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4,15

sur 534 notes
Découvrir ou comprendre la culture japonaise dans son approche ancestrale de l'ombre et de la lumière, sa conception de l'esthétisme est chose aisée grâce à cet essai en tout point enrichissant. Car très abordable, ponctué d'exemples tirés de la vie quotidienne.
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Un livre intéressant et étrange. Etrange car la préface situe l'auteur dans la littérature japonaise, mais qu'il rédige un essai sur l'ombre, liée à l'architecture et à la culture japonaise. le Japon vient depuis peu de s'ouvrir au monde occidental, et l'auteur est perturbé par ces changement technologiques notamment. Les lampes électriques ont fait leur apparition et éclairent toutes les zones qui jusque là étaient dans l'ombre (cabinets d'aisance ; recoins...) Il déplore que cela aplatit les choses, enlève du relief et la beauté des choses (voir passage sur les objets en laques et les fils d'or dans les costumes). Il déplore la perte du génie national. Mais finit par un clin d'oeil, au fait qu'il vieillit, et que les vieux ont en général tendance à trouver que c'était toujours mieux avant. En tout cas, il s'agit d'un esthète cultivé aux goûts prononcés. L'époque lui donne raison sur la fuite en avant de la course à la technologie. Et si cela ne me donne pas plus envie que cela de découvrir son oeuvre, j'irais bien cependant en apprendre plus sur l'architecture japonaise, glaner quelques éléments de l'Orient dans ma vie d'occidentale. Mais j'avoue que pour rien au monde je ne souhaiterais prendre la place de la femme telle qu'il la présente dans ce livre (la femme n'a pas de corps).
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Tanizaki a écrit ce bref essai en 1933. Il y défend une esthétique de l'ombre, qu'il considère comme typiquement orientale, en réaction à l'esthétique de la lumière, qu'il tient pour occidentale et qui envahit irréversiblement le Japon.

Il préfère la pénombre, la patine, la laque, le masque qui induisent le calme, le mystère, la profondeur, la subtilité à la lumière, à l'éclat, à l'hygiène, au progrès. Il trouve que les appareils de chauffage, les WC, les lampes, les carrelages etc. ont été inventés et conçus pour les occidentaux dans une esthétique qu'il juge laide et tapageuse. Si les japonais avaient inventé ces appareils, ils auraient conçu des objets appropriés au goût japonais. Il prend l'exemple du stylo: un japonais l'aurait muni non pas d'une plume mais d'un pinceau, l'écriture en caractères latins n'aurait eu aucune audience et, il va jusque là, la littérature nippone n'aurait pas imité servilement celle de l'Occident.
La thèse en elle- même est assez caricaturale et on ressent un certain dépit : si les japonais avaient inventé les nouvelles techniques, elles auraient été adaptées selon lui à l'esthétique traditionnelle nippone. Mais son éloge est limpide, instructif, souvent amusant et toujours poétique.
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Réflexion sur la conception japonaise du beau, opposée à la conception occidentale. Monde de l'ombre opposé à la mise en lumière estimée clinquante par l'auteur. Celui-ci nous décrit l'esthétisme japonais dans tous les secteurs. Je suis restée un peu sur ma faim. Je pensais davantage découvrir des digressions sur l'ombre , la pénombre dans le sens du yin et du yan, le plein opposé au vide, etc.

Mais lecture intéressante malgré tout.
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Dans ce court essai à l'écriture fluide (bravo au traducteur en tout cas) l'auteur compare occident et Japon, en ce qui concerne l'amour de l'ombre et celui de la lumière, s'attristant de la baisse des traditions japonaises et l'envahissement des lumières trop vives.
Dans tous les domaines. le chauffage, les toilettes, le papier, la vaisselle, la cuisine, le théâtre no et le kabuki, la couleur de la peau, le maquillage des femmes... Pour moi ce fut l'occasion de faire connaissance avec l'art de vivre à la japonaise (en tout cas dans les années 1930) et rien que pour cela je recommande cette lecture qui devrait ravir les friands de Japon. C'est subtil, non dénué d'humour.

