul. Les rares célibataires vivaient chez leurs parents ou en collectivité. (...) Nous, jeunes femmes, acceptions cette division des rôles non seulement parce qu'elle nous semblait réaliste et adaptée aux temps exceptionnels que nous vivions, mais également parce que, en période de pénurie, le prestige de celle qui parvenait à servir la soupe dans une maison propre était immense. Du haut en bas de l'échelle sociale, la maîtresse de maison, la "ménagère" était respectée. Pour seulement permettre aux siens de survivre, elle devait déployer beaucoup d'endurance et d'astuces
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Il faudrait que les responsables de la politique familiale (laquelle, je le redis, a été plutôt bien adaptée, en ce qui concerne les congés et prestations, aux nouvelles conditions de vie et aux nouvelles familles) aient l'intelligence et le courage de réunir un cénacle de personnalités connaissant bien, à plusieurs titres, les problèmes des enfants d'aujourd'hui, qui se constituerait en une "Autorité pour l'enfance".

Cette autorité lancerait et animerait une grande campagne publique, résolument optimiste dans ses buts et son style, mais exigeante sur l'authenticité et la véracité des enquêtes et études qu'elle présenterait.

Il faut balayer l'hypocrite climat actuel qui laisse planer l'idée qu'il n'y a rien à faire, que les enfants sont victimes du trépidant climat d'une société marchande mondialisée qui leur vend toujours plus d'excitation, toujours plus de gadgets pour communiquer sans nécessité, toujours plus de jeux sans enjeux véritables, l'idée que, contre cela, on ne peut rien.

Sans culpabiliser systématiquement les parents, on doit faire naître un grand débat national pour leur faire prendre conscience du besoin de sécurité, de continuité, de sérénité de leurs jeunes enfants.

(...) En même temps, l'Autorité pour l'enfance s'inviterait dans toutes les négociations touchant à l'emploi : plans sociaux après faillites, travail du dimanche, restructurations, etc. Elle ferait partout savoir les répercussions sur les familles de chaque événement lié au monde du travail, de chaque loi touchant au droit du travail.
Il faudrait donner une large place dans cette campagne aux pères, comme aux mères, mais également aux grands-parents, si présents aujourd'hui : tous les enfants d'âge scolaire ont aujourd'hui quatre grands-parents vivants, ce qui n'a jamais été le cas dans le passé (...)

j'invite tous les jeunes parents à faire un grand exercice public de réflexion sur l'environnement familial qu'ils assurent à leurs enfants désirés.
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Vous, chers petits, pour vos anniversaires, vous avez eu des consoles de jeux vidéo, des ordinateurs, puis des téléphones de plus en plus "smart", qui écrivent et correspondent.
Sur vos écrans et vos téléphones, vous apprenez à lire et à écrire, à votre manière - même si vos parents, quand vous étiez petits, vous ont lu des histoires dans des livres dont vous regardiez les images.
En souvenir de ces images, peut-être aimez-vous "lire" des bandes dessinées, mais peu d'entre vous se plongent avec délice dans les gros livres sans illustrations.

L'ère de l'imprimé n'est pas close, mes enfants, loin de là, elle est aussi à vous.
Elle n'est pas tuée mais seulement relayée par le numérique (...)
on aura toujours besoin du papier, on écrira toujours des livres en français !

L'innovation ? Les idées qui renouvellent la pensée, les styles qui réinventent la beauté, les créations qui scandalisent, mais ouvrent des voies inconnues - la révolution culturelle, en somme, qui peut fort bien jaillir d'une grave crise économique -, ce sont aux jeunes "numériques" d'aujourd'hui de la faire, et à vous, mes chers arrière-petits-enfants, de l'amplifier.
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Les femmes déterminent désormais l'avenir démographique d'un pays.
Infiniment plus libres de disposer d'elles-mêmes depuis qu'elles contrôlent leur fécondité et qu'elles travaillent, elles ne peuvent plus être forcées, ni par des exhortations ni par des sanctions. (...)

Projeter, comme l'expriment encore en ce XXIe siècle les jeunes filles françaises, d'avoir "plutôt deux enfants, peut-être trois", c'est délivrer un satisfecit à son pays tout en assurant son avenir.

(...) l'INSEE, publiant le nombre des naissances de l'an passé, notait que l'ISF (indice synthétique de fécondité) a décroché du nombre symbolique de 2.
Il n'a atteint, en 2013, que 1,99 enfant par femme.
Il serait donc important de rassurer les Françaises avant que ne se produisent des infléchissements irréparables.

Elles sont plus nombreuses que jamais à désirer travailler, mais le monde du travail ne leur est pas très accueillant.
Les entreprises privées, particulièrement, ne leur font pas de cadeaux au prétexte qu'elles font les enfants.
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[Note : souvenirs de la Seconde guerre mondiale, de l'occupation par les Allemands, de la répression, à une époque où l'auteur était jeune]

Interdit de courir dans la rue, de nous assembler à plus de trois, de porter un insigne, quel qu'il soit. De traverser les rues en dehors des clous. De former des associations.

Interdit de sortir le soir après le couvre-feu, soit après dix heures du soir. (...) mille six cent vingt soirs sans pouvoir aller retrouver les copains pour écouter ou faire de la musique, sans pouvoir aller danser, sans balades au clair de lune ! Enfants, "ados" et jeunes, nous étions bel et bien bouclés à domicile dès la fin de l'après-midi. Nous n'étions jamais seuls, particulièrement l'hiver où nous faisions nos devoirs dans la seule pièce chauffée, avec toute la famille, les vieux qui toussaient, les petits qui chahutaient sous la table, les parents qui chuchotaient en épluchant quelques châtaignes ou en réparant quelque chose.
Beaucoup d'entre nous partageaient leur lit avec un frère ou une sœur.

Toutes ces contraintes, vous ne les subirez sans doute jamais, ni les sensations et les maladies de la misère qui les ont accompagnées et que vous n'imaginez même pas.
A l'âge même de notre plus forte croissance, nous n'avions pas, c'est le moins qu'on puisse dire, un régime alimentaire équilibré.
Nous avons connu la faim.
(...) Pour plusieurs de mes amis aujourd'hui octogénaires, la faim reste le souvenir dominant. (...) La disette créait l'obsession, frôlant la maladie mentale
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Vidéo de Évelyne Sullerot
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