AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
EAN : 9782070384525
253 pages
Gallimard (31/03/1998)
3.84/5   139 notes
Résumé :
« Il mesurait un mètre quatre-vingt-huit, était blond, et on lui avait souvent dit qu'il ressemblait à un très jeune Gary Cooper. C'était le seul gars qui lui faisait quelque chose. Il avait même une photo de lui, qu'il regardait souvent. Les gars chez Bug Moran rigolaient, ils trouvaient ça marrant. "Qu'est-ce que ça peut te foutre, Gary Cooper ?" Lenny ne répondait pas et rangeait soigneusement la photo. "Tu veux que je te dise, Lenny ? C'est fini, Gary Cooper. Fi... >Voir plus
Que lire après Adieu, Gary CooperVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (12) Voir plus Ajouter une critique
3,84

sur 139 notes
5
2 avis
4
6 avis
3
1 avis
2
0 avis
1
0 avis
Dans ce roman, nous suivons Lenny, américain qui, pour échapper à la guerre du Vietnam, devient ski bum en Suisse, un vaurien traînant dans et autour des stations de ski.
En fait sa conscience semble avoir été effrayée par le slogan « ne vous demandez pas ce que l'Amérique fait pour vous, mais demandez-vous ce que vous faite pour elle ».

Ce roman est en partie intimiste car nous nous voyons souvent l'action à travers les yeux de Lenny.
C'est aussi un roman d'aventure, avec une partie de l'action qui concerne le trafic d'or et de devises entre la France et la Suisse.

Lenny est un personnage complexe. Il refuse de faire partie de la société, il est très désabusé, parfois cynique. Il revendique son aliénation, sans dire au profit de qui. Il passe même un peu pour un demeuré (« Il paraît même que c'est inscrit dans la Déclaration d'Indépendance, l'aliénation, mais jusqu'à présent, il y a que les Noirs qui en ont bénéficié. Je savais même pas que ça existait. le mot, je veux dire. », il veut aller en « euthanasie »). Il a des réflexions assez brut de décoffrage (« Toujours cette pute de psychologie, on n'a pas idée de ce que ça peut faire à un type, la psychologie. Ça pardonne pas. »).

Cependant, il a une personnalité un peu double : ce qui se passe en-dessous d'une certaine altitude ne compte pas, il s'adapte donc au monde et à la société qui l'entoure dans ce cas ; mais au-dessus de cette altitude, il est alors atteint par la pureté de la neige.
Il peut en effet faire preuve d'une grande candeur et d'une grande tendresse, avec les femmes notamment. Il y a une sorte d'animalité dans ce personnage, qui a besoin de contact physique, et qui aimerait réussir à ne pas trop réfléchir.
Il y échoue en partie car il a de superbes réflexions (« Sûr. Les plus beaux gâteaux, Bug, ce sont ceux qui n'existent pas. Dieu. le communisme. La fraternité. L'Homme, avec un H grand comme ça. »)

Jessie, elle, est bien plus intelligente et très complexe aussi. C'est une étudiante, la fille d'un diplomate, alcoolique, avec qui elle a une relation certes platonique mais tout de même un peu incestueuse. Elle est entourée d'autres étudiants, prétextes à des réflexions politiques sur le monde, sur les sociétés, avec par exemple une superbe déclamation de Chuck, étudiant noir, sur la condition des Noirs (que je verrais très bien dite par Samuel L. Jackson, comme il s'exprime dans Pulp Fiction) :
« […] Et ne venez pas parler aux Noirs américains de communisme, parce que nous ne voulons pas être intégrés. Ni dans le prolétariat, ni dans rien. Et autre chose. Nous n'avons aucune intention de renverser le capitalisme américain, bien au contraire. Nous voulons nous faire rembourser. […]
Il faut absolument lire ce passage en entier.

Ce livre est donc bien sûr rempli de réflexions sur de grands sujet : la connerie, « la barrière du langage » quand les gens ne se comprennent plus alors qu'ils parlent la même langue, la psychologie qui je crois est ici « la conscience d'être » et la mauvaise conscience entre autres, la démographie ( « la procréation indiscriminée »), la beauté des idées avec le gâteau qui n'existe pas dans la boîte, l'individualisme, l'aliénation, la condition des Noirs américains, l'importance des minorités…
Toutes ces réflexions ne sont pas du tout assommantes, car elles sont disséminées au gré des personnages ou des pensées de ceux-ci, à travers le narrateur.