Quelques passages (mais il faudrait citer in extenso tellement c'est agréable et intéressant!)
Où je découvre qu'il existe déjà un beau florilège de passages... J'en propose quand même :

"En fait on peut dire que l'obscurité est la condition indispensable pour apprécier la beauté d'un laque.
De nos jours on en est venu à fabriquer aussi des 'laques blancs', mais de tout temps la surface des laques avait été noire, brune ou rouge, autant de couleurs qui constituaient une stratification de je ne sais combien de 'couches d'obscurité', qui faisaient penser à quelque matérialisation des ténèbres environnantes. Un coffret, un plateau de table basse, une étagère de laque brillante à dessin de poudre d'or, peuvent paraître tapageurs, criards, voire vulgaires; mais faites une expérience : plongez l'espace qui les entoure dans une noire obscurité, puis substituez à la lumière solaire ou électrique la lueur d'une unique lampe à huile ou d'une chandelle, et vous verrez aussitôt ces objets tapageurs prendre de la profondeur, de la sobriété et de la densité.
Lorsque les artisans d'autrefois enduisaient de laque ces objets, lorsqu'ils y traçaient des dessins à la poudre d'or, ils avaient nécessairement en tête l'image de quelque chambre ténébreuse et visaient donc sans nul doute l'effet à obtenir dans une lumière indigente; s'ils usaient de dorures à profusion, on peut présumer qu'ils tenaient compte de la manière dont elles se détacheraient sur l'obscurité ambiante, et de la mesure dans laquelle elles réfléchiraient la lumière des lampes. car un laque décoré à la poudre d'or n'est pas fait pour être embrassé d'un seul coup d'oeil dans un endroit illuminé, mais pour être deviné dans un lieu obscur, dans une lumière diffuse qui par instants en révèle l'un ou l'autre détail, de telle sorte que, la majeure partie de son décor somptueux constamment caché dans l'ombre, il suscite des résonances inexprimables."

"La cuisine japonaise en tout cas, si elle est servie dans un endroit trop bien éclairé, dans de la vaisselle à dominante blanche, en perd la moitié de son attrait. La soupe au miso rouge, par exemple, que nous consommons tous les matins, voyez un peu sa couleur et vous comprendrez aisément qu'on l'ait inventée dans les sombres maisons d'autrefois. Il m'est arrivé un jour, convié ç une réunion de thé, de m'y voir présenter du miso, et cette soupe bourbeuse, couleur d'argile, que n'avais toujours consommée sans y prêter attention, je lui découvris soudain, en la voyant, à la lueur diffuse des chandelles, qui stagnait au fond du bol de laque noir, une réelle profondeur et une teinte des plus appétissantes."

"Et le riz tout le premier, sa seule vue, lorsqu'il est présenté dans une boîte de laque noire et brillante déposée dans un coin obscur, satisfait notre sens esthétique et du même coup stimule notre appétit."
Lien : https://enlisantenvoyageant...
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Il m'a franchement amusée Junichirô Tanisaki, dans les toutes premières pages de cet éloge, en énonçant les principes fondamentaux d'un art de vivre japonais menacé par la modernité occidentale qui chahute déjà largement les usages traditionnels dans l'archipel au moment où il écrit (1933). Ainsi, quand les commodités les plus élémentaires de la maison d'habitation sont concurrencées par de rutilantes cuvettes à chasse d'eau, de disgracieux calorifères ou d'inconvenants éclairages électriques, se plait-il à rappeler combien ces "avancées" utilitaires s'accordent mal à l'idéal japonais des "petits coins" dont le lecteur découvre les principes, quelques pages plus loin, aux monastères de Nara ou de Kyôto. Puis convoquant le "génie national" Tanizaki questionne ironiquement cette victoire de l'hygiénisme rampant sur des habitudes largement séculaires. Entre purisme de la tradition et modernisme effréné lui, qui n'est pas totalement insensible aux sirènes du confort, tente avec humour de se frayer une voie médiane au grand péril de son budget. Mais cet antagonisme des valeurs sur lequel il s'attarde volontiers n'est qu'un prétexte, le véritable propos est ailleurs.

