La même pensée nous vint à tous au même moment : « c'est la mer » Elle va nous engloutir sur l'heure et tous… Mais pourra-t-elle enfler à ce point, monter si haut? Jusqu'à cette falaise? »
Et cependant elle grossit démesurément… Ce qui se précipite, au loin, ce ne sont plus de petites masses séparées… C'est une seule vague, une vague monstrueuse qui embrasse tout le cercle de l'horizon.
Elle court, elle court vers nous! Elle s'élève en trombe glacée ; elle roule en ténèbres infernales. Alentour, tout a tremblé, et là-bas, dans cette masse qui fonce sur nous, ce sont des craquements, des roulements de tonnerre et les abois de mille gueules de fer...
Ah ! quel rugissement et quel hurlement ! C'est la terre qui a hurlé de terreur…
C'est sa fin, c'est la fin de tout !
Le petit garçon a piaillé une dernière fois… Je fais le geste de m'accrocher aux camarades. Mais nous sommes déjà tous écrasés, ensevelis, noyés, emportés, par la vague glacée, noire comme de l'encre, qui roule avec fracas.
La nuit… la nuit éternelle !
Je suffoquais… je me réveillai.
Mars 1878
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DEMAIN ! DEMAIN !
Oh ! comme chaque jour qui passe est vide, morne et fastidieux
! Comme il laisse peu de traces ! Et que la course des heures
est stupide !
Pourtant, l'homme est avide de vivre ; il y tient ; il a foi en
lui-même, dans son existence, dans son avenir… Ô, combien
d'espoirs il fonde sur demain !
Mais pourquoi s'imagine-t-il donc que le jour qui s'annonce
ne ressemblera point à celui qu'il vient de vivre ?
Il n'y songe même pas. D'ailleurs, il n'aime pas réfléchir —
et il fait bien.
« Demain, demain ! » se console-t-il jusqu'à ce que ce demain
le jette dans la tombe.
Le Merle
Je suis encore couché, et cette fois encore je ne dors pas... Me voici de nouveau entouré par la splendeur d'une aube d'été. Et de nouveau, sous ma fenêtre, un merle chante, et dans mon coeur brûle la même blessure.
Mais le chant de l'oiseau ne m'apporte pas l'apaisement, et pourtant je ne pense pas à ma blessure. D'autres blessures me torturent, qui sont innombrables et béantes. Un sang qui est mien, un sang qui m'est cher, coule en ruisseaux de pourpre, en vain, sans raison, telles les eaux de pluie, du haut des toits, sur la boue et les ordures de la route.
La bougie vacille et s'éteint... Qui est-ce qui tousse là-bas d'une voix sourde et rauque ? Recroquevillé sur lui-même, mon vieux chien se blottit et frissonne à mes pieds - mon seul compagnon... j'ai froid... je gèle..., et ils sont tous morts... tous...
ö fraicheur, ô beauté des roses d'autrefois...
Septembre 1879
Arrête
L'énigme est dévoilée !… Mystère de la poésie, de la vie, de
l'amour !… C'est cela l'immortalité !… Il n'y en a point, il n'en
faut point d'autre !… Tu es immortelle en cet instant.
Mais il passe, et tu redeviens une pincée de cendre, une
femme, une enfant… Que t'importe ! — Tout à l'heure, tu étais
plus grande que tout ce qui passe. — Et ton heure ne finira jamais.
Arrête-toi ! Et permets-moi de communier à ton immortalité,
laisse choir dans mon âme un reflet de ta vie éternelle !
Aujourd'hui,c'est l'hiver ; le gel a soupoudré de frimas les vitres de ma croisée ; une bougie solitaire brûle dans ma chambre obscure. Je me suis blottie dans un coin de la pièce, et le souvenir scande inlassablement :
ô fraîcheur, ô beauté des roses d'autrefois ...
En librairie le 23 mai 2019
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Byx serait-elle la dernière de son espèce, celle que l'on appelle l'ultimon ? Pour en avoir le coeur net, elle traverse le royaume de Nedarra à la recherche des siens. Mais chaque recoin regorge de prédateurs…
Un voyage fantastique par Katherine Applegate, l'auteure du Seul et Unique Ivan.