Sorti cet ouvrage-orphelin de mes réserves d'écureuil… je n'ose regarder la date d'acquisition : FNAC Saint-Lazare, 6 septembre 2000 [ !!!]- Lecture Octobre 2021…
Je me hâte de rattraper mes négligences impardonnables !!...
« En 1899,
Tchekhov fait la connaissance au
Théâtre d'Art de Moscou de celle qui en est alors l'actrice vedette, Olga Knipper ; au-delà de cette rencontre, de la collaboration qui va faire d'Olga l'interprète de tous ses grands rôles " (
les Trois Soeurs,
Oncle Vania, La Cerisaie,
La Mouette..) commence une correspondance qui durera six ans, de la naissance de leur amitié à leur mariage en 1901 et à la mort de
Tchekhov en 1904. Atteint de tuberculose, l'écrivain vit alors à Yalta, tandis qu'Olga lui donne des
nouvelles de la vie du
théâtre à Moscou, des répétitions, des écrivains qui comptent : Gorki, Tolstoï, Nekrassov... Inquiète, passionnée, frémissante, soucieuse de sa liberté, elle veut se consacrer à sa carrière, mais rêve aussi de partager chaque journée avec son amoureux et mari. Ce recueil réunit les lettres les plus importantes échangées entre
Tchekhov et Olga, un témoignage inédit et bouleversant…
Leurs premières rencontres eurent lieu pendant les répétitions de «
La Mouette » en septembre 1898. Leur correspondance débuta à l'été 1899. La présente édition contient un dixième de l'ensemble de leurs lettres ; qui en comptait, pour chacun plus de quatre cents !!
Une correspondance précieuse qui nous révèle un
Tchekhov progressivement amoureux, rempli de malice, et d'esprit taquin, bienveillant, rassurant Olga, actrice perfectionniste, anxieuse de ne pas assez bien interprété les personnages féminins de son « grand écrivain » d'amoureux !
Leurs Lettres nous offrent le «vaste panorama » culturel de la Russie au tournant du siècle. Apparaissent des personnages tels que Tolstoï, Gorki,Nekrassov,
Stanislavski [Acteur et metteur en scène célèbre ], Nemirovitch-Dantchenko, les acteurs et jeunes écrivains du moment !
Parrallèlement à leurs sentiments amoureux,à leur tendresse, on découvre aussi leurs préoccupations professionnelles, dans l'art scénique comme dans l'écriture. Sur le plan intime, il y a dans leur grand Amour, toutes les affres du doute (provoqués par les éloignements géographiques), les tristesses, chagrins dus aux séparations et à la montée de la maladie de l'écrivain. Ils passent l'un et l'autre par des périodes d'abattement et de solitude intense, même si
Tchekhov se départit rarement de son caractère plaisantin et ironique , dédramatisant un maximum leurs tracas dûs à l'Absence de l'Autre ; Olga, d'ailleurs lui reproche de temps à autre ses plaisanteries qui lui évitent d'exprimer ce qu'il ressent vraiment au fond de lui !...
Je ne regrette qu'une chose… la brièveté de l'ouvrage ; de ne pas avoir eu connaissance de toutes leurs Lettres… le plus captivant est leur échange autour de l'art et de la littérature, dont des échanges très fournis autour du
Théâtre, qui est l'un des pivots de leur intense complicité. Une magnifique lecture, trop courte, comme je l'ai déjà formulé (ci-dessus) !!!… que j'achève sur une formidable déclaration d'Olga, très consciente du génie de son poète-écrivain -
théâtreux de mari !...
« le 24 septembre 1903--
(...)Ne te fâche pas, petite colombe, n'écris pas de lettres pessimistes. Tu es nécessaire comme écrivain, extrêmement nécessaire, nécessaire pour le repos, pour que les gens comprennent qu'il y a de la poésie dans le monde, de la beauté véritable, des sentiments élevés, des âmes affectueuses, humaines, que la vie est vaste et belle.
Et ton lyrisme ? Chacune de tes phrases est nécessaire, et toi-même tu le seras encore plus à l'avenir. Oh, si j'avais le don de la parole-combien je t'en conterais encore !! Chasse loin de toi ces pensées inutiles. Aie pitié des gens et sens que tu leur es nécessaire. Ne t'éloigne pas, et donne, du fond de ton âme si riche, tout ce dont tu es capable.
Ecris et aime chacun de tes mots, chaque pensée, chaque âme que tu élèves et sache que tout cela est indispensable pour les gens. Il n'existe nulle part au monde un écrivain comme toi, ne te replie donc pas, ne te retire pas en toi-même.
On attend tes pièces comme la manne céleste. “(p. 137)