Une vraie philosophie cette esthétique de l'ombre et tant de grâce dans l'écriture d'un si petit recueil. Une quête de la beauté enfouie dans l'obscur qui revêt avec Tanizaki une densité insoupçonnée dans l'art d'habiter. Les sobres et discrets moyens de l'ombre convoquant les effets suggestifs les plus inattendus. La présence d'un auvent, le shôji d'une entrée, le fond d'une alcôve (Toko no ma), chaque recoin de la maison, chaque parcelle de matériau ou d'ustensile, la forme d'un aliment (jôkan), l'usure d'une patine deviennent promesse d'émotion sous lumière tamisée ou même indigente ; mais aussi le jeu de l'acteur (nô), le trait d'un maquillage, la pigmentation de la peau. Parcours de beauté peu ordinaire qui ne dévie jamais, malgré la subtilité de certains détours, d'un axe de sensualités où les plaisirs de l'oeil et du toucher s'allient à ceux du goût ou de l'oreille. Car outre l'objet, le geste, l'instant, toutes les sensations passent l'épreuve de l'ombre dans cet art inépuisable de la rêverie et de la contemplation auquel semble nous inviter l'auteur : une texture de papier (le hoshô duveteux), une saveur sublimée, une clarté suggérée dans un jeu d'opacités, le décor d'un laque, la profondeur d'un silence. A la moitié du livre, on se prend à plonger le regard au fond d'un bol laqué, en méditant sur quelques reflets luisants agitant la surface d'un simple bouillon. La grande prêtresse, ici, c'est l'ombre, la lumière devient accessoire. Dépaysant à plus d'un titre. Un pas vers la sérénité.

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Cet essai met en lumière les changements de la société japonaise suite à l'introduction des progrès techniques, inventés par les occidentaux. L'auteur s'interroge tout d'abord sur le point suivant : est-ce que si le Japon était resté isolé du monde, les techniques découvertes par les nippons auraient été différentes de celles qui leur ont été apportées ? Partant de là, Tanizaki pose son regard plus particulièrement sur la maison, l'éclairage, les objets usuels, le théâtre traditionnel comme le Kabuki et le Nô.
Il fait alors l'éloge de l'ombre, alors que l'électricité est usitée sans compter, pour montrer la beauté des contours, l'intemporalité des lieux … sans jamais ennuyer le lecteur, comme si il s'agissait d'une conversation, avec ses tours et détours. Par exemple, il fait part de ses émotions quand il découvre les mains d'un acteur sur une scène traditionnelle et ne s'explique pas en quoi ces mains sont manifestement beaucoup plus belles que les siennes.
Ce livre est un petit bijou de finesse, de sensibilité au sens propre, qui s'attache à ces infimes détails que nous ne regardons jamais et qui pourtant nous partagent, nous les occidentaux des orientaux. Il prend le temps d'observer nos différences de culture et de chercher à les élucider, sans pour autant prétendre à une vérité. Or c'est là que le livre prend toute sa dimension humaine, Tanizaki nous semble extrêmement proche, alors qu'il est japonais, a écrit son livre au début des années 1930. de plus, il nous enseigne sur le mode de vie d'un intellectuel japonais de cette époque. Par exemple, il décrit le soin qu'il apporte au choix du lieu où il va passer la fête de la lune avec des amis. On aimerait en être aussi pour partager le pique-nique sur une barque la nuit.

La traduction de René Sieffert est limpide, de très beaux mots portent ce texte rare et précieux.
Lien : http://objectif-livre.over-b..
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Autant étude sociologique que réel exercice d'écriture, cet ouvrage débusque et analyse au scalpel l'ombre dans la société japonaise par le menu, le sensuel ou le quotidien.

Destiné autant aux Japonais qu'aux étrangers, le texte repose sur le paradoxe de jeter la lumière, et une lumière plutôt crue, taillée au couteau du fait de cette écriture incisive, sur l'ombre, la pénombre et l'intime.
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L'éloge de l'ombre est le livre qui,
à travers la description de la
maison japonaise, du jardin, du
toilette, donne l'essence
de l'architecture et de la culture
nippone. Il montre la mutation qui
s'opère avec l'arrivée de l'électricité
et du changement de souffle de
toute la société qu'il observe et
qu'il décrit non sans nostalgie,
de la poésie portée par la pénombre
et de son importance comme
fondement. Un chef-d'oeuvre!
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