Ce narrateur est très intéressant. Il est proche des personnages. Son ton varie suivant les passages où l'on s'intéresse à Lenny ou à Jess. Il permet donc très bien de se mettre dans la peau des personnages et de passer de l'un à l'autre.

A noter une apparition du Baron, toujours dans son état de stupeur alcoolique et dans toute sa « splendeur ».

J'ai adoré ce livre, j'aurais voulu qu'il dure plus longtemps.
J'ai essayé de ne pas me livrer à la citationnite aigue que m'inspire toujours Romain Gary (c'est formidable de savoir dire tant de choses, et de grandes choses, en si peu de mots ou de phrases), mais je vais quand même ajouter encore cet extrait dit par Lenny :
« - Je connais un type à Zermatt, qui dit : « C'est pas au point, tout ça. Il faut changer le monde. Il faut qu'on se mette tous ensemble et qu'on change le monde. » Mais si on pouvait se mettre tous ensemble, le monde, on aurait plus besoin de le changer. Il serait déjà complètement différent. Seul, tu peux faire quelque chose. Tu peux changer ton monde à toi, tu peux pas changer celui des autres. »

Toujours trop de lucidité chez Romain Gary.

Commenter  J’apprécie          257
Avec ce roman paru en 1969 pour la version française, soit sept ans après la naissance de son fils Diego, un an avant son divorce de Jean Seberg et cinq ans avant la parution du premier "Ajar", je poursuis ma découverte de la partie méconnue de la bibliographie de Romain Gary, après la lecture cette année de Lady L. et de la danse de Gengis Cohn. Sur le plan de la narration, on peut dire que "Adieu Gary Cooper" se situe à mi-chemin entre ces deux romans, avec un certain romanesque empruntant aux codes du polar d'un côté et une loufoquerie dans le ton de l'ouvrage, les dialogues et les situations qui le rapproche du "Gengis Cohn" de l'autre.

Le roman se situe en Suisse où un jeune américain, Lenny, s'est réfugié pour ne pas être enrôlé dans la guerre du Vietnam. Il y côtoie d'autres "vagabonds des neiges" comme les appelle Gary (en anglais "sky bum", qui est le titre de la version américaine du roman, parue en 1965, que Gary a beaucoup remaniée pour sa parution en France), jeunes gens en rupture de ban avec la société occidentale qui répugnent à descendre en dessous de 2000 mètres d'altitude car l'air y est "irrespirable".

Pourtant c'est lors d'un passage à Genève que Lenny va faire la connaissance de Jess, la fille d'un diplomate américain qui n'est pas très à l'aise avec le rôle qu'il est sensé tenir auprès de ses alter egos. Jess et Lenny vont alors être mêlés à une histoire plutôt louche...

La trame du roman n'est qu'un prétexte dont se sert Gary pour nous parler de l'état du monde, encore largement dominé par les Etats-Unis à cette époque mais alors en proie à une tenace résistance de mouvements d'indépendance, le plus souvent d'obédience communiste (Chine, Vietnam, Cuba, Algérie...) et au développement d'une vigoureuse contestation dans la jeunesse occidentale (USA, Allemagne, France...). Gary nous laisse deviner sa sympathie pour les jeunes contestataires mais c'est aussi sans aucune illusion pour les causes qu'ils défendent. Il se range par principe dans le camp des faibles, des vaincus et n'exprime aucune sorte de complaisance envers les détenteurs du pouvoir et de la force armée, qu'elle que soit la couleur de leur drapeau.

C'est bien-sûr avec le langage que Gary entend résister, pour sa part, aux nouvelles terreurs qui menacent le monde. Un langage dont il joue en tordant les expressions, en télescopant les sens des mots avec la réalité dans un chemin qui le mènera jusqu'à l'invention d'Emile Ajar. Pour qui connaît les romans d'Ajar, il semble évident – a posteriori – de voir dans "Adieu Gary Cooper" un jeune frère de "Gros Câlin" et de "La vie devant soi". Un jeune frère peut-être encore un peu maladroit par moment, mais déjà d'un inventivité fabuleuse.
Commenter  J’apprécie          230
On retrouve avec délectation l'écriture fabuleuse de Romain Gary et son contre pied permanent des sentiments .....Voila un livre, pour autant , qui , pour moi , a pris un coup de vieux et pas sur que les jeunes générations puissent l'apprécier à sa juste valeur....Il faut vraiment le lire dans le contexte de l'époque ( 62-68) et c'est avant tout un livre sur la société américaine ( même si l'intrigue se passe en Suisse) et ses errements de l'époque. les personnages sont forcément attachants et finissent par s'engager ...alors que toute l'histoire tient finalement à la question du non engagement comme seule voie possible.
Commenter  J’apprécie          130
"Adieu Gary Copper" que le chanteur H.F Thièfaine a justement cité dans sa chanson "soleil cherche futur" en1983:

"Adieu Gary Cooper, adieu Che Guevara.
On se fait des idoles pour planquer nos moignons"

Cela résume une bonne partie du sujet central de ce livre; la tentation de la lutte armée Maoïste dans la jeunesse de 68, le désarroi et le désoeuvrement sur une jeunesse trop gâtée.
Ici, il s'agit de jeunes américains, plus ou moins déserteurs (Vietnam), plus ou moins drogués, plus ou moins amoureux, bref des "plus ou moins en tout", exilés dans les montagnes suisses, en quête des sensations fortes du ski extrême.
Le héros trimballe dans sa poche une vielle photos de Gary Cooper; c'est dire le désert culturel qui le hante.
à cela s'ajoute une intrigue plutôt bien pensée; l'infiltration de la famille d'un ambassadeur US à Genève, à assassiner si possible, via sa fille, une jeune "oie idéaliste", qui tombera dans les filets de la bande de voyous skieurs de l'extrême, après avoir été séduite par le "Gary Cooper" de poche.
Les spécificités suisses sont également évoqués et mises en scènes; techniques d'évasion fiscales et lutte armée, servis par des personnages en quête de leur propre identité.
Bref; cela fonctionne un peu comme un roman policier.
On sent Gary très énervé par les frasques de la belle Jean Seberg, sa femme à la dérive, et le parallèle est rapide avec cette histoire qui pourrait faire un bon thriller si David Fincher voulait bien s'y mettre.
On peut se questionner aussi sur le rapprochement que génère le titre du roman; entre les deux Gary; l'écrivain français et l'acteur américain.
J'avoue ne pas avoir de solution ici.
Mais à méditer...
je conseille ce roman de Romain Gary, qui est une sorte de reflet de son autre roman américain "chien blanc".
Commenter  J’apprécie          50
"La barrière du langage, c'est lorsque deux types parlent la même langue. Plus moyen de se comprendre."

Romain Gary, en pondant ces lignes dès la première page de son roman, nous prévient : hors de question pour lui de se coltiner avec une phraséologie éculée. Il va donc mettre des étoiles sur ses "i" en subornant sa plume.

Dans cette histoire qui brasse romance et polar, l'écrivain cinquantenaire joue les ventriloques et prête sa voix à une jeunesse désespérée. Nous sommes en 1969, Kennedy est mort, le Vietnam n'en finit pas de s'enliser dans la boue et le sang, les démocraties vacillent, les révolutions couvent des dictatures et les minorités explosent...

Lenny, "ski bum" flaccide (glandeur des neiges, autrement dit) promène sa flemme de déserteur -il a fui la conscription- dans les montagnes suisses. Sa beauté ravageuse de blond yankee trouble l'indocile Jess, fille d'un diplomate éthylique, qu'il entraîne dans un obscur trafic de devises. Amour et pastaga !

Exercice de style souvent drôle, "Adieu Gary Cooper" compile les récriminations d'une jeunesse suicidaire et les protestations d'un écrivain désenchanté. le roman dégondé abonde d'à-peu-près rigolards, de blagues faciles et d'avis définitifs. On s'attendrit aux rapprochements des deux héros mais on grince des quenottes quand l'action se dilue, le propos se disperse ou lorsque l'auteur, fieffé Narcisse, se délecte de ses propres tours.

En mélangeant discours direct et indirect avec changements brutaux de personnes, Gary donne d'une main au lecteur réjoui ce qu'il lui reprend aussitôt en enfilant provocations puériles (déjà démodées en 69) et cynisme feint.

Attachant et agaçant, ce chromo d'une certaine jeunesse au bord du gouffre -mi visionnaire, mi bonimenteur- aurait gagné à plus de sincérité.
Lien : http://lavieerrante.over-blo..
Commenter  J’apprécie          80

Citations et extraits (36) Voir plus Ajouter une citation
– Je voudrais vous parler des insecticides, dit le dominicain. Les nouveaux insecticides sont formidables. Il y avait pas mal de parasites, de vieilles vermines et de vers rongeurs à détruire. Ils réussissent ça très bien. Mais l'ennui, avec ces insecticides puissants, c'est qu'ils finissent par empoisonner la nature elle-même. Vous avez peut-être lu le livre de Rachel Carson, Le Printemps silencieux ? Elle a montré d'une manière définitive et effrayante comment, à force de vouloir purifier la nature, nous avons fini par l'atteindre dans son essence même, dans sa beauté, dans sa fécondité dans ses chants multiples, dans son admirable foisonnement. Le résultat, c'est le printemps silencieux d'une nature privée de ses cigales et de ses oiseaux. Vos D.D.T. [Dichlorodiphényltrichloroéthane] idéologiques ont fait exactement le même travail. Pour chaque mensonge odieux et chaque insecte nuisible qu'ils détruisaient, ils tuaient aussi une parcelle de vie, de vérité et de beauté ; ils prétendaient œuvrer pour le grand printemps, mais lorsque le printemps fut venu, on s'aperçut qu'il n'était plus que silence. C'est cela, votre cynisme : un puritanisme dévorant.
Commenter  J’apprécie          30
Les hommes étaient tous absolument surréalistes. Lenny n'avait pas très bien compris ce que c'était, le surréalisme, mais Bug lui avait confirmé que c'était justement cela, le surréalisme: il fallait pas essayer de comprendre. Les hommes, c'était tout à fait ça.
Commenter  J’apprécie          150
- Je connais un type à Zermatt, qui dit : « C’est pas au point, tout ça. Il faut changer le monde. Il faut qu’on se mette tous ensemble et qu’on change le monde. » Mais si on pouvait se mettre tous ensemble, le monde, on aurait plus besoin de le changer. Il serait déjà complètement différent. Seul, tu peux faire quelque chose. Tu peux changer ton monde à toi, tu peux pas changer celui des autres.
Commenter  J’apprécie          90
Elle se mit à rire. Il en eut le souffle coupé. Quand elle riait, c'était comme si on était soudain remonté là-haut, d'un seul coup, deux mille mètres au-dessus du niveau de la merde.
Commenter  J’apprécie          180
Quelques mois auparavant, il avait fait l'amour avec une petite Française dans un chalet à Wengen, et le matin, alors qu'il essayait de sortir sur la pointe des pieds, ses chaussures à la main, il était tombé sur la mère. Il n'y avait pas moyen de nier, alors, il avait essayé de s'en tirer par la politesse, en disant à la vieille quelque chose de gentil, en français, mais tout ce qu'il était arrivé à trouver fut "merci beaucoup", à peu près les seuls mots qu'il connaissait. Apparemment c'était pas des choses à dire à une mère, vu les circonstances, seulement, c'était trop tard, il l'avait déjà dit, et la vieille s'était mise à hurler, il ne savait plus comment s'en tirer, mais finalement, il lui dit encore "à votre santé", l'autre phrase en français qu'il connaissait, et attendit, très fier de lui, en lui faisant un de ces grands sourires innocents bien américains, qui sont censés vous aller doit au coeur. Mais pas du tout, la bonne femme était devenue vraiment furieuse et elle avait appelé son mari.
Commenter  J’apprécie          20

Videos de Romain Gary (68) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Romain Gary
"Un monument ! Une biographie indispensable pour (re) découvrir Romain Gary, cet auteur incroyable ! " - Gérard Collard.
Dans le Jongleur, Agata Tuszyska peint un portrait unique de Romain Gary, unique auteur à avoir reçu deux fois le Prix Goncourt (pour Les Racines du Ciel et La Vie devant soi), diplomate, scénariste, pilote de guerre, voyageur; et montre comment son personnage va au-delà des limites de la pirouette artistique et des responsabilités humaines.
À retrouver en librairie et sur lagriffenoire.com https://lagriffenoire.com/le-jongleur.html
autres livres classés : romanVoir plus
Les plus populaires : Littérature française Voir plus


Lecteurs (376) Voir plus



Quiz Voir plus

Tout sur Romain Gary

Dans quelle ville est né Romain Gary ?

Kaunas
Riga
Vilnius
Odessa

12 questions
609 lecteurs ont répondu
Thème : Romain GaryCréer un quiz sur ce livre

{* *} .